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#1 2018-02-21 17:35:14

Markus Habsburg
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La geste de Markus

Il s'assit dans le manoir principal de son village, méditant sur les contes qu'il avait entendu à la taverne. Une damoiselle d'une beauté telle que les mots pouvaient difficilement lui rendre hommage. Auréolée de longs cheveux sombres ondulant le long de son cou. Des yeux qui pourraient détruire l'âme d'un homme d'un seul regard, car ils capturaient le cœur sans pitié pour en jouir. Et ah .. Sa voix. Cette partie que même les hommes racontant le conte ne pouvaient pas évoquer sans tomber en transe.

Les anges l'envient, c'est ainsi qu'ils avaient appelé la damoiselle. Car aucune force divine ne pourrait saisir un tel pouvoir.
Maintenant, il avait entendu que son armée avait été repoussée, que de l'aide était nécessaire. Il ne pouvait pas penser clairement, mais essayait de l'imaginer au fil des heures qui passaient et de l'obscurité habituelle grandissante de la nuit. Il ferma les yeux et il pouvait la voir dans son rêve. Sa peau et ses cheveux, son sourire et son regard. Ce rêve, il ne pouvait pas y survivre, c'était son destin et même la notion de se réveiller serait un grave péché. Elle tendit son bras vers lui, révélant ses douces mains et alors qu'il tentait de l'atteindre, une lumière vint des côtés et l'aveugla.

C'était déjà le matin et le début de la journée. Mais c'était la fin de son errance. Elle était la fin et le début.
Markus réunit ses gardes et envoya des équipes de recherche à travers les terres

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#2 2018-02-21 19:31:16

Mahaud

Re : La geste de Markus

L'île, qui avait jadis compté une communauté de femmes conséquente, n'abritait plus désormais au sein de ses murs en mauvais état que quelques irréductibles qui pour la plupart n'avaient nulle part où aller. Beaucoup d'habitants se tournaient désormais vers les nouveaux cultes et peu nombreuses étaient celles qui venaient se retirer du monde ou confier aux sœurs de l'île une fille qu'elles ne pouvaient élever. L'île représentait leur foyer, un refuge isolé du monde et de ses tourments. Un endroit où aucun mal ne pourrait leur arriver... et si terriblement ennuyeux que Mahaud serait certainement morte sans les histoires de chevalerie qu'elle pouvait entendre à la taverne du port. Non pas que ses sœurs seraient vraiment heureuses de découvrir que dès que possible elle y courait déguisée pour s'assoir dans un coin sombre et écouter les histoires échangées entre deux éclats de rire. Certains semblaient trop merveilleuses pour être vraies, mais au moins cela lui donnait des choses auxquelles penser quand la nuit était sombre et silencieuse et qu'elle ne pouvait pas dormir après l'un de ces rêves étranges qu'elle faisait parfois.
Ces histoires étaient parfaites pour créer certaines des chansons qu'elle aimait chanter, en particulier quand personne ne pouvait l'entendre. A murmurer des berceuses dans le vent pendant qu'elle se baignait dans la rivière. Sans réaliser que quelqu'un pouvait l'avoir entendu, et en parlerait aux marins qui s'enivraient souvent. Marins qui voyageraient ensuite vers d'autres endroits où l'histoire seraient répétée et déformée...

Enfin assez âgée pour avoir quelques responsabilités, ses sœurs lui avaient confié récemment quelques gardes qui bien que vieillissant les servaient encore fidèlement. C'était amusant de les envoyer d'une place à une autre et d'attendre leur retour. Sauf quand ils ne revinrent pas.

Pour la première fois de sa vie, la jeune fille se sentit coupable. La nuit semblait plus noire que d'habitude. Et dans son rêve des yeux qui avaient la couleur du lac ne la quittaient pas du regard. Et cela semblait si réel qu'elle s'éveilla en sursaut, le cœur battant. Qui était donc en train de la regarder ?

#3 2018-02-23 00:19:59

Markus Habsburg
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Re : La geste de Markus

Ils voyageaient le long d'un étroit sentier entre les montagnes, leurs respirations à peine visibles dans le brouillard dense qui les entourait. Une journée et une nuit avaient passé pendant qu'ils cherchaient un chemin hors des montagnes pour rejoindre les vallées. "Seigneur Markus, les éclaireurs ne sont toujours pas arrivés, peut-être si nous campons ici jusqu'à ce qu'ils reviennent ?" Le commandant de sa garde se tenait devant le cheval de Markus, couvert de boue, le brouillard épais cachant les détails de son visage inquiet.

"Nous continuons, la fin de ces montagnes ne doit pas être beaucoup plus loin." Alors qu’il parlait, son cheval s'arrêta et secoua nerveusement la tête en reculant de quelques pas. "Seigneur Markus je dois imp ... Aaaarggghhhh" Des cris avaient jailli du brouillard remplissant leurs cœurs de peur. "Aaaaaaa" se rapprochant de plus en plus lorsqu'une flèche frappa son épaule, pénétrant à peine le métal.

Le commandant aspirait de l'air, étouffant dans son propre sang, une flèche enfoncée dans le cou. Voyant sa fin si proche, il saisit les rênes du cheval de Markus et frappa sa croupe, le précipitant au galop. Prenant son épée pour se tenir à peine debout, il s'effondra sur les terres boueuses.

Des sons de métal se heurtant au métal déformés par l’air brumeux du terrain. Markus tira son épée et se précipita vers l'avant. Balayant le brouillard de droite et de gauche tandis que les silhouettes se révélaient devant lui. Quelques gardes survécurent et le suivirent mais les flèches ne cessaient de pleuvoir sur eux par derrière. Quelques-uns frappèrent son cheval et ses hommes.

Plusieurs heures s'écoulèrent avant que son cheval ne cède à la perte de sang et laisse son seigneur sans coursier. À la fin seulement 2 de ses hommes étaient avec lui sur 30. Certains avaient été laissés sur le bord de la route mourant lentement de blessures, la plupart étaient tombés en combattant sur le site de l'embuscade. Ils marchaient et évitaient de faire du bruit jusqu'à ce qu'un son bizarre leur parvienne. * splosh * Ses pieds frappèrent le sol sous l'eau remplissant ses bottes avec un sable fin. "Où sommes-nous ?" demanda Markus en levant les yeux, le brouillard se séparant pour révéler la lune dont la lumière illuminait maintenant un lac. L'un des hommes tomba à genoux en riant frénétiquement et rassemblant ses mains pour prendre une gorgée d'eau afin d’étancher sa soif. Ses mains touchaient à peine l'eau qu'un vacarme inhumain se précipitait vers eux, le bruit de pas secouant le calme de l'endroit et le moment de répit dans leurs âmes. Un ours brun géant se rua vers l'homme et l'attrapa dans sa gueule, déchirant la chair et le jetant sur le côté. Le deuxième homme sortit son épée et essaya de frapper l'ours mais en vain. Les grandes pattes s’abattirent sur son visage, laissant son corps aux corbeaux dans l’instant.

Seul Markus resta, choqué par la perte du dernier de ses hommes et de cette bête qui venait de les tuer en un instant. L'ours se laissa retomber sur Markus le clouant au sol et se tenant au-dessus de lui en essayant de lui mordre le cou. Markus tendit le bras devant sa tête et attrapa le couteau sous sa ceinture. Il pouvait sentir le métal se plier sous la force des mâchoires alors qu'il attrapait la poignée de son couteau et l'enfonçait dans le ventre de l’animal, le tordant et coupant sa chair aussi sauvagement qu'il le pouvait. L'ours lâcha son bras et lança un hurlement horrible remplissant ses os d'une froideur terrible. Le son de la rage. Il attrapa le couteau avec son autre main et poussa profondément. Les secondes suivantes le marquèrent, la patte d'ours lui tranchant la joue et s'effondrant à ses côtés.

Avec le peu de forces qu’il lui restait, il rampa jusqu'à la rive du lac, laissant une traînée de sang gorger le sol et plaça sa tête juste au-dessus de l'eau. Une goutte de sang tomba dans le lac, se mélangeant à l'eau puis disparut. La seconde tombant au même endroit, recouvrant la surface et changeant sa couleur au noir puis à la transparence. Il inspira avec effort alors que la douleur explosait dans son corps lui faisant perdre l’espoir de survivre.

Son cœur se remplit d'un sentiment de paix en un instant alors qu'il voyait se dessiner les contours d'une autre personne à la surface de l'eau où son sang tombait toujours. Il ne pouvait pas la reconnaître mais cela lui fit oublier le sol froid sous son corps et la douleur qu'il contenait. Il se retourna alors le climat autour d'eux changeait soudain et il put la voir. Son rêve était là. Sa raison de vivre était devant lui.
Puis, l'obscurité.

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#4 2018-02-23 10:34:58

Mahaud

Re : La geste de Markus

La nuit était sombre, mais Mahaud maniait sans peur la longue perche pour faire avancer la barque sur les eaux calmes du lac dont la brume s’élevait lentement. L’Île située à l’embouchure nord de celui-ci donnait sur les eaux plus tumultueuses ensuite. L’esquif à fond plat glissait sans bruit sur les herbes aquatiques jusqu’à atteindre la petite crique abritée qui servait de lieu de rituel pour les sœurs de l'Île. Ceux-ci se faisaient maintenant plus rares mais la jeune fille n’avait pas oublié le chemin, souvent emmenée par ses sœurs plus âgées pour y assister et apprendre. Même si on la tenait encore éloignée de certains rites, comme la fête de Beltan.

Agenouillée près de la vasque d’obsidienne, elle vérifia une nouvelle fois d’une main un peu nerveuse que le voile de lin brodé cachait sa chevelure sombre, avant de puiser l’eau du lac avec une douceur extrême pour ne pas la troubler. L’eau coula dans la vasque tandis qu’elle murmurait les paroles rituelles. Car le rêve était bien trop présent dans sa mémoire et elle voulait savoir, quand bien même on lui avait souvent répété que la connaissance avait toujours un prix. La lune se dévoila, venant effleurer la surface liquide de ses rayons pour la changer en miroir d’argent. Mahaud retenait son souffle alors que son reflet lui renvoyait son regard. Elle patienta, continuant à fixer l’image, désespérant presque au fil du temps qui passait de ne rien y voir d’autre. Jusqu’à ce que l’eau frissonne comme sous l’effet d’une brise imperceptible. Alors que le reflet reprenait sa netteté ce n’était plus elle qu’elle voyait, mais ces yeux couleur d’eau qui la fixaient. Puis l’image s’assombrit, le liquide s’épaissit, jusqu’à prendre une teinte rouge. Elle réprima un cri d’horreur alors qu’au loin un hurlement de rage résonnait. Le gardien était sorti de sa tanière !

La jeune fille avait couru le long du sentier qui faisait le tour du lac. Elle avait vu les hommes, et le gardien. Elle l’avait vu tomber et s’approcha doucement, incapable de concevoir que quelqu’un ait pu le tuer. Un mouvement attira son attention, le troisième homme, penché au-dessus de l’eau était encore en vie. Elle serra les doigts sur le petit couteau à sa ceinture. S’il avait tué le gardien il ne méritait pas de vivre. La jeune fille s’approcha encore alors qu’il se tournait avec effort. Une bourrasque de vent siffla soudain mais Mahaud l’ignora en croisant le regard qui la hantait depuis des jours. Cela ne dura que quelques secondes, puis l’homme laissa retomber sa tête ensanglantée.
Interdite, elle contemplait le corps du chevalier à l’armure boueuse et cabossée, le sang qui coulait sur sa peau pâle. Le sang ! Elle se laissa tomber à genoux près de lui, décrochant rapidement son voile pour le plier et le presser contre la blessure, le bout de ses doigts fins effleurant sa peau glacée.

Elle voyait… le brouillard et l’embuscade, entendait les cris de guerre, l’odeur du sang emplissait ses narines alors que son cheval galopait ventre à terre. Puis la longue marche, la lueur de la lune dans le ciel, le choc contre le gardien, et enfin… elle.

Le choc fut si violent que Mahaud faillit en lâcher le fin tissu qu’elle tenait pressé contre la blessure. Heureusement, des lanternes approchaient déjà, les serviteurs de l’île attirés par le bruit. Le chevalier fut emmené pour être soigné, la jeune fille sous le choc raccompagnée vers ses sœurs.

Ces dernières considérèrent la nouvelle d’un homme ayant tué le gardien naturel du lac comme un mauvais augure, mais Mahaud insista tant pour qu’il soit sauvé, qu’on s’employa à le soigner. La vieille Eilwen qui avait une affection toute particulière pour la jeune fille qu’elle avait pour ainsi dire élevée se proposa pour veiller sur lui. Et ce d’autant plus qu’elle avait subtilisé le voile qu’elle avait aussitôt reconnu. Cela resterait un secret entre Mahaud et elle.
Les sœurs les plus âgées parlèrent tard ce soir-là. Il fallait trouver le moyen de conserver les pouvoirs de Mahaud, même contre son gré, et continuer à la tenir le plus possible éloignée du monde. Surtout quand un inconnu foulait leur territoire.

#5 2018-02-26 20:44:26

Markus Habsburg
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Re : La geste de Markus

L'ombre le suivait pas à pas, toujours à distance. Il pouvait la sentir le regarder avec des yeux de prédateur. Il pouvait sentir sa présence dans les limbes où il errait. Il n'y avait pas d'arbres ni de murs autour de lui mais un écho suivait chacune de ses respirations. Il n'y avait pas de sol mais ses pieds sentaient une surface dure. Il tournait la tête de temps en temps pour essayer de la voir, et chaque fois tout ce qu'il voyait derrière lui était une brume qui tournait lentement dans les airs et se courbait comme si elle était façonnée par une main qui la traversait. Il avait accéléré le rythme et couru aussi vite que possible sans but. L'ombre suivit, imitant ses pas. Son cœur pompait le sang avec la fureur d’un sanglier en cage essayant d’en sortir. "Est-ce qu'il va vivre ?" Il entendit une voix venant du néant qui l'entourait. L'ombre se formait devant lui et il pouvait voir sa silhouette. C'était elle. Ses yeux s'éclairèrent quand il leva la main pour la poser sur sa joue. Il sentit la douleur dans sa poitrine et les muscles qui se crispaient dans tout son corps mais il se battit. Une autre voix la rejoint "Je ne sais pas .. Ses blessures ont empiré." Ses lèvres bougeaient, essayant désespérément de prononcer des mots. Une ligne pour la faire sourire ou une ligne pour lui dire ce qu'il ressentait. Rien ne sortit. "Il danse avec la mort, il pourrait ne pas survivre à la nuit." dit la première voix et l'ombre a placé son bras sur sa poitrine. Il essayait de l'attraper mais ne pouvait pas, son bras traversant l'ombre à chaque fois. "Prenez-le, c'est à vous." dit-il à l'ombre.
"Cela l'aidera à se calmer, il souffre beaucoup ..." dit la deuxième voix et Markus sentit son souffle s'arrêter, sa gorge se crispant et s'étranglant sur quelque chose. L'ombre était partie. La brume est revenue et il ne sentit plus rien.

Ce fut quelque temps après qu'il put à nouveau prendre conscience de son corps. Cela avait-il duré quelques instants ou des jours, il ne savait pas. Il essaya d'ouvrir les yeux et vit une silhouette floue au-dessus de lui. Une vieille femme le regardait.

"Où est-elle ?" lui a-t-il demandé. "Où suis-je ?" Il portait une robe blanche tachée de sang. Allongé sur un lit dans une pièce avec de vieux meubles et des branches de vigne rampant depuis la fenêtre couvraient le plafond.

“Tu es vivant pour ce que ça vaut, tu as tué notre Guardien ... Quant à ... tu apprendras que bientôt, les sœurs voudront te parler maintenant que tu es éveillé.” La vieille femme a répondu et a quitté la pièce.

Il se leva et s'assit sur le côté du lit. Palpant son visage avec le bout de ses doigts, il pouvait sentir les blessures sur sa tempe et sa joue gauche. "Cela laissera une cicatrice." marmonna-t-il.

Ils vinrent le chercher, deux hommes avec l'épée à la main et de la colère dans les yeux. Malgré un vent froid dehors, ils l'ont laissé dans la robe blanche. En l'amenant au centre du village, à une grande salle ovale en chêne, avec de hauts piliers en bois et un toit peint en rouge avec des fleurs sur le sommet et des vagues d'eau à la fin. Quand il entra dans la salle, une chaleur flamboyante le frappa, il n'y avait qu'un seul feu brûlant au centre de la salle ovale et pourtant c’était une vraie fournaise. Personne ne semblait être affecté par cela, ils portaient tous plusieurs couches de vêtements. Tous sauf les trois femmes au bout de la salle. Ils l'ont amené à elles et l'ont jeté au sol. Le silence emplit la pièce alors que les trois femmes le surveillaient attentivement.

"Où..." commença-t-il mais il fut interrompu.

"SILENCE !" a crié l'une des femmes. "Qui es-tu et pourquoi es-tu venu à notre lac sacré ?"

Markus était surpris, il y avait quelque chose de particulier en elle mais il se leva et la regarda droit dans les yeux. "Markus Habsburg d'Agram, mes hommes ont été pris dans une embuscade par des voleurs sur le chemin dans les montagnes."

“Ils n'étaient pas des voleurs, vous êtes venus sur nos terres avec des épées et des chevaux, vos hommes ont tué nos amis et notre famille, ils ont eu ce qu'ils méritaient.” Sa voix s’adoucit et corps se détendait, alors qu’elle se rapprochait lentement comme pour l'examiner. "Beaucoup ont essayé pendant des siècles de venir ici et de violer et piller notre île." Elle s'arrêta à quelques centimètres de son visage en regardant ses blessures. “Pourtant tu es le seul qui a réussi à tuer le Gardien, tu devrais être pendu juste pour cela.” Alors qu'elle plissait les yeux, ses blessures commencèrent à brûler.

L'une des autres l'arrêta, murmurant quelque chose dans une langue inconnue et les femmes acquiescèrent. La brûlure s'arrêta et il tomba à genoux, la colère emplissant lentement son cœur.

"Où est la femme du lac ?" leur demanda-t-il.

"Qu'est-ce que tu veux d’elle, le gardien ne t'a pas suffit ?" répliqua la troisième sœur en venant former un demi-cercle avec les deux autres autour de lui.

"J'ai besoin de la trouver, c'est pourquoi je suis venu ici."

"Tu ne le feras pas, elle n'est pas là, qu'est-ce que tu veux d'elle ?"

Il releva le regard, une flamme dans les yeux, où se mêlait la passion et la colère. “Elle est mon rêve, je dois la trouver, si vous ne me dites pas où elle est, je jure devant tous les dieux que vous finirez comme cet ours au bord du lac.”
Son corps se souleva et ses blessures ont brûlé encore plus fort. Les os de ses bras et ses jambes semblaient vouloir se rompre. Les cheveux des soeurs commencèrent à léviter, leurs yeux à briller.

"Tu oses nous menacer, tu oses ..." Les ténèbres commencèrent à emplir son regard alors qu'il perdait ses force.

"Sœurs !" cria une voix derrière lui. "Souvenez-vous de ce que Mahaud nous a dit !" Et c'était la voix de la vieille qui le regardait quand il s’était réveillé.

"Mahaud .." dit-il alors qu’il sombrait dans le vide.

Son rêve lui revenait, il pouvait la revoir. Cette fois, ils étaient dans une forêt. Elle cueillait des champignons sur des souches d'arbres. "Mahaud." Il l'a appelée mais elle ne l'a pas entendu. Il s'approcha d'elle, assez près pour voir chaque ligne de son visage. "Mahaud." murmura-t-il mais elle ne pouvait toujours pas l'entendre. Il baissa la tête et embrassa ses cheveux à peine avec un son tangible l'appelant à nouveau. Ses yeux s'élargirent et regardèrent autour d’elle, surprise. Elle ne peut pas me voir. Il s'agenouilla devant elle en regardant ses yeux confus. “Qui vous êtes, je ne le sais pas. Ce que vous êtes, je peux à peine le concevoir. Où vous êtes je ne peux même pas le deviner. Ce que je sais c'est la vérité de votre existence. Ce que je sais, c'est que vous êtes venue à moi en rêve et que vous vous révélez être réelle. Comment puis-je continuer à vivre sans vous trouver ? Comment puis-je marcher sans imaginer votre pas à côté du mien ? Chacun de mes souffles cherchant les vôtres et chacun de mes doigts cherchant à rejoindre les vôtres. Un esclave pour remplir cette chaleur dans mon coeur, brûlant de votre image et alimentant mon corps. Ta présence gardant la mienne enfermée et ton esprit liant le mien dans la passion. Comment puis-je te dire ce qu'il y a au fond de moi sans me consumer en cendres juste pour un baiser ? Mon sang bout à la simple pensée de tes mains suivant mes blessures sur ma joue et de tes yeux qui regardent les miens pendant que je m'enfonce de plus en plus profondément dans l'idée que la seule qui est, c'est toi.” Il pencha sa tête vers la sienne.

"Markus..." C'était la voix de la vieille femme. Il a commencé à se réveiller, revenu dans la même chambre.
Elle tenait un voile dans ses mains, ses yeux grands ouverts libérant une larme sur sa joue.
"Je m'appelle Eilwen." dit-elle en lui tendant le voile.
"Vous devez échapper à cette île et rapidement."

Dernière modification par Markus Habsburg (2018-02-26 20:51:29)

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#6 2018-02-27 22:45:34

Mahaud

Re : La geste de Markus

La nuit dans sa petite chambre familière ne lui avait apporté aucun réconfort, les rêves de sang troublant un regard couleur d’eau se répétant sans fin. Aussi avait-elle couru vers la chambre du blessé dès les premières lueurs de l’aube. La vieille Eilwen le veillait et cette pensée rassérèna un peu la jeune fille. Le chevalier était entre de bonnes mains.
Elle prit le temps de le détailler maintenant que la lumière du jour lui permettait de le faire. Son teint était pâle, et même si la blessure sur sa joue avait été recousue il en garderait certainement une trace. La barbe qui ombrait son menton était tentatrice, et lui donnait envie d’y perdre ses doigts. Il avait les épaules larges d’un homme habitué à porter l’armure, les bras robustes d’un homme sachant se battre. Un toussotement d’Eilwen la sortit de ses pensées alors que son regard se perdait plus bas.

" Est-ce qu'il va vivre ? " Elle avait murmuré, craignant la réponse. Ce qui n’avait aucun sens, au contraire, elle devait éprouver de la colère contre celui qui avait tué le Gardien. Pourtant, savoir qu’il allait survivre lui importait. Le blessé tressaillit, luttant contre la fièvre qui le consumait. Eilwen secoua doucement la tête. " Je ne sais pas .. Ses blessures ont empiré. " Il s’agita faiblement et sans y penser Mahaud posa une main qui se voulait apaisante sur sa poitrine où son coeur battait bien trop vite. " Il danse avec la mort, il pourrait ne pas survivre à la nuit." En cet instant, elle aurait aimé alléger ses souffrances mais c’était là un pouvoir qu’elle ne possédait pas. Sa vieille nourrice l’écarta doucement, une petite fiole en main.
" Cela l'aidera à se calmer, il souffre beaucoup ..." fit Eilwen en donnant la mixture à boire à Markus. Ca avait un goût particulièrement amer mais au moins ne viendrait-il pas s’en plaindre. Le blessé cessa de s’agiter, plongeant dans un profond sommeil.

La jeune fille guettait son visage avec appréhension, espérant croiser son regard une nouvelle fois, rien qu’un instant. Afin de savoir si elle éprouverait à nouveau cette brûlure intérieure qui l’avait parcourue la veille. Mais rien ne semblait pouvoir troubler le repos du chevalier. Elle tendit une main hésitante vers sa joue, pour effleurer sa barbe. Si douce sous ses doigts.
“ Les soeurs n’aimeraient pas te voir ici. “ Eilwen rangeait un peu la pièce et faisait mine de ne pas la regarder, mais Mahaud savait que rien ne lui échappait. Elle éloigna sa main à regret, consciente que la vieille femme avait raison.
“ J’ai rêvé de lui, tu sais Eilwen…”
La nourrice s’arrêta net pour observer la jeune fille.
“ Rêvé comment ?
De ses yeux… qui me regardaient.”
Eilwen fit une moue réprobatrice.
“ Un rêve ça ne veut rien dire. Tu devrais oublier tout ça. “
Mahaud s’apprêtait à franchir le seuil et observa la vieille femme, son regard sombre paraissant soudain sans âge sous ses longs cils.
“ Et si je ne le peux pas Eilwen ? “ lança-t-elle avant de quitter la pièce.
La vieille nourrice referma la porte tout en murmurant entre ses dents “ Si tu ne le peux pas, que les Dieux vous protègent, tous les deux. “

Des jours avaient passé, mais rien ne semblait sortir le chevalier de sa torpeur. Tous les matins Mahaud entrait dans sa chambre, sans s’y attarder, le regard inquisiteur d’Eilwen surveillant le moindre de ses faits et gestes. En désespoir de cause, elle passait alors ensuite ses journées à parcourir les prés environnants pour y cueillir des simples qui permettraient de le guérir. Elle l’espérait.
Les champignons d’un blanc laiteux surmontés d’un chapeau brun couvraient la vieille souche de bouleau moussue. Mahaud souriait en songeant à sa chance. Ils n’apparaissaient que dans le brouillard après une averse et leur rareté ne les rendait que plus précieux. A genoux dans l’herbe, elle les détachait soigneusement de l’écorce quand une légère brise sembla tournoyer autour d’elle. “ Mahaud ” semblait-elle répéter, “ Mahaud “.
Cette fois il lui semblait bien avoir entendu quelque chose et la jeune fille écarquilla les yeux, cherchant d’où cela provenait. Mais il n’y avait que le vent qui faisait ondoyer l’herbe. Pourtant le murmure était presque audible, les mots presque à portée. Elle avait l’habitude de rêver mais jamais éveillée. Un instant elle fut tentée de s’enfuir et puis Mahaud posa son panier et s’assit sur ses talons, fermant les yeux.
Le murmure s’amplifia, plus grave, enfin compréhensible. Elle ignora volontairement ses autres sens qui lui rappelaient où elle était pour se noyer dans ce souffle à son oreille lui murmurant des mots brûlants qui faisaient rougir ses joues. Son corps s’embrasait et elle se demanda un instant si elle n’allait pas réellement prendre feu. Et pourtant elle priait que le murmure ne s’arrête pas, sans que ses doigts frémissant d’impatience ne trouve rien à quoi s’accrocher dans le souffle d’air tout autour. Mahaud ferma les paupières plus fort, désirant que le murmure prenne consistance. Pour qu’elle se perde dans ses bras.
Le vent cessa soudain, et le manque était encore pire. Le souffle court, la peau brûlante, la jeune fille rouvrit les yeux fixant sans les voir les prés autour d’elle. Elle pouvait sentir son coeur battre à tout rompre dans sa poitrine. Sans comprendre comment de simples mots pouvaient avoir un tel effet sur elle. Parce que ce ne sont pas de simples mots lui soufflait son instinct.
Fébrilement elle ramassa son panier pour rentrer. Eilwen saurait lui dire, Eilwen savait toujours. Elle n’en eut cependant pas le temps. A peine à la porte principale, un garde venait la trouver pour la conduire près des soeurs. Le coeur serré par un sombre pressentiment Mahaud le suivit.

#7 2018-03-05 18:52:31

Markus Habsburg
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Re : La geste de Markus

Il a attaché le voile au-dessus de son coude pendant qu'il descendait lentement le long de la vigne sous la fenêtre. Les gardes patrouillaient l'île et il n'avait pas les moyens de se faire prendre. Laissant son épée et son armure entre les mains des insulaires, il attrapa la partie inférieure de sa robe et la déchira. La salissant avec de la boue et couvrant aussi son visage, il courut lentement accroupi de maison en maison. Il était sur la côte maintenant. Devrais-je nager à travers? Non .. Trop loin. - Il a regardé autour de lui, et il a suivi la côte pour trouver n'importe quel type de bateau pour le faire traverser l'eau. Un petit point a commencé à se montrer pas si loin sur la mer. Un petit bateau à rames, un pêcheur. Markus a couru à l’abri et a regardé l’homme ramer lentement vers la côte. Une grande barbe grise montrait son âge avancé.

Markus attendit que le pêcheur arrive sur la côte et ramasse sa prise du jour. Ce fut seulement quand il commença à s'éloigner lentement que Markus sauta hors de sa cachette et qu'il courut comme le vent vers le bateau. Il s’est jeté dessus et l'a repoussé dans la mer. De forts cris résonnèrent à travers la côte et les gardes commencèrent à se regrouper sur la ligne séparant la mer et la terre. Markus ramait aussi fort que possible tandis que les flèches remplissaient l'air autour de lui. Malédictions. Mille malédictions, j'aurais dû le tuer, murmura-t-il en ramant. Le temps passa et ses bras étaient fatigués. Un brouillard est tombé sur la surface de la mer, couvrant tous les signes de la terre s'il y en avait. Il se souvenait seulement de son rêve et de celle qu'il aimait, où était-elle? Il avait besoin de la trouver maintenant. Comme ses pensées se déchaînaient sur l'endroit où il devait aller, une lumière rouge se mit à briller au loin. Ça bougeait et c'était rapide. Les insulaires étaient sur sa piste et il savait que s'ils le voyaient ce serait sa fin. Il ramait plus vite que jamais auparavant, seul le brouillard le protégeait maintenant. Les heures passèrent et ses bras étaient à peine capables de retenir les rames. Il les laissa partir et leva les yeux vers le ciel, le soleil était à peine visible mais il pria pour lui montrer le chemin, pour le ramener sur le continent. Alors qu'il priait, un «thump» l'interrompit, son corps tomba et il entendit des cris et des bottes de fer qui marchaient sur le bateau. En une seconde, une épée était à sa gorge, brandie par un soldat en vêtements noirs et jaunes, une cotte de mailles couvrant sa poitrine et un casque ouvert sur la tête. Au-dessus de la visière du casque, il vit quelque chose de familier. Ses armoiries de famille.

" Oseriez-vous défier vos dieux et tuer votre maître, fantassin ? " dit-il.

Le soldat recula et quitta le bateau en retirant son casque pour mettre genou en terre devant lui. "Je n'oserais pas, le brouillard et votre robe maître, nous avons pensé que vous étiez l’un d'entre eux." dit le soldat. D’autres soldats vinrent de la côte d'abord confus et puis en reconnaissant leur maître, ils se sont tous agenouillés.

“ Seigneur Markus, nous ne pensions pas que vous aviez survécu, les dieux soient loués car ils vous ont rendu à nous “, dit un autre soldat.

Il était tard dans la nuit quand ils lui racontèrent ce qui s'était passé après son départ. Les embusqués étaient des gardes de l'île, gardant le seul chemin menant à une berge à partir de laquelle l'île pouvait être atteinte. Les pêcheurs locaux leur avaient raconté des histoires sauvages sur les gens qui y vivaient. Des créatures magiques et impies gardaient l'île. Le brouillard et les orages la protégeaient de tout mal. L'île pouvait être atteinte seulement de cette berge sans avoir à craindre les serpents et sirènes qui coulaient les plus grands et les plus forts des navires.

Il avait dormi à l'aise cette nuit-là. Avec ses hommes qui veillaient et une épée à sa portée, il n'avait plus rien à craindre. Mais elle revint à lui, la jeune fille de l'île. La chaleur de son corps. Le plaisir de son baiser ... Ça ne pouvait plus durer longtemps, il devait la retrouver. Alors qu'il se réveillait avec son corps tremblant d'extase comme si elle se trouvait à côté de lui, il sentait que les rêves devenaient de plus en plus réels.

Les soldats rôtissaient un sanglier qu'ils avaient chassé pendant la matinée et se moquaient les uns des autres quand Markus arriva et se leva, vêtu d'une armure complète et l'épée à la main.

"Qui sont les deux des plus courageux ici ? ", demanda-t-il aux soldats.

Un silence s'abattit sur les soldats et celui qui avait été le premier à le voir se leva et hocha la tête. Un garçon plus jeune, avec des traits du visage similaires aux siens se tenait à côté de lui. "Notre famille a servi les Habsbourg depuis des générations, nous sommes avec vous sire."

Markus les ramena vers le bateau, les mains encore grasses à cause de la nourriture qu'ils avaient attrapée pour le retourner. Les soldats avaient rempli la petite barque avec des flèches et de l'équipement. Cette fois, ils seraient préparés. Il était de retour sur le chemin de l'île, suivant les eaux calmes comme seul guide arrière. Le brouillard ne tarda pas à retomber et couvrit leur haleine de froid. Markus se tenait sur le bateau tandis que les soldats ramaient, essayant de penser à un plan pour la trouver, en regardant l'horizon. Un petit sentier découvert dans l'eau, un autre bateau pas si loin du leur. Le brouillard faisant une ouverture avait révélé la proue du bateau. Elle était là, debout sur la proue, et regardait ailleurs

Dernière modification par Markus Habsburg (2018-03-05 19:48:24)

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#8 2018-03-06 12:55:43

Mahaud

Re : La geste de Markus

Au sortir de chez les soeurs, Mahaud ne savait plus que penser.
“ Les hommes ne songent qu’à nous utiliser ”, avait dit la première.
“ Ils ne pensent à nous que pour réchauffer leur lit ”, scandait la seconde.
“ Pour ensuite nous traiter de sorcières s’ils ne peuvent nous avoir “, crachait la troisième.
L’esprit en déroute, elle s’était hâté vers la chambre du blessé, ayant gardé pour elle le trouble que lui causaient ses rêves. Une telle intensité voulait sans doute dire quelque chose, la jeune fille en était persuadée.
Eilwen rangeait la petite chambre et Mahaud lui avait sourit, juste avant de s’aviser que le lit était vide.
“ Où est le chevalier ?
- Parti. “
Un tout petit mot qui lui fit l’effet d’un coup de poignard, aussi répéta-t-elle incrédule.
“ Parti ? “
La vieille femme hocha simplement la tête, reprenant son ménage pour éviter de voir la douleur qui se peignait sur le visage de la jeune fille. Celle-ci fixait le lit vide en ruminant de sombres pensées. Ainsi ils avaient tous eu raison, le rêve ne voulait rien dire. C’était juste un délire créé par son esprit trop imaginatif. Comme elle avait été stupide !
La colère enflait en elle, au moins aussi grande que la déception éprouvée.
“ Les soeurs veulent remettre en état le sanctuaire des collines. Je crois que je vais m’en charger. “
En la voyant partir avec tant de colère dans les yeux, Eilwen s’en voulut. Elle avait eu le pouvoir d’adoucir les choses et n’avait rien dit. Pour autant rien n’assurait que le chevalier reviendrait, pensait la vieille femme en récupérant l’armure et l’épée mises de côté. Rien à part sa conviction. Et le fait qu’elle l’avait entendu prononcer le nom de Mahaud.

La jeune fille n’avait pas décoléré depuis son départ de la chambre et inspira à fond alors qu’elle mettait le pied sur le bateau. Le matériel et les provisions s’entassaient dans la coque et les gardes qui devaient l’accompagner prenaient déjà place sur les bancs de nage. Pour qui n’était pas originaire de l’Île, les courants et le brouillard étaient de sérieux obstacles à la traversée. Mais pas pour eux.
Mahaud vint se placer à la proue pendant que l’on détachait les amarres. C’était la première fois qu’elle ferait traverser un équipage mais personne n’avait l’air inquiet. Elle se força à se concentrer sur le brouillard et les flots, chassant de son esprit toute autre idée. Les paroles rituelles franchirent ses lèvres sans effort, et le bateau se mit à suivre le courant docilement. Devant eux le brouillard s’amenuisait, pour reprendre ses droits en quelques volutes claires après leur passage. La jeune fille s’acquittait de sa tâche avec sérieux, sans réaliser qu’à quelques encablures un bateau de pêche retournait vers l’île.

#9 2018-03-16 16:30:52

Markus Habsburg
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Re : La geste de Markus

Le bateau ne pouvait pas changer de cap, le courant était trop fort. Elle s'évanouit derrière la brume alors qu'ils ramaient plus loin. Il avait besoin de trouver la vieille femme qui l'avait aidé à s'échapper, elle devait savoir où Mahaud allait. C'était sa meilleure chance de la retrouver.

Des heures passèrent avant que la poupe de la chaloupe ne heurte et ne laboure le sable. Les bottes frappèrent la plage rapidement pour tenter de ne pas être vus par des yeux trop curieux. Ils avaient de la chance, personne n'était là. Arriver à la vieille femme, à la maison où il s'est réveillé sur l'île signifiait se faufiler derrière les arbres et les maisons. Passer à travers les champ de blé accroupi et prier pour ne pas être vu. Ils ne pouvaient pas se permettre un combat avec les gardes de l'île. Si ces sœurs le voyaient, qui sait ce qu'il se passerait?

Ils marchaient lentement et silencieusement, les soldats armés de leurs arcs et une flèche entre leurs doigts. Markus tenait son épée recouverte de boue pour cacher toute brillance qui le trahirait.

La nuit tombait presque sur l'île quand ils atteignirent la maison. Markus pouvait voir une lumière vacillante dans la pièce où il avait dormi, la fenêtre donnant naissance à une ombre dans la rue dessinant la silhouette de la vieille femme. Il donna son épée et ses hommes et enleva son armure. Puis se dirigea vers la vigne avec laquelle il pourrait atteindre la pièce. La femme était assise sur une chaise presque endormie. Ses bottes touchaient doucement le sol quand elle ouvrit grand les yeux, visiblement sous le choc.

" Toi ?! " dit-elle.

“ Ne donnez pas l'alarme, chère Eilwen, je n'ai aucune intention de vous nuire. “chuchota Markus en baissant sa main paume ouverte.

" Pourquoi .. Comment avez-vous ? Pourquoi êtes-vous revenu ? Cet endroit n'a rien pour vous. "

" J'ai vu Mahaud sur un bateau qui naviguait vers le continent, tu dois me dire où elle allait. "

La femme se leva à l’aide de sa canne avant de désigner la porte. " Je vais appeler les gardes si vous mentionnez son nom à nouveau, laisser la fille tranquille. "

Markus s'agenouilla et retira le voile qu'elle lui avait donné pour le placer devant elle. " Tu... Tu ne comprends pas, je dois la trouver, je... Je ne peux pas respirer sans son image dans mon esprit, je ne peux pas. " -Il regarda droit dans les yeux de la femme- " J'ai rêvé d'elle, j'ai tué pour la trouver et je suis prêt à mourir. Appelle les gardes si tu veux, appelle-les pour que mon corps trouve le repos dans ce monde."

La femme abaissa sa canne et se rassit. Se tenant la tête en pleine confusion. Il ne bougeait pas, et retenait son souffle. Le temps passa et elle marmonna dans sa barbe. " Les vieilles ruines au sud des montagnes... Le vieux... monastère..."

Markus se leva et attrapa sa main en l'embrassant. "Je vous remercie." Il avait commencé à bouger vers la fenêtre, quand il vit que son armure était toujours là depuis qu’on l’avait amené, il l'a attrapé et a passé sa tête par la fenêtre. Les soldats ont levé les yeux et ont presque été heurtés par son épée et sa cuirasse. " Pssst, attention " dit-il un peu trop tard mais avec un sourire.

Ils ont couru dans l’ombre de la nuit, cette fois au mépris de toute prudence. Les épées frappaient leurs ceintures et leurs bottes laissaient des traces derrière eux alors qu’ils se précipitaient vers la côte. Passant une forêt et passant un champ, ils arrivèrent de nouveau à la côte. Sautant dans le bateau et les deux soldats le repoussant dans l'eau, Markus attrapa les rames et commença à ramer. Il savait où aller et il devait y aller aussi vite que possible. Les deux soldats le regardaient avec étonnement, alors qu’il ramait comme si les rames étaient légères comme des plumes et que l'eau les conduisait. Le brouillard retomba, mais il ne s'arrêta pas, même quand ils entendirent des cris sur l’horizon. Les créatures qui gardaient l'île les suivaient sous l'eau, ils pouvaient voir de grandes formes se mouvoir étrangement sous la surface.

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#10 2018-03-16 18:13:27

Mahaud

Re : La geste de Markus

Un étrange sentiment rôdait à la lisière de sa conscience, l’impression de passer à côté de quelque chose d’important. Non pas que l’idée soit véritablement formulée dans son esprit, elle était trop occupée à leur frayer un chemin dans le brouillard en suivant les courants naturels qui les poussaient à travers le lac. C’était juste un peu agaçant et une fois arrivée sur la berge, elle réalisa que cela contribuait à nourrir la colère sourde qui brûlait encore au fond d’elle.
Même la chevauchée qui suivit ne suffit pas à la calmer, pourtant elle avait fait pousser les chevaux à son escorte, les menant à un train infernal. Ce n’est qu’une fois arrivée à l’ancien lieu de culte que la paix s’insinua doucement en elle. La végétation avait repris ses droits sur les bâtiments construits par l’homme donnant au site une atmosphère irréelle.

Porte

Laissant aux gardes le soin de se répartir les tâches, elle entreprit d’explorer l’enceinte. Certaines portes n’existaient plus, mais les escaliers de pierre étaient encore pratiquables. A l’étage, la vieille porte de chêne tenait encore sur ses gonds. Et à l’intérieur, Mahaud découvrit une ancienne salle d’étude dans laquelle une tornade semblait s’être abattue. Au moins certaines archives étaient encore lisibles.
“ Nous resterons ici plusieurs jours ”, avait-elle annoncé à son escorte avant de retourner s’installer dans la grande pièce, un peu fébrile à l’idée de manipuler tous ces vieux documents. Ici elle savait qu’elle trouverait ce qu’elle cherchait.

#11 2018-03-18 01:14:54

Markus Habsburg
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Re : La geste de Markus

Il avait fallu des heures avant qu'ils atteignent la côte et Markus avait sauté du bateau dans l'eau, laissant les soldats à l'intérieur à quelques pas du sable. " 3 chevaux frais, MAINTENANT ! " cria-t-il surprenant la compagnie qui l’attendait. Le camp entra en activité, ses hommes courant de gauche à droite. Trois chevaux furent amenés pendant qu’il ajustait son ancienne armure, après avoir enroulé le voile sur son bras, puis il avait saisi les rênes et avait sauté en selle, les deux soldats le suivant. " Ne me perdez pas de vue sous peine de vous perdre." leur dit-il alors avant de se tourner vers les soldats du camp. “ Retournez au donjon et préparez un host, appelez aux armes tous ceux qui m'ont prêté serment et attendez mon arrivée. ” Il éperonna son cheval qui se précipita au galop suivi à grand peine par ceux des deux soldats.

Le jour et la nuit s'échangèrent deux fois pendant qu'ils chevauchaient, s'arrêtant à peine pour dormir une heure de temps en temps. Mais ce n'était pas loin, il connaissait l'endroit par les vieux contes racontés par ses courtisans quand il était un jeune garçon. Il avait laissé les chevaux entravés dans la forêt alors que lui et ses soldats se faufilaient à travers les buissons près du vieux monastère. Il avait été dit que les anciens esprits vivaient là, qu'aucun adorateur n'était autorisé à marcher sur le sol entourant les murs de pierre du sanctuaire. Mais c’était juste des contes, des esprits, des dieux... Son esprit était fixé sur une seule chose, sur une paire d'yeux qui l'appelait.

Deux gardes patrouillaient autour des murs du monastère avec une haute tour les surplombant et un troisième gardien veillant en hauteur. Il fit signe à ses hommes d'attendre ici et se retourna vers les murs alors que les gardes changeaient. Évitant leur vue, il réussit à passer à travers une ancienne ouverture, où il y avait autrefois une porte. Maintenant métal rouillé et mousse couvraient l'arche. Alors qu’il la franchissait le garde en haut de la tour regarda dans sa direction mais Markus resta immobile. Son armure était couverte de boue et de mousse et les ténèbres du soir aidaient à le cacher. Il se déplaça très lentement et passa plus près du complexe intérieur. Son esprit restait aux aguets toujours à la recherche d'un autre garde. Son épée était dans sa main alors qu'il passait sous une autre arche entrant dans le jardin intérieur, à gauche de lui étaient des escaliers menant à l’étage. Des pas commencèrent à faire écho dans le jardin et il se dirigea dos au mur vers les escaliers en marchant lentement sur la pointe des pieds. Il put entendre les gardes passer les escaliers et puis... Un bruit, quelqu'un était là-haut. Il choisit d'en défier un plutôt que tout un groupe de gardes et s'était précipité dans le bâtiment en choisissant la première pièce. L'épée à la main, il sauta à l’intérieur, prêt à découper en morceaux le premier qu’il verrait. Ses mains se figèrent. " Toi..."

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#12 2018-04-06 15:18:08

Mahaud

Re : La geste de Markus

Cela faisait deux jours et deux nuits que la damoiselle s’était enfermée dans la grande salle à l’étage de l’ancien lieu saint. Les premiers temps les gardes avaient tenté à plusieurs reprises de venir s’enquérir de ses besoins. Elle les avait renvoyés sans ménagement, aussi évitaient-ils maintenant soigneusement de venir la déranger. Parfois une exclamation joyeuse leur parvenait depuis les fenêtres et ils se regardaient alors, amusés, avant de poursuivre leur ronde.
Le culte des dieux étant enseigné principalement par voie orale, Mahaud se doutait qu’elle ne trouverait que des documents annexes, mais même les anciens relevés d’inventaire avaient quelque chose d’excitant à ses yeux. Et puis travailler jour et nuit lui tenait l’esprit occupé, les quelques heures de repos prises quand la fatigue devenait trop pesante dénuées de tout rêve troublant.

Les bras pleins d’anciens parchemins ayant échappés aux rongeurs et à l’humidité, elle avait froncé les sourcils en entendant la porte s’ouvrir à la volée et le bruit de pas précipités qui fit vaciller la flamme des dizaines de chandelles éclairant la salle. Elle avait pourtant été claire sur les dangers encourus à la déranger sans raison. Voilà un garde qui allait s’en souvenir de façon cuisante.
Mais ce n’était pas l’un des hommes de l’Île qui se tenait devant elle, et alors qu’elle croisait le regard bleu mêlé de vert, elle faillit en lâcher les rouleaux qu’elle tenait précieusement contre elle. Ses doigts fins s’étaient crispés instinctivement sur son fragile chargement alors qu’elle faisait appel à toute la colère dont elle disposait pour parvenir à détourner les yeux.
“ Vous… Vous avez quitté l’Île ! “

Hélas le chevalier n’avait rien d’un garde vieillissant craignant le pouvoir des soeurs. Il marcha vers elle d’un air décidé, tendant la main pour effleurer doucement sa joue du bout des doigts.
“ Je suis parti pour te chercher. Pour retrouver mon rêve. Pour embrasser celle dont la pensée me hante. Pour sentir chaque goutte de sang dans mes veines et savoir que je suis à nouveau en vie. Je suis là pour toi Mahaud. “
Et le murmure faisait courir des frissons sur l’échine de la damoiselle qui recula avec inquiétude, tentant de rompre ce qui déjà semblait inéluctable.
“ N’usez pas de votre magie sur moi ! “

La salle dotée de murs encore en état ne lui permit pas d’aller très loin. Le regard de Markus s’était assombri alors qu’il touchait enfin au but de sa quête. Visiblement il ne la laisserait pas s’enfuir une nouvelle fois. D’autant plus que la volonté de Mahaud faiblissait un peu plus à mesure que leurs regards se croisaient, jusqu’à ce qu’elle s’y perde.

Les parchemins avait roulé au sol…

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C’est la douceur d’une main sur sa joue qui avait réveillé Mahaud en sursaut. En croisant les prunelles couleur d’eau posées sur elle, la jeune femme s’était aussitôt redressée, vaguement inquiète en réalisant que le sommeil l’avait terrassée aussi facilement. Markus sourit en murmurant “ tu es mienne ”. Elle faillit lui sourire en retour. Mais en apercevant le fin tissu brodé qui enserrait son bras, ses yeux sombres se firent perplexes.
“ Mon voile ?
- Pour toujours te garder près de mon coeur. “
Et déjà il se penchait sur elle pour l’embrasser quand un bruit de voix sous les fenêtres se fit entendre. Maudits gardes. Le chevalier grogna vaguement et se redressa souplement pour récupérer son armure et la sangler. Ce qui ne l’empêcha pas de détailler Mahaud avec un air de prédateur.
“ Tu devrais remettre ta robe, sinon je t’emmène telle que tu es. “
L’emmener ? Où donc ?
Elle se leva en fronçant les sourcils, ses longs cheveux dénoués l’enveloppant comme un manteau.
“ Partir ? “
Markus entendait les pas au bas de l’escalier et prit son épée en main, tandis qu’il surveillait la porte.
“ Avec moi.
- Mais ce serait trahir la confiance des Soeurs. “ objecta Mahaud.

En deux enjambées il était près d’elle pour la saisir par le bras et plonger son regard dans le sien.
“ Et tu préfères trahir mon coeur ? “ demanda-t-il, la voix assourdie par la tension.

Les coups frappés à la porte les firent tressaillir tous les deux, sans qu’il la lâche ni ne la quitte des yeux.
“ Damoiselle ?
- J’ai dit que je ne voulais pas être dérangée ! “ Quand bien même prendre ce ton sec demanda beaucoup à la jeune femme.
“ Nous avons repéré des traces récentes aux alentours.
- Eh bien allez patrouiller et ne m’ennuyez pas avec ces détails ! ”

Ce n’est qu’au petit matin suivant que les gardes découvrirent la disparition de la Damoiselle. Et ils tremblèrent en pensant à la réaction des Soeurs à cette nouvelle.

#13 2018-04-20 14:25:27

Markus Habsburg
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Re : La geste de Markus

Ses gardes la regardaient avec beaucoup d'émerveillement. Elle dormait dans les bras de Markus alors qu'ils chevauchaient lentement. Ils profitaient de la nuit comme leur protecteur pendant le voyage. Les sœurs seraient folles de rage, il était donc préférable de prendre toutes les mesures possibles. Je t'aime... pensa-t-il en regardant son visage calme reposant contre lui. Ses bras tenaient les rênes et gardaient Mahaud dans un état de calme alors que le cheval bougeait en la balançant comme dans un berceau. "Quel prix vais-je devoir payer pour toi ..." dit-il en laissant à peine échapper un son de ses lèvres, ne détournant pas ses yeux de ses cheveux, de ses paupières, de ses lèvres et de ses joues. "Quelle torture m'attend ..." Il leva la main pour poser un doigt sur sa joue. "Rien ne peut me tuer, mon amour m'a rendu immortel." Il sourit quand Mahaud ouvrit les yeux en sentant son contact. "Ils ne peuvent pas tuer quelque chose sans coeur." Elle le regardait sans comprendre. "Garde le mien en sécurité dans ta poitrine et je serai toujours là avec toi." il se pencha pour l'embrasser alors qu’elle se réveillait et fermait les yeux en sentant ses lèvres. "Où sommes-nous?" demanda-t-elle et l'un des gardes a répondu. "Devrait être proche des terres païennes m'lady, ce sera pas long avant que nous n'atteignions leur .." Markus fixa le garde avec colère. "Oh, désolé, Seigneur." Le garde talonna son cheval et se précipita hors de portée auditive.

"Nous serons bientôt en sécurité, Mahaud, vos sœurs ne pourront pas nous trouver ou nous sentir quand nous traverserons les frontières des pays païens : les tribus qui y habitent prient des dieux longtemps oubliés de notre peuple, mais ils sont encore puissants là-bas. " Elle hocha la tête et attendit avec impatience de voir la route. Il savait ce qu'elle avait en tête. La nuit au monastère, il avait pu sentir quelque chose qui ne venait pas de cette terre en elle. Des pouvoirs qu'il ne pouvait même pas imaginer. C'était l'amour qui le poussait à dépasser ses limites. Mais il y avait quelque chose dans son âme qui l'effrayait. Lances, épées, flèches et haches. Il les comprenait, il savait les utiliser. Mais pas la magie, des forces invisibles qui ne peuvent être touchées mais ressenties profondément dans ses os.

«Nous arriverons juste à temps pour leur fête du Nouvel An. Le printemps, c'est quand leurs jours recommencent, ils se réveillent en ramenant leur terre à la vie, en brûlant du bois avec une danse de sueur et de sang." Il tourna la tête des feuilles éclairées par le clair de lune alors qu'il sentait sa main sur son bras. Elle regardait le voile.

"Une fois que nous y serons, tu seras présentée comme ma femme." dit-il d'une voix basse et profonde en la regardant. "Ne t'éloigne pas de moi et garde-le avec toi tout le temps."
Il arracha le sceau brodé sur la laine du cuir qu'il portait et le plaça entre ses mains. "C'est le sceau de ma maison ..." il sourit "Ta maison .."

Le soleil a lentement commencé à s’élever dans les cieux pour remplacer sa soeur. Au loin, sur la colline, de la fumée pouvait être vue. Des lignes noires denses comme des nuages descendirent et formèrent une échelle au-dessus de la terre. La fête commença déjà et Markus baissa la tête pour la regarder encore une fois avant de la laisser se rendormir. "Mon rêve, aujourd'hui tu dors, demain on danse avec le feu." Dit-il Et je brûlerai en lui comme mon âme brûle pour toi.

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