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C'est un Ribou soucieux qui entra dans la capitale, sans tambours ni trompettes, pour aller rendre hommage à son suzerain, qui venait d'être appelé aux plus hautes fonctions du royaume.
Il décida tout d'abord de se rendre dans une taverne que lui avait conseillée Robert de Carovar, le fougueux vassal d'Otto Septim, afin de récupérer un peu avant d'affronter les ors de la salle du trône... Ou bien était-ce le Roi Otto lui-même qu'il redoutait de rencontrer à nouveau ? Toujours est-il que, revenant de la forteresse dont il avait la charge en Exsulare, et qui venait de subir l'étrange assaut avorté d'une troupe dirigée par le Comte Enfroy de Fontfroide, il avait besoin de se poser tranquillement pour faire le point.
En effet, suite à on ne sait quel coup du destin qui envoya une vilaine humeur décimer les rangs des assaillants, ses gens avaient... eh bien, oui, capturé, c'est pourtant bien le mot, le Comte Enfroy de Fontfroide, qui contrôlait la province du Clos des Roys où Ribou possédait deux petits fiefs sans prétentions. Celui-ci avait décidé d'attaquer la forteresse d'Exsulare, suite à un conflit opposant son propre suzerain à l'un des plus honorables vassaux du Prince... pardon, du Roi Otto Septim, lorsque soudain, les quelques bougres réfugiés à l'intérieur de la forteresse virent comment les soldats, l'instant auparavant si vaillants et braillards, se mirent à chanceler et à s'écrouler en masse.
Parmi les corps inanimés, ils reconnurent le Comte à ses atours chatoyants et décidèrent de lui porter secours. Ils savaient bien que les seigneurs pouvaient être aussi féroces que généreux, et surtout que celui-ci pourrait bien un jour prendre possession des terres qu'ils cultivaient. Aussi, mieux valait se montrer bienveillant, car s'ils s'en remettaient à ce que les rumeurs disaient du nouveau maître des lieux, ce seigneur Ribou, que certains surnommaient « le dingue », cela ne présageait de bon quant à son étoffe de seigneur de guerre.
Avisé promptement de la présence du Comte de Fontfroide en grand danger dans sa forteresse, Ribou décida de s'y rendre afin de comprendre ce qui s'était passé, non sans avoir auparavant envoyé un messager au clos des Roys pour expliquer la situation. Seulement, peu au fait des us et coutumes de la guerre, et surtout ne se sentant absolument pas impliqué dans une quelconque bataille, Ribou ne se rendit pas compte qu'il déclencha ainsi tout le processus de libération habituel en cas de capture d'un seigneur.
Arrivé en Borde-Terre, il s'entretint aimablement avec le Comte auprès duquel il s'enquit de ce qui s'était passé. Les gens de Borde-Terre, étonnés déjà de l'affabilité dont leur maître faisait montre, évident signe de faiblesse qui ne faisait que confirmer leurs appréhensions, rapportent que, face à l'incompréhension qui assaillait le Comte, le Vicomte Ribou aurait évoqué l'intervention probable d'une... Licorne ! Que lui seul pouvait voir en plus, et qui serait là pour l'aider à accomplir son « exceptionnelle destinée ». Le Dingue qu'y disaient...
Le plus surprenant pour eux, toutefois, survint lorsque se présenta aux portes de la forteresse une délégation du Clos des Roys, composée de soldats au visage rude et fermé qui escortaient un civil circonspect et portaient un lourd coffre. Au grand étonnement des uns et des autres, le Vicomte les accueillit le plus aimablement du monde, tout sourire et empressement, et le secrétaire, ne sachant à quoi s'en tenir, refusa sèchement toute discussion et lui ordonna de leur remettre immédiatement leur seigneur en échange de la rançon de plus de deux millions d'Ors qu'il apportait, en vertu des traités en vigueur.
Le Vicomte en resta pantois, ne sachant que dire et se demandant par où il avait fauté. Alors ses gens, pressentant qu'il ne comprenait pas la situation, prirent sur eux de transporter le convalescent sur une civière et de le remettre aux envoyés du Clos des Roys, qui tournèrent casaque immédiatement, laissant derrière eux un Ribou désorienté.
Mais tout de même plus riche maintenant de deux millions.