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#1 2015-02-12 01:15:46

Enguerrand

Avant la bataille

Le marquis Enguerrand est en train d’harnacher son destrier.
Il peut paraître étrange qu’un seigneur de son rang fasse le travail d’un palefrenier. D’habitude il laisse à ses écuyers le soin de seller son cheval. Mais pas ce matin. L’aurore qui fait pâlir l’horizon annonce une journée mémorable. Le campement de la reine Yselda est à moins d’une lieue. Des éclaireurs excités et poussiéreux sont revenus faire leur rapport.  La horde des barbares est en route. Dans moins d’une heure, les deux armées se feront face.
Ce matin il a besoin de se libérer l’esprit. Il ne veut pas penser à ce qui les attend et quoi de mieux que de serrer sa sous-ventrière, de régler ses étriers et faire ces mille petits gestes anodins et pourtant si importants.
Ce matin il ne veut pas confier sa vie à des mains tremblantes ou maladroites
Un chevalier désarçonné est un chevalier mort.
A ses côtés deux jeunes chevaliers font de même. A voir leur fronts boutonneux et le fin duvet qui peine à recouvrir leur lèvre supérieure, ils ne doivent pas avoir plus de seize ans.
Le marquis a amené un millier d’entre eux avec lui, il ne les connaît pas tous.
Quel est ton nom ?  Demande-t-il au premier
Je suis Tiburce de Malvoisin, Monseigneur ! Répond le jeune. Fils de Pylade de Malvoisin et de Bertrade de Monfort.
Je connais ton père!Il n’est pas avec toi ?
Il est mort Messire ! A la bataille des Bories. Mais voici mon frère Oreste !

Il désigne l’autre chevalier. Ce dernier salue son marquis avec un mélange de déférence et de fierté chevaleresque.
Nous allons venger notre père et tuer cette sale catin d’Yselda! Précise-t-il.
Vous êtes bien jeunes, l’un comme l’autre ! S’inquiète le marquis. Combien de batailles à votre actif?
Ce sera la première,Monseigneur, mais nous sommes prêts, nous avons été armés chevalier il y a une semaine de cela. Ces barbares ne nous font pas peur.

Le marquis leur sourit. Faites bien attention à serrer ces brides-là ! Dit-il en empoignant le dosseret d’une des selles et en la secouant pour vérifier le jeu des sangles. Un Chevalier désarçonné….
…Est un chevalier mort !
Reprennent en chœur les deux frères.
Le marquis sourit à nouveau. Il sait que derrière ces masques rieurs et cette vantardise se cache une peur insidieuse qui vous noue les tripes et vous donne envie de vomir.
Un cavalier arrive en trombe et s’arrête devant le gonfanon du marquis.
Messire Enguerrand !   Dit-il sans démonter, son cheval piaffant sous lui.   Le duc Antoine vous fait dire qu’il vous veut à sa droite avec tous vos chevaliers et vous espère avant le lever du soleil !
Dis-lui que j’y serai !
Répond sobrement le marquis.
Alors que le cavalier repart dans un nuage de poussière, Enguerrand, aidé cette fois-ci de son écuyer, monte sur son destrier. Il empoigne la lance qu’on lui tend et au bout de laquelle flotte ses couleurs et, se tournant vers ses chevaliers, leur crie :
Derrière moi en colonne par quatre ! Pour Okord ! Pour le Roi ! Pour la Mortquitue !
Morquitue ! Mortquitue ! Mortquitue !
Scandent les chevaliers qui montent un à un et rejoignent la colonne qui se forme petit à petit.
S’adressant alors aux frères, le marquis leur dit:
Vous deux, vous me suivez ! Quoi qu'il arrive vous restez au botte-à-botte, c'est compris?
C'est un honneur, Messire!
Répond Tiburce.
C'est surtout un ordre! Insiste le marquis.

Dernière modification par Enguerrand (2015-02-12 16:10:15)

#2 2015-02-13 15:57:06

Enguerrand

Re : Avant la bataille

Cela fait maintenant plus d’une heure que l’ost royal a pris position.
Le roi Wanderer a choisi les hauteurs d’une colline peu boisée qui domine la plaine d’où l’ennemi est censer venir. Les archers, massés sur dix rangs, occupent la pente qu’ils couvrent entièrement. Ils sont protégés derrière un mur de piquiers destiné à briser la charge de l’ennemie. A gauche la cavalerie légère s’étale jusqu’à la forêt qui en masque une bonne partie.
La fine fleur de la chevalerie d’Okord constitue le flanc droit. C’est le marquis Galzbar qui en a le commandement.  Il a demandé à Enguerrand de protéger le flanc de l’armée. C’est la raison pour laquelle les chevaliers d’Helgor, du Rhelm et de Quintras tiennent le fait de la colline, légèrement en retrait.
De là où ils sont, le premier rang a une vue imprenable sur l’immense déploiement de force.
Je n’imaginais pas qu’il y eût autant de monde à Okord. Fait remarquer Tiburce.
Les deux frères tendent le cou pour voir le roi. Ils sont trop loin mais peuvent apercevoir le gonfanon noir frappée du lion blanc. Le chevalier vêtu d’une armure d’or, qui se tient dessous, hiératique, telle la statue du commandeur, sur un destrier caparaçonné d’or lui aussi, ne peut être que Wanderer l’ancien.
Il est entouré des princes et des ducs et les oriflammes aux fleurs de lys côtoient les têtes de coq et les croix Araldiennes.
Nous n’allons faire qu’une bouchée de ces barbares ! Claironne Tiburce, émerveillé par l’impressionnant déploiement de bannières, de lances, d’armures brillant au soleil et de tuniques aux couleurs chamarrées. Un silence relatif à succédé au bruyant déplacement des soldats rejoignant leur position, mais la remarque du jeune chevalier s’est noyée dans le bourdonnement sourd des conversations.
Elle est, malgré tout, parvenue aux oreilles du marquis.
Les cavaliers barbares sont montés sur de petits chevaux très vifs. Dit-il à l'attention des deux godelureaux. Ils sont légers et très mobiles. Leur tactique consiste à disperser les chevaliers pour s’infiltrer dans leurs rangs et les frapper dans les flancs. Ce sont des cavaliers hors pair qui ont un sens inné de l’esquive. Ils s’attaquent aux trumeaux des chevaux de façon à ce que ces derniers s’écroulent sous le poids de nos armures.
Restez groupés, ne cherchez pas à les poursuivre s’ils retraitent et battez-vous à l’épée plutôt qu’avec la lance. C’est compris ?
-    Oui Messire !
Répondent en chœur les deux frères Malvoisin.
La remarque du marquis a refroidi leur ardeur. Ils se regardent gravement comme s’ils venaient de comprendre qu’ils n’allaient pas à une partie champêtre.
Soudain, le murmure s’éteint et le silence se fait dans les rangs.
Une ligne noire est apparue qui souligne l’horizon. Une ligne qui n’a ni début ni fin et qui s’épaissit.
C'est l'armée des barbares qui avance vers eux!

Dernière modification par Enguerrand (2015-02-13 16:57:55)

#3 2015-02-14 15:47:37

Enguerrand

Re : Avant la bataille

Les récits épiques et les gestes des grands chevaliers emplissent la tête des jeunes.
Tout ce qu’ils savent de la guerre, ils l’ont imaginé d’après les légendes héroïques que les vieux racontent le soir à la veillée quand il pleut au-dehors et que tous se réfugient autour de l’immense cheminée, unique source de lumière et de chaleur du glacial château paternel.
Ils n’imaginent  que la victoire, la gloire et les honneurs. Ils n’ont aucun doute sur leur capacité de vaincre des dragons ou d’abattre dix ennemis d’un seul coup d’épée. C’est le propre de la jeunesse de se croire immortel.
Mais les rêves ne tiennent pas longtemps face à la dure réalité. Ils s’estompent aussi rapidement que la rosée du matin aux premiers rayons du soleil.
Tiburce et Oreste en font l’amère expérience.
L’horizon s’est noirci. Comme une marée couleur de deuil, l’armée ennemie avance sur la plaine. Le vert de la pairie disparaît peu à peu sous les pas des chevaux et rien ne semble tarir ce flot mortel.
Si l’ost royal est imposant, l’armée d’Yselda l’est encore plus car il semble que le déferlement de ces cavaliers n’a pas de fin.
Les deux jeunes ont pâli.  La crainte sourde qu’ils ressentaient depuis le matin sans se l’avouer est en train de se matérialiser sous leurs yeux. Ils prennent conscience qu’ils sont peut-être en train de vivre leur dernier jour sur cette terre. Leurs mains deviennent moites, de grosses gouttes de sueur viennent perler à leurs fronts et leurs estomacs font des nœuds.
Le marquis Enguerrand n’est pas moins impressionné. Il éprouve les mêmes symptômes que ses jeunes chevaliers mais lui sait, par expérience, que ce malaise disparaitra dès le début du combat.
C’est l’heure de recommander son âme aux dieux que l’on vénère. Eux seuls maintenant décideront de qui mourra et qui sauvera sa vie. C’est l’heure de se laisser envahir par la rage de vaincre qui donne l’énergie des titans et fait oublier tout le reste. C’est l’heure de penser une dernière fois à ses parents, sa femme ou ses enfants, car plus rien n’aura d’importance quand les trompettes sonneront.
Plus rien que la bataille.
Le monde disparaîtra et il n’y aura plus qu’elle.  L’impitoyable affamée exigera son lot de cadavres et le festin qu’elle s’apprête à faire durera toute la journée.
Chevaliers de la Mortquitue ! Hurle le marquis Enguerrand qui a senti quelques frémissements dans sa troupe. Gardez vos positions ! Attendez les ordres !

Dernière modification par Enguerrand (2015-02-14 17:07:07)

#4 2015-02-14 17:03:22

Le Rige

Re : Avant la bataille

Je m'adresse à Vous, Ô Dieux, car Vous donnez
Ce que l'on ne peut obtenir que de soi

Je ne Vous demande pas le repos ni la tranquillité
De l'âme, ou du corps

Je ne vous demande pas la richesse , le succès, ni même la santé
Tout ça, Ô Dieux, on vous le demande tellement

Que Vous ne devez plus en avoir.

Donnez-moi, Mes Dieux, ce qui Vous reste.
Donnez-moi ce que l'on Vous refuse.
Donnez-moi ce dont les autres ne veulent pas.

Donnez moi l'inquiétude et l'insécurité
Donnez moi la tourmente et la bagarre

Et que Vous me le donniez, Mes Dieux, définitivement.
Que je sois sûr de les avoir toujours,

Car je n'aurai pas toujours le courage de Vous les demander.




Mon Roy, les Preux d'Hespérides sont en chemin.



Votre obligé, Le Rige,
Chevalier d'Hespérides et SimGanGrad,
Baron d'Ozikoville, Olympe, Makedonia, Troie, Titania et Tristegarde
Vicomte de Fort Fort Lointain,
Seigneur de La Marche des Vents d'Est
Homme Lige de Son Altesse le Prince Godefroy.

Dernière modification par Le Rige (2015-02-14 20:00:48)

#5 2015-02-17 12:21:42

jeyangel

Re : Avant la bataille

Sur toute la plaine, des soldats.
Un immense damier de couleurs éparses.
Ici la fleur de lys, là le lion d'argent, là-bas, une bannière qu'il ne connaissait même pas.

Oui, Okord entier était là, sur cette vaste étendue.
Le Vicomte se dit que la seule raison pouvant, enfin, réunir Okord sous une seule bannière, c'était toujours la guerre.

Oui, mais cette fois, il en était.

Au milieu des couleurs chatoyantes, se tenait donc Dracangia, sombre et mystérieuse.
Tout autour, des tentes grises. Et autour de ces tentes, des armures noires.
Celles des Neir'gar et des Draks.

Ici, se trouvait l'enclos des chevaux, bâtit à la hâte, mais solidement conçu par les cavaliers. Dans des tentes proches, les chevaliers vérifiaient une dernière fois les attaches de leurs selles et armures.
Là, les Neir'a'than avaient choisit un bosquet d'arbres comme malheureuses victimes de leurs tirs d'entrainement finaux.
Et tout à l'arrière du camp drakan, deux grandes tentes.
Celle de droite était celle du Vicomte, également centre de commandement.
L'autre, de forme étrange, laissait échapper des volutes de fumées que certaines troupes alliées auraient juré voir "bouger".

Jeyangel se tenait devant l'autel des Protecteurs installé dans sa tente. Il baissa la tête et écarta les bars paumes vers le ciel; Puis commença son rituel:

"Je suis le Dragon,
sa puissance est mienne,
Je suis le Céleste,
mon bras impose sa justice
Je suis les ténèbres,
elles m'enveloppent et me portent.

Sang et acier,
que la lame des valeureux trouve toujours sa cible
Croc et écaille
de mon épée je taille, de mon esprit anéantie."

Il releva alors son capuchon, et les "seigneur noir" sortit de sa tente.
Il leva le bras au ciel et en jaillit un trait de lumière "obscure" qui éclata dans les air en une forme ailée.

A ce signal, Neir'gar, Neir'a'than, et mages se rassemblèrent, tandis que les Draks, rapides, montaient déjà leurs chevaux.
En moins de 5 minutes, l'armée drakan se tenait en rang, face à leur seigneur, tandis que les chevaliers descendaient les allées latérales afin de rejoindre les rangs.

Jeyangel ne s'attarda pas à un long discours. Il connaissait la valeur des mots directs.

"DRACAN! Aujourd'hui, nous nous battons pour le royaume! Oubliez les seigneurs, oubliez même le roi!
Ce que nous protégeons, c'est notre terre!

Je serais honnête: beaucoup d'entre vous mourrons ce soir! Si vous vous battez, vous le faites en connaissance de cause!
Mais mieux vaut mourir en défendant ses valeurs, que vivre longtemps en subissant celles des autres.

DRACAN, Pour Dracangia!!!"

"DRACANGIA!!!"

"Au nom d'Arald et du Roi!!!"

"A ARALD, AU ROI!!!"

"POUR OKORD!!!"

"POUR OKORD!!!"

"DRACAN, SANG ET ACIER!!!"

"...CROC ET ECAILLES!!!"

Les Neir'gar et les Draks légers tirèrent alors l'épée au clair et frappèrent leurs boucliers en rythme, tandis que l'armée se mit en marche vers les autres armées d'Okord.
Bientôt, les lanciers accompagnèrent les épéistes de leurs lances, frappant le sol au gré de leur avancée.
Puis chaque Dracan accompagna le rythme d'un grave son guttural.
L'ensemble donnait un tableau lugubre mais solennel, d'une armée pour laquelle n'existait plus rien entre elle et l'ennemi.

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