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Loué soit le lien qui unit le Vicomte Marillac et le Vicomte Salman.
Louée soit cette entente qui nous permet de jouir de nouveaux domaines.
Voilà des années que je m’essaie à produire un nectar digne du Baswen.
Vendange après vendange, j’ai bouturé, j’ai marcotté le cep d’Altevin que j’avais emporté dans mon exil jusqu’à obtenir le pampre espéré.
Au Nord des Marches d’Extentrion, Botia, dans sa clémence infinie, m’a gratifié d’automnes pluvieux, d’hivers rigoureux, de printemps doux et d’été secs.
Depuis trois récoltes, les grains étaient charnus, les rafles généreuses. Le pressage rendait un mout odorant à l’acidité prometteuse. Le vin nouveau était fort appréciable. Je le nommais Lussuriale ainsi que son cépage pour rendre grâce à Lussuria. La divinité du libre-arbitre avait guidé mes choix et rien ne définissait mieux les effets de cet élixir que la Reine des vices et la Mère des vertus.
Trois fois hélas, l’élevage en fût donnait de piètres résultats. Si les marchands parvenaient à satisfaire le goût de l’exotisme de quelques voyageurs avec ce breuvage, les bourgeois, eux, en usait pour lustrer leurs cuivres, les fermiers pour tuer les mauvaises herbes. On dit même que les plus belliqueux des seigneurs y trempaient leur épée après le combat pour qu’elle ne se pique point du sang de leurs défunts ennemis.
Louées soient ces nouvelles terres du Prix de la Pairie où s’enracinent désormais mes fiefs. Aux confins des canaux et du Delta du Hornet, les rivages sont à chaque automne amendés de limons d’argile blanche depuis des ères. Les serfs de cette contrée en façonnent des jarres où ils conservent leurs récoltes de manière ancestrale.
La nuit du 16 au 17e phase de l'automne de l'an II de l'ère 19, Lussuria m‘est apparue en songe sous son allure primitive. Les jarres étaient emplies du jus fermenté. Elle y jetait les boutons de la Passiflore, symbole de l’éveil des sens (un éveil proche de la félicité en Okord mais paraît-il douloureux dans une religion lointaine. Le fouet de Lussuria en serait-il une réminiscence ?).
Foin des barriques ! Je fis vendre toutes les moissons de mes gens. Exalté, je versai moi-même la Lussuriale dans les jarres purifiées tandis que le Recteur Gervais de Marillac, alerté par des fermiers cupides et incrédules, décidait diligemment de me rendre visite avec tout ce que le Baswen compte de druides.
Je lui dis mon songe.
Fût-il ému par ma ferveur et mon zèle ? Plus sûrement sa curiosité théologique en fût éveillée. Quelle issue pouvait réserver une recette inspirée par les Dieux à un vigneron ? Quel charme attendre de cette alliance du régulier et du séculier ?
On décida d’un nouveau rite où l’on mêlera le vin et la fleur. On invoquera Botia, Goben et Lussuria. Les druides seront vêtus du blanc de l’argile, du pourpre du raisin et du parme irisé de la Passiflore. A la fin de l’été on goûtera le nouveau nectar du Baswen qu’on baptisera La Flore de Lussurie.
Humm ...
Le breuvage coulait dans la gorge délivrant ses notes florales.
Par tous les Dieux et par Lussuria !
Gervais reposa sa coupe vide et s'adressa à Alceste :
- Mon cher Alceste votre vin est divin !
- Une telle merveille se doit d’être promue.
- Aussi, je déclare la Flore de Lussurie breuvage officiel des Dieux anciens. Chaque célébration sera arrosée avec ce seul et unique vin. Les Dieux ne pourront qu'être satisfaits.
- Surtout notez bien la méthode employée et prenez soin des cépages sur vos terres.
- Je vous adjoindrai quelques druides pour vous aider dans cette lourde tâche.
Puis le recteur se retira, en n'oubliant pas de prendre une bouteille de Flore de Lussurie avec lui, pour entrer en communion avec les Dieux anciens.
Dernière modification par Malicia (2019-02-18 21:51:11)
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