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L'été de l'an III avait été un moment important pour Grogoire et le peuple Liber. Après plusieurs années dans le Sud d'Okord, un modeste parti d'ambitieux colonisateurs décida de s'implanter dans le Nord et ainsi se rapprocher de nos frères et sœurs d'arme du Hall.
Le comte Sirex avait découvert un endroit propice à l'installation de ces quelques familles en sa belle région d'Orbitèle. Point rebutés par l'ampleur de leur tâche ces vaillants travailleurs purent rapidement contempler leur nouvelle cité. C'est avec fierté qu'ils voyaient la belle Vapaa Kaupunki s'étendre, se peupler, et commencer à rayonner.
Une invitation à venir les visiter fût envoyée au seigneur lige de ces terres, le vicomte Grogoire. Satisfait de l'énergie déployée, de l'avancement des projets, et de la belle ambiance qui régnait dans cette jeune, mais déjà fière, cité, il en profita pour découvrir et explorer cette région inconnue.
Étendant le périmètre de ses pérégrinations, il rencontra enfin des signes de la présence d'un puissant voisin. Du haut d'une colline se déployait un panorama saisissant après ces quelques jours dans la vierge campagne. Devant lui s'étendait une impressionnante agglomération, un tel rassemblement de constructions ne pouvait qu'être le signe d'une population nombreuse et industrieuse, d'un protecteur puissant et respecté, qu'il serait intéressant de rencontrer pour lier de profitables relations de bon voisinage.
C'est donc accompagné des quelques hommes de sa garde, guerriers, amis, confidents, qu'il s'avança vers la plus haute porte, la plus impressionnante entrée.
Au fur et à mesure de l'approche, quelques détails se révélèrent troublants. Le chemin de ronde n'était parcouru que par de rares patrouilles. Les murailles, si impressionnantes de loin, semblaient manquer cruellement d'entretien. Et comble des combles, le pont-levis était abaissé, sans garde aucune.
Personne ne paru s'émouvoir de l'entrée d'une troupe d'hommes en armes. La maigre population vaquait à ses occupations sans s'intéresser le moins du monde à ces étrangers. Il était saisissant de constater comme la glorieuse cité, promesse de prospérité, se révélait à l'étude une jolie coquille, jolie mais bien vide, et presque miséreuse.
La déambulation pénible, dans ces sombres ruelles aux pavés disjoints, révélait des visages hâves et graves, un laisser-aller prégnant, tant chez les êtres vivants que dans les constructions. Finalement un rayon de soleil frappa le visage de visiteurs de plus en plus interloqués. La place centrale baignait dans le franc soleil de cette fin d'après-midi.
C'était quelque chose ! Même ternie par cette ambiance de déliquescence, cette place dégageait une impression de puissance et de richesse. Quel spectacle cela devait-il être aux temps dorés et triomphants qui avait conduit à cette opulence !
L'imposant bâtiment dont la riche façade dominait la place ne pouvait qu'être officiel. Grogoire quitta le petit équipage, uniquement accompagné de son fidèle Birüt, respectable et respecté compagnon d'arme, pour gravir les quelques degrés qui menaient à un portail de bois finement ouvragé. Après s'être manifestés, et devant l'absence de réponse, Birüt poussa le vantail. Qui ne céda qu'a contre cœur et avec un inquiétant grincement. L'intérieur se révéla à l'aune du reste de la ville, décrépit, poussiéreux mais vestige d'un glorieux passé.
Et surtout les quelques portes entrouvertes laissaient voir des monceaux d'or ! Comment une telle cité pouvait-elle regorger de tant de richesse ? Et par quel miracle personne n'avait pris la peine de s'intéresser à cet or ?
Une rapide inspection démontra deux choses. La quantité d'or entreposée dépassait l'ensemble des richesses de tout le peuple Liber. Et pas âme qui vive.
Dernière modification par grogoire (2018-03-24 11:18:45)
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Déconcertés par ce spectacle, et il faut l'avouer légèrement oppressés, Grogoire et Birüt regagnèrent l'extérieur avec soulagement. Le vicomte avisa alors un quidam tirant une charrette à bras, ce devait être un artisan cordier, ou un marchand, vu la nature du chargement.
Salutations citoyen,
J'arrive tout juste en ville, et dans la région, et je m'inquiète pour vous. Que se passe-t-il par ici ? Où est votre seigneur ? vous a-t-il abandonné ?
Après quelques instants passés à observer celui qui l’interpellait ainsi, un guerrier vu son attirail et la troupe derrière lui, et un étranger entendu son accent.
Messire, notre seigneur, le vicomte Merlun nous a pas abandonné, mais il a eu des moments pas faciles. L'est donc rentré chez lui à Avalon. Veut voir personne depuis. Mais nous on continue not'vie comme avant.
Grands mercis mon brave, bonne fin de journée à vous.
Voilà qui était préoccupant. Un seigneur mélancolique. Une population livrée à elle-même. Des murs sans entretien. Une montagne d'or sans surveillance...
Et la visite des cités voisines confirma cette constatation. Et amplifia le trouble du vicomte.
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Un autre problème l'accapara à son retour. D'inquiétants personnage avaient été aperçus battant la ville et la campagne. L'interrogatoire ne révéla pas grand chose, si ce n'est que tous tenaient le même discours : des marchand venus de l'Est en quête de bonnes affaires. Jusqu'à ce qu'on découvre chez l'un d'entre eux, gravé sur l'avers d'un médaillon un symbole révélateur.
La fouille minutieuse entreprise alors révéla d'autre objets marqués de ce signe infamant : une bourse au marquage presque effacé, une poignée de dague ouvragée... le plus déroutant fut une empreinte au fer rouge sur le flanc d'un de ces hommes, même sous la crasse on reconnaissait le symbole.
Le caducée de Podeszwa !
Alors que la région était réputée pour être épargnée par cette plaie !
Les mesures de surveillance à prendre furent prises immédiatement mais toute l'attention de Grogoire fut mobilisée.
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Ce n'est que tard qu'il pu regagner ses appartements, modestes mais confortables, de Vapaa Kaupunki. Les questions continuaient à agiter son esprit. Afin d'apaiser son trouble, et obtenir quelques réponses, décision fut prise d'envoyer un messager auprès du vicomte Merlun. En espérant qu'il ne soit pas complètement coupé du monde. La missive rédigée par son secrétaire se voulait amicale, mais la présence de suppôts de Podeswa impliquait une réaction rapide, efficace et concertée.
Messire, vos coffres débordent d'or !
Si par malheur un podeswite s'en apercevait, il rameuterait dans l'instant un troupeau de mangeurs d'or. Et nous ne voulons pas de cette sale engeance dans nos régions.
Aussi je me propose de vous aider à cacher toutes ces richesses.
Bien à vous,
GROgoire.
Le sommeil se fit attendre longtemps. Tant de questions sans réponse.
La promesse d'un avenir paisible s'éloignait petit à petit.
Dernière modification par grogoire (2019-09-11 17:40:53)
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Face à la situation compliquée en ces terres du Nord, Grogoire dut retarder son retour vers le doux climat du Sud.
La chasse aux podeswites se révéla bien peu divertissante, et la question de l'or de Merlun revint au premier plan. En l'absence d'une quelconque réponse, décision fut prise de se rendre sur place et constater en personne ce qu'il en était. Les visites successives amenèrent un soulagement bienvenu, les coffres avaient été vidés. Rassuré par cette découverte, le vicomte s'enquit d'un éventuel regain d'activité des adorateurs du faux dieu dans le voisinage. Les quelques traces relevées semblaient converger vers une imposante ruine.
Au loin, sur le bord du chemin, un petit groupe de miséreux s'échinait à sortir une charrette branlante d'une profonde ornière. D'un signe de tête le vicomte signifia à ses hommes de venir prêter main forte à ces pauvres paysans, pendant qu'il s'entretenait brièvement avec le vieil homme qui semblait mener le groupe. Bien que misérablement vêtu, crotté de boue, voûte par le poids des ans, il émanait de lui un semblant de fierté, pâle vestige d'une respectabilité évanouie mais pas oubliée.
Bien le bonjour mon brave,
Mes compagnons vont vous sortir de cette panade en un tournemain. Mais pouvez-vous m'en dire plus sur cette ruine un peu plus haut ?
Aaaah m'bon seigneur, s'pas toujours z'été eune ruine. Fort Pélican qu'ça s'pelle. Boug'ment costaud qu'c'était. Eul p'ti bijou d'not' comtesse Pétunia. Mais s'pu qu'eusse qu'c'était. Comme nous m'seigneur, l'avions pas t'jours été loqu'teux v'savez. Mais c'te chienne eud'vie l'a pas 'té tend' vec nous v'voyez...
Le vieillard n'avait pas l'air de vouloir s'arrêter, et le langage qu'il tenait n'était que difficilement compréhensible. Patois local ? rude accent du terroir ? difficultés à articuler avec quelques moignons de dents ? Le vicomte préféra l'interrompre en lui lançant quelques piécettes
Pour vous et votre famille vieil homme. Et tâchez dorénavant d'éviter les pièges du chemin, les roues de votre char n'y résisteraient peut-être pas une nouvelle fois.
La forteresse était bien en ruine, mais les outrages du temps restaient discrets, la végétation n'avait pas encore envahi les lieux, les boiseries restaient solides. Mais partout mort et désolation. Pas de corps, mais des reste calcinés, des taches rougies, dans la pierre et sur les quelques tentures restantes, le mobilier réduit à du petit bois, les portes fracassées. L'affrontement avait été sévère, mais il était récent.
Un improbable spectacle attendait ces hommes au fond de ce qui avait été un palais et une place forte. Au delà de l'imagination, pourtant fertile, du vicomte et de ses hommes.
Un trésor.
Un trésor immense.
Un trésor mirobolant.
Un trésor incommensurable.
Dernière modification par grogoire (2019-09-11 17:42:14)
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Encore tout chamboulés par la présence de ce trésor, Grogoire et ses hommes retrouvèrent leurs chevaux, presque aussi excités qu'eux et les deux sentinelles sur le qui-vive. Une présence se faisait sentir mais pas voir.
La battue rapidement organisée, trois homme furent découverts. Et aucun doute à avoir, ils étaient des fanatiques de Podeswa. Les cris poussés pendant leur longue agonie sonnèrent comme une douce mélodie aux oreilles de ces zélés adeptes du Grand Ygnnir. Les restes disposés bien en évidence pour décourager leurs coreligionnaires, il fallait maintenant se hâter de rentrer au bercail et trouver une solution à ce tas d'or, dont la présence appâtait les podeswites, tels des vautours en présence de charognes.
La longue chevauchée épuisa les corps, la présence de tout cet or échauffa les esprits. Après un bref concile réuni dans la salle d'armes de Vapaa Kaupunki, décision fut prise d'envoyer quelques informateurs se renseigner sur de possibles mouvement de troupes en terres araldiennes. Podeswa non plus n'était pas le bien venu dans le puissant duché, et peut-être que cet appât était justement destiné à faire converger les suppôts de l'or, avant de leur tomber dessus et régler le problème une bonne fois pour toute. Une tactique bien téméraire mais tout à fait possible.
Des missives partirent également chez les seigneurs du Hall présents dans la région. Ce problème les concernait aussi. Les nouvelles d'Arald clarifièrent la situation, aucun mouvement d'armées, ce n'était pas un piège. Les Araldiens ne sont pas aussi retors que la légende le raconte.
Le transport d'une telle quantité d'or était une première pour Grogoire et ses compagnons du Hall, les vicomtes Madère et Axlou accompagnés de la douce mais ferme vicomtesse Camalyenne. Même en réquisitionnant les chars, charrettes, chariots, les bêtes de somme et animaux de bâts, jusqu'aux carrosses des nobles et des bourgeois, cela nécessiterait plusieurs voyages !
La logistique fut longue à mettre en place, mais le premier jour de l'automne, tout était fin prêt. Et il était temps, les patrouilles chargées de veiller sur la forteresse de dame Pétunia rapportaient la présence toujours plus nombreuse de podeswites aux abords de Fort Pélican. La routine des suplices en arrivait à diluer le plaisir de pourfendre ces animaux.
Un flot d'attelage s'élança sur la route pour converger vers le trésor. Un spectacle saisissant que ces chariots hétéroclites serpentant jusqu'à l'horizon. Les regards se tournaient régulièrement vers le ciel pour surveiller le temps, la pluie aurait été un désastre transformant les chemins en inextricables bourbiers.
Cette opération colossale enfin achevée, il était temps de faire les comptes. Le long labeur de l'intendant du vicomte fut égayé par la joie d’étrenner un abaque exotique, bijou technologique de la République de Valésianne, tant l'importance des montants complexifiait les calculs.
Le maître des chiffres annonça alors le résultat.
Messire, après avoir recompté et revérifié, j'ai la joie de vous annoncer que vous êtes millionnaire, plusieurs fois millionnaire ! Et je gage que vos amis du Hall le sont aussi.
L'intendant s'attendait à une réaction. Sûrement pas un cri d’allégresse, ni même une explosion de joie, mais peut-être un sourire de satisfaction.
Rien pas la moindre expression, si fugitive soit-elle. Et pour cause.
Pardonnez-moi, mais non instruction avait plus trait au maniement des armes et des hommes qu'à celui des chiffres. Ça fait combien ?
Expliquer au vicomte la démesure des ces chiffres nécessita quelques minutes, il fallu de nombreuses secondes pour qu'il réalise ce que cela signifiait mais un franc sourire progressa sur son visage en un instant.
On dirait que je vais devoir payer ma tournée de calvok.
Le plaisir de partager ces instants avec ses hommes se révéla un fortifiant bienvenu. Cette journée harassante ne connaissait pas là son terme. Les seigneurs d'Arald devaient être avertis.
Le secrétaire rédigea un message pour le vicomte Merlun alors que son seigneur peinait avec les mots, la fatigue et la tension se faisant sentir, ainsi que les quelques choppes partagées.
Mon cher ami,
C'est avec plaisir que j'ai constaté avec quelle diligence vous aviez nettoyé vos fiefs pour éviter qu'un suppôt du dieu prétendument unique ne soit pris de frénésie à la vue de ces richesses.J'émettrais cependant quelques réserves quant au lieu choisi pour entreposer votre or.
Voyez-vous, lors d'une ballade vivifiante en nos belles contrées du Nord, je suis passé à proximité de la forteresse de Dame Pétunia. J'ai alors surpris quelques marauds qui furetaient par là sans grande discrétion.
Ils se sont avérés être d'ignobles podeszwites attirés par l'odeur de l'or. Comme ces animaux ont un odorat développé ! J'ai donc pris sur moi d'organiser une petite cérémonie purificatrice en l'honneur du puissant Ygnnir. Mais après les avoir proprement démembré (ce qui n'a pas été si propre d'ailleurs), il a fallu songer à déménager les monceaux d'or qui s'entassaient sans protection aucune.Ce ne fut pas tâche aisée je vous l'avoue, mais nous sommes parvenu à un résultat des plus satisfaisants en bien peu de temps.
Bien à vous,
GROgoire
Le sommeil le gagna rapidement mais il restait une missive à envoyer à la comtesse Pétunia.
Très chère comtesse,
Il y a quelques jours de cela je faisais remarquer à votre vassal, le seigneur Merlun, que l'étalage de ses innombrables richesses, en des lieux assez peu efficacement défendus, était une tentation bien trop forte pour tous les podeszwites de la région.Et personne ne souhaite voir cette engeance proliférer en nos régions !
Alors que je me proposais généreusement de l'aider dans la dure tâche de soustraire à la vue de ces hérétiques tout cet or, il s'est échiné à tout rassembler en vos murs de Fort Pélican. Malheureusement vous conviendrez que la protection de cette fortune laissait grandement à désirer.
J'ai donc pris sur moi de demander de l'aide à quelques compagnons pour régler dans les plus brefs délais cette épineuse situation.
Vous constaterez avec quelle efficacité cette délicate mission fut menée à bien.
Nous n'attendons pas de louanges ou de remerciements de votre part, ce fut une œuvre d'entraide et d'assistance, comme de coutume dans tout bon voisinage.Si vous ressentiez à nouveau le besoin de menus services, n'hésitez pas à me solliciter.
Avec tout mon respect,
GROgoire
La satisfaction du travail bien fait et l'accumulation des efforts eurent raison du vicomte qui s'écroula pour profiter d'un sommeil plus que bienvenu.
Dernière modification par grogoire (2019-09-11 17:47:20)
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