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#1 2017-08-21 02:13:32

Viserys Hallgeirr

La chute

L’ascension avait été très rapide. Peu après avoir vaincu Loth en duel pour prendre la tête de la maison Hallgeirr, Viserys était devenu Duc et avait prouvé sa valeur au combat en défaisant le Marquis Foxhound, mentor de son père, lors des Fleurs de Samarie. Malgré la superbe performance d’Elverid durant ce tournoi, il avait pris les commandes de la confrérie du Cygne avec autorité, mettant des réformes en place pour trancher avec ses prédécesseurs. Son tempérament dominateur avait toutefois fait son lot de victime, puisque les relations avec la dame des Neiges Eternelles, Mizuki, représentante majeure du Cygne au nord du royaume, s’étaient rapidement dégradées. Leur collaboration semblait définitivement entamée.

C’est pourtant elle qui lui fournit le prétexte de la guerre contre les Léopards, en capturant la vicomtesse Lucill. Peu après, quelques Léopards réagirent en attaquant ses fiefs, et Viserys imposa sa vision des choses au Cygne, malgré les quelques voix mécontentes qui s’étaient élevées pour protester contre ses velléités belliqueuses. La guerre était déclarée entre le Cygne et les Léopards.

Ces derniers étaient arrivés à l’ambassade avec l’intention de calmer les ardeurs des seigneurs du Sudord, mais Viserys leur avait rapidement fait comprendre que c’était peine perdue. C’était l’occasion rêvée pour lui de montrer au royaume entier quel grand stratège il était, et à quel point sa grandeur allait illuminer le royaume pour les décennies à venir.
C’est dans le but d’expliquer cette stratégie à ses confrères qu’il les avait réunis au palais de la Nouvelle-Hrothgar. Les effectifs de la garde du palais avaient été triplés depuis sa prise de pouvoir, et sa décoration complètement modifiée. Des travaux extrêmement coûteux avaient été effectués en un temps record pour répondre aux besoins impérieux du Duc, dans le but d’impressionner tout noble lui rendant visite. Lorsque les seigneurs du Cygne entrèrent dans la salle du trône, certains n’en croyaient pas leurs yeux.

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Une fois qu’ils furent tous installés à la table centrale, quatre serviteurs amenèrent une immense carte du royaume brodée sur de la soie dorée avec une remarquable précision. Viserys, qui était jusqu’alors toujours assis sur son trône, leur indiqua de la poser en bout de table. Il se leva, et marcha d’un pas décidé en sa direction, tandis que la plupart des seigneurs le regardaient, abasourdis.

La convivialité habituelle des réunions du Cygne avait brutalement pris un coup après la disparition de Carmen et l’avènement de Viserys, car ce dernier n’hésitait pas à houspiller ses vassaux lorsqu’ils n’avaient pas un comportement adéquat à ses yeux. Pourtant, malgré tous ses défauts, ils savaient qu’il était de la trempe des vainqueurs, qu’il respecterait toujours les valeurs du Cygne, et que ses ambitions royales lui étaient accessibles. C’est uniquement ces trois points qui lui permettaient de garder la mainmise sur la confrérie, ainsi que l’absence d’opposant crédible face à lui.

Sans même leur accorder un regard, il montra la carte et prit la parole.

« Bon, vous savez pourquoi nous sommes ici. Les Léopards sont actuellement au nord du royaume, proche des Neiges Eternelles. La destruction d’une de leurs places fortes du Sud permettrait sans doute de les forcer à rapatrier leurs armées, mais cela reviendrait à leur donner la main. Ils s’attendent sans doute à ce que l’on évite de prendre des risques, peut être même à ce que l’on reste au sud du Canal. Nous irons donc sur leurs terres, pour les prendre à la gorge. »

Il leva les yeux pour la première fois vers eux. Son visage trahissait toute sa détermination, mais également son arrogance : il les considérait davantage comme un moyen d’arriver à son objectif que comme des frères d’armes.

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« Elverid a déjà prouvé qu’elle était capable de mener ses troupes à la victoire sur une bataille à l’issue incertaine. De mon côté, j’ai vaincu en duel un des plus grands guerriers du sud : ce n’est pas quelques nordistes qui nous empêcheront de les vaincre. Ces Araldiens ne sont rien face à nous ! »

Les membres du Cygne échangèrent un regard interloqué. Vince intervint :

« Léopards, vous voulez dire…
-Euh, oui, répondit Viserys, le regard un peu dans le vague. Plissant les yeux pour mieux se concentrer, il enchaîna : Je disais donc, ces… ces… »

Il posa une main sur son front, perdant le fil de ses paroles.

« Ces mercena…. Non… »

Un filet de sang commença à couler de son nez. Elverid était déjà en train de se lever, comprenant que quelque chose de grave était en train de se passer.

« Je… je… »

Viserys Hallgeirr s’effondra sur le sol de marbre de sa salle du trône, inconscient.

Dernière modification par Andior (2017-08-21 02:17:43)

#2 2017-08-22 00:55:32

Viserys Hallgeirr

Re : La chute

Il se réveilla quelques heures plus tard, une lumière éclatante aveuglant ses yeux. Il était allongé sur un lit confortable, une poche de glace posée sur l’endroit où sa tête avait brutalement heurté le sol, lors de sa chute. Elverid recula la lanterne qu’elle avait approchée de Viserys, un grand sourire sur le visage.

« Tu es déjà réveillé ! Bon sang, tu nous as fait une de ces peurs ! »

Il tenta de se redresser, mais elle posa une main sur son torse pour l’en empêcher.

« Je ne sais pas encore précisément ce qui t’est arrivé, mais il te faut du repos. Je vais chercher Zyakan, je reviens. Surtout, ne bouge pas !
- Hmm. »

Il profita de ce moment pour vérifier qu’il pouvait bouger tous ses membres, avec succès. Il poussa un soupir de soulagement, puis se redressa. Elverid revint avec Zyakan sur ses talons tandis qu’il se frottait les yeux.

« Bordel, gamin, c’est pas le moment de flancher ! Maintenant que tu nous as foutus dedans, on a une guerre à gagner !
- Du calme Zyakan, si tu es venu ici pour râler, tu peux repartir ! Il a besoin de repos, répondit Elverid.
- Zyakan, arrêter de râler ? Ca relèverait du miracle. »

Zyakan ouvrit la bouche pour protester, puis se ravisa devant le regard réprobateur d’Elverid. Viserys reprit :

« Elverid, qu’est-ce qu’il m’est arrivé ?
- Je ne sais pas encore. D'après mes premiers examens, tu es au bord de l'épuisement, mais je préfère vérifier que ce malaise ne révèle pas quelque chose de plus sérieux. En tout cas, le fait que tu reprennes conscience aussi vite est très encourageant.
- Eh bien, nous verrons ça plus tard. Les autres sont encore là ? On reprend la réunion.
- Non, le coupa Elverid.
- Pardon ?
- Ce serait très imprudent, dans ton état. Nous ne savons pas exactement ce que tu as et tu pourrais faire une rechute à tout moment. Tu peux te rallonger ? Il faut que je te passe cet onguent sur le crâne.
- Je n’ai pas mal, répondit Viserys en enlevant la poche de glace de sa tête. Allez, rappelez-les !
- Elverid a raison, intervint Zyakan. Nous avons déjà de la chance que ça ne te soit pas arrivé en pleine bataille.

Viserys réfléchit quelques instants, puis leva des yeux méfiants vers eux, devenant soudain agressif.

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« C’est ce que vous vouliez depuis le début, n’est-ce pas ?
- De quoi parles-tu ?
- Vous m’avez empoisonné. Comment n’ai-je pas pu m’en rendre compte plus tôt ?… Depuis le début, vous essayez de me mettre des bâtons dans les roues. Vous voulez éviter la guerre, et Loth vous arrangeait bien pour ça, n’est-ce pas ? Vous n’étiez pas favorables à un conflit contre les Léopards, au début, surtout toi Elverid… Et avec tes connaissances en alchimie, il ne t’est pas difficile de me causer du tort !
- C'est absurde. Zyakan t’a laissé la tête de la confrérie, nous t’avons aidé à mettre en place tes réformes, te suivons dans chaque bataille que tu mènes…
- Tu parles ! Contre Foxhound, je vous ai demandé votre aide, et vous me l’avez refusée ! »

Elverid et Zyakan se regardèrent un instant, interloqués.

« Tu ne nous as rien demandé contre Foxhound, Viserys. Le combat dont tu parles était un duel pour les Fleurs de Samarie, tu ne t'en souviens pas ? Tu étais fier de pouvoir te mesurer seul à lui.
- MENTEURS ! »

Viserys tenta de se lever, mais s’écroula par terre. Il était loin d’être remis de son malaise, même s’il n’en avait pas conscience. Elverid s’approcha pour l’aider, mais il leva le poing vers elle en hurlant :

« NE T'APPROCHE PLUS DE MOI ! TRAITRESSE ! »

La matriarche, surprise, s'arrêta net. Zyakan et elle échangèrent à nouveau un regard chargé d'inquiétude. Ils ne reconnaissaient plus le Viserys qu’ils côtoyaient depuis qu’il était tout jeune. Zyakan se tourna vers l’entrée.

« GARDES ! Aidez Viserys à se remettre sur son lit, mais faites attention, il est très agressif… Elverid, allons parler en privé. »

Dernière modification par Andior (2017-08-22 00:56:37)

#3 2017-08-22 23:13:37

Elverid

Re : La chute

Laissant Viserys sous bonne garde dans la chambre soigneusement fermée, Zyakan entraîna Elverid plus loin dans le couloir pour discuter de la situation discrètement.

« Elverid, tout cela n'est-il vraiment qu'un coup de fatigue ? Ou est-ce plus grave ?
- Probablement, oui... Son état d'épuisement ne suffit pas à expliquer tous ses symptômes, en particulier ses propos incohérents et ses pertes de mémoire.
- Et ses élucubrations au sujet d'un empoisonnement. »

Everid marqua une pause avant de répondre.

« Cette hypothèse n'est peut-être pas si aberrante... Tu as vu les rénovations pharaoniques qu'il a fait réaliser dans le palais...
- Quel est le rapport ?
- Hé bien... il est possible que des matériaux toxiques aient été utilisés pour ces travaux, et qu'il y ait été exposé quand il inspectait les chantiers.
- Tout de même, ça me paraît peu probable.
- Je ne veux rien négliger. Je vais faire venir une équipe d'érudits de mes universités pour étudier la question, et essayer de savoir si des ouvriers sont tombés malades... »

Zyakan eut un mouvement d'impatience et l'interrompit :

« Pour ça, c'est toi l'experte. Mais pour la guerre ? Maintenant qu'elle est déclarée, il va bien falloir mener les combats. Sans lui. Comment est-ce qu'on l'annonce à la Confrérie ?
- On en dit le moins possible sur la gravité de son état. Cela risquerait d'entamer le moral des troupes, sans parler des rumeurs qui pourraient courir sur notre soudain affaiblissement et revenir aux oreilles de nos ennemis. Officiellement, il a seulement besoin de repos.
- Il faut qu'on rassemble tous les deux nos osts au Sudord, le temps qu'il se rétablisse. Et le temps qu'on arrive à déchiffrer ses notes, aussi. Tu connais l'état complet de nos troupes ?
- Celui de mes vassaux, pas plus. Il a tout centralisé.
- Pareil pour la logistique d'approvisionnement, pour l'état des troupes et des défenses ennemies, pour les mouvements adverses... J'y ai jeté un œil, j'ai à peine réussi à comprendre de quoi il s'agissait, à croire qu'il prenait ses notes en code. Dommage qu'il n'ait pas couché son plan de bataille sur papier aussi, ça nous aurait fait gagner du temps. Il faut qu'on récupère ces informations avant de tenter quoi que ce soit.
- Oui. Je vais convoquer mon ost pour qu'on soit prêts à passer à l'action dès que ce sera possible, mais de toute façon, je me vois mal aller guerroyer tout de suite en le laissant dans cet état. Je préfère continuer à le soigner.
- Tu penses vraiment pouvoir lui faire avaler des potions après ce qu'il vient de nous dire ?
- Cela risque d'être assez difficile, en effet. Mais au moins, je pourrai surveiller son état et intervenir s'il s'aggrave. »

#4 2017-08-23 22:53:11

Elverid

Re : La chute

Quelques jours avaient passé depuis que le duc Viserys s'était effondré en plein conseil de guerre. Elverid était restée au chevet de son suzerain à Nouvelle-Hrothgar, ne s'absentant qu'une demi-journée pour aller convoquer son ost au Pic du Hibou. Le jeune chef de guerre semblait s'être apaisé et se remettre lentement, mais restait très faible. Sa guérison s'annonçait longue, beaucoup trop longue au vu des circonstances. Aussi la matriarche, depuis la veille, avait voulu profiter des moments où il dormait sous la surveillance d'un garde pour rencontrer l'intendant du palais et s'assurer qu'il pourrait exercer la régence de la maison Hallgeirr en attendant que son maître se rétablisse.
Jusqu'à présent, elle ne l'avait pas trouvé, et les serviteurs du palais éludaient craintivement ses questions. A présent, elle s'apprêtait à aller chercher les informations là où elle avait le plus de chance d'en trouver : dans la salle d'étude de Viserys. Au moment où elle s'apprêtait à toucher la poignée de la porte, une voix retentit derrière elle.

« Je ne sais pas qui vous êtes, mais si le Duc apprend ça, vous allez passer un sale quart d'heure. Et de toute façon c'est fermé. Il n'y a qu'une seule clé, et le Duc la garde toujours sur lui. »

La matriarche se retourna. Celui qui l'avait interpellée ainsi était un jeune garçon qui devait avoir une quinzaine d'années.

« Je suis Elverid, matriarche du Clan du Hibou. Et toi, jeune homme ?
- Ah... Faites excuse, Duchesse, je ne vous avais pas reconnue... Je m'appelle Arnault, je suis le neveu de l'ancien intendant.
- L'ancien intendant ? Tu vas peut-être pouvoir me dire qui est son successeur et où je peux le trouver, dans ce cas...
- Il n'y en a pas. Le Duc les a tous virés. Sur tous ses fiefs. Il s'occupe de tout lui même, maintenant.
- Il fait tout lui-même ?
- Oui, le Duc contrôle tout. On ne peut pas embaucher une gardeuse d'oies ou acheter un tonneau de pommes sans sa permission écrite. Il y passe toutes ses journées, d'ailleurs, de l'aube jusqu'à tard dans la nuit... Au fait, il est où, maintenant ? A la guerre ? C'est pas qu'il nous manque, hein, on est même tous plutôt contents de pouvoir un peu respirer. On voudrait juste savoir quand il va revenir.
- Bientôt.
- Oh...
- Mais comment faites-vous en son absence ?
- Justement, tout est bloqué. Personne n’a assez de responsabilités pour pouvoir le remplacer au pied levé. C’est pour cela que son absence ne doit pas être trop longue, malgré la guerre…
- Je vois... Bien, tu peux retourner à tes occupations. Et bien sûr, cette conversation n'a jamais eu lieu. »

Les explications du jeune serviteur avaient laissé Elverid perplexe. Ainsi, même des années après le complot dont il avait autrefois été victime, même arrivé au pouvoir, Viserys avait gardé l'habitude de se méfier de tout le monde. En tout cas, la surcharge de travail qu'il s'était imposée expliquait au moins son état d'épuisement.

La matriarche décida de retourner voir Viserys. Il devait bien avoir un homme de confiance qu'il pourrait nommer intendant de ses domaines, au moins provisoirement.
La porte de la chambre était entrouverte. Lorsqu'Elverid la poussa pour entrer, elle trouva le jeune duc debout et équipé de pied en cap comme pour présider une assemblée. Il accueillit sa vassale stupéfaite avec un large sourire.

« Ah, Elverid ! Comme tu peux le voir, tes bons soins ont fait leur effet. Je suis en pleine forme ! »

Viserys s'avança vers la matriarche d’un pas assuré. Elverid jeta un rapide coup d'oeil autour d'elle.

« Si tu cherches le garde que tu avais posté à mon chevet, je lui ai dit qu'il pouvait partir. Je n'ai plus besoin qu'on veille sur moi, maintenant. Et surtout, les affaires vont pouvoir reprendre. Tu peux convoquer à nouveau le conseil de guerre.
- Je pense que c'est un peu prématuré. Hier encore, tu étais cloué au lit, et tu n'as pas mangé grand-chose ces derniers jours. Si tu veux que ton rétablissement soit durable, il va falloir reprendre tes activités progressivement. Et engager quelques assistants, aussi. Personne ne peut gérer toute l'intendance d'une vingtaine de fiefs à la fois sans s'appuyer sur...
- Attends un peu... Comment tu sais ça ? »

Le sourire de Viserys s'effaça brusquement et il lança à Elverid un regard noir.

« Tu as profité que j'étais malade pour aller fouiner dans mes affaires, c’est ça ?
- J'ai seulement voulu m'assurer que tes terres continueraient à être administrées correctement. Cela dit, si tu préfères que... »

Elverid n’eût pas le temps de terminer sa phrase. Viserys se jeta sur la elle et la saisit à la gorge.

« Ce sont MES terres ! MON domaine ! Et je ne laisserai personne me le voler ! »

Elverid, suffoquant, tenta de se repousser son assaillant et de lui faire lâcher prise, mais la force de Viserys était décuplée par la colère. Il continua à vociférer tout en la plaquant violemment au mur :

« C’était ça le but de mon empoisonnement, hein ? Faire main basse sur le Cygne, sur mes provinces, et sur la Compagnie Marchande Orcanienne ? Mais vous ne m’aurez pas, dussé-je vous tuer tous les deux, Zyakan et toi ! »

Viserys se mit soudainement à chanceler et ses mains relâchèrent progressivement leur étreinte autour du cou d'Elverid. Enfin, après d'interminables minutes, il s'effondra au sol.
Tout en reprenant son souffle, la matriarche l'examina rapidement, puis essaya vainement de le hisser sur le lit. Elle s'assit finalement au sol à côté de son patient toujours inconscient et prit quelques instants pour réfléchir. Si Viserys continuait à faire rechute sur rechute, le soigner à Nouvelle-Hrothgar deviendrait vite compliqué. Outre le fait que, sans son laboratoire, elle n'avait que peu de moyens pour établir un diagnostic et préparer des potions, elle ne pourrait pas dissimuler très longtemps la gravité de l'état de son patient. La meilleure solution était de faire transporter le jeune Duc au Pic du Hibou, et ce, dans le plus grand secret. Seul Zyakan devrait être mis au courant.

#5 2017-08-25 02:49:34

Zyakan

Re : La chute

Avec l'aimable participation de Gron ;)


Grononie...

Ses murailles plus qu'imposantes, bâties en demi-cercle à flanc de montagne, ses sept tours représentant les sept péchés capitaux, jalonnant le mur d'enceinte, et son donjon immense, érigé au centre de la cité. Le duc Zyakan aurait sans doute mieux apprécié la visite s'il n'avait pas dû arriver de nuit, dans le plus grand silence, fourbu et accompagné seulement d'un homme d'escorte. L'ost des Léopards était rassemblé autour de la ville, et la guerre était en cours.

On le laissa passer une porte majestueuse, et il pénétra dans une salle... de bain. Entièrement carrelée de marbre, nimbée d'une lumière discrète et chaude, la pièce ne laissait aucun doute sur son utilité. En son centre, le prince Gron l'attendait patiemment, assis contre le rebord d'un bassin d'eau claire, large et profond.

« Votre Altesse. Merci de me recevoir à une heure si tardive.
-Seigneur Zyakan, c'est un honneur de vous recevoir dans ma demeure.
-Je... Je conçois que ma visite vous pose question. À vrai dire, je viens à propos d'un sujet délicat.
-Nous espérions votre visite en d'autres circonstances mais nous ne sommes pas surpris de votre venue. Prenez vos aises. Si nous devons discuter, cela sera d'homme à homme. »

Zyakan hésita un court instant, puis finalement accepta les mains du serviteur se proposant de lui enlever ses vêtements. Le voyage depuis le Sudord avait été éprouvant.

« Lussuria nous apprend à nous aimer tels que nous sommes et à apprécier son prochain à sa juste valeur. »

Et l'eau était juste à la bonne température. Le duc prit un temps, laissant agir la tiédeur du bain. Il considéra plus en détail son hôte. Le prince Gron devait avoir la quarantaine, avec une légère barbe grisonnante, mais son regard juvénile et son léger sourire lui donnaient l'air plus jeune.

Comment lui annoncer ce qu'il avait à dire sans avouer qu'ils étaient totalement désemparés ?

« Votre Altesse. Je ne sais pas par quel bout le prendre... Il faut que nous mettions un terme à cette guerre.
-Cette guerre n'a pas lieu d'être et nous le savons tout deux.
-Affronter les Léopards aurait été un honneur, et un défi. Mais nous avons quelques problèmes en interne, et nous craignons de ne pas être en mesure de poursuivre les combats. »

Un chef de guerre qui devient fou à lier, et une maison fondatrice du Cygne qui se retrouve sans dirigeant du jour au lendemain, en pleine préparation d'un ost. Quelques problèmes. Rien d'insurmontable, à condition d'avoir la paix. Elverid avait intérêt à faire des miracles.

Adossé au bord de la piscine, le prince fronçait les sourcils et, le bras hors de l'eau, pianotait sur le bord.

« Le Léopard n'a pas pour but d'être un défi. Nous ne cherchons pas la gloire, juste le respect et l'écoute des autres factions.
-Chez nous, la gloire, quelques jeunes têtes la cherchent. Elle est inscrite dans notre devise. Quand au respect, j'espère que notre déclaration de guerre en a été un signe suffisant. »

C'était au moins ça. Les choses avaient été faites dans les formes. Avec un prétexte aussi bancal que celui qu'ils avaient utilisé, c'était la moindre des choses.

« Je vous présente mes excuses pour cette entrée en guerre, vaine. Si vous êtes d'accord, je vous propose de signer un armistice entre le Cygne et les Léopards. »

Le prince se retourna vers l'extérieur du bassin, pensif, et dévoila son dos mutilé, traversé d'entailles tranchantes, et de balafres rouges. Des souvenirs de batailles, sans aucun doute. Même si certaines lui évoquaient plutôt des coups de fouet ou, pire, de fils de fer barbelés.

« Le Cygne reconnaît il que le Léopard n'est pas responsable de cette guerre?
-Oui. »

Le prince ferma les yeux quelques instants puis, avec son sourire tendre, prit sa décision.

« En tant que chef de guerre de l'Ordre, j'accepte votre armistice. N'ayant pas le pouvoir de signer la paix, je me rendrais auprès de mes frères et sœurs afin de vous transmettre notre avis. Nulle action ne sera lancée sans mon accord et mes corbeaux partiront prévenir nos hommes de faire halte. »

Zyakan soupira discrètement, soulagé. 

« Un verre de vin?
-Merci, votre Altesse. Une dernière requête cependant : Pouvez-vous garder le secret quelques temps sur l'arrêt des combats, en dehors de l'Ordre ? »

L'hôte sourit.

« La Tour Rose garde toujours secrète ses... entrevues.
-Alors, à votre santé ! fit le duc en lui rendant son sourire. »

Le prince fit sonner une clochette. Aussitôt, une jeune femme à la peau d'albâtre entra dans la salle.

« Lucinda, très chère, peux tu aller nous chercher une bouteille du meilleur vin de Valésiane que nous possédons? L'audience n'est plus privée, les bains peuvent redevenir... publics. »

Dernière modification par Zyakan (2017-08-25 12:58:28)

#6 2017-08-28 22:30:54

Viserys Hallgeirr

Re : La chute

La nouvelle de l’arrêt des hostilités contre les Léopards arriva aux oreilles du peuple des cités Orcaniennes, ainsi que la démobilisation des osts réunis par Zyakan et Elverid. La langue du fils de l’ancien intendant de la Nouvelle-Hrothgar se délia, et il révéla avoir surpris Elverid devant la porte de la salle d’étude de Viserys.

Le fait qu’elle soit restée au palais pendant plusieurs jours n’était pas passé inaperçu, tout comme la discrétion dont elle avait fait preuve lors de son départ. Cela aurait pu paraître normal dans d’autres circonstances, mais elle était restée à la Nouvelle-Hrothgar alors qu’elle avait appelé ses vassaux pour un ost au Pic du Hibou. C’était forcément lié à la disparition brutale de Viserys.

Voyant l’absence de ce dernier se prolonger, et étant toujours sans aucune nouvelle, des rumeurs de plus en plus inquiétantes se propageaient. Certains pensaient que Carmen de Guarida était revenue de son périple, et que sa première action avait été d’éliminer Viserys pour venger la destitution de Loth, avec l’aide d’Elverid. D’autres disaient que cette dernière lui avait lancé un sort qui aurait mal tourné. Si le seigneur d’Orcanie était craint, il était avant tout respecté pour avoir survécu au complot fomenté par Magdalena Alighieri, pour la manière avec laquelle il avait pris le pouvoir, respectant les ancestrales traditions Saarthiennes, mais également pour son ascension rapide dans la noblesse okordienne. Les huskarls et adeptes d’Yggnir, très nombreux dans l’armée Orcanienne, rêvaient également de le voir devenir le prochain Tokva d’Okord.

Cependant, ce qui mit réellement le feu aux poudres fut le témoignage d’un des gardes de la Nouvelle-Hrothgar, révélant qu’Elverid avait quitté le palais en emportant un énorme colis avec elle. Cela crédibilisait les théories les plus farfelues exprimées jusqu’ici : elle avait enlevé Viserys, et le retenait sans aucun doute sur sa capitale. La situation devint rapidement instable dans l’armée Orcanienne, qui avait été mobilisée aux alentours de la Nouvelle-Hrothgar. Des généraux appelaient au calme le temps que la situation se décante, tandis que d’autres souhaitaient lever un ost pour libérer Viserys de sa supposée prison.

Les huskarls eurent une influence primordiale sur les événements qui suivirent. Les généraux furent tous massacrés durant une nuit que l’on appela sobrement « Nuit Sanglante ». Et le lendemain, l’armée d’Orcanie se mit en marche, menée par les huskarls.

Afin de se rendre au Pic du Hibou, l’armée devait contourner Guarida. La colère des Orcaniens eût de lourdes conséquences sur les paysans vivant aux alentours de la capitale de Solède, qui furent massacrés. En effet, la construction d’un monument au nom de Podeszwa, qui venait d’y être terminée et fêtée en grandes pompes, sonnait comme une insulte aux adeptes d’Yggnir. Les huskarls ne firent preuve d’aucune pitié, ravageant les champs et brûlant les maisons. Le gros de l’armée continua sa route en direction du Pic du Hibou, mais quelques centaines de soldats s’attardèrent pour profiter de la faiblesse des paysannes…

L'ost du duc ayant été démobilisé et le gros de son armée renvoyé en garnisons sur ses autres fiefs, c’est sa vassale Sheeana qui vint en personne rétablir l’ordre en son nom, éliminant tous ceux qui étaient restés dans le coin.

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Elle en interrogea quelques-uns afin de connaître la destination finale du reste de l’armée, et alerta immédiatement Zyakan qui envoya un pigeon en direction du Pic du Hibou pour prévenir Elverid.

L’information arriva à temps. Elverid, malgré son désarroi, dût se résoudre à réagir rapidement, et efficacement. Ce n’était pas une armée organisée, avec un plan de bataille bien préparé, qui s’apprêtait à assiéger le Pic du Hibou. Non, ce n’était qu’une énorme bande de pillards réduits à leurs pulsions primaires, guidés par des huskarls dont la soif de sang n’était que contenue par Viserys. Ils étaient à l’affut de la moindre occasion de se battre, et elle comprit alors pourquoi leur souverain avait tant incité le Cygne à entrer en guerre contre les Léopards. Elle fit évacuer le Pic du Hibou par le nord, tandis que l’armée d’Orcanie arrivait du sud-ouest. Sachant que ses vassaux n’auraient pas le temps de venir l’aider, elle demanda également à l’intégralité de ses chasseresses de quitter la cité pour tendre une embuscade à ses ennemis.

L’armée Orcanienne tomba dans le panneau. Alors que les troupes déployaient leurs engins de siège, les chasseresses surgirent des bois alentours, et les détruisirent au prix de nombreuses pertes. Malgré tout, l’opération fut un succès, et elles ne laissèrent aucune marge de manœuvre au reste de l’armée ennemie obligée de reculer jusqu’aux murs du Pic du Hibou, à portée de tir de leurs archers.

Ainsi, l’armée Orcanienne, aveuglée par sa soif de vengeance, fut anéantie en tentant de détruire ses propres alliés.

#7 2017-08-29 19:25:31

Viserys Hallgeirr

Re : La chute

La défaite de l’armée Orcanienne n’engendra que le chaos dans toutes les cités des Hallgeirr, chacun voulant prendre le contrôle sur la ville. Les pillages devinrent monnaie courante, tout comme les meurtres et viols.  Plusieurs cités furent détruites dans de violents incendies faisant suite à des affrontements entre des groupes rivaux : Morthal, Pondragon, Fortdhiver, Vendeaume, et Aubétoile n’étaient plus qu’un tas de cendres, et de ruines. Folpertuis résista un temps grâce à la garde de la Compagnie Marchande Orcanienne, qui réussit à exfiltrer ses possessions avant de s’enfuir par le Canal, et toutes les autres tombèrent sous la coupe de diverses bandes de pillards.

Des groupes immenses de réfugiés convergeaient vers les autres cités du Cygne pour demander la protection des seigneurs locaux, et racontaient des choses plus horribles les unes que les autres. La situation était devenue incontrôlable. Loth tenta bien d’aller à la Nouvelle-Hrothgar, mais il fut reçu par une pluie de flèches.

C’est dans ce contexte qu’Elverid alla voir Viserys. Ses visites s’étaient espacées à cause de l’agressivité de son patient, dont l’état ne s’améliorait pas. Il était victime d’accès de rage incontrôlable, et avait été contraint à l’isolement pour sa propre sécurité, mais également celle des autres. Malgré les jours qu’elle avait passé à y réfléchir, Elverid était incapable de déterminer ce qui causait l’état déplorable de Viserys, même si elle avait déjà quelques pistes. Mais ce jour-là, il fallait qu’Elverid lui annonce la nouvelle de l’attaque des orcaniens sur sa cité. Il avait forcément entendu les bruits de la bataille depuis sa cellule, sans pour autant deviner ce qu’il se passait.

Lorsqu’elle arriva devant sa cellule, il paraissait exténué. Elle ne baissa pas sa garde pour autant, les marques de strangulation autour de son cou étant encore visibles. Il avait failli la tuer après avoir feint une guérison rapide, il pouvait tout autant simuler une extrême faiblesse. Elle décida de lui révéler directement ce qu’il s’était passé, lui donnant également la situation dans laquelle se trouvaient les cités qu’il était censé gouverner. Le regard dans le vide, il lui répondit d’une voix étrangement calme.

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« Loth a essayé de régler tout ça, de reprendre le contrôle ?
-Oui, répondit Elverid. Ca a été un échec. »

Un silence de plusieurs minutes s’installa. Elverid, malgré la situation, savourait ce genre de moment, car elle sentait qu’elle avait en face d’elle le Viserys qu’elle avait toujours connu.

« Peux-tu m’apporter trois parchemins, une plume, et un encrier, je te prie ? »

Elle acquiesca, et revint quelques instants plus tard. Elle le laissa écrire en silence sur ses trois parchemins, puis il lui tendit un à un.

« Ce parchemin te donne la gouvernance de l’Orcanie. Celui-ci donne Cicatrice des Neiges à la vicomtesse Sheeana, qui a été la plus prompte à réagir à la menace de… mes hommes. »

Il déglutit, et Elverid put percevoir un léger tremblement dans sa voix.

« Enfin, ce parchemin… Ce parchemin dit que je renonce à mes titres. Je ne suis plus le seigneur Hallgeirr, et puisque Loth n’a pas réussi non plus à régler la situation… Ce parchemin demande à tous les seigneurs du Cygne d’accueillir mes civils, et de neutraliser tous ceux qui répandent la terreur sur mes fiefs.
Si cela ne peut être évité, vous pouvez détruire mes cités. Récupérez ce que vous pouvez, donnez-le aux jeunes maisons du Cygne ou aux rescapés. A présent, laisse-moi. »

Elverid voulut répondre, mais il la fit taire d’un geste. Il lui était difficile de contenir ses larmes, et il ne souhaitait pas qu’elle voit cela. Même s’il n’était pas responsable de sa maladie, une culpabilité amère le rongeait à présent. Il revoyait sa seule année à la tête du Cygne, et se demandait ce qu’il aurait pu faire autrement, comment il aurait pu éviter une telle déchéance à son peuple.

La matriarche appela un garde, et lui murmura de prendre garde à ce que Viserys ne tente pas de se suicider. Vu la situation, il y avait forcément songé, mais elle ne pouvait pas se résoudre à l’abandonner à son sort. Si elle pouvait, un jour, le sauver de sa maladie, et lui redonner goût à la vie, elle le ferait.

Les anciennes cités des Hallgeirr furent toutes détruites, à l’exception de Blancherive et la Nouvelle-Hrothgar. Les armées du Cygne assiégèrent ces deux villes sans pour autant tenter d’en percer les défenses, et après plusieurs semaines, les bandits qui en avaient pris le contrôle se rendirent, craignant la famine.

La Nouvelle-Hrothgar fut, durant un temps, préservée, notamment le magnifique palais que Viserys avait rénové. Blancherive, quant à elle, tomba peu à peu en désuétude.

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L’avenir de la famille Hallgeirr était à présent lié à celui des Guarida, et reposait sur les frêles épaules d’un jeune garçon de six ans, Luis Hallgeirr de Guarida.

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