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#1 2016-10-26 12:10:59

Enguerrand

La bataille de Blancherives

Le messager ruisselait de sueur au point qu’on pouvait penser qu’il avait couru à côté de son cheval au lieu de rester en selle. La poussière noire du chemin collait à sa peau grasse et lui donnait l’air d’un ramoneur. Sans marquer le moindre temps d’arrêt, Il s’était précipité dans la tente du sire de Commines, commandant de l’ost du comte de la Mortquitue.

« Messire l’armée d’Andior est en vue !
- Enfin ! Je désespérais de voir leurs écus. Ainsi il se rabat sur Blancherive!  Et moi qui m’inquiétais de devoir lever ce siège inutile. Voilà qu’il vient à nous ! »

Cela fait plus de deux jours que l’ost campe devant les murs de Blancherive. Suivant les consignes de son seigneur et maître, Commines a reçu l’ordre d’assiéger la ville pour coincer la puissante armée d’Andior qui devait s’y trouver. Il a laissé ses deux mille engins de siège et n’a pas attendu les mille deux cents archers qui étaient encore en train de traverser le grand canal pour être sûr de surprendre l’oiseau au nid.

Il avait pris ce risque, mais cela n’avait pas suffi. Une fois devant les murs, ses espions n’y avaient trouvé aucune trace d’Andior. Pourtant, une armée aussi importante et si pauvre en ravitaillement ne pouvait avoir retraversé le grand canal. Il avait ordonné des espionnages tout alentours et n’avait rien obtenu comme si les treize mille hommes du comte s’étaient évaporés dans la nature. Et voilà qu’au moment où il se demandait s’il ne fallait pas repartir bredouille, le comte venait à sa rencontre, sans doute à court de vivres et obligé de regagner ses hauts murs protecteurs.

« Que l’armée se mette en ordre de bataille ! » Ordonna-t-il, au combe le l’excitation. « Thierry et ses lanciers au centre. Les archers derrière eux. Le margrave Vonglück et ses quatre mille Strolatz formeront l’aile gauche, je prends la droite avec le reste de la cavalerie. »

L’ost de la Mortquitue compte près de dix-neuf mille hommes. Certes le comte n’est pas là et c’est un handicap. Si l’armée d’Andior ne compte que quatorze mille hommes, leur chef les commande et cela peut changer le cours de la bataille. Commines est un commandant avisé et courageux mais il n’a pas le charisme d’Enguerrand de la Pétaudière. L’affaire sera chaude, à n’en point douter.

L’armée est alignée suivant les consignes de son chef. Les chevaliers, cavaliers et Strolatz ont démonté pour mettre genoux à terre comme le reste de la troupe. Ils prient Podeszwa en silence. Les aumôniers du culte passent dans les rangs en exécutant les signes rituels sensés les protéger.  Au loin, les rumeurs de l’armée adverse leur parviennent. Ce ne sont que cris, beuglement et éructations en tout genre. Le vacarme provient surtout des deux mille Huskarls qui enrichissent leur démonstration de gestes obscènes. Ils se distinguent par la couleur rouge dont ils s’enduisent de la tête aux pieds et qui doit représenter le sang de l’ennemi qu’ils vont faite couler.

La prière terminée, les hommes remontent en selle et les trompes signalent le début du combat. Il n’y a pas eu de pourparlers. Les disciples d’Yggnir sont là pour les tuer et Commines a pour objectif de détruire ce ramassis idolâtres buveurs de sang humain. Il n’y aura pas de quartier. Les hommes le savent et c’est pourquoi ils remettent leurs âmes au Dieu unique créateur de toutes choses.

Alors que les lanciers de chaque bord avancent sur la plaine, une nuée de flèche s’élève dans les deux camps. Le nombre des archers est en faveur de l’ennemi, mais pas tant que cela, pourtant le résultat est très inégal. Les rangs des lanciers de Commines tombent par pans entiers alors que les flèches de ses archers entament à peine l’ennemi.  Le vent s’est levé en défaveur des adeptes de Podeszwa et réduit la portée et la puissance de leurs traits. Le commandant assiste impuissant au massacre de ses piétons. Il décide, sans plus attendre, de lancer sa cavalerie pour prendre toute cette piétaille en étau et la réduire au silence.

Andior, sur une petite proéminence du terrain a vu la manœuvre, il ordonne à ses deux mille cinq cent chevaliers et à ses deux mille cavaliers de contrer la menace. La rencontre a lieu au milieu du terrain dans un fracas épouvantable. Tant de poussière est soulevée qu’à la fin on ne distingue plus rien. Ce n’est que hennissement de chevaux, cris et tintement de métal.

Quand les trompes d’Andior rappellent ses hommes, seuls mille cinq cent cavaliers s’extirpent du champ de bataille. Commines a perdu la moitié de ses huit mille cavaliers mais les rangs de ses chevaliers et de ses Strolatz sont presque intacts, il va pouvoir lancer une seconde charge qui rasera tout sur son passage.

Il prend lui-même la tête de sa cavalerie et se lance à corps perdu à travers la plaine jonchée de cadavres.  La puissance de la charge est dévastatrice. Les derniers cavaliers d’Andior sont bousculés, les deux mille lanciers survivant du début de journée écrasés et elle met en déroute les Huskarls qui laissent presque la moitié de leurs effectifs sur le terrain avant de se replier derrière les engins de siège.

Commines rappelle ses troupes pour reformer une ligne et relancer une troisième charge. Cette fois-ci l’élan ne peut être brisé. Le mur de cuirasses montés sur les puissants destriers déferle sur les derniers retranchements de l’ennemi, détruit ses chars, ses transporteurs et tous ses engins de siège, mais Andior a rassemblé un dernier carré composé de mille deux cent Huskarls soutenus par deux mille archers autour de son promontoire.

Les vagues de chevaliers et de Strolatz se brisent sur le mur de Huskarls. Les flèches pleuvent sur les cavaliers dont les montures s’effondrent. Commines se retrouve à pied et se bat au corps à corps au milieu de ses hommes. Le combat est furieux, titanesque. Il veut à tout prix atteindre Andior et prendre sa tête. Mais ce dernier est trop bien protégé. Malgré tous ses efforts, Commines est tué avant de pouvoir l’atteindre.

Les derniers guerriers de la Mortquitue se battent encore, malgré la mort de leur chef. Ils savent que l’ennemi ne fera pas merci et qu’il vaut mieux mourir l’épée à la main que de subir le déshonneur d’une décapitation honteuse.
Le dernier d’entre eux tombe sous les coups de cinq Huskarls en criant Podeszwa.

Andior est victorieux. Son armée est entièrement détruite, mais le champ de bataille est sien.

Trente-deux mille hommes sont tombés.

Les Huskarls survivants fêtent la victoire en décapitant les cadavres des adeptes de Podeszwa et en ouvrant leurs cranes pour en déguster la cervelle encore chaude.

Yggnir peut être satisfait, le bain de sang annoncé à bien eu lieu.

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