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#26 2017-07-07 03:01:24

Loth Hallgeirr

Re : Les affres du pouvoir

6e phase du printemps de l’an VII de l’ère 17, Place de la Grande Traversée, Nouvelle-Hrothgar.


La plus grande place de la Nouvelle-Hrothgar, baptisée « Place de la Grande Traversée » en hommage à l’exil forcé du peuple de Saarthal qui l’avait mené en Okord sous le commandement d’Hakar, d’Andior, et d’Helyanor, avait été préparée pour accueillir le duel fratricide qui se préparait. Aucun noble Okordien n’avait été invité, cette affaire étant strictement du ressort des Orcaniens. Le peuple s’était déplacé en nombre, et la sécurité avait été extrêmement renforcée en vue du duel, chaque spectateur étant fouillé avant de pouvoir s’installer sur les gradins sommaires qui avaient été installés durant la nuit. Une ligne de soldats, lances sorties, bloquait le chemin à quiconque tenterait d’interrompre le combat. Le souvenir de l’assassinat d’Andior était encore présent dans toutes les têtes.

Lorsque les gradins furent combles, le soleil commençait déjà à approcher de l’horizon, à l’ouest. Une légère brise soufflait sur la place, et le ciel était dégagé. C’était une belle journée de printemps. Une belle journée pour mourir.
Les deux combattants arrivèrent enfin, escortés par les trois généraux en chef de l’armée Orcanienne. La tension était palpable. Aucune parole, aucun regard échangé, Loth et Viserys se placèrent en silence, tandis qu’il murmure parcourait le public.

A gauche se tenait l’aîné. Loth Hallgeirr, Marquis d’Orcanie, héritier d’Andior, était vêtu d’une armure légère en cuir. Il tenait dans sa main gauche une rondache dotée d’une pique acérée en son centre, et dans sa main droite, une hache forgée dans le plus solide acier de la région. Les sept années qu’il venait de passer en tant que seigneur d’Orcanie avaient vu l’enrichissement progressif de son peuple – principalement de sa bourgeoisie – et, quoi qu’on puisse en dire, le maintien d’un titre de noblesse honorable. Ses deux dernières années, malgré le fait qu’il soit toujours en recul dans la hiérarchie de la confrérie du Cygne, rendait la population plutôt optimiste à son sujet. En effet, il semblait prendre de plus en plus d’assurance, avait tenté un coup d’éclat militaire lors de la guerre du pays de Karan qui aurait pu se révéler payant, et avait fini par rejoindre le Sanctuaire des Forts d’Yggnir, suivant les traces de son père, alors qu’il n’avait pas encore trente ans. De plus, tout le monde se souvenait de la quête épique qu’il avait mené afin de retrouver l’ascendance de leur dynastie, et du courage dont il avait fait preuve pour y parvenir.

De l’autre côté de la lice, Viserys Hallgeirr, prétendant au Marquisat et fils cadet d’Andior, portait une armure du même type que celle de Loth. Il tenait fermement dans chaque main une épée longue, très acérée mais avec une lame assez fine. Il faisait quelques moulinets pour se détendre les poignets avant que le combat ne commence. Assez peu connu lors de la mort d’Andior, il avait la réputation d’être extrêmement audacieux, mais solitaire. Nul n’ignorait que son père lui avait accordé un an, après avoir été déchu de son rang de prince et avant de devenir Tokva, pour lui enseigner tout ce qu’il savait de la politique, des stratégies militaires, ou encore des sciences, même si Viserys en savait presque autant que lui sur ce dernier sujet grâce à l’enseignement du clan du Hibou. Son dédain pour les histoires des roturiers contrastant furieusement avec l’intérêt que Loth y portait, il n’était pas apprécié pour ses qualités humaines. Pourtant, tout le monde s’accordait sur le fait qu’il avait été très important lors de la préparation de la capture du seigneur Hide-Rik, et qu’il avait un potentiel de chef de guerre hors norme. Le sang froid dont il fit preuve lorsqu’il était accusé d’avoir commandité le meurtre de Loth avait également contribué à l’amélioration de sa réputation, car personne ne croyait en son innocence à l’époque.


Les regards des deux demi-frères se croisèrent une dernière fois avant le début du duel. Ils ne virent que le reflet de leurs propres intentions dans les yeux de leur adversaire : une détermination et une concentration sans failles. Ils ne se feraient pas de cadeau, toute trace de fraternité avait disparu à cet instant précis. Chacun savait que le perdant de ce duel, s’il survivait, ne pourrait redevenir seigneur d’Orcanie tant que l’autre serait en vie.
Les cors sonnèrent, et les duellistes s’élancèrent vers leur adversaire avec un unique objectif à atteindre : la victoire, et le trône d’Orcanie.

#27 2017-07-10 02:05:22

Loth Hallgeirr

Re : Les affres du pouvoir

Loth, sûr de sa supériorité physique, chargea son adversaire, bouclier en avant, sa hache empêchant Viserys de passer par le côté droit. Celui-ci réussit à éviter l’assaut, s’en tirant seulement avec une éraflure sur le bras causée par la pointe du bouclier.

S’en suivit la forme classique des combats opposant Viserys et Loth : le premier enchaînait les attaques de sape,  tandis que le second attendait une ouverture derrière son bouclier. Ce petit manège dura quelques minutes, puis Loth attaqua le côté gauche de son opposant avec sa hache. Viserys esquiva sans trop de mal en faisant un pas de côté tout en pivotant sur lui-même, et ne se rendit compte qu’il était tombé dans le piège de son frère qu’au moment où il sentit la pointe de la rondache s’enfoncer dans son épaule gauche. Il accéléra sa rotation pour se dégager, sentant à peine la douleur se propager dans tout son bras gauche grâce à l’adrénaline du combat, et vit l’occasion qui se présentait à lui.

Loth, dans sa tentative de porter un coup décisif, n’était plus concentré sur le bras qui tenait sa hache, et n’eût pas le temps d’anticiper la contre-attaque de son demi-frère. Viserys attaqua avec le tranchant de sa lame, la violence de son coup découpant la chair de Loth sans mal. Alors que celui-ci lâchait sa hache sans même s’en rendre compte, Viserys en fit de même avec l’arme qu’il venait d’utiliser, et, prenant son autre épée à deux mains, plongea derrière Loth pour sectionner son tendon d’Achille. Le coup ne fut pas aussi puissant qu’il l’aurait souhaité à cause de la faiblesse de son épaule gauche, mais eût l’effet escompté : Loth s’écroula brutalement. Viserys termina son plongeon par une roulade, puis se retourna rapidement afin de voir dans quel état se trouvait son demi-frère.

Ce n’était pas glorieux.

Le sang de Loth coulait à flot par les veines de son poignet tranché. Sa main pendait lamentablement, la lame de Viserys ayant été à deux doigts de la séparer purement et simplement de son avant bras. Viserys avança d’un pas rapide, posa sa lame sur la gorge de Loth pour signifier à tous qu’il était le grand vainqueur du combat, puis fit signe aux soigneurs de venir en urgence. Aucun des deux demi-frères n’avait pu se résoudre à tenter un coup mortel contre son adversaire, et Viserys en avait bien conscience : Loth aurait probablement pu viser sa gorge plutôt que son épaule avec sa rondache. L’issue du duel aurait alors été bien différente.

Mais les Hallgeirr ne s’entretuent pas.


Viserys déchira un bout de la chemise qu’il portait sous son armure en vitesse, afin d’endiguer le ruisseau de sang qui s’écoulait du poignet de Loth, le temps que les soigneurs arrivent. Lorsqu’ils purent enfin prendre le relai, il s’accroupit près du visage de son demi-frère, qui était encore conscient, et lui murmura ces quelques mots :

« Tu peux partir en Solède. Je n’ai pas besoin de toi dans mon conseil restreint pour l’instant. Survis, car les Hallgeirr auront sans aucun doute besoin de toi à l’avenir. Réfléchis à ce qui t’a mené là, et peut-être qu’un jour, tu auras une deuxième chance.
Mais tu connais les règles… Tu as perdu le duel. Je suis Marquis d’Orcanie, et étant donné que je t’ai vaincu, tu ne peux plus me défier. A bientôt. »

Loth tenta de lui murmurer une réponse, mais il était trop faible, et ses mots ne parvinrent pas à franchir ses lèvres. Ses yeux se fermèrent, et il sombra doucement dans une inconscience dont il ne sortirait qu’après plusieurs jours de soins.
Viserys ramassa ses épées couvertes du sang de Loth, et se releva. Il les essuya consciencieusement sur son pantalon, avant d’en lever une vers le ciel, et de s’adresser à son peuple.

« Citoyens d’Orcanie, en ce jour, j’ai triomphé de Loth Hallgeirr, et deviens donc votre Marquis. Des choses vont changer, ici-bas. Je ne serai pas celui qui garantira votre bien-être à tous, ni votre enrichissement personnel, comme mon prédécesseur le faisait. Mon objectif est de redonner aux Hallgeirr leur prestige d’antan. Le Roi Enigral nous avait massacrés lors de la création d’Okord, mais je n’oublie pas d’où nous venons. Andior a fait l’incroyable effort de revenir jusqu’ici il y a désormais plus de vingt-cinq ans, et je vais faire en sorte que cela n’ait pas été vain.

La tradition aurait voulu que je tue Loth, que je mange son cœur, et boive son sang. Je ne l’ai pas fait, et ne le ferai pas. Son sang est trop précieux pour cela, s’il m’arrive malheur et que je n’ai pas d’héritier, il sera de sa responsabilité de prendre ma relève. N’oubliez pas ce qu’il nous a apporté, malgré tout.
Citoyens d’Orcanie, acclamez votre nouveau seigneur. Je ne vous demande pas de me faire confiance, je vous prouverai que je la mérite. Un jour nouveau se lève pour nous… Et il sera sanglant. »

Un hurlement de joie vint des gradins situés à l’ouest de la place, remplis de Huskarls. Puis, peu à peu, toute la place se mit à scander le nom de Viserys.
Les Orcaniens étaient prêts à retourner sur le chemin de la victoire.


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[Message HRP : Voilà la fin des aventures officielles du RP « Les affres du pouvoir » ! Je tiens à remercier Elverid pour son aide essentielle durant l’enquête, c’était très plaisant d’écrire avec toi sous le format qu’on a utilisé ! Merci également à Carmen pour ses deux interventions un peu improvisées, mais qui promettent pour la suite des relations entre ma maison et la sienne.
Merci aussi à Antoine et aux MJ pour avoir créé l'univers d'Okord qui m'inspire terriblement smile. Et merci à tous les joueurs dont le seigneur est mentionné dans ce RP.
Je vous réserve encore quelques surprises avec deux ou trois chapitres d’épilogue. Cependant, ce qui y sera écrit ne sera connu que des personnages RP qui y seront mentionnés. Merci de respecter ce point-là.
Enfin, si vous avez des remarques, positives ou négatives, sur cette histoire, ma façon d’écrire, des incohérences, etc… n’hésitez pas à me contacter par MP pour me le dire. Même si vous en avez pas mais que vous voulez juste me faire savoir que vous avez lu ce RP d’ailleurs, ça fait toujours plaisir.
Allez, place à l’épilogue maintenant.]

Dernière modification par Andior (2017-07-10 02:08:55)

#28 2017-07-10 19:42:47

Viserys Hallgeirr

Re : Les affres du pouvoir

Maison de Simon Sangfield, troisième jour après l’attentat, fin de soirée.


Simon sursauta en entendant que quelqu’un tambourinait à sa porte. Il venait de finir de souper, et n’attendait personne. Il partit discrètement à sa fenêtre pour voir qui c’était, et poussa un soupir de soulagement. Magdalena.
Il alla lui ouvrir la porte, et l’enlaça amicalement pour la saluer. Alors qu’il allait ouvrir une de ses meilleures bouteilles de vin pour l’accueillir comme il se doit, il repensa à sa situation.

Deux jours plus tôt, il avait présenté un dossier accablant Viserys Hallgeirr en tant que commanditaire de l’attentat sur Loth, et il était évident qu’Elverid n’aurait pas le temps de trouver suffisamment de preuves pour l’innocenter. Après tout, la dague venait du nord du Royaume, et était impossible à tracer en si peu de temps. Il avait jeté tous les documents compromettants : les noms des personnes impliquées dans le complot, les multiples tentatives qu’il avait effectué pour imiter l’écriture de Loth, ou encore les factures liées à la fabrication de la dague. Sans oublier les pots de vin qu’il avait versé à certains capitaines de navire de la Compagnie Marchande pour qu’ils en prennent soin comme la prunelle de leurs yeux. Et si Elverid parvenait contre toute attente à invalider les indices qu’il avait présentés à Loth, il en avait gardé d’autres en réserve.

Il posa deux verres ornés du mitsubaaoi, le symbole que la Compagnie Marchande Orcanienne avait repris des Tokugawa, qu’il remplit du liquide couleur bordeaux.

« Alors, Magdalena, qu’est-ce qui t’amène ? Tu viens déjà fêter la réussite de notre plan ?
-Je ne vois pas de meilleur moment pour le faire ! Mais tu aurais quelque chose à grignoter ? J’ai assez peu mangé ce soir...
-Ah, attends une seconde. Je vais chercher un excellent saucisson aux noisettes. Tu m’en diras des nouvelles ! Et c’est du sanglier, attention ! »

Ce faisant, il partit dans sa cuisine pour trouver ledit saucisson. Ainsi, il ne vit pas la petite fiole que Magdalena sortit de sa poche, et les quelques gouttes du liquide transparent qu’elle fit tomber dans le verre de Simon. C’est sans appréhension qu’il revint avec le saucisson coupé en rondelle sur une planche de bois. Il leva son verre pour trinquer avec Magdalena.

« A Viserys Hallgeirr, qui ne sera bientôt qu’un lointain souvenir !
-A Viserys. »

Il but son vin d’une traite, savourant ce qui serait le verre de sa vie. Après quelques secondes, il porta ses mains sur sa gorge, suffoquant. Puis il écarquilla les yeux, comprenant ce qu’il venait de se passer.

« Po…Pour...quoi…. Tr….ai…T……. »

Puis il s’effondra au sol, inconscient. Magdalena savait qu’il ne lui restait pas plus de trois minutes avant de mourir, alors elle sortit rapidement une pile de feuilles de sa sacoche. Elle fonça au bureau de Sangfield, et les entassa sur l’écritoire, en laissant bien en évidence un exemplaire d’un des multiples essais qu’avait fait Simon pour imiter l’écriture de Viserys. La liste de noms était juste en dessous. Après le faux témoignage que le forgeron avait fourni à Elverid, ces preuves l'accableraient.

Elle était venue elle-même récupérer les documents sensibles des mains de Simon, quelques jours plus tôt, pour préparer ce qu’elle faisait maintenant. Elle tira ensuite son corps pour l’allonger au fond du bureau.
Elle trouva ce qu’elle souhaitait dans sa cave : un stockage important d’huile de lampe, qui lui suffirait pour laisser les enquêteurs croire qu’elle avait voulu détruire les preuves du complot. Elle prit bien soin de verser de l'huile de lampe autour de la pièce sans toucher le corps ni le bureau, sur lequel elle versa de l’eau pour l’humidifier au maximum.

Puis, alors qu’il ne lui restait qu’à mettre le feu, elle se laissa tomber lourdement sur la chaise de la salle à manger. La bouteille de vin était toujours sur la table, et elle sentait qu’elle en avait sacrément besoin à ce moment précis. Alors elle but un, deux, puis trois verres, jusqu’à ce que la bouteille soit vide. Et elle pleura toutes les larmes de son corps.
Elle savait qu’en faisant cela, Elverid remonterait jusqu’à sa trace, et qu’elle serait condamnée, sans doute à mort. Non pas que sa vie fut des plus heureuses, après tout, elle avait longtemps été prostituée avant, mais avoir conscience de n’avoir que quelques jours à vivre lui faisait froid dans le dos. Mais il était bien trop tard pour regretter. Elle mit rapidement le feu à la maison, s’enfuit en brisant une fenêtre du rez-de-chaussée, et voulut rejoindre Virshan pour une dernière nuit, au château.

Hélas, une servante l’informa que Loth l’avait fait mander dans sa chambre.

Jouer son rôle jusqu’au bout, ne pas faiblir. Remplir sa partie du contrat. Et se sacrifier pour l’amour de sa vie.

Dernière modification par Andior (2017-07-11 20:52:22)

#29 2017-07-11 20:07:17

Viserys Hallgeirr

Re : Les affres du pouvoir

Amour éternel.


« N’oublie pas, Viserys. Ne commets jamais la seule erreur que j’estime avoir commis dans ma vie. Ne néglige pas ta famille, ton sang. Si Loth revient, essaie toujours de le forcer à s’améliorer, de l’aider. Trop souvent, je vous ai mis de côté, lui et toi. Mais si tu vois qu’il est trop faible, que tu ne peux rien pour lui, et que tu penses faire mieux, n’insiste pas et prends sa place. »

Tels avaient été les mots d’Andior à l’égard de Viserys, lorsqu’il prit une année pour lui enseigner tout ce qu’il savait. A ce moment-là, Loth était en quête d’un artefact prouvant l’ascendance noble d’Andior, et n’avait pas donné de nouvelles depuis de longs mois déjà. Viserys n’était qu’un adolescent, mais chaque parole de son père était restée gravée dans son esprit. Alors, quand Andior fut tué par le carreau d’un Strolatz dissident et que Loth s’avança au milieu de la lice pour proclamer qu’il était son héritier attitré, la première chose que fit Viserys fut de contacter les deux personnes qu’il voyait en secret depuis qu’il était tout petit. Il venait d’avoir dix-sept ans lorsqu’il les rencontra à nouveau, dans la même maison que toutes les années précédentes. Une fois entré, il enlaça tendrement la plus âgée des deux, qui avait exactement vingt ans de plus que lui.

« Tu m’as manquée, maman. Ca fait du bien de te voir. »

L’autre femme fit une moue pour mimer sa jalousie.

« Toi aussi, tatie Magda, ne fais pas la tête ! »

Lorsqu’Andior avait traversé l’Österlicht pour rejoindre Okord, il avait sauvé Susanna, la mère de Viserys, retenue captive par un camp de brigands, d’un sort peu enviable. Il n’était pas tombé amoureux d’elle malgré leur profonde amitié, mais ils avaient eu plusieurs relations sexuelles, dont une avait mené à la naissance de Viserys, qu’Andior avait décidé de traiter comme s’il était un fils légitime. Le seul amour de sa vie, il l’avait connu sur l’île d’Agomeux, plus jeune, après être devenu chef de la tribu de Saarthal, mais elle était morte en couches. Elle se nommait Morgane, mère de Loth, et jamais il ne voulut laisser de place à une autre femme dans son cœur. Il avait trop souffert lors de sa mort, et seule la nécessité de faire survivre tout son peuple, qui dépendait entièrement de lui, lui avait permis de tenir le coup.

Andior avait tenu à garder sa brève relation avec Susanna secrète, mais son visage était connu de tous, notamment de Fulbert d’Inverness qui était déjà présent, bien que simple soldat à l’époque. En revanche, lorsque Susanna demanda à Andior si sa petite sœur Magdalena, qui n’avait que treize ans à l’époque, pouvait les rejoindre, il n’accepta qu’à la condition qu’elle reste anonyme parmi les leurs. Il ne voulait pas offrir de point faible à ses ennemis, et surtout, il voulait éviter que ses proches paient pour ses propres actes.

Lorsqu’Andior s’établit en Okord, il demanda à Susanna de rester discrète et lui envoya régulièrement de l’or, tandis que Magdalena fut intégrée au projet de monter une guilde marchande au nom d’Andior. Et jamais plus il ne s’occupa d’elle, estimant qu’il avait rempli sa part du marché en leur assurant à toutes les deux la possibilité d’avoir un avenir radieux.
Magdalena apprit bien vite la rudesse de sa condition lorsque de vieux pervers s’en prirent à elle pour lui « donner la possibilité de monter dans la hiérarchie ». Elle encaissa, années après années, toutes les injures qui lui furent proférées, et toutes les violences que son corps subit, tandis que la compagnie trempait dans des affaires louches, et ne prenait pas d’ampleur. Les rares bons moments de cette longue période de sa vie étaient lorsqu’elle pouvait aller chez Susanna, lors des visites de Viserys. Elle aimait profondément son neveu, qui le leur rendait bien. En effet, elles étaient les deux seules personnes pour lesquelles il montrait des signes d’affection.

Lorsque Magdalena arriva à la tête de la guilde, elle prit soin de faire payer tous ceux qui l’avaient salie, se montrant d’une cruauté sans limites, avec l’aide de Virshan. Et une fois que ce fut terminé, elle se rendit compte que sa vie était vide de sens. Elle était dégoûtée de la plupart des hommes, et était certaine de ne jamais pouvoir ressentir d’amour pour l’un d’entre eux, hormis l’amour fraternel qu’elle éprouvait pour son neveu. Elle avait régulièrement des relations sexuelles avec Virshan, mais c’était purement physique.

Ainsi, lorsque Viserys leur fit part de sa volonté de prendre la place de Loth à long terme car il pensait qu’il serait davantage à la hauteur que son frère, les deux sœurs réfléchirent longuement jusqu’à aboutir à ce plan.
Le problème principal était la légitimité : Loth avait pour lui, en plus d’être l’aîné des Hallgeirr, la quête dantesque de l’ascendance d’Andior qui lui avait permis d’acquérir le respect de ses hommes. Il fallait que Viserys ait lui aussi une histoire particulière, qu’il en sorte grandi, et si au passage Loth pouvait voir son image affaiblie, cela n’était pas plus mal. Ainsi, lorsque Magdalena dit à sa sœur qu’elle n’hésiterait pas à sacrifier sa vie pour Viserys, Susanna commença à concocter le plan qui devait se dérouler sur plusieurs années.

Si Viserys parvenait à prendre la place de Loth, elles étaient certaines que leurs descendants n’auraient pas à subir ce qu’elles avaient subi, et qu’il pourrait vivre ses rêves. Cela valait tous les sacrifices du monde.

Dernière modification par Andior (2017-07-11 20:53:43)

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