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RP Introductif à l'évènement "Gundor" à venir.
Talera Happs en tant que Maître Espion est chargée d'obtenir des informations sur les royaumes alentours.
Ce RP animé par les MJs vous permet de suivre l'obtention d'informations au Gundor.
Seul le joueur GrandJarl est concerné par ce RP.
Les MJs se réservent le droit d'inviter d'autres joueurs suivant l'évolution.Mission :
Obtenir des informations sur le Gundor
Etape 1 :
- Définir les recrues qui iront espionner le Gundor (dé pour le nombre)
- Choisir le village d'arrivée au Gundor
Les agents envoyés obtiendront-ils des informations cruciales du Gundor ?
Rentreront-ils vivant en Okord ?
Description des villages :
1. Village du Nord-Est : Rimor
Contexte : proche des Neiges Éternelles, aux frontières de Perdiglas.
Rimor est niché au fond d’une vallée glacée où le vent siffle comme un animal affamé. Les calèches rapides qui traversent l’Est vers l’Ouest s’y arrêtent rarement : elles glissent sur la route gelée, profitant du seul passage non montagneux de la région. On dit qu’à Rimor, les toits murmurent la nuit, tant le vent y frappe fort. Les villageois, endurcis par le froid et les tensions proches de Perdiglas, observent chaque voyageur avec la fatigue des guetteurs éternels.
2. Village montagnard de l’Est : Nimor
Contexte : proche des domaines okordiens de Nocturne, très pauvre, chercheurs d’or.
Perché à flanc de roche, Nimor n’est guère plus qu’un alignement de cabanes branlantes et de feux qui peinent à tenir tête à la nuit. Le village abrite une population misérable de prospecteurs trop fatigués ou trop malchanceux pour continuer leur route vers l’intérieur du Gundor. Ils fouillent les lits gelés des ruisseaux, espérant trouver la pépite qui les tirerait de cette vie d’ombres. La lumière de Nocturne, au loin, donne à Nimor une étrange teinte bleutée chaque soir.
3. Village du Sud-Est : Treldor
Contexte : près du domaine okordien de Sköll, bandits, routes dangereuses.
Treldor est un hameau nerveux, bâti sur une crête basse qui surveille des routes aussi peu sûres que nécessaires. Les marchands y passent sans s’arrêter, serrant leurs coffres et laissant des gardes éveillés. Les habitants vivent au rythme des rumeurs : une nouvelle bande venue de Sköll, un convoi disparu, une silhouette aperçue au crépuscule. Treldor respire la méfiance et la tension, mais il reste un point d’ancrage indispensable pour traverser le Sud-Est du Gundor.
4. Village du Sud : Huldor
Contexte : zone plus chaude, chalets de riches Gundoriens.
Huldor s’étend tranquillement au pied des montagnes, respirant un air étonnamment doux pour le Gundor. Les chalets de bois clair y sont entretenus avec un soin aristocratique, entourés de jardins minuscules mais fièrement affichés. Les riches seigneurs et marchands gundoriens y viennent passer la mauvaise saison, profitant du calme et de la tiédeur venue du sud okordien. Huldor ressemble à une enclave paisible dans un royaume de pierre et de neige.
5. Village du Sud : Branor
Contexte : proche des anciennes terres du roi d’Okord Nuada et du domaine guerrier d’Oros Boros.
Branor vit au rythme du marché : convois, mules, négociants et gardes se succèdent du matin au soir. Ici, on parle fort, on marchande sec et on jure beaucoup. La tension latente entre les factions okordiennes voisines rend les discussions politiques explosives, mais le commerce n’y a jamais cessé. Branor est un carrefour vivant, instable, vibrant — un endroit où l’on vient pour faire fortune rapidement ou se perdre tout aussi vite.
6. Village du Sud-Ouest, en territoire de Träkbäläard : Skarnor
Contexte : zone dangereuse, mercenaires, lieu de passage mystérieux.
Skarnor est une énigme. Perdu dans les terres rudes de Träkbäläard, entouré de crêtes sombres et de soldats mercenaires au regard impassible, c’est un endroit où les routes ne mènent nulle part… pourtant les voyageurs y passent. Pourquoi ? Nul ne l’explique vraiment. Certains murmurent qu’il existe un passage secret, d’autres une dette ancienne entre clans. Les habitants, taciturnes, ne disent rien. Skarnor est un village de silence, de regards lourds et de secrets enterrés.

Remerciements à Altéria pour la mise en image du grand duché du Gundor
MJ d'Okord.
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https://www.youtube.com/watch?v=7bW75OwVXZI
Lancement du premier dé : Le maximum de personnes dans ton équipe d'espions est ...
Résultat du lancé : 5le Gundor, c'est dangereux, il y fait terriblement froid, Perdiglas surveille les moindres recoins, la mission s'approché plus de la mission suicide, la difficulté fût de trouvé des volontaires.
c'est au nombre de cinq que ces derniers se présentèrent.
Gunther, le marchand, aura la mission la plus simple, ce marchand souhaitant retrouver sa place dans les hautes affaires commercial aura la tache de communiquer avec les nobles et bourgeois de Huldor, l'occasion de tiré quelques informations cruciale autour d'une mission commerciale qu'il espère tout aussi fructueuse.
Stark et Outch, deux gardes du corps taiseux, soldats loyaux de la maisons Happs, présent pour le protéger, et pour lui donner une apparence importante de délégation officielle d'un petit marchand aux grandes connexion.
Grimace, un malfrat, libéré à l'occasion, la simple vue de son visage à moitié arraché laisse apparaître un sourire carié qui crée un profond malaise dans ceux qui porte sur ce dernier le regard, vicieux, roublard, vulgaire, voleur, il fera l'affaire pour rencontrer les bandits de Treldor si nécessaire.
Petite souris, de son nom d'emprunt, est une femme assassin, loyale au clan happs, au forme séduisante, elle est une vraie veuve noire discrète, qui manie aussi bien le couteau que le poison, elle espère s'illustrée pour grimper dans la hiérarchie du clan, elle se présentera comme la femme de Gunther quand nécessaire, mais sa mission principale est de tiré les vers du nez de la cité des secrets, Skarnor.
l'équipe au complet, il fallait plus que chercher un guide, et se diriger vers le Gundor, en commençant par Huldor si les dieux étaient favorable à ce trajet.
vous trouverez ici une rapide explication et un historique de la maison: https://www.okord.com/ranking.html?profile-3451
Le Grand Jarl Actuel: https://www.okord.com/ranking.html?profile-21203
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(HRP)
Attribution des rôles : ( Dé lancé par GrandJarl )
Gunther le marchand : GrandJarl
Pièces dans sa bourse : 224
Points de vie : 6
Grimace le malfrat décharné : Nywihell
Pièces dans sa bourse : 93
Points de vie : 13
Petite souris la femme assassin : Neslepaks
Pièces dans sa bourse : 100
Points de vie : 9
Les deux gardes Stark et Hutch :
deux joueurs...
qui ne se feront connaître qu'à la fin de ce RP d'introduction !
Stark :
Pièces dans sa bourse : 15
Points de vie : 21
Hutch :
Pièces dans sa bourse : 50
Points de vie : 17
(HRP)
MJ d'Okord.
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Préambule :
La cariole cahotante finit par s’immobiliser dans un couinement de roues, au bord de la pente qui descendait vers Huldor. Les cinq passagers s’entre-regardèrent comme si le silence soudain était plus inquiétant que tout le voyage.
Le cocher, un type sec comme une planche oubliée au soleil, se retourna sur son siège et leur lança d’une voix lasse :
- Bon, m’sieurs-dames… Pour moi, c’est le terminus. Huldor, magnifique Huldor, dernière étape avant que je vire du froid dans mes bottes et que mes chevaux se mettent à parler comme des poètes gelés.
Sans attendre leur réaction, il fouilla sous son siège et en sortit une petite cage métallique contenant un seul pigeon, particulièrement bedonnant, l’air légèrement vexé d’être réveillé.
- Ordres de la cheffe, hein. “Pour le jour où vous aurez un truc intéressant à dire”, qu’elle a dit. Et, franchement… dites-lui un truc intéressant avant qu’il crève de trouille, ce volatile.
Il leur tendit la cage comme s’il leur remettait un héritage maudit, puis claqua les rênes.
- Et surtout, je ne vais pas plus loin ! Huldor, c’est déjà beaucoup pour mes pauvres reins et mon instinct de survie. Bonne chance !
Et il fila, laissant derrière lui une traînée de poussière, d’odeur de cheval et un léger écho de “Héééyaaaa !” qui s’étiola dans la vallée.
Les cinq se retrouvèrent seuls.
Gunther réajusta sa veste de marchand “respectable” (qui avait pourtant dû connaître de meilleurs jours).
Stark et Outch vérifièrent d’un même geste muet que leurs armes étaient bien à leur place.
Grimace sourit et regretta immédiatement, les autres reculant d’un millimètre.
Petite Souris observa la cage, soupira et glissa le pigeon sous son bras comme si c’était un sac de commissions.
Ils descendirent le petit chemin menant à la placette centrale.
Et Huldor s’offrit à eux.
La place principale était pavée de pierres claires, usées par les générations.
L’église, massive et rassurante, se dressait au centre, avec son clocher pointu coiffé d’ardoises rouges. Les vitraux, modestes mais soignés, reflétaient la lumière douce du sud gundorien.
À gauche, une rangée de chalets montagnards bien entretenus, aux balcons sculptés, affichait la richesse discrète des familles aisées venues se reposer ici.
À droite, quelques étals vendaient encore des bougies parfumées, des fromages étrangement bleus et des souvenirs en bois représentant… essentiellement des chèvres.
Une petite fontaine en pierre sculptée coulait paisiblement, décorée d’une statue représentant une femme mais dont le temps et la pluie avait lissé tout trait spécifique.
Des habitants marchaient tranquillement, visiblement habitués aux étrangers bien habillés sans se douter que ceux-ci n’étaient pas exactement venus pour acheter du fromage. On entendait des conversations feutrées, un rire à moitié étouffé, un chien qui aboyait au loin.
Au-dessus de tout cela, les montagnes encerclaient le village comme un amphithéâtre de géants, leur air frais descendant en courants tièdes depuis les collines okordiennes.
Gunther inspira profondément.
- Parfait, murmura-t-il. L’endroit idéal pour commencer.
Grimace renifla.
- L’endroit idéal pour se faire chier, ouais.
Petite Souris tapota la cage.
- Tais-toi, tu vas effrayer le pigeon. Et si ce pigeon s'envole avant l’heure… Je te préviens, je t’utilise comme message.
Stark et Outch, silencieux comme deux statues armées, hochèrent la tête ensemble.
L’équipe de Talera Happs venait d'entrer en Gundor.
Et leur mission commençait.
MJ d'Okord.
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Gunther remis sa veste en place et pris une grande inspiration d’air de Huldor, air réputé pur, vivifiant, et occasionnellement parfumé au fromage local.
« Compagnons ! » lança Gunther, de cette voix volontairement grave qu’il affectionnait quand il voulait faire croire qu’il était important. « Nous devons trouver un marchand avec des connexions. Je me dirige vers cet étal avec Petite Souris. Grimace ! Tu sais ce qu’on t’a promis si tu assures la mission. »
Grimace renifla, ce qui fit fuir trois pigeons et un enfant un peu trop curieux.
« Intéresse-toi aux criminels locaux, continua Gunther. T’approche pas trop des marchands, même si je sais que tu es tenté ! Et t’éloigne pas trop de Stark et Hutch ! Avec ta sale tête on pourrait bien te pendre ! »
Grimace voulut protester. Mais son visage, mélange d’ironie permanente et de cicatrices mal placées, produisit un gargouillis disgracieux qui fit office de réponse. Il se détourna donc vers la taverne voisine, attiré à la fois par la promesse d’alcool et celle d’informations croustillantes. Et puis, on y pendait rarement les clients dès la première chope — un détail stratégique appréciable.
Derrière lui, Stark et Hutch restèrent un instant plantés au milieu de la place, l’air perplexe.
« Pourquoi on doit suivre lui ? » demanda Stark.
Hutch haussa les épaules.
« Bah… c’est l’ordre. Pis… y’a de la bière là-bas. »
Stark réfléchit deux secondes, sourit, et suivit Grimace d’un pas résolu. Le devoir, c’est le devoir après tout… surtout quand il implique de la mousse fraîche.
Pendant ce temps, Gunther reprit sa pose de marchand ambitieux en mission diplomatique. Petite Souris se plaça aussitôt à son côté, légèrement en retrait, suffisamment près pour qu’on comprenne qu’ils voyageaient ensemble… mais assez loin pour que les regards des commerçants se posent sur Gunther d’abord. Sa démarche était fluide, presque indifférente, mais ses yeux, eux, balayaient méthodiquement les étals : vêtements coûteux, bagues trop brillantes, gestes nerveux, gardes privés — chaque détail avait un sens. Et Petite Souris ne manquait jamais un détail.
Les étals de Huldor formaient un arc coloré autour de la place. Il y avait de tout : poteries ordinaires, jambons pendus, peaux de bêtes, outils agricoles, mais aussi quelques stands qui détonnaient par leur recherche : soies délicates, petites boîtes ornées, parfums importés, fourrures soigneusement traitées, bijoux en métal précieux.
Les marchands derrière ces tables-là n’avaient pas l’air d’être n’importe qui : tenues plus raffinées, mains propres — luxe rare chez les vendeurs ambulants — et surtout gardes privés en armure légère. Le genre de personnes qui savaient des choses.
« Voilà… » murmura Gunther, œil brillant, flair de commerçant affûté. « Des produits de luxe, des gardes… des connexions. »
Il avança d’un pas noble vers l’un des étals les plus travaillés : bijoux, épices coûteuses, petits coffrets dont l’odeur évoquait un voyage lointain.
« Parfait. Si celui-ci ne connaît pas les haut placés… alors je veux bien manger ce pigeon. »
Derrière lui, Petite Souris glissa entre deux badauds, observant les regards en coin, les échanges silencieux, les mains dans les poches. Après deux tours autour de Gunther, elle conclut intérieurement que le marchand qu’il avait choisi était effectivement le meilleur point d’entrée… et peut-être aussi le plus protégé. Ses doigts effleurèrent la garde d’un couteau dissimulé. On ne sait jamais.
À la taverne, Grimace poussa la porte d’un air faussement discret, ce qui, compte tenu de son visage, était un exploit remarquable. Deux discussions cessèrent immédiatement. Le tavernier eut un petit frisson.
« Une bière, » grogna Grimace, « et des infos si t’en vends. »
Stark et Hutch entrèrent derrière lui, souriant, ce qui eut bizarrement pour effet de détendre légèrement l’atmosphère.
Et ainsi, l’équipe improbable, bruyante et mal assortie se dispersa dans Huldor, chacun à sa manière, chacun vers ses ennuis… et peut-être, avec beaucoup de chance, vers le début de leur mission.
MJ d'Okord.
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A la taverne :
Le tavernier posa la chope d’un geste sec, comme s’il craignait qu’elle se mette à lui mordre les doigts. Grimace n’eut même pas le temps de flairer la mousse. Une grosse main calleuse, paume ouverte, se dressa aussitôt devant lui.
« Une pièce. »
Pas « bonjour », pas « bienvenue », pas « c’est de la bière locale, vous m’en direz des nouvelles ». Juste : « une pièce ».
Grimace grogna, fouilla dans une poche d’où s’échappa un bruit de métal… et peut-être un petit bruit gluant qu’on n’identifia pas. Il jeta la pièce dans la main du tavernier qui la happa avec l’instinct d’un homme qui avait trop vu de mauvaises gens pour prendre le risque de laisser traîner de l’argent.
Une fois la chope libérée, le tavernier fit un geste bref du menton, un classique du métier : « va là-bas, t’éloigne pas trop des meubles, touche à rien ».
Grimace, sa chope en main, s’avança dans la salle… et se figea un instant.
La taverne ne ressemblait pas du tout à ce qu’il attendait. Pas de bagarre, pas de guetteur louche, pas de parfum de racines fermentées qui collent aux bottes.
C’était… chaleureux.
Boiseries blondes, murs décorés de petites gravures représentant montagnes et chamois, poutres apparentes, lumière douce diffusée par un feu de cheminée rondouillard. On se serait cru dans une maison de vacances.
Beurk, pensa Grimace dans un premier réflexe. Puis : bon, au moins ça sent pas le vomi.
Il y avait peu de monde, mais assez pour donner vie à l’endroit.
À une table près de la cheminée, une famille avec deux enfants sirotait une boisson chaude fumante. Le plus petit fixait Grimace avec la fascination qu’on réserve habituellement aux monstres dans les contes. Le plus grand, lui, se pelotonna un peu derrière sa mère.
La mère tenta un sourire poli à Grimace — politesse de montagne — mais celui-ci s’effondra aussitôt quand le malfrat esquissa ce qui, chez lui, était supposé être un sourire en retour.
Au bar, un homme seul tournait lentement une cuillère dans une infusion. La trentaine à peine, manteau propre, posture calme, regard posé. Rien d’extraordinaire. Sauf qu’il regardait Grimace sans peur ni surprise. Un regard tranquille, presque professionnel.
Le genre de type qui sait observer sans être vu. Grimace nota mentalement : méfiance.
Dans le fond de la salle, près d’une fenêtre, deux femmes élégantes chuchotaient.
Des riches, ça se voit tout de suite : fourrures trop douces pour être locales, bijoux fins, parfums légers. Elles buvaient un vin qui n’était clairement pas celui servi aux voyageurs ordinaires.
Elles parlaient bas, mais leurs regards glissaient régulièrement vers l’entrée, comme si elles attendaient quelqu’un. Ou craignaient de voir arriver quelqu’un.
L’une d’elles fronça les sourcils en apercevant Grimace, mais l’autre, plus assurée, leva le menton : ignore-le, il ne sait même pas lire, devait-elle penser.
Stark et Hutch passèrent derrière Grimace avec leur pas calme de gardes en mission.
« Ben c’est mignon ici », murmura Stark.
« Oui », répondit Hutch en observant le décor, « y’a même pas d’odeur de sang. Ça change. »
Il s'avança alors vers le tavernier pour lui commander simplement :
« Six mousses bien fraîches et trois saucissons aux noisettes.»
Puis se tourna simplement vers Stark :
« Et toi tu veux quoi ? »
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Du côté des Etals :
Le marchand Gunther se redressa, bomba légèrement le torse, et s’avança avec un sourire de professionnel qui sentait la confiance… ou l’arnaque bien huilée.
Il lança son discours, grandiloquent, précis, rêche à souhait :
« Messieurs, je ferre un gros poisson ! Plus il sera gros, plus votre part sera énorme. Ne vous fiez pas à mon apparence simple. Mes clients cherchent à faire du commerce de gros… »
Puis, inclinant légèrement la tête, il murmura d’une voix de conspirateur :
« … on parle en millions d’or. »
À côté, Petite Souris examinait une étoffe avec une grâce étudiée, comme si son existence même ne servait qu’à souligner la crédibilité de Gunther.
« Évidemment, poursuivit-il, j’y gagne ma part si je me prouve compétent pour conclure cette affaire. De marchand à marchand, je suis sûr que vous savez flairer les bonnes opportunités. »
Il acheva son discours avec un sourire trop large pour être honnête, mais suffisamment calculé pour impressionner n’importe quel marchand désireux de faire fortune. N’importe quel marchand… sauf celui-là.
Le type leva à peine les yeux.
Lui, il avait l’air de préférer perdre deux doigts que de s’engager dans une discussion commerciale avant le déjeuner.
Il répondit d’une voix monocorde :
« Mh. Pas intéressé. »
Pas d’excuse, pas de justification. Même pas un « revenez plus tard ».
Juste un mur. Le mur le plus neutre du royaume.
Gunther sentit un spasme d’irritation lui grimper dans le cou.
Ça commençait bien.
Il jeta un coup d'œil à Petite Souris, et soupira intérieurement.
Il se pencha vers elle, agitant légèrement sa manche pour faire croire à un geste tendre alors qu’il chuchotait comme un serpent essoufflé :
« Petite Souris, séduis-le vite ! Au pire tu pourras toujours l’étouffer avec un coussin ! »
Il s’écarta ensuite légèrement, laissant à sa compagne l’espace nécessaire pour opérer sa magie… ou son carnage, selon l’humeur.
MJ d'Okord.
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Du côté des Etals :
Petite Souris, sans même lever les yeux, prit un air absorbé, comme si le tissu entre ses doigts valait à lui seul la paix dans le royaume.
Elle souleva délicatement un coin d’étoffe, le laissa glisser le long de sa hanche, et fit semblant de visualiser une robe élégante dont elle seule pouvait imaginer la coupe.
D’une voix douce comme une caresse — mais parfaitement maîtrisée — elle dit :
« Monsieur, auriez-vous l'amabilité de me donner un coup de main ? Pourriez-vous maintenir ce pan de tissu au niveau de ma hanche, comme ça ? J’aimerais commander une robe… mais je ne suis pas sûre que cette couleur convienne à mon teint… »
Elle inclina légèrement la tête, adoptant une pose sensuelle, mais enrobée d’une innocence terriblement étudiée. Le genre de posture qui transforme un simple morceau de tissu en arme diplomatique.
Gunther, derrière elle, jubilait intérieurement.
Oui, voilà, ça va marcher, évidemment que ça va marcher, quelle merveille !
Il s’imaginait déjà la discussion commerciale avancer d’un bond, puis deux, puis trois.
Sauf que.
Le marchand n’était pas tombé de la dernière carriole.
Ses yeux passèrent de Petite Souris à Gunther, puis de Gunther à Petite Souris, comme un homme qui assemble plusieurs pièces d’un puzzle trop facile.
Il comprit tout de suite.
Et il décida fermement de ne pas se laisser piéger par le premier duo de charme venu marchander une opportunité.
Mais, professionnalisme oblige, il prit tout de même un second tissu dans son étal. Un très beau tissu, d'ailleurs — preuve qu’il ne mélangeait jamais les affaires avec les tentatives de séduction.
« Voilà ce qu’il vous faut. » déclara-t-il en présentant une étoffe plus noble.
Puis — et là Gunther sentit une goutte de sueur froide lui glisser le long de l’échine — le marchand afficha un sourire. Un sourire carnassier, le genre de rictus qui appartient aux gens parfaitement sûrs d’eux… ou aux prédateurs.
Il pointa son pouce derrière lui, vers une petite cabine en bois fermée d’un rideau épais.
« Vous voulez l’essayer dans la cabine ? » dit-il d’un ton étonnamment léger.
Puis, sans même cligner des yeux :
« Je vous tiendrai le tissu… où vous voulez. »
Gunther faillit avaler sa langue.
Petite Souris resta un instant immobile.
Le marchand, lui, semblait aussi sincère qu’un chasseur proposant à un lièvre d’aller voir « ce qu’il y a derrière ce buisson ».
MJ d'Okord.
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A l'étal :
Gunther, encore tout crispé par l’audace carnassière du marchand, se tourna vers Petite Souris et lui souffla, avec le naturel d’un serpent qui vendrait un antidote :
« Tu devrais y aller, franchement… Avec ton expertise, je suis sûr que tu peux l’attraper par des bijoux — hm hm — si tu vois ce que je veux dire…
Ou… passer du bon temps avec lui ?
Enfin, c’est toi qui vois. »
Petite Souris offrit à Gunther un sourire… dangereusement calme.
Un sourire qui, en langage assassin, signifie : Je note. Nous en reparlerons. Peut-être quand tu dormiras.
Puis elle se tourna vers le marchand.
« Très bien, monsieur. Montrez-moi la cabine. »
Le marchand, trop sûr de lui, ouvrit le rideau d’un geste théâtral, la laissa entrer… puis fit exactement ce qu’elle avait anticipé : il referma la porte derrière eux, dos tourné. Erreur stratégique fatale.
Dès qu’il tourna la poignée, Petite Souris bondit à une vitesse féline.
Son bras passa autour de son cou, l’autre main plaqua un petit couteau glacé contre sa gorge.
Un souffle d’air.
Une syllabe étranglée.
Puis un silence compact.
« Pas un bruit. » chuchota-t-elle d’une voix si douce que cela en devint terrifiant.
« Maintenant, tu verrouilles la porte. »
Le marchand – soudain beaucoup moins carnassier – hocha la tête avec la vivacité d’un mouton qu’on tond pour la cinquième fois de la semaine.
Clique.
La serrure se referma.
« Que... Qu'est ce que vous me voulez ? »
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À la taverne :
Grimace, une chope encore à moitié pleine et un sourire qui ferait fuir une armée d’orcs enrhumés, repéra les deux femmes assises au fond. Riches, élégantes, yeux plissés vers l’entrée de la taverne comme si elles attendaient quelqu’un… ou redoutaient quelqu’un.
Il se planta devant leur table en bombant le torse, persuadé d’être irrésistible.
« Bonjoooour, mesdames ! » grinça-t-il d’une voix qu’on pourrait confondre avec une vieille porte rouillée.
« J’peux m’asseoir avec vous ? J’vois bien que vous êtes en détresse… et que vous regardez vers la porte. »
L’une des femmes sursauta légèrement en voyant sa tête.
L’autre manqua d’avaler de travers sa gorgée de tisane.
Un silence.
Un très long silence.
Grimace tira une chaise sans attendre leur réponse, s’installa et ajouta avec un clin d’œil qui aurait été charmant s’il avait eu encore tous ses muscles faciaux :
« Alors ? On attend quelqu’un ? Ou on fuit quelqu’un ? »
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Toujours à la taverne :
Hutch prit sa commande sans attendre la réponse de Stark et se dirigea à une table proche de la famille de quatre.
Pendant ce temps, Stark faisait face au tavernier.
Le tavernier lui tendait la paume avec toute la gravité d’un bourreau déclarant une sentence.
« Neuf pièces. »
Stark cligna des yeux. Hésita. Puis grommela :
« Ça serait pas un peu cher, votre… eau sale ? »
Le tavernier ne broncha pas.
Pas un battement de cil.
On aurait dit un menhir facturé à l’unité.
Stark finit par payer en maugréant.
Il rejoignit Hutch à une petite table.
Hutch sirotait déjà sa boisson, l’air très satisfait.
« Alors ? » demanda Hutch, le sourire narquois.
« TA GUEULE. » répondit Stark en s’asseyant lourdement.
La famille de quatre, installée juste à côté, jeta un regard craintif au duo.
Le père ramena instinctivement ses deux enfants un peu plus près de lui.
La mère dévisagea Stark comme s’il était un ours mal léché.
Ce qui n’était pas entièrement faux.
Hutch leva sa choppe en direction de son compagnon :
« Allez, la suivante, je la paie.
Enfin… si c’est pas dix pièces. »
Stark lui lança un regard noir.
MJ d'Okord.
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à la taverne – Stark et Hutch :
Hutch savourait son moment de tranquillité, bien calé dans sa chaise, ses grosses épaules enfin relâchées.
Stark, lui, fixait le saucisson posé au centre de la table avec l’intensité d’un loup qui négocie intérieurement sa moralité.
Finalement, Hutch poussa deux bières et le saucisson vers lui, s'en gardant quatre de l'un et deux de l'autre.
« Tiens. Pour éviter que tu meures de faim et d’ennui. »
Stark répondit par un grognement approbateur, déjà plus concentré sur la découpe du saucisson que sur toute autre préoccupation stratégique.
À côté d’eux, la famille de quatre dévorait ses plats dans une ambiance de course contre la montre.
« Allez, allez, dépêchez-vous ! » répétait le père, l’air aussi nerveux qu’un moine devant une pièce de théâtre obscène.
« La diligence ne nous attendra pas, vous le savez. Réservation ou pas, six places seulement ! Et s’il manque quelqu’un, ce quelqu’un restera ici, hein ! »
Les deux enfants eurent un petit gloussement jubilatoire.
« On veut rester ici nous ! Y’a de la neige, et des fromages, et des chiens avec des gros poils ! »
« Vous rentrerez à la capitale et puis c’est tout ! » répliqua la mère en essuyant la bouche du plus petit avec une vigueur qui relevait davantage du brossage de cheval.
Hutch écoutait, distrait, la bouche légèrement ouverte, hochant la tête comme s’il suivait une histoire fascinante.
Stark, lui, ne suivait rien du tout : il mutilait son saucisson avec bonheur.
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Toujours à la taverne – Grimace :
Grimace, affalé devant les deux femmes, avait choisi « posture de charme numéro 3 », c’est-à-dire « sourire pendouillant + souffle de troll asthmatique ».
Les deux femmes le regardaient comme on regarderait une limace dans une coupe de champagne.
« Nous attendons le pigeonnier… » dit la première, la lèvre crispée.
« Un message d’un bel homme rencontré la semaine dernière. » ajouta l’autre, le menton haut, visiblement fière de la précision.
Grimace hocha la tête d’un air très grave, sans comprendre que son simple mouvement produisait un craquement désagréable de cicatrices sèches.
« Il nous a promis un poème… un doux poème. Pour nous deux.
Alors si vous pouviez… vous lever. Voilà. Partir. Là-bas. Ou ailleurs. Enfin, bref. »
La seconde fit un geste vague mais énergique vers « loin », comme si elle voulait l’envoyer mentalement jusque dans le royaume voisin.
Grimace nota :
Elles veulent être seules. Elles sont naïves. Elles aiment les poètes. Et elles me méprisent.
Il en conclut, évidemment :
Elles cachent un trafic !
Sa réflexion fut perturbée par l'entrée dans la taverne d'une nouvelle personne, facilement remarquable au vu de la réaction des deux femmes :
« Le voilà, le voilà ! »
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Au marché – La cabine :
Le marchand, toujours tenu par les côtes avec la délicatesse d’une mante religieuse tenant une mouche, tremblait légèrement lorsque Petite Souris reprit la parole.
« Excuse-moi mon cher, » souffla-t-elle, le couteau jouant comme une plume glacée entre ses doigts,
« tes désirs charnels… devront attendre.
Tu vois, la façon dont tu as négligé mon associé était très impolie. »
Le marchand déglutit.
« Il mérite une petite conversation en privé. Et tu vas gentiment la lui accorder. »
Elle gloussa doucement.
« Cette cabine est assez grande pour trois. Mais tes amis grincheux avec leurs gourdins… oh, eux ne sont pas invités. »
Le marchand, pâle comme une bougie pas encore allumée, hocha la tête.
« D’accord… d’accord… »
« Bien. Maintenant tu rouvres la porte. Tu souris. »
Elle resta collée à lui, cachant le couteau sous les étoffes, en lui pinçant légèrement les côtes chaque fois que son sourire menaçait de ressembler à autre chose qu’un sourire.
Le rideau s’ouvrit.
Petite Souris appela d’une voix délicieusement sucrée :
« Gunther ? Viens mon cher… on a besoin de ton aide. »
Gunther, qui guettait nerveusement depuis tout à l’heure, vit le marchand sourire — un sourire faux comme des dents d’or plaquées sur un troll — et il bondit immédiatement à l’intérieur.
Le rideau se referma derrière eux.
À trois dans un petit espace.
Un marchand pris en sandwich.
Une espionne au couteau.
Un marchand Okordien trop ambitieux pour son propre bien.
Le marchand éclata enfin :
« Mais enfin… qu’est-ce que vous me voulez ?? »
MJ d'Okord.
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Le rideau venait à peine de retomber que Gunther, coincé entre Petite Souris et le marchand pris au piège, tapa doucement dans ses mains comme s’il lançait une réunion d’affaires tout ce qu’il y a de plus normale.
« Ce que nous vous voulons ? » lança-t-il avec un large sourire.
« Maintenant que nous sommes à trois dans ce cabanon… n’est-ce pas évident ? »
Le silence qui suivit fut si épais qu’on aurait pu l’emballer dans du papier huilé.
Le marchand, livide, avait les yeux fixés sur le couteau.
Petite Souris, elle, ne riait pas. Pas du tout. Elle appuyait même un peu plus fort la lame dans les côtes.
Gunther toussota.
« …Bon. Un trait d’humour pour commencer les négociations. »
Il haussa les épaules.
« Ce n’est pas tous les jours qu’on se tient dans l’équivalent d’un placard… avec un marchand en otage. »
Il plongea alors la main dans sa veste, ce qui fit tressauter le marchand et raidir Petite Souris d’un demi-centimètre de menace immédiate… et en sortit lentement un objet métallique gravé : l’emblème de la Banque Givrée.
Le regard du marchand changea aussitôt.
La peur restait.
Mais elle venait de gagner une sœur jumelle : l’avidité.
« J’ai de puissants clients en Okord, » reprit Gunther d’une voix soudain plus basse, plus sérieuse.
« Ils cherchent un contact. De préférence un acheteur d’armes. Mais un noble de l’ancienne cour ducale du Gundor ferait parfaitement l’affaire. »
Le marchand avala sa salive.
Gunther continua, implacable, posé :
« Peut-être que, si vous êtes réellement intéressé par votre part, je pourrais vous donner plus de détails.
Nous pourrions commencer à négocier dès maintenant.
Votre commission pourrait s’élever à 5% des ventes et des achats, pour la durée d’une année complète. »
Les yeux du marchand scintillèrent. Cinq pour cent. Un an. Sur de l’armement.
C’était une somme qui changeait une vie…
Ou qui la terminait très vite.
Gunther acheva calmement :
« Et pour compenser votre… incommodante situation actuelle, je suis prêt à vous acheter l’un de vos plus beaux objets pour 100 pièces d’or immédiatement. »
Il inclina légèrement la tête.
« Qu’en pensez-vous ? »
Le marchand resta figé quelques secondes. Ses pupilles allaient du couteau de Petite Souris à l’emblème de la banque, puis au sourire trop confiant de Gunther.
Finalement, il souffla, la voix tremblante mais déjà pleine de calcul :
« …Vous êtes fous.
Mais… ce que vous proposez est très sérieux. »
Il humecta ses lèvres.
« Cent pièces, je peux vous céder une pièce de joaillerie okordienne. Authentique.
Mais pour les armes… les nobles…
Vous ne jouez pas dans un monde sûr. »
Petit silence.
« Si je vous aide… je veux la garantie que je ne finirai pas égorgé dans une ruelle dans trois jours. »
Petite Souris appuya doucement la lame.
« Ça, » murmura-t-elle à son oreille, « ça dépendra entièrement de ta coopération. »
Le marchand ferma les yeux une seconde.
« …Alors nous allons parler. »
Le marchand inspira lentement, comme un homme qui venait d’accepter l’idée que sa journée avait très mal tourné… mais pouvait encore devenir extrêmement rentable.
« Mais ce n’est pas ici que vous rencontrerez quelqu’un d’influent. »
Il jeta un rapide coup d’œil vers le rideau comme s’il voyait déjà défiler les chalets bien sages de Huldor.
« Les clients d’ici… ce ne sont que des riches de seconde zone. Des propriétaires de chalets, des veuves bien dotées, des marchands en retraite déguisée. Ils retournent tous à la capitale avec quelques pièces de décoration inutiles estampillées du blason local, pour se donner l’illusion d’avoir encore un pied dans les affaires. »
Il ricana nerveusement.
« Des bibelots, des fourrures, des souvenirs…
Pas des armes.
Pas des alliances.
Pas des trahisons de cour. »
Le couteau de Petite Souris resta bien en place, mais elle relâcha à peine la pression, juste assez pour lui rappeler qu’il était toujours en sursis.
« Si vous voulez un informateur… un vrai.
Un influent de la cour.
Un acheteur sérieux.
Un noble qui peut faire disparaître des cargaisons entières sans poser de questions… »
Il leva lentement les yeux vers Gunther.
« C’est à Granduchor que vous devez aller. »
Un silence tomba dans la cabine.
Même le tissu pendu contre le mur semblait écouter.
« La capitale du Gundor. » reprit-il.
« Là-bas, tout s’achète : les secrets, les serments, les routes commerciales… et parfois même les guerres.
Mais plus on monte haut, plus la chute est rapide. »
Gunther ne dit rien tout de suite. Il rangea lentement l’emblème de la Banque Givrée, réfléchissant déjà à mille scénarios.
Granduchor.
Le cœur du duché.
Le nid des intrigues.
Petite Souris, elle, inclina légèrement la tête.
« Tu aurais un nom. »
Ce n’était pas une question.
Le marchand hésita. Une fraction de seconde de trop.
« Peut-être. » souffla-t-il.
« Mais pas pour… cent pièces. »
Gunther esquissa un sourire.
« Alors il va falloir commencer à travailler pour les mériter. »
Dans la cabine étroite, l’air se fit soudain plus lourd.
Ils n’étaient plus en train d’improviser une simple escroquerie.
Ils venaient d’entrer dans le jeu de Granduchor.
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Du côté de la taverne :
La porte de la taverne grinça doucement.
Le courant d’air froid entra le premier… suivi presque aussitôt par un petit homme nerveux, emmitouflé dans un manteau trop grand pour lui. Sur son chapeau court, de larges taches blanches séchées, et sur ses épaules, quelques plumes rebelles accrochées comme des badges de guerre mal lavés.
À peine eut-il fait trois pas dans la salle que les deux femmes du fond sursautèrent sur leur banc.
« Le voilà, le voilà ! » chuchotèrent-elles en parfaite synchronisation hystérique.
Grimace, affalé non loin avec sa chope, inclina légèrement la tête sans bouger le reste du corps. Son sourire naturel – c’est-à-dire son rictus de mâchoire déformée – s’étira encore un peu plus.
Le pigeonnier s’approcha, très professionnel, très propre dans sa posture malgré ses restes de fiente.
« C’est pour vous le message du barde Assur Hans Tourror ? »
« Oui oui oui ! » répondirent-elles en chœur, les yeux brillants comme deux adolescentes devant un troubadour mythique.
Il sortit un petit papier soigneusement plié, le leur tendit avec une révérence exagérée.
« Merci d’avoir choisi la compagnie Colombophilor.
Si vous avez besoin d’envoyer une réponse, vous me trouverez au pigeonnier derrière l’église. »
Nouvelle inclinaison de tête.
Demi-tour impeccable.
Direction la sortie.
Pendant ce temps, les deux femmes tenaient le papier entre elles comme s’il s’agissait d’une relique sacrée… puis relevèrent les yeux lentement vers Grimace.
Le message était clair. Très clair.
Dégage.
Grimace prit une longue gorgée.
Reposa la chope.
Trop lentement.
Ses yeux passèrent du papier… aux femmes… à la porte… puis revinrent aux femmes.
« Z’êtes sûres qu’c’est pas… un message codé pour un trafic d’armes, d’or ou d’assassinats politiques ? »
Les deux femmes le regardèrent comme on regarde une moisissure qui parle.
« Non. »
« C’est de la poésie. »
« De l’amour. »
« Et vous êtes terrifiant. »
Grimace haussa les épaules.
« J’suis aussi un grand sensible, vous savez. »
Un silence.
Pesant.
Les deux femmes serrèrent le message contre elles.
Grimace soupira théâtralement, repoussa sa chaise avec un raclement disgracieux, et se leva.
« Bon… bah… bonne lecture. J’vais aller… boire ailleurs. Ou écouter des complots. Ou casser des dents. J’hésite encore. »
Il recula de deux pas, toujours face à elles.
« Mais j’dis ça… si jamais le poème finit par parler de cargaisons suspectes, de nobles corrompus ou de transactions douteuses… vous penserez à moi, hein. »
Les deux femmes ne répondirent même pas.
Grimace tourna enfin le dos…
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Dans l'autre coin de la taverne :
Hutch, affalé sur son banc, suivait la scène d’un œil mi-attentif, mi-amusé, tout en mâchonnant son saucisson avec un sérieux quasi religieux. La voix du père, jusque-là simplement autoritaire, monta soudain d’un cran quand le pigeonnier entra.
« Allez les enfants, on y va. »
Les deux petits levèrent la tête, la bouche encore pleine.
« Si le pigeonnier est déjà là, alors notre diligence nous attend sûrement près de la fontaine.
Plus de temps à perdre, c’est la dernière aujourd’hui ! »
Le stress lui nouait la voix. Il se leva d’un bond, renversa presque son banc, et attrapa son manteau à la hâte. La mère soupira, déjà résignée, en boutonnant le sien tout en jetant un dernier regard regrettant aux bols à moitié pleins.
Les enfants râlèrent.
« Mais j’ai pas fini ! »
« Moi non plus ! »
« Vous finirez dans la diligence ! » trancha le père. « Et si vous ratez encore une fois, y’en a un de vous deux qui rentrera à pied ! »
Ça, ça eut l’effet d’un sortilège.
En quelques secondes, la petite famille s’agita dans un ballet désordonné :
— manteaux remis de travers,
— sac de voyage mal refermé,
— une écharpe oubliée sur le dossier d’une chaise,
— les deux dernières assiettes abandonnées, encore fumantes.
Hutch leva lentement sa chope dans leur direction.
« Bonne route… » marmonna-t-il pour lui-même.
Stark, à côté, suivit la scène d’un air placide.
« T’as entendu ? Dernière diligence. »
Hutch hocha la tête.
« Ouais. Et le pigeonnier aussi est là. Coïncidence ? »
Stark haussa les épaules.
« Tout est toujours une coïncidence. Jusqu’à ce que quelqu’un meure. »
La famille se précipita vers la porte, le père poussant presque les enfants devant lui. La porte de la taverne s’ouvrit brusquement, laissant entrer une dernière bouffée d’air froid… puis claqua derrière eux.
Pendant une fraction de seconde, la taverne retrouva son calme feutré.
MJ d'Okord.
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