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Le comte de la Mortquitue venait de rentrer de la chasse. Il avait passé la journée à courir après un dix cors qui lui avait finalement échappé. Il était, par conséquent, d'assez méchante humeur.
Il peut sembler paradoxal pour qui connait les rites des adeptes de Podeszwa que le comte persiste dans la pratique de la chasse puisque ces derniers ne mangent pas la viande des mammifères. On pourrait croire que le comte commet des entorses à son régime et l'on se tromperait lourdement. le comte respecte scrupuleusement le rite et ne se nourrit que de poisson et de volaille. La viande du cerf sert à nourrir les chiens de sa meute, ainsi il ne pêche pas contre sa religion et s'offre le plaisir de son sport favori. Le comte ne se préoccupe pas de savoir pourquoi l'Eglise a institué ce rite. Il le suit parce qu'il a épousé cette religion et qu'il en a, de ce fait, contracté l'obligation. L'Eglise interdit de manger les animaux, elle n'interdit pas de les tuer et ses chiens ne sont pas tenus de suivre le régime imposé par Podeszwa puisqu'ils sont, par nature, carnivores. Il ne voit donc pas ce que sa pratique de la chasse pourrait avoir d'antinomique.
Alors qu'il passait la porte de la grande salle d'apparat ou l'attendait un bon feu, il se fit rattraper par un serviteur, sans doute un peu trop zèlé, qui, lui courant après, se disait porteur d'une missive tout juste arrivée.
Le serviteur en question, un obscur comptable au service de son intendant, n'était pas préposé au courrier et l'obséquieuse révérence qu'il lui fit, lui parut suspecte. En d'autres circonstances il aurait négligé le parchemin qu'on lui tendait, mais il le prit, décacheta sa cire et l'ouvrit. Ce qu'il lut lui parut bien plus étrange encore.
"Bonjour Monseigneur, Merci beaucoup, signé Baron Yiam.
Qui donc pouvait bien être ce Baron? Et pourquoi ces remerciements? Le comte retourna le vélin de tous cotés pour chercher un indice quelconque, sans succès. Était-ce un nouveau disciple de l'Eglise dont il aurait oublié le nom? Il avait, en effet, recommandé quelques seigneurs de sa connaissance au frère Vashem Greznik, mais pas de baron Yiam, il en était certain. Tout en gardant la missive dans la main, il s'affala sur son fauteuil favori, demanda qu'on lui retira ses bottes et qu'on fit quérir son Intendant.
Quelques minutes plus tard, Pylade de Basétage entra dans la pièce et vint saluer son maître. Enguerrand, une coupe de vin dans une main, la missive dans l'autre demanda à brule-pourpoint:
"Connaitrions-nous un baron Yiam, Messire Pylade?"
L'Intendant loucha sur la missive. Il blêmit légèrement, mais réussit à cacher son trouble. " Il est possible, en effet, que ce seigneur ne nous soit pas inconnu! Y aurait-il un problème quelconque, Monseigneur?
"Il semblerait que non! Puisqu'il me remercie dans sa missive! Mais, par Podeszwa, j'aimerai bien savoir de quoi!
- Il ne le dit pas?" S'inquièta Pylade.
" Pas le moins du monde! Voyez vous-même!" Et il tend la missive.
"Comme je n'ai pas souvenance d'avoir aidé en quoi que ce soit ce seigneur, et puisqu'il ne vous est pas inconnu, peut-être pourriez-vous m'éclairer!
"Voyons! le baron Yiam...."
Pylade fait mine de se plonger dans ses souvenirs!
Ah oui! Cela me revient! Oh, il s'agit d'une broutille....Vous allez rire! Trois fois rien en vérité. Le baron est un jeune seigneur fraichement débarqué sur Okord. Il a été victime d'ignobles exactions de la part de ces affreux buveurs de sang de la secte d'Yggnir. Votre seigneurie les a vaillamment combattu et vous avez même failli capturer le chef....Le Tokva comme ils l'appellent....Oui...Enfin failli seulement!
Ahum....Bref!
Ce jeune baron donc, avait souffert un massacre en ses terres et je lui ai fait envoyer quelques inactifs pour reconstituer sa main d'oeuvre. C'est sans doute ce qui a motivé cette lettre de remerciements.
- Et vous ne m'en avez rien dit, Messire Pylade?
- Ma foi, vous étiez à la chasse, loin de tout... Je n'allais pas vous déranger pour si peu. Ne suis-je pas là pour vous ôter tout souci? Je me suis dit qu'un adepte de Podeszwa ne laisserait pas un frère dans la détresse! Car je me suis renseigné! Ce baron fait partie de votre église.
- Frère Yiam, dites-vous? Oui, prononcé de cette manière, cela m'éveille le souvenir d'un adepte! Fort bien! Et combien de péons lui avez-vous envoyé.
- Oh très peu! Juste quelques-uns....
- Mais il fallait faire bien plus! Si ce frère a souffert un massacre dans un de ses fiefs c'est au bas mot 2000 inactifs qu'il faut lui envoyer! Nous avons bien cela en réserve que diable. Dix-sept fiefs sis sur de bonnes terres à blé. ça doit grouiller de marmots dans les villages.
- Hélas, Messire c'est impossible. je ne vous l'ai pas dit pour ne pas vous alarmer, mais nous avons souffert d'une épidémie de chiasse infernale. C'est malheureux à dire mais l'eau des puits s'est viciée.... Les cochons ont attrapé la grippe porcine, l'ont transmise aux marmots, justement, qui s'amusent tant dans leurs soue et finalement nous n'avons plus d'inactifs.
- Plus d'inactifs.
- Plus un seul, Messire! Ils meurent comme des mouches! Par bonheur, ce drame ne touche pas les actifs, et nos productions n'en souffrent pas!
- C'est fâcheux quand même! Il faut remédier à cela!
- Je m'y emploi, Monseigneur! Je m'y emploi! J'ai déjà pris des mesures draconiennes.
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