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#1 2017-02-01 14:56:47

Quandtucomprendratutenvou

un prétendant turbulant

Un prétendant turbulent.

Sur une étroite route montagneuse, un homme et une femme voyageaient côte à côte. Ils discutaient de tout et de rien, mais surtout de la raison de ce voyage. Apogryphe parlait à Volie de son projet de parfaire ses connaissances en alchimie, bien qu'elle lui en eût déjà inculqué les bases. Pour cela, il avait choisi une destination qui lui paraissait idéale...

Les deux voyageurs se séparèrent devant la porte principale de la cité fortifiée du Pic du Hibou. Apogryphe déploya sa miteuse bannière rapiécée par endroits, puis, se présentant aux gardes comme un étudiant désireux de fréquenter les écoles du Clan, il put entrer sans difficulté.

Les rues de la ville offraient une impression générale d'ordre et de propreté. Elles étaient bordées de maisons mitoyennes aux facades blanchies à la chaux, avec çà et là, une échoppe d'artisan. Apogryphe suivit l'avenue principale jusqu'à une vaste esplanade entourée d'édifices plus imposants que ceux du reste de la ville. Leurs murs de pierre d'un gris bleuté étaient ornés de quelques sculptures, mais l'ensemble demeurait assez sobre. Le jeune homme s'avança vers le milieu de la place. Sur sa droite se trouvait un bâtiment monumental, le plus grand de tous. A travers l'arche grande ouverte, on pouvait apercevoir, dans la cour intérieure, des tables et des chaises abritées sous des auvents de toile, où de nombreuses personnes s'étaient installées pour lire. Apogryphe interpella un passant et lui montra du doigt l'édifice.
"Je suppose que ceci est le palais de la Comtesse Elverid ?
- Ah, non, Messire, ça c'est le bâtiment qui regroupe l'Université et la bibliothèque principale. Si vous cherchez la Matriarche, c'est là-bas, au palais du Conseil des Sages, que vous aurez le plus de chances de la trouver."
Ledit palais, à l'autre bout de l'esplanade, était nettement moins imposant que l'université. Apogryphe, bien qu'étonné, s'avança d'un pas décidé vers l'édifice, et se présenta aux deux chasseresses qui gardaient l'entrée en leur expliquant les raisons de sa venue. Après une courte discussion, il fut escorté jusqu'à un vaste cabinet de travail, où la matriarche s'entretenait avec quelques membres du Conseil. Il marqua quelques minutes d'arrêt pour l'observer. Elle se tenait debout, très droite, ce qui accentuait encore sa silhouette longiligne. Elle portait des braies, des bottillons de cuir, et une longue cuirasse souple au-dessus d'une épaisse chemise de lin sobremement décorée de quelques broderies. Une tenue élégante quoiqu'assez peu féminine. Sa longue chevelure rousse encadrait un visage à l'expression austère et sérieuse. bien qu'assez jolie, la dame paraissait aussi avenante que si elle avait été sculptée dans un bloc de glace. Et cependant, cela ne rebutait pas le jeune Apogryphe, bien au contraire. Il l'aborda sans faire de cérémonies.

"Bonjour, Dame Elverid. Je me présente, Apogryphe de la maison Harley. Je suppose que vous avez pris connaissance de ma précédente missive qui explique la raison de ma venue aujourd’hui ?
- Une missive ? Non, personne ne m'a apporté de missive de votre part."
Il ne lui avait bien entendu jamais écrit de missive. Il venait d'inventer cette excuse pour s’approcher d’elle et la contempler de plus près. Il reprit :
"Peu importe, je peux vous la réciter de mémoire :
Dame Elverid,
J’ai entendu dire que vous dispensiez des cours sur la merveilleuse science qu’est l’alchimie, je vous fais donc la demande motivée de pouvoir y accéder et aussi d’avoir la chance d’avoir une préceptrice telle que vous.
Est-ce possible ?
Voilà ce que contenait mon message.

- L'enseignement des sciences fait en effet partie des traditions de notre clan, et nos écoles sont ouvertes à tous. Je suis moi-même herboriste, toutefois je n'ai pas encore l'expérience nécessaire pour enseigner. Si vous souhaitez intégrer nos écoles, je vous confierai à la Doyenne Séraphina. C'est la plus respectée parmi nos érudites, et une pédagogue exceptionnelle. Personne n'est plus qualifié qu'elle pour vous aider à parfaire vos connaissances."

#2 2017-02-06 19:22:13

Quandtucomprendratutenvou

Re : un prétendant turbulant

Apogryphe s'était vu attribuer un logement dans un bâtiments réservé aux étudiants étrangers au Clan du Hibou. Il découvrit ses appartements et il y déballa son petit paquetage qui consistait en une tenue de voyage, un drap, une tenue informelle et une tenue soignée.
Il prit un peu ses aises puis il se dirigea vers le lieu de son premier cours. Tout en marchant, il se mit à réfléchir à un moyen de se débarrasser de la doyenne : il espérait qu'ainsi, la matriarche Elverid la remplacerait.
Lorsqu'il entra dans la salle d'étude, il fut déçu de constater qu'elle ne contenait que des tables, des chaises et des étagères chargées de livres. Il n'y avait là aucun matériel permettant de réaliser des expériences. Une dizaine d'autres élèves étaient déjà installés, la plupart avec un ouvrage posé devant eux. D'autres relisaient ce qui semblait être des notes prises lors d'un précédent cours.
Ses condisciples levèrent la tête pour le saluer. Certains d'entre eux échangèrent des regards étonnés, sans doute à cause de l'allure inhabituelle du nouveau venu : sa carrure d'athlète et ses vêtements usés faisaient davantage penser à un soldat de fortune qu'à un érudit. Toutefois, il crut remarquer une lueur d'intérêt dans les yeux de quelques-unes des jeunes filles présentes.
Il était toujours planté au milieu de la salle lorsque la doyenne Séraphina arriva derrière lui.
"Bonjour à tous !"
Elle se tourna vers Apogryphe.
"Je présume que vous êtes le nouveau venu dont la matriarche Elverid vient de me parler ? Bienvenue à vous. Ceci est une classe de perfectionnement destinée aux étudiants les plus doués, qui souhaitent parfaire leurs connaissances dans un domaine précis. Chacun des élèves ici présents travaille sur son propre sujet d'étude. Mon rôle consiste à les aider dans leurs recherches documentaires et dans le choix des méthodes d'expérimentation. J'ai cru comprendre que vous étudiiez l'alchimie ? Sur quoi vos recherches portent-elles actuellement ?
- Heu..."
Apogryphe ne s'attendait pas à une telle question. Il ne sut pas quoi répondre.
"Si vous n'avez pas encore de projet d'étude bien défini, ce n'est pas grave. Ce sera la première étape de votre travail ici. Je vais vous prêter quelques ouvrages généralistes qui vous aideront à affiner vos centres d'intérêt. Je me ferai un plaisir de répondre à toutes les questions que vous pourrez avoir. Et lorsque vous aurez arrêté votre choix, je vous attribuerai un laboratoire."
Cela commençait bien. Cette Séraphina avait des méthodes d'enseignement bien étranges. Apogryphe s'installa à la table sur laquelle la doyenne avait posé les livres et commença à en lire un. Il continua ainsi une dizaine de minutes, tout en épiant du coin de l'oeil, de temps à autres, la vielle femme qui se déplaçait d'une table à l'autre pour répondre aux questions de ses étudiants.
Enfin, alors que tout le monde était concentré sur son travail, un crissement strident se fit entendre, interrompant la doyenne au milieu de ses explications sur une notion difficile.
Tous les yeux se tournèrent vers le nouvel élève, qui affichait un sourire narquois.
"Êtes-vous déjà lassé de vos lectures ? Ou peut-être avez-vous choisi un sujet d'étude ? Si c'est le cas, venez donc l'exposer à la tribune au lieu de troubler le travail des autres avec des bruits incongrus."
Apogryphe se rejeta en arrière sur son siège dans un grand éclat de rire... puis brusquement, se redressa et fixa la doyenne avec l'air le plus sérieux du monde.
"Vous êtes sûre ? Comme vous voudrez."
Il se leva, traversa lentement toute la salle jusqu'à la tribune, et improvisa un exposé sur l'usage médicinal de plusieurs plantes toxiques. Tous les autres étudiants l'écoutèrent avec attention, tant il apparaissait évident que ce nouvel élève, malgré son allure et son comportement étranges, maîtrisait parfaitement son sujet. Après quelques minutes de discours, satisfait de son effet et quelque peu lassé de parler, il s'interrompit brusquement, puis conclut par un " Cela vous convient-t-il ?" à l'adresse de la doyenne, avant de retourner s'asseoir sans attendre de réponse.

La séance de travail se poursuivit sans autre incident. Apogryphe avait été remarqué de tous et c'était tout ce qu'il voulait. Après la fin des cours, il suivit les autres étudiants vers le réfectoire. La nourriture était disposée sur une grande table au fond de la vaste salle. Les étudiants prenaient une assiette, se servaient, puis allaient s'installer à l'une des tables plus petites disposées dans toute la pièce. Il se dirigea vers le buffet et se servit deux belles pièces de viande saignante, puis alla s'installer seul à une table libre.
Presque aussitôt, quelques-uns des étudiants du cours de Séraphina vinrent s'installer à la même table que lui et engagèrent la conversation. Il était clair que son attitude inhabituelle les avait intrigués. Il suffirait à présent d'être assez habile pour que les curieux deviennent des admirateurs...

#3 2017-02-11 13:19:45

Quandtucomprendratutenvou

Re : un prétendant turbulant

Les premiers jours d'étude s'étaient passés sans incident. Apogryphe était parvenu très vite à se rendre populaire parmi les étudiants et s'était déjà constitué un petit groupe d'amis. La doyenne Séraphina elle-même avait fini par apprécier ce nouvel élève qui lisait avec assiduité tous les traités d'alchimie qu'elle lui prêtait, même si ses méthodes de travail durant les séances en laboratoire étaient parfois hasardeuses. Elle avait toutefois remarqué que le jeune homme avait les yeux de plus en plus rouges, mais ce dernier lui avait expliqué qu'il passait une partie de ses nuit à lire à la lueur d'une chandelle.
Un matin, l'une des étudiantes du groupe, pourtant connue pour son sérieux, ne se présenta pas à une session en laboratoire. Interrogés, ses condisciples furent incapables d'expliquer son absence : le soir précédents, ils l'avaient aperçue en pleine forme.
Après la séance, Séraphina décida d'aller rendre visite à la jeune fille pour vérifier si tout allait bien. A son grand étonnement, elle trouva la porte entrouverte. Elle entra avec précaution. Toute la pièce était plongée dans la pénombre. Les volets n'avaient pas été ouverts. De plus en plus inquiète, la vieille femme alluma une bougie et se dirigea vers l'alcôve. Elle y trouva sa jeune élève allongée sur son lit, immobile et le teint livide. Elle l'examina sans tarder et poussa un soupir de soulagement : la jeune fille respirait encore, quoique très faiblement.
La doyenne courut vers la fenêtre, ouvrit les volets, et apostropha un scribe qui passait dans la cour en contrebas.
"Allez chercher la matriarche de toute urgence ! Une de mes étudiantes est gravement malade."
L'homme partit en courant et revint quelques minutes plus tard, accompagné d'Elverid. A peine arrivée dans la chambre, cette dernière commença a ausculter la patiente.
"Ses battements cardiaques sont anormalement faibles... à en juger par la pâleur de son teint, on dirait qu'elle a perdu beaucoup de sang, mais il n'y a aucune blessure apparente... Quand a-t-elle été vue en bonne santé pour la dernière fois ?
- Hier soir, aux dires des autres étudiants de son groupe.
- Aucune maladie connue ne corrompt le sang aussi vite. Il y a forcément autre chose..."
Elverid écarta les draps du lit, défit la chemise de nuit de la malade et entreprit un examen minutieux. Et après quelques minutes, elle découvrit deux traces de piqûres espacées d'environ un pouce sur la face intérieure de sa cuisse. Elle fit signe à Séraphina de s'approcher.
"Regardez : quelqu'un lui a ponctionné une quantité importante de sang au niveau de l'artère fémorale. Ces traces ont dû être faites par des aiguilles assez épaisses.
- Parviendras-tu à la soigner ?
- Elle survivra. Mais tant qu'elle ne reprend pas conscience, impossible de savoir si elle gardera des séquelles. Tout dépend de la quantité de sang qu'on lui a volé. Je vais la faire transférer dans mon laboratoire pour la garder sous surveillance constante."
La matriarche se mit à inspecter la chambre.
"Votre élève ne semble pas s'être défendue. Elle ne porte aucune autre blessure ou contusion, et il n'y a aucune trace de lutte dans la pièce. Tout paraît en ordre. Elle devait donc connaître celui qui l'a attaquée.
- Un autre étudiant ? Orianne était très appréciée. Je ne vois pas qui pourrait lui en vouloir à ce point.
- Le coupable ne l'a peut-être pas agressée pour un motif personnel. De toute évidence, il a emporté avec lui le sang qu'il lui a volé. Il doit donc vouloir en faire quelque chose. Est-ce qu'il y a un étudiant, à ta connaissance, qui pourrait avoir besoin de sang humain pour ses recherches ?
- Non. Mais je vais tout de même vérifier. Je ne suis pas la seule à encadrer les travaux de nos jeunes érudits."

#4 2017-02-27 12:22:09

Dame Corbeau

Re : un prétendant turbulant

La jeune Orianne avait repris conscience et se remettait lentement. Physiquement, du moins : elle était tout d'abord restée prostrée une journée entière dans son lit, mutique et le regard fixe, avant de reprendre un semblant d'activité. Mais une grande partie de sa mémoire semblait effacée, y compris, bien sûr, les souvenirs de son étrange agression. De plus, l'examen minutieux de sa chambre n'avait pas permis de découvrir le moindre indice sur l'identité du coupable, et la matriarche Elverid était inquiète à l'idée qu'il pût récidiver à tout moment.

Quant à Apogryphe, il désespérait de ne pouvoir approcher Elverid, qui, accaparée par ses fonctions, fréquentait peu l'université. Il continuait cependant à préparer son plan. Il mettrait encore une dizaine de jours à préparer, l'une après l'autre, les trois potions dont il avait besoin. Non que ces mixtures fussent très longues à préparer, mais il voulait éviter d'attirer l'attention de Séraphina sur ses travaux en laboratoire et de devoir répondre à trop de questions sur leur finalité.

Environ une semaine s'écoula sans nouvel incident. Puis un matin, une étudiante d'un autre groupe fut portée manquante. Après ce qui était arrivé à Orianne, sa disparition souleva immédiatement une grande inquiétude. La matriarche fut immédiatement avertie et organisa les recherches qui se poursuivirent toute la journée.
La jeune fille fut finalement retrouvée inconsciente à la tombée de la nuit, et transportée immédiatement dans le laboratoire d'Elverid, qui l'examina minutieusement en présence de Séraphina.
"Alors ? C'est bien ce que je crains ?
- Oui. J'ai trouvé les mêmes traces de piqûre à la jambe que sur Orianne, un peu plus bas sur l'artère, toutefois. Le voleur de sang a fait une nouvelle victime. Et on n'a toujours aucune idée de son identité.
- Orianne fait-elle des progrès ?
- J'ai essayé plusieurs méthodes pour stimuler sa mémoire, mais sans succès. Il reste a espérer que ma nouvelle patiente aura davantage de souvenirs qu'elle à son réveil... Si elle se réveille...
Réunis nos meilleurs érudits et expose-leur la situation en détail. Toute idée sera la bienvenue.
"

#5 2017-03-21 18:31:21

Dame Corbeau

Re : un prétendant turbulant

La seconde victime du voleur de sang s'était réveillée dans le même état qu'Orianne. Les deux patientes étaient à présent isolées dans une pièce attenante au laboratoire d'Elverid et gardées en permanence par des chasseresses. Mais aucun remède, aucune technique de stimulation mentale ne semblait réussir à leur faire retrouver la mémoire.
Comme tous les jours depuis près de deux semaines, Séraphina retrouva la matriarche dans son cabinet d'étude.
"Toujours aucun progrès ?
- Non. Et de ton côté, as-tu trouvé d'autres traités de médecine qui pourraient contenir des informations utiles ?
- Tous les étudiants de mon groupe, ainsi que quelques autres, se sont engagés cette recherche. Tout ce que notre bibliothèque compte d'ouvrage médicaux a été étudié en détail. Nous n'avons rien trouvé de plus que ce que tu as déjà."
La doyenne marqua une courte pause avant de reprendre.
"Nous avons un autre problème. Ces deux agressions ont marqué les esprits, et les rumeurs les plus folles courent à propos de leur auteur. Certains étudiants commencent à avoir peur, et je crains qu'un vent de panique ne finisse par s'installer.
- Je m'inquiète aussi pour les questions de sécurité...
Les deux agressions ont eu lieu à une semaine d'intervalle, et cinq jours se sont déjà écoulés depuis la deuxième. Si le coupable continue à agir avec la même régularité, il devrait frapper à nouveau après-demain. D'ici là, il faudra avoir mis en place les mesures de sécurité que j'ai consignées ce matin-même dans ce décret.
"
Elverid remit un parchemin à Séraphina, qui le lut immédiatement.

A l'attention de tous les étudiants et personnels de l'université.

Au vu des récents événements, il est nécessaire de mettre en place des mesures exceptionnel afin de garantir la sécurité de tous. Des chasseresses patrouilleront donc en permanence dans l'enceinte de l'université et à ses abords immédiats. Il est également demandé à tous les étudiants et résidents de se conformer aux consignes suivantes :

1. Ne circulez pas hors des bâtiments ou dans les couloirs après la tombée de la nuit.
2. Verrouillez la porte de votre chambre lorsque vous vous y trouvez, et n'y recevez pas de visiteurs.
3. Durant la journée, limitez vos déplacements au strict minimum, et circulez de préférence en groupe.
4. Lorsque vous vous trouvez seul dans une salle d'étude ou un laboratoire, verrouillez la porte après vous être assuré que votre professeur possède un double de la clef.
5. Si vous remarquez un fait ou un comportement suspect, informez-en immédiatement la patrouille la plus proche.
6. Ceux qui ont appris le maniement des armes devront en porter une en permanence.

"Ces mesures doivent être mises en place avant deux jours. Je ne tiens pas à avoir un troisième patient.
- Je vais immédiatement les faire diffuser.
De mon côté, je vais rassembler toute la garde et organiser les patrouilles."

Les deux femmes passèrent l'après-midi à organiser les mesures de sécurité. Enfin, lorsque tout fut en place, Elverid, accompagnée d'une demi-douzaine de chasseresses, retrouva la doyenne dans son bureau à l'université. Cette dernière les accueillit avec son habituel sourire malgré son étonnement de voir que la matriarche n'était pas seule.
"Les instructions de sécurité ont été transmises par tous les professeurs et placardées un peu partout.
- Des instructions qui valent aussi pour toi. Et j'ai décidé de t'assigner une escorte permanente.
- Je doute que ce soit nécessaire. De toute évidence, le voleur de sang choisit des victimes jeunes. Mais soit, je renoncerai à mon habitude de travailler tard, ne serait-ce que pour donner l'exemple..."
La conversation fut interrompue par le bruit de la porte s'ouvrant brusquement. En se retournant, Elverid se trouva face à un groupe de trois jeunes gens, deux garçons et une fille, qui paraissaient être des étudiants... à ceci près qu'ils avaient le regard étrangement fixe. L'un après l'autre, ils entrèrent lentement dans le bureau sans dire une parole. Séraphina se leva et s'adressa à eux d'un ton sévère.
"Hé bien, en voilà des façons d'entrer dans mon bureau ! Que voulez-vous qui ne puisse pas attendre demain ?"
Les étudiants ne répondirent pas. Ils sortirent chacun une dague dissimulée sous leurs vêtements et, sans prêter la moindre attention aux autres personnes présentes, s'avancèrent vers la doyenne.
Immédiatement, Elverid se plaça devant la vieille femme, la forçant à reculer vers le fond de son bureau, et la lutte s'engagea entre les chasseresses et les trois jeunes gens, dont la force semblait avoir été décuplée par quelque moyen mystérieux.
Les minutes s'égrenèrent, interminables. Les chasseresses, bien qu'ayant l'avantage du nombre, paraissaient à tout moment sur le point d'être débordées. L'une d'entre elle tomba, puis une seconde, face aux assaillants qui semblaient insensibles aux blessures. Les voyant s'approcher, Elverid se précipita en avant et parvint à saisir une épée tombée au sol. Au moment où elle s'apprêtait à se lancer dans la bataille, une seconde patrouille fit irruption dans la pièce, et les trois jeunes gens furent enfin maîtrisés au terme d'un combat acharné.

Une fois le calme revenu, la doyenne s'avança en regardant autour d'elle, l'air consterné, son bureau totalement mis à sac, les écritoires renversés, les meubles brisés, les ouvrages de sa bibliothèque éparpillés au sol.
"Mais qu'est-ce qui leur a pris ?... Des étudiants si sérieux...
- Un mystère de plus à résoudre. Tu penses toujours que tu n'as pas besoin d'escorte ?"
Séraphina ne répondit pas. La matriarche se tourna vers la patrouille arrivée en renfort.
"Enfermez-les. Je les examinerai dès que j'en aurai terminé ici."
Les chasseresses s'éloignèrent avec les trois jeunes gens qu'elles avaient dû attacher solidement pour parvenir à les maîtriser, pendant qu'Elverid examinait les deux blessées.

#6 2017-04-09 17:31:22

Elverid

Re : un prétendant turbulant

Après une nuit passée à s'interroger sur les derniers évènements, Elverid retourna voir les prisonniers dès les premières lueurs de l'aube. La veille au soir, leur état d'agitation l'avait empêchée de les examiner. Elle fut accueillie par la capitaine de la garde qui la conduisit immédiatement vers la cellule où était enfermé l'un des garçons. La matriarche se fit ouvrir la porte et entra, accompagnée par deux chasseresses.
Le jeune homme était allongé sur la couchette et semblait dormir profondément. Elverid s'approcha avec précautions et le secoua un peu. Il se réveilla en sursaut et se redressa sur son séant en regardant autour de lui.
"Mais... Je ne suis pas dans ma chambre ?... Matriarche !
- tu viens de passer la nuit dans les geôles. Te souviens-tu de ce que tu as fait hier après-midi ?"
L'étonnement du jeune homme sembla se muer en angoisse. Il fini par bredouiller :
"N-non...
- Hier en fin d'après-midi, toi et deux autres étudiants avez tenté de tuer la doyenne Séraphina."
Le prisonnier sembla sur le point de s'effondrer. Il resta sans voix, recroquevillé sur sa couchette pendant quelques instants avant de relever la tête vers Elverid.
"Matriarche... je ne peux pas avoir fait ça...
- J'étais présente. Et je peux t'assurer que toi et les deux autres étiez plus que déterminés. Il a fallu une douzaine de chasseresses en armes pour vous maîtriser. Cependant... Il m'apparaît clairement que vous n'étiez pas dans votre état normal. Quelle est la dernière chose dont tu te souviens ?
- Après la séance de laboratoire d'hier matin, moi et quelques autres, nous sommes allés prendre notre repas de midi chez... euh...
- Chez qui ?"
Pendant quelques instants, le garçon sembla chercher en vain à rassembler ses souvenirs, avant de répondre d'une voix blanche :
"Je ne me rappelle plus !"
Elverid se détourna quelques instants pour réfléchir et fit quelques pas vers la porte. Le prisonnier se leva et la suivit des yeux, l'air angoissé. Il finit par oser une question.
"Vous me croyez, n'est-ce pas ?"
La matriarche se retourna vers lui.
"Oui. De toute évidence, toi et les autres étiez sous l'influence de quelque chose lorsque vous avez agressé la doyenne. Reste à savoir quoi... Il est sans doute trop tard pour le découvrir en vous examinant, mais je vais tout de même essayer. Et dans tous les cas... tant qu'on ne sait pas ce qui vous est arrivé, je préfère vous garder tous les trois enfermés ici pour la sécurité de tous."
Le jeune homme acquiesca et retomba assis sur sa couchette. Elverid l'examina sans rien trouver d'anormal, puis quitta la cellule, laissant derrière elle un prisonnier effondré.

L'interrogatoire des deux autres donna le même résultat. Une énigme de plus. Et toutefois, au milieu de toutes ces nouvelles questions, se dégageait une unique certitude : l'instigateur de tout ceci ne pouvait être que le mystérieux hôte chez qui ces trois-là avaient déjeuné la veille. Restait à savoir de qui il s'agissait. Le seul moyen pour cela était d'interroger tous leurs condisciples, et toute personne susceptible de les avoir vus. Cela prendrait du temps, et il faudrait mettre à contribution les scribes et les professeurs pour recueillir tous les témoignages.
Elverid décida d'aller sans tarder retrouver la doyenne Séraphina. Elle trouva la vieille dame en train de terminer de ranger ses précieux livres sur les étagères remises en place.
"Bonjour Elverid. Des scribes ont eu la gentillesse de m'aider à remettre de l'ordre. Es-tu parvenue à savoir ce qui a pris à mes trois étudiants ?
- J'ai quelques éléments de réponse : la dernière chose qu'ils se rappellent est qu'ils étaient tous invités à déjeuner par un ami commun... dont ils sont incapables de donner l'identité. Ils n'ont aucun souvenir de ce qu'ils ont fait à partir de midi. Je pense qu'ils ont été drogués... Nous allons devoir interroger toutes les personnes qu'ils ont l'habitude de fréquenter.
- En commençant par tous les étudiants de leur groupe. Je dois justement les rejoindre ce matin dans leur salle d'étude. Je te les enverrai un par un."
La vieille dame prit une pile de parchemins et se dirigea vers la porte. Au moment de sortir, elle s'arrêta net et se tourna à nouveau vers Elverid.
"Oh ! Avec tous ces évènements perturbants, j'avais oublié !
- Quoi donc ?
- Un groupe de nos jeunes érudits organise une série de conférences qui doit réunir les meilleurs étudiants de tous nos fiefs, afin qu'ils puissent échanger sur leurs travaux.
- Il serait plus sage de différer ce regroupement jusqu'à ce que les choses aient repris leur cours normal ici.
- Je crains fort qu'il ne soit trop tard pour l'annuler. Il doit commencer dans deux jours. Les participants venant de nos fiefs les plus lointains doivent déjà être en route."
Elverid réfléchit quelques instants, visiblement contrariée.
"Dans deux jours... Si le prochain vol de sang a bien lieu demain soir, espérons que les mesures de sécurité suffiront à attraper le coupable. Dans le cas contraire... Je vais dès maintenant demander des renforts de troupes à nos fiefs les plus proches."

Dernière modification par Elverid (2017-04-09 17:37:53)

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