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#26 2018-02-28 12:35:52

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

K-Lean se réveilla avec une détermination toute neuve. La mission avant tout. Il n'avait qu'une hâte, quitter ce port et poursuivre l'aventure. Ses hommes seraient bien restés un peu plus longtemps. Ils avaient récupéré et se sentaient d'attaque, mais davantage pour honorer les danseuses plutôt que pour ramer, d'autant que les tarifs d'Illun Bitur étaient alléchants. Mais K-Lean resta inflexible. La mission, la mission, la mission. Naki Bol essaya bien de parlementer. Il demandait un répit pour faire une visite, sans oser avouer qu'il s'agissait du marchand, mais il reçut une fin de non-recevoir sèche et sans appel.
Le vent s'était levé de l'Est, il fallait en profiter.

Alors que le Knorr glissait sur l'eau jaunâtre du fleuve et qu'Illun Bitur s'éloignait, Elvane, qui n'avait pas commenté le départ précipité, s'approcha de K-Lean et lui parla à voix basse.

Il parait que des trières de guerre d'Abrasil sillonnent le fleuve en amont, mais que ce n'est rien à coté de ce qui nous attend!

- Qu'est-ce qui nous attend de si terrible?   K-Lean avait répondu en grognant, comme s'il se fichait éperdument de la réponse.

Eh bien justement, on ne sait pas! Vous avez fait fuir le gars qui allait nous le dire!

- Un colporteur de mauvaises nouvelles ! Et vous croyez ces ragots? De toute façon quoi qu'il y ait devant nous, il faudra l'affronter. On a une mission et je ne suis pas le genre à retourner à Okord, la queue entre les jambes. ce qui m'importe c'est le prochain port de ravitaillement et éventuellement le temps qu'il fera demain.

Le Knorr longeait la berge sud, comme l'avait ordonné K-Lean. Ils étaient assez près pour distinguer les détails de la côte. Les collines boisées avaient laissé place à un paysage bas et aride. Un univers morne de sable et d'ocre, égayé seulement  par de rares tâches de verdure. Ils étaient seuls à naviguer dans ces eaux. Ce détail intrigua K-Lean. Il se demanda d'où pouvaient bien venir tous ces bateaux qui n'avaient cessé d'envahir les docks d'Illun Bitur, quand ils y étaient. Il s'en ouvrit à Elvane.

Ils viennent de la berge opposée! Il n'y a rien de ce côté-ci pendant des dizaines de lieues. En plus il parait que la côte est maudite. ça tombe bien, on sera tranquille. Les Lumoédiens ne viendront pas nous chercher des poux.

- Maudite? S'inquiète K-Lean.  Maudite comment?

- Racontars de vieilles femmes! Ne vous inquiétez pas. Vous avez peur des histoires de croque-mitaine?

K-Lean n'osa pas avouer que les esprits le terrifiaient. Il n'avait pas peur d'affronter des ennemis, même en surnombre. Mourir au combat était l’aboutissement naturel de la vie du guerrier. Mais les esprits c'était autre chose. Des entités malfaisantes qu'on ne pouvait combattre à la hache et qui vous volait votre âme pour la vendre à Krom. Il prit sur lui de ne pas ordonner le changement de cap, mais chaque heure qui passait le rendait plus nerveux et la nuit qui n'allait pas tarder, plus encore. A bout de nerfs, il décida enfin de s'éloigner de la côte maudite, mais au moment où il allait donner l'ordre, le Knorr freina brutalement, prit de la bande et s'immobilisa, la voile claquant inutilement dans le vent.

Tous les hommes se regardèrent, incrédules, K-Lean voyant déjà, dans ce maléfice, l'oeuvre d'un Djinn particulièrement vicieux.

Elvane, par contre, comprit tout de suite.

Meeeerde! Cria-t-elle.
On s'est échoué sur un banc de sable!

#27 2018-03-01 20:11:27

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Voyant que K-lean n'avait pas bien compris, Omånn Dø appela quelques huskarls à côté de lui :
"Avec moi, on va le ressortir.   Toi, baisse la voile le temps de l'opération."
Omånn Dø et les huskalrs passèrent par dessus le bord avant du knörr tandis que le dernier descendait la voile.
Elvane se pencha par dessus la bordure pour regarder s'il était encore possible de voir les bancs de sable et les contourner.
"On voit rien K-lean, on ferait mieux de faire étape là." - du menton elle pointa vers la berge sablonneuse complètement déserte. Il n'y avait pas un seul arbuste sur ce secteur, pas une seule habitation ou édifice en vue.
" Fais chier." K-lean observait la berge pour se rassurer mais il n'était pas à l'aise, il se sentait oppressé, comme si on était en train de lui jeter un sort.
Sur sa gauche à l'arrière du bateau il remarqua que Spårr Høff observait lui aussi la berge et qu'il venait de prendre en main son arc et une flèche dans son carquois.
K-lean scruta donc plus précisément pour trouver ce qu'avait vu Spårr Høff et s'approcha de lui en chuchotant.
"Qu'y a t-il Spårr Høff ?
- J'ai rien vu, mais y'a quelque chose là bas."
- Les deux autres archers imitèrent le meilleur tireur de l'équipe et cherchèrent eux aussi des traces de vie.
Les quelques hommes observèrent la berge durant quelques petites minutes pendant que les autres s'évertuaient à libérer le knörr ensablé.
Lorsqu'ils réussirent, ils remontèrent aussitôt à bord.
" Alors on fait quoi K-lean ? - demanda Elvane.
- On part sur l'autre berge, on va y camper pour la nuit. - Il montra l'autre berge avec son bras sans se retourner et sans lâcher du regard la berge qui commençait à être recouverte par la nuit.
Les huskarls se mirent à la rame pour reculer puis faire pivoter le Drakkar en direction de la berge nord.

Après quelques courtes minutes, le vent était complètement tombé et la nuit étouffait tous les sons environnants. Seul le clapotis de l'eau contre la proue leur permettait de constater qu'ils n'étaient pas pris dans un autre banc de sable.
Omånn Dø beugla vers K-lean :
"Bordel mais y voit moins que dans le cul d'une poule ici ! K-lean merde ! Posons nous sur cette berge, en plus on avance à rien le courant est trop fort ici !
- Alors redescendons le courant ! Mais on crèche pas là !
- Mais t'écoutes quand on te cause !? On n'avance à rien, ni vers l'amont ni vers l'aval ! Posons nous là et demain on passera les bancs à pied s'il le faut !"

Omånn Dø avait raison, c'était la seule décision logique à prendre. Mais il était nerveux, et l'instinct presque animal de Spårr Høff avait aussi senti quelque chose.

"Qu'est ce que t'en penses Spårr Høff ?
- J'sais pas. Y'a quelque chose là bas. Mais ça veut pas dire que ce sont des esprits ni que ça veut nous faire la peau.
- Hmmm. Bah, faut bien crever à cause de quelque chose.
- puis s'en retournant - Allez, on va s'échouer là bas et on repart à l'aube."
Le vent se remit à souffler légèrement, comme pour les emmener plus rapidement sur cette berge d'apparence déserte...


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#28 2018-03-02 15:06:32

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Le sable crissa sous la quille du knörr et K-Lean fût le premier à sauter sur la plage. Sparr Hoff et les deux autres archers, l’arc à la main, une flèche encochée, essayaient de percer les ténèbres, guettant le moindre mouvement suspect.

Ramassez tout le bois flotté que vous trouvez ! Nous allons allumer des feux. Cria K-Lean, pour qui il était évident que le seul remède contre les esprits était la lumière.
Elvane, qui ne voyait pas le danger sous cet angle, pensait différemment. Restée à la proue du Knörr, elle observait les dunes claires qui se détachaient faiblement sur l’horizon noir.

Si nous allumons des feux, on va nous repérer de loin et nous ferons des cibles faciles.

K-Lean lui en voulu de cette remarque. Après tout c’était de sa faute s’il ne respectait pas les règles élémentaires de prudence en abordant un rivage inconnu. Elle aurait dû garder ses histoires de malédiction pour elle !

Des cibles pour qui ? Si tu sais ce qu’il y a sur cette plage, dis-le-moi et je t’écouterai ! Dans le cas contraire, laisse-moi faire à ma manière ! Lui répondit-il, assez sèchement.
Jusqu’à preuve du contraire, c’est moi qui commande.

Elvane prit la remarque en pleine figure. Elle alla s’asseoir en poussant un bon gros juron pour se calmer les nerfs. Après tout qu’est-ce qu’elle en avait à foutre !

Omann Do était descendu et harcelait ses hommes. Plus vite, Putain du Nord ! Vous avez entendu le capitaine ? Fini les vacances ! On se bouge le cul ! C’est pas le bois mort qui manque ! Je veux que cette plage s’illumine comme un jour de carnaval !

Sparr Hoff, toujours à bord, l’œil rivé sur la crête des dunes, essayant d’imaginer ce qui pourrait en surgir, avait surpris l’altercation entre son chef et leur guide. Il pouvait sentir la vexation de la jeune femme et lui confia en souriant:
Faut pas lui en vouloir, ma belle ! Il a peur du noir !  Puis il gueula à l’attention d’Omann Do et un peu pour embêter son chef:

Plus loin, les feux, que j’ai le temps de voir arriver les spectres !

Une heure plus tard, l’équipage, rassemblé autour du plus grand des brasiers, faisait cuire des tubéreuses et des harengs, sur de longs bâtons.

Qu’est-ce qu’il y a derrière ces dunes ? Demandait l’un d’eux.

Pour ce que j’en ai vu, des marais ! Répondit un des éclaireurs que K-Lean avait envoyé en reconnaissance.

Des marais en plein désert ?

- Des étangs si tu préfères, camarade ! La flotte c’est pas ça qui manque par ici ! Si elle tombe pas du ciel, elle doit venir fleuve. Sigurd a dit qu’elle devait être saumâtre, parce qu’y a rien qui pousse à part des trainasses et du jonc.
Au fait ! Quelqu’un sait où il est Sigurd ? Je l’vois pas !
 
- J’croyais qu’il était rev’nu avec toi ! Eh, Chef ! Il est où Sigurd ?

K-Lean reçût la question comme un pavé sur la tête. Après avoir fait un rapide décompte de ses hommes, l’absence se confirma. Or si un éclaireur ne revient pas, c’est qu’il a fait une mauvaise rencontre.  Mais si ça avait été le cas, Sigurd aurait gueulé et il a la voix qui porte. Pourtant on n’avait rien entendu.
Putain du Nord de putain du Nord, se dit K-Lean. Ce crétin a pas pu se perdre avec tous ces feux !

#29 2018-03-02 22:59:58

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

"J'l'avais dis qu'y fallait pas allumer de feux..."
K-lean fusilla du regard Elvane qui ruminait encore la décision. L'insurrection en des temps dangereux n'était pas quelque chose qu'il appréciait.
" Au contraire on va en allumer d'autres et on va les mettre plus loin.
Que chacun prenne une torche, on se met en arc de cercle et on s'écarte à la même allure pour agrandir le cercle.
On reste tous en vue du camp où Spårr Høff tu restes avec tes archers.
Dès qu'il y en a un qui voit quelque chose, il agite la torche et Spårr Høff tu appelles tout le monde avec la corne.
A ce moment là tout le monde plante sa torche dans le sable et on rejoint celui qui a vu quelque chose."

K-lean prit le temps de regarder tout le monde dans les yeux pour voir s'il était le seul à s'inquiéter. La plupart étaient dans le même état que lui, mais quelques-uns, dont Omånn Dø ne semblaient pas spécialement perturbés par l'absence de leur équipier.
"Tout le monde à compris, on y va ?
- Je peux rester là moi aussi ?
- le marchand Nåki Bøøl était recroquevillé encore au bord du feu. La peur se lisait dans ses yeux.
- Non, tu te lèves et tu bouges ton cul avec nous. Tout le monde veillera sur tout le monde. Tu te mettras à côté de moi si tu veux."

Les hommes allumèrent chacun une torche avec le bois récupéré et prirent une arme dans l'autre main. Sous le signe de K-lean, les hommes s'avancèrent et l'arc de lumière s'agrandit. Ils avancèrent une dizaine de mètres encore et dépassèrent les torches plantées les plus lointaines. La nuit sombre les enveloppait chacun d'avantage qu'ils avançaient.

Ressenti par K-lean :

K-lean était anxieux, il se retournait toutes les deux secondes. Tantôt sur sa gauche vers Nåki Bøøl juste à côté puis les autres équipiers. Tantôt vers sa droite.
Il regardait rapidement au sol et devant lui. Mais avec les torches ils ne voyaient pas à trois pas. Tout n'était que sable ou nuit.
Ils avançaient encore. Certains beuglaient le nom de leur camarade, mais seul le silence de la nuit leur répondait.
Lorsqu'ils arrivèrent à presque une trentaine de mètres de leur campement, la corne retentit.
Presque soulagés, K-lean et Nåki Bøøl plantèrent leur torche dans le sable et se retournaient vers le camarade qui avait appelé.
A droite... tout le monde avait planté sa torche.
A gauche... aussi.
K-lean ne comprenait pas et se retourna complètement vers le campement.
Spårr Høff agitait frénétiquement une torche au dessus de sa tête, derrière lui K-lean pu observer les deux archers agenouillés au dessus d'un corp.
Il accouru, bientôt suivi par le reste de la troupe.

Ressenti par Spårr Høff :

Spårr Høff était inquiet et il n'aimait pas être en retrait de l'action. De là où il était il pouvait planter sa flèche dans le dos de n'importe lequel de ses équipiers, mais il ne voyait rien au delà, éblouis par les torches. Il n'y avait pas de rochers ou d'arbres qui pouvaient cacher des individus. Pas d'ombres portées dans lesquelles il aurait pu discerner des mouvements.
Il se contentait d'observer l'angle central et les réactions des porteurs, jetant tout de même des coups d'oeils pour vérifier que ses hommes suivaient bien aussi.
Alors que le rayon de torches avait dépassé les vingt cinq mètres, il senti un mouvement derrière. Le temps de se retourner il entendit un petit gémissement...

Putain du nord ! Sigurd !
Les deux autres archers se retournèrent et coururent vers leur compagnon qui était allongé au sol, un peu plus loin au bord de la rive.
Spårr Høff prit la corne et souffla plusieurs fois dedans puis pris une torche du feu et la balança au dessus de sa tête.
Voyant que les équipiers revenaient au camp après avoir planté leurs torches, il alla voir Sigurd.




- Il respire encore Spårr Høff !
- Sigurd ! Ho ! Sigurd !
- Spårr Høff  lui mettait de petites claques pour essayer de le réveiller. Sigurd fronçait les sourcils et tournait la tête, comme un homme que l'on réveillait après une soirée arrosée. Mais il ne se réveillait pas.
- Par Yggnir Sigurd ! Réveille toi !
- J'ai ce qu'il faut !
- Nåki Bøøl accouru en sueur et poussa les autres qui étaient arrivés avant et s'étaient agglutinés autour.
Il sortit un petite fiole de sa chemise, la déboucha et la plaça sous le nez de Sigurd... Qui ouvrit les yeux.
- Putain du nord, ça pue comme un barbecue d'Arald ta merde là... hooo... - il gémit en se frottant la tête
Qu'est ce qu'y m'est arrivé ?
- On aimerait bien le savoir.
- Répondit K-lean - Tu te souviens de quoi ?
- Ben je sais pas trop, je regardais autour d'un coin d'eau pour voir si y'avait pas aut' chose à bouffer que du hareng pis ... pouf, je suis là.
- Il se frotta encore l'arrière du crâne.
Y'en a un de vous qui m'a mis ...
- K... K-lean !
- Nåki Bøøl coupa Sigurd, la voix hésitante
- Ta gueule Nåki Bøøl, laisse le finir.
- K-lean !!
- Nåki Bøøl leva cette fois-ci le bras et pointa du doigt vers les torches qui avaient été installées quelques minutes plus tôt.
Une à une, et de manière aléatoire, elles tombaient au sol et s'éteignaient.
"Ho putain du nord ! Tout le monde en position !" sur cet ordre, tout le monde repris son arme en main et s'installa côte à côte en demi arc de cercle, un genoux à terre. Les 3 archers s'installèrent au centre et bandèrent leur arc.
"Quelqu'un voit quelque chose ?
- Que dalle, fait tout noir.
- Fermez là !
- Spårr Høff aurait voulu un silence total pour 'sentir' ce qu'il pouvait y avoir au delà de la ligne de lumière. Mais le souffle apeuré du marchand et l'adrénaline des autres les faisaient respirer amplement et bruyamment. Toutes les torches de la dernière rangées étaient maintenant éteintes.

Après quelques longues secondes sans mots, une torche à l'extrémité initiale du cercle de lumière vacilla.
Spårr Høff décocha immédiatement sa flèche... que l'on entendit s'enfoncer dans le sable plus loin. Une nouvelle flèche était déjà encochée.
Une seconde torche, puis une troisième s'éteignirent. Les trois flèches des archers volèrent et ne trouvèrent rien que le vent puis le sable.
Nåki Bøøl se mit à prier comme il l'avait fait dans le bateau, d'abord assez silencieusement, puis plus frénétiquement lorsque d'autres torches s'éteignirent tout autour.
Les mains de l'équipage se cramponnait à leurs armes, ils ne savaient pas ce qu'ils affrontaient.
Quelques-uns lancèrent de petits regards à K-lean, qui les sentit.

Il sentait à présent tout le poids de ces hommes et de leur confiance sur ses épaules. Il les avaient emmené au combat sans aucune peur, et ils étaient là aujourd'hui à affronter des spectres... Mais dans un éclair d'esprit, il se dit que ce qu'il y avait devant eux ne leur voulait pas de mal. Sigurd avait été seulement assommé puis ramené auprès d'eux ! Ces choses étaient aussi furtives que le vent, K-lean et son équipage auraient pu être égorgés dans leur sommeil !
K-lean jeta sa hache juste devant lui et se pencha en avant, la tête presque dans le sable, comme s'il priait Yggnir.
Autour de lui, l'équipage ne comprenait pas mais fit tout de suite de même lorsque Omånn Dø et Elvane imitèrent ces gestes.
Tous ne voyaient désormais plus que le sable devant leur visage, le silence de la nuit était pesant... Enfin des pas légers se firent entendre dans le sable, les pas s'approchaient...


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#30 2018-03-03 13:21:39

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Ils étaient prosternés. Tous les fiers navigateurs et les Huskarls assoiffés de sang s’étaient transformés en agneaux dociles, s’offrant au sacrifice. Il avait suffi d’une légende et de quelques flèches tirées au hasard sans résultat, pour faire ressurgir leur angoisse profonde d’un au-delà indicible. Ils avaient suivi leur chef dans ses fantasmes de djinn, de trolls, de gremlins et de toutes les créatures qui peuplent l’imaginaire, pour donner un sens aux phénomènes inexpliqués. La plupart y croyaient aussi et parfois même plus que leur chef. Les rares incrédules s’étaient pliés au rituel par mimétisme ou parce qu’ils n’imaginaient pas s’opposer seuls à leurs visiteurs.
Le nez dans le sable ils attendaient la clémence des esprits, n’osant lever la tête de peur d’être transformés et statue de sel, en vieil arbre torturé ou en bouse de vache.
Ils ne voyaient pas mais entendaient le sable voler et retomber en pluie, ensevelissant les braises et étouffant le crépitement des brasiers. Les flammes mouraient et la nuit retrouvait son royaume.
L’obscurité reprenait ses droits, et pour accentuer le phénomène, la déesse lune était partie se cacher derrière un gros nuage noir.
K-Lean comprit qu’il avait offensé Nott et lui demanda pardon. C’était une prière intérieure. Il implorait le dieu d’épargner ses hommes qui n’avaient fait qu’obéir à ses ordres, tout en s’offrant en victime expiatoire. Il était prêt à subir son juste courroux.
Quand le dernier feu mourût, un silence glacé figea la plage. Il n’y avait pas un brin d’air pour faire chanter les ajoncs ou clapoter l’eau du fleuve sur la berge.
Au bout d’un moment, la lueur froide de la lune refit son apparition.
Elvane, qui commençait à trouver le temps long, fût la première à relever la tête.
Rien ! Il n’y avait rien sinon les restes fumants des brasiers recouverts de sable.

C’est fini ! Dit-elle sobrement en se redressant.

Elle se leva et se débarrassa du sable incrusté dans ses braies en se donnant de grandes claques sur les genoux. Les hommes se relevaient aussi les uns après les autres, étonnés d’être encore en vie.
K-Lean avait la figure pleine de sable, à croire qu’il avait enfoui sa tête dans la plage comme une autruche. Il était souriant, mais on pouvait déceler, aux traces qu’elles avaient laissées, les larmes qui avaient inondé son visage. Il était fier de lui, et surtout de sa vessie qui ne l’avait pas trahie. Ce n’était pas le cas de tout le monde.

Bon ! Bah moi j’vais dormir à bord ! Dit Elvanne.
Les esprits nous ont peut-être accepté sur leur plage, mais elle est aussi habitée par des scorpions bleus.

Tous suivirent son exemple. A part Sparr Hof qui n'arrêtait pas de scruter le crête des dunes.

Le petit matin blême vit nos héros entassés à bord du Knörr, dans les positions exubérantes qu’ils avaient prises dans leur sommeil, pour préserver leurs reins, de la dureté du bois.
Le réveil fût pénible. La nuit avait été mauvaise et le moral de l’équipage était au plus bas. La perspective de ramer toute la journée à contre-courant, dans une zone truffée de pièges et d’esprits sinon malfaisants, tout du moins espiègles, ne les enchantait guère.

Faut qu’on aille de l’autre côté ! Confia K-Lean à Elvane. Je préfère encore les trières déomuliennes s’il y en a, plutôt que ces diableries.

- C’est vous qui voyez ! Le courant est trop fort au milieu du fleuve. On n’avancerait pas et on épuiserait vos rameurs en pure perte. Il faut longer les berges d’un côté ou de l’autre. Soit les bancs de sables et les farceurs qui entretiennent la légendaire malédiction de cette côte, soit la rive de Déomul. Il n'y a pas de trières rassurez- vous! Mais nous serons à portée des archers des fortins qui défendent cette frontière, tous les quarts de lieues.
Il y a une île à deux jours d’ici. Elle est étroite mais longue de deux lieues. C’est un repaire de contrebandiers et de pirates que ni Déomul, ni Erlevan ne contrôlent. La dernière revendication territoriale, remonte à trente ans et s’est terminée en une guerre qui a paralysé le commerce sur le fleuve. Sous la pression de tous les autres riverains, Abrasil, Osterlich, Salahin, Ponobar et même de certaines tribus du cœur de cendres, les belligérants ont été obligés de signer la paix et de renoncer à toute souveraineté sur cette langue de terre. Vous aimerez! C'est pittoresque.

#31 2018-03-13 10:37:03

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Le débat avait pris quelques longues minutes entre les occupants du navire. K-lean n'avait pas voulu se laisser guider par sa peur de ce qu'il ne voyait pas. Il préférait mourir en voyant la hache qui le découperait en deux ou la flèche qui lui perforerait les poumons. Mais la plupart de ses équipiers ne souhaitaient tout simplement pas mourir et préféraient largement l'inconnue des berges soit disant hantées plutôt que les berges à coup sûr truffées de fortins et d'armées Déomuliennes.
K-lean se retrancha, pour une fois, derrière un vote à mains levées qui choisi de prendre la direction des rives sud et sablonneuses.

La journée se passa sans encombre, ils ne croisèrent personne de ce côté ci et n'aperçurent même pas une seule trière de l'autre côté. Le knörr avait profité d'une petite brise chaude provenant du sud pour s'éloigner un peu plus des bancs de sable et remonter le courant sans les rames. Mais le soir venu, le vent se fit de nouveau totalement absent. Et la nuit qui s'annonçait encore sombre et dense réveilla les mêmes craintes de la veille parmi certains navigateurs qui avaient préféré voter pour les rives nord.

"K-lean, on ne commence à plus rien voir dans l'eau. - dit Elvane qui revenait de l'avant. - On va encore se prendre un banc de sable. Vaudrait mieux s'échouer tout de suite sur la berge.
- Ouais t'as raison.
- On n'est pas obligé de forcer, si on se fait la même journée demain, on arrivera sur l'île en fin de soirée avant que la nuit soit tombée alors ...
- J'ai dis oui ! Ha ha. C'est toi qui porte la hache à la baraque nan ?!
- Etant donné qu'y'a personne d'autre..."
Elvane leva les épaules en adressant un grand sourire à K-lean qui lui répondit par le même sourire avant de se retourner pour donner ses ordres.

"On va se poter là. - il désigna une endroit à proximité sur la berge.
On se fait la même séance de spiritisme qu'hier, avec torches et grillades, et on repasse la nuit à bord.
Et si les dieux sont avec nous on retrouvera un semblant de matelas demain soir les gars !"

Dernière modification par K-lean (2018-03-13 10:37:45)


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#32 2018-03-18 17:22:33

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Le sable fin de la plage était accueillant, mais, caprice des courants, ils ne trouvèrent pas de bois flotté aux environs. Comme des cimes d’arbres dépassaient de la crète de la dune, K-Lean décida d’aller personnellement en reconnaissance avec Sparr Hoff, Elvane et quelques hommes. Quand la petite troupe parvint au somment de la colline de sable, ils découvrirent, de l’autre côté, une forêt immense et profonde. D’aussi loin qu’ils pouvaient voir, elle emplissait l’espace entre la dune et une chaine de montagnes arides, qui barrait l’horizon à plusieurs lieues de là. La hauteur de ces falaises ocres était difficile à apprécier, mais elles semblaient aussi hautes que lointaines.

La pente, formée par le vent, était raide. Descendre dans la forêt ne poserait pas de problème. Il suffirait de s’asseoir et de se laisser glisser. Regrimper, par contre, serait un calvaire. Le sol s’échapperait sous les pieds et on n’avancerait pas plus de quelques pouces en dix pas.
K-Lean cherchait un endroit ou l’escalade de la dune serait plus facile, quand Sparr Hoff le poussa du coude et lui indiqua un point précis de la forêt. Une maigre fumée s’élevait d’une zone qui pouvait bien ressembler à une clairière.
Tous se mirent à scruter l’endroit. Il n’y avait aucun doute possible, il s’agissait d’un feu de camp. La clairière ne devait pas être à plus de cent perches* de leur position.
K-Lean interrogea Elvane du regard.

Des nomades ! Répondit leur guide. En tous cas, ce ne sont pas des esprits !

-Hostiles ?

-Pourquoi le seraient-ils ?  Le royaume d’Alervan est coincé entre le cœur de cendres et le fleuve. La majorité de sa population vit du commerce dans ses villes portuaires. Ils ne sont pas agressifs avec leurs voisins et les échanges avec les tribus de l’arrière-pays sont nombreux. La frontière est très poreuse et les caravanes ne sont pas rares, qui viennent faire du troc dans les cités. Ils sont capables de se défendre si on les attaque, mais sinon….

-A ton avis, demanda K-Lean à Sparr Hoff, on les ignore, ou on va à leur rencontre ?

-A mon avis, ce sont eux qui viennent. Ils ont du poster des sentinelles et auront vu le bateau, car les voilà.

Et l’archer à la vue perçante désigna, au loin, un coin de dune qu’une petite troupe, comparable à des fourmis, était en train d’escalader.

Ils sont cinq ! Six maintenant ! Je ne vois pas d’arme. Commenta Sparr Hoff. Ah si, il y a un arc…deux...trois. Il en vient d’autres. Ils dont une dizaine maintenant. Et il en vient toujours.

Les nomades n’avaient pas l’air pressés ni excités, ils grimpaient sur la dune par petits groupes de cinq ou six hommes et commencaient à marcher en direction des visiteurs venus du fleuve. Quand le flot se tarit, Sparr Hoff en avait compté une quarantaine, dont la moitié armés.

Ils sont bien nombreux pour un comité d’accueil. Remarqua K-Lean

Ils viennent voir ce qu’on fait ici. Dit Elvane. Ils prennent leur précaution. Si nous sommes des pillards, ils veulent nous montrer leur force pour nous décourager.

- Et si c’étaient eux les pillards ?

- Ils ne se montreraient pas et attendraient la nuit pour attaquer.

- Je n’aime pas ça ! Retournons au bateau ! Dit K-Lean.

Surtout pas ! Le fait de partir les inquiéterait. On va les attendre et s’expliquer gentiment. Il n’y a rien de tel que la parole pour détendre l’atmosphère.

- Tu penses pouvoir parler leur langue ? On ne sait même pas qui ils sont.

- On verra bien. Ces nomades baragouinent pas mal de dialectes à force de voyager.

Arrivés à une vingtaine de pas, la troupe des nomades s’arrêta et l’un d’eux se détacha du groupe pour s’avancer seul vers K-Lean. Il était très noir de peau, vêtu d’une longue robe flottante qui l’enveloppait depuis les épaules jusqu'aux pieds, la tête prise dans un curieux chapeau fait d’une bande de tissu enroulée et savamment ordonnée comme un nid d’oiseau. Il fit un salut compliqué auquel Elvane répondit par un geste identique. 
Que l’unique femme de ce groupe d’étrangers réponde au salut amusa les nomades qui se mirent à rire derrière leur chef lequel entama un dialogue fait de mots étranges accompagnés de claquements de langue.

Qu’est-ce qu’y dit ? Demande K-Lean.

Ce sont des nomades de la tribu des Khirzines. Ils viennent de l’Ouest. Celui-ci est leur chef. Il demande si vous voulez me vendre et quel serait votre prix. Il propose dix chameaux.
Et il nous invite dans son campement. C'est la coutume chez les nomades. Ce serait impoli de refuser.

*nota: Une perche correspond à 6,5 mètres

#33 2018-03-19 22:58:32

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

K-lean réfléchit rapidement. La fumée dégagée n'était pas très massive et ne ressemblait pas à la fumée d'un feu mourant, éteint à la hâte. Ils avaient donc, soit laissé une partie de la troupe sur le camp, sans intention de mener un assaut, soit invité toute leur troupe avec l'intention de revenir au campement.
K-lean n'apprécia pas au premier abord celui qui semblait être leur meneur, il donnait l'impression que tout lui était acquis, de gré ou de force. Et qu'il soit intéressé par Elvane le rendait encore plus méfiant.

Mais ils avaient là une occasion unique d'en apprendre plus sur ce territoire et sur son histoire, surtout racontée par des nomades, rarement politiciens ni avares d'histoires.


"Dis lui qu'ils nous accompagnent jusqu'à notre bateau. Nous allons prendre quelques vivres pour les partager avec eux.
Nous ne refuserons pas leur invitation mais notre coutume est de ne pas venir les mains vides."

K-lean évita soigneusement la question de l'achat de chameaux.
Ils ramèneraient du poisson, mais surtout leurs armes se dit K-lean tandis qu'Elvane traduisait difficilement.
Des huskarls contre des archers, les plus nombreux ne seraient pas forcément vainqueurs si les choses tournaient mal.
Le Khirzine claqua deux fois de la langue et leva les bras vers eux comme pour dire qu'il les suivait.
K-lean hocha la tête avec un sourire qu'il voulut amical et s'en retourna vers l'embarcation, aussitôt suivi de ses hommes.

Quelques dizaines de minutes plus tard, ils étaient de nouveau au même endroit, prêts à descendre.
Le trajet avait permis à Elvane de briser la glace avec celui qui semblait être le meneur. Personne ne savait de quoi ils parlaient mais ils souriaient tous deux et leurs sourires semblaient sincères. Naki Bool, restait juste à proximité et faisait mine d'écouter leur conversation.
Les deux troupes étaient désorganisées, le sable étant très mou, chacun s'était fait son propre sillon pour aller à sa vitesse. Des huskarls s'étaient retrouvés à côté de Khirzines. Et hormis le fait qu'ils s'observaient mutuellement pour découvrir un peu de leurs coutumes respectives, leurs armes ou leurs habits, il n'y avait pas de tension dans l'air.
Seul K-lean avait le regard froncé et concentré, mais il ne regardait en détail que le comportement d'Elvane et du chef des Khirzines. Il aurait préféré que cette dernière resta silencieuse et discrète plutôt que de se rendre attractive et se donner une valeur marchande supérieure à dix chamelles.

Après que quelques Khirzines aient montré aux huskarls comment glisser le long de la pente, et que seul Omann Do se soit retrouvé à rouler sur celle-ci, après avoir perdu l'équilibre, ils arrivèrent sans encombre au petit campement. La troupe d'Okordien comprit rapidement qu'elle était largement en infériorité numérique. Il y avait de nombreuses tentes d'où entraient et sortaient des femmes et des enfants portant toute sorte de choses. Cela ressemblait à un petit village. Ils arrivèrent rapidement au centre du campement, d'où émanait la fumée et où étaient regroupés les feux, au dessus desquels cuisaient différents animaux. Il y avait là autant d'hommes, jeunes ou anciens, que ceux qui les avaient rejoint. Ils étaient regroupés en cercle autour des feux de cuissons tandis que les femmes s'occupaient de les servir en nourriture ou en eau.

Le chef Khirzine leva les bras au ciel et beugla dans sa langue. Le silence se fit rapidement et Elvane traduisit rapidement :
"Il explique que nous sommes Okordiens et que nous sommes invités."
Sous les gestes de leur chef, un groupe de Khirzine se releva pour se serrer auprès d'autres un peu plus loin, laissant de la place aux arrivants pour s'installer.
"Naki Bool, vient avec moi préparer le poisson." asséna Omann Do, l'oeil méchant. Il n'avait surement pas apprécié que le marchand se moque de son long roulé boulé dans le sable. Il appela aussi d'autres Okordiens à la rescousse.
La plupart des Khirzines ne comprirent d'abord pas ce que faisaient ces hommes venus du fleuve, puis ils se mirent à rire en nombre lorsqu'ils virent qu'ils préparaient les poissons pour les faire cuire. Mêmes les femmes Khirzines s'arrêtèrent pour les observer faire. Sans nul doute, il ne s'agissait pas, pour eux, d'un travail d'homme.

Les regards échangés entre ces deux populations étaient pleins de curiosité mais ils étaient amicaux. Après quelques minutes, et surtout grâce aux enfants curieux, les huskarls montraient comment on utilisait les haches et les boucliers en Okord. Deux d'entre eux firent un simuilacre de combat devant des enfants ravis. Deux Khirzines en firent de même avec leurs épées larges et arrondies, mais ils semblaient plus réaliser une danse qu'un réel combat.
Elvane et le chef Khirzine conversaient seuls tous les deux. K-lean les observait du coin de l'oeil et fit comprendre discrètement à Elvane qu'elle pourrait lui faire signe en cas de besoin. Elle avait été souriante la majeure partie du temps mais, alors que la danse des Khirzines prenait fin, elle semblait plus tendue, elle ne souriait plus lorsqu'elle répondait au Khirzine et évitait son regard.
Elle ne regardait tout de fois pas vers K-lean qui ne savait comment réagir. Le Khirzine ne intéressait plus qu'à son guide et cela l'inquiétait.
Soudain, Elvane, pour interrompre une conversation qui prenait l'allure d'une demande en mariage, se leva et se mit à applaudir les deux danseurs. Les huskarls en firent de même mais cela eut pour effet de faire peur aux Khirzines qui reculèrent tous et mirent la main sur leur arme. K-lean s'avança immédiatement, mains ouvertes et paumes en avant pour montrer qu'il n'y avait là aucun geste d'agression. Il ordonna aux deux premiers huskarls de se mettre à danser. Hébétés, les deux hommes mirent quelques secondes avant de se mettre à sautiller sur place, et quelques secondes de plus pour que cela ressemble un minimum à une danse Okordienne. K-lean se tourna vers eux et se mit à frapper des mains au rythme de la danse, en regardant autour de lui avec le sourire. Il entrainait les autres Okordiens à frapper dans leurs mains au même rythme.
Les Khirzines resterent tendues encore quelques secondes avant qu'un enfant vienne détendre l'atmosphère en se mettant à frapper dans ses mains aussi. D'autres continuèrent et tous relâchèrent leurs armes, comprenant la nouvelle différence de culture. Des Khirzines s'amusèrent à s'approcher des deux huskarls et tentèrent de les imiter. Les huskarls encore assis raillaient leurs copains danseurs et les sourires revinrent sur les visages.

K-lean se rassit auprès d'Elvane.
"Comment ça va avec ton bavard ?
- J'apprends des choses, c'est pas ce que tu voulais ?
- Si si. Mais j'ai cru voir que tu avais besoin d'aide.
- Je crois qu'il a compris qu'on voulait en apprendre sur eux et sur ces territoires. Il m'en a déjà dit pas mal, mais maintenant, il insiste lourdement sur mon achat. Il est monté à quinze chameaux. C'est une petite fortune pour eux.
- C'est hors de question!
- Si on veut en apprendre plus, il faudrait rester plus longtemps, mais vous risquez de repartir sans guide. Il va certainement te faire une autre proposition.
- Quand bien même il me filerait tout son troupeau, je ne prendrai pas un seul chameau à bord du knörr !
Qu'as tu appris ?


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#34 2018-03-20 17:04:43

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

J’espère que vous trouverez une solution pour me sortir de là. J’ai pas bourlingué depuis trente ans pour me retrouver troisième ou quatrième épouse d’un chef Khirzine.

-T’en fais pas, on va pas te laisser en plan. Alors ?

- Ben, ça se présente mal.

Elvane désigna le chef, du menton et lui fit un petit signe crispé en réponse à son large sourire carnassier et gourmand.

Il a fui les territoires de l’Ouest pour mettre sa tribu à l’abri. Il semblerait que les cavaliers des steppes de Salahin fassent des razzias de plus en plus profondes, à Ponobar et dans l’Est d’Alervan. J’ai pas tout compris, mais il m’a parlé d’un genre de guide autoproclamé. De ces illuminés qui pensent avoir reçu la parole des dieux et dont la mission sacrée serait de nettoyer le monde de tous les impies. Ça serait peut-être pour ça que la flotte de guerre d’Abrasil serait sur les dents, mais j’en suis pas sûre. Lui et ses chameaux ont quitté le cœur de cendres il y a deux mois pour rallier le fleuve en marchant au Nord. Depuis, ils le longent plus ou moins en essayant d’éviter les villes qui se sont repliées sur leurs fortifications. Ils ont l’intention d’aller jusqu’à Urlun-Bitur et de s’y installer le temps que ça se calme. Il parait qu’ils ne sont pas les seuls à avoir quitté le Sud. Pas plus tard qu’avant-hier il a croisé une caravane qui avait bravé le grand désert de sable et sont tombés sur des cavaliers d’Yselda. Ils n’ont dû la vie sauve qu’au prix d’une forte rançon et bien sûr, de leur conversion au dieu du nouveau prophète. D’après le Khirzine, il est possible que les illuminés soient arrivés au fleuve dans certaines de ses portions, ce qui rend sa remontée délicate, surtout dans ses passages les plus étroits.

-Il y a des passages étroits ?

-J’en connais au moins un. C’est le Pas du Géant. Il s’appelle Gurun Dur à Alervan et Katta Ilon pour les habitants de Ponobar. En plus d’être un endroit dangereux pour la navigation à cause du courant et des tourbillons, la passe fait à peine deux cents pas de large, elle est défendue par une forteresse sur la rive de Déomul, basse et propice à un débarquement. L’autre coté c’est une falaise de granite haute d’une vingtaine de toises et qui s’avance comme un coin dans le fleuve.

-Et c’est loin ?

-Trois jours de navigation après l’ile de Maravorgues

-Bon, ben on en sait assez ! Pas la peine de s’éterniser ici. Dites au chef qu’on le remercie pour son hospitalité

-Et pour mon problème ?

-Tu n’as qu’à lui dire que tu es ma femme et que je ne te vends pas quel qu’en soit le prix.

Pendant qu’Elvane s’évertuait à expliquer avec des mots choisis, la situation au Khirzine, K-Lean alla voir Oman Do.

Rassemble les hommes discrètement, on part.

Le retour vers le bateau, fût moins difficile que ce qu’il avait craint. La fin des danses et le repli des huskarls qui s’étaient mis en formation de combat en prévision d’un possible affrontement, avait, bien sûr, jeté un froid, d’autant que le chef Khirzine, comprenant que son marchandage ne déboucherait sur rien, se mit à jeter des imprécations dignes d’un marchand de souk, en prenant tous les dieux à témoins, du manque de savoir-vivre de ces « Schmoulaks » ; mot intraduisible désignant à la fois, l’étranger, le voleur, l’idiot du village et le percepteur d’impôts.

Mais devant le regard déterminé des Huskarls et l’éclat du tranchant de leurs haches, il préféra les envoyer se faire voir chez les Sgours, tribu mythique de l’ancien empire, réputés pour leur sexualité déviante.

Après avoir escaladé, non sans mal, la dune, la troupe retourna au Knorr, accueillie avec soulagement par les hommes que K-Lean avait laissés en sentinelle.

Ils appareillèrent le lendemain, avant le lever du soleil, à la rame, car le vent ne s’était pas levé non plus, mais heureux de quitter ce rivage malsain et enthousiastes à l’idée de l’escale suivante. Elvane avait parlé d’une île enchanteresse peuplée de contrebandiers, de trafiquants et de pirates, donc de bordels, de bars, de gargottes et d’autres lieux de plaisirs que leur imagination parait de tous les attraits.
Le soir même l’ile était en vue et ils échouèrent le Knorr sur une petite plage à son extrémité Ouest.
La nuit tombait mais aucun feu ne s’allumait malgré l’obscurité croissante et à part le cris des oiseaux et le clapotis de l'eau, on n'entendait rien.

C'est ça ton paradis? Demanda K-Lean à Elvane.

#35 2018-03-20 22:38:48

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

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K-lean avait envoyé cinq petits groupes de reconnaissance, les quatre premiers étaient revenus avec le même constat : Il n'y avait personne sur l'île.
Pas un seul feu à l'horizon, pas une seule baraque habitée. Que ce soit des petites maisonnées isolées de pêcheur, ou des petits hameaux, tout était vide et sans vie.
"Il n'y a personne. Les maisons sont vides mais elles n'ont pas été brulées ni pillées. On dirait tout simplement que l'île a été abandonnée du jour au lendemain. - Expliqua Sparr Hoff à K-lean.
- Et c'est ancien comme départ ?
- J'dirais que ça fait assez longtemps. Il y avait des baraques qui grouillaient de toiles d'araignées. Mais pas assez longtemps pour que la nature ne repousse sur les toits ou sur les murs. D'ailleurs les toits étaient encore en bon état alors qu'il doit y avoir de bonnes tempêtes par ici. J'dirais que ça doit bien faire plusieurs mois.
- Elvane, qu'est ce qui aurait pu faire partir les gens du coin.
- J'en sais foutre rien... Par les bourses d'Karan ! J'ai l'impression d'être sur une autre île ! Quand t'allais par là tu pouvais aller te prendre une murge chez le vieux Mac Bernik en échange de quelques fausses histoires de jambe en l'air. Je comprends pas pourquoi même cette vieille poche ambulante se serait tiré d'ici. Il avait rien d'autre que de quoi faire son tourne boyau fermenté."

Elvane semblait agitée à l'évocation de ces souvenirs. Elle regardait dans d'autres directions comme si d'autres souvenirs lui revenaient en mémoire.
"Sparr Hoff, vous êtes passés dans un petit hameau non ?
- Ouais. Personne.
- As tu vu une grande baraque ? La plus grande en fait, tu peux pas la louper elle est en plein milieu.
- Ha ouais celle qui empiete de plusieurs mètres sur le chemin. He bien ?
- Ouais ! Celle là. Vous l'avez fouillée ?
- Non, tout était fermé, et bien barricadé d'ailleurs. Mais y'avait pas un pet de lumière qui en sortait. C'était quoi ?
- C'était l'entrepôt de stockage du plus vicieux contrebandier de ce coin de la côte. Nadaldur qu'il s'appelait...
- Et alors ? - demanda K-lean voyant qu'Elvane ne poursuivait pas.
- Et alors je comprends pas non plus pourquoi il aurait laissé son entrepôt ce tocard. Il ne faisait pas de commerce ici, c'était juste un lieu de stockage où il laissait quelques trésors volés dans l'attente de trouver des acheteurs. C'était SON lieu de stockage en réalité. Parce qu'ici, comme aucun Empire ne voulait y mettre les pieds, y'avait pas de règles. C'était la loi du plus fort et rien d'autre. Donc là si y'a plus rien ça devrait être encore mieux pour les contrebandiers puisque personne ne peut raconter ce qu'il a vu. Tu peux planquer tout ce que tu veux !
Putain du Nord je comprends pas !
- Bon allez te bile pas Elvane. Au moins on est tranquille pour cette nuit.
- Tu comprends pas K-lean, les contrebandiers quitteraient pas une île comme celle que j'ai connu. Et ils quitteraient encore moins l'ile qu'on voit aujourd'hui.
- Omann Do n'est pas revenu encore. Et il est parti en plein coeur de l'ile sur les hauteurs, peut être qu'il trouvera quelque chose."



Lorsqu'Omann Do revint avec ses trois huskarls, il s'était écoulé plusieurs heures.
"Bordel Omann Do qu'est ce que tu foutais ?! Je t'ai pas demandé d'aller cueillir des fleurs !
- File nous à bouffer plutôt que nous les briser. On n'a pas été aux champignons non plus figure toi !"

Omann Do alla se servir directement une brochette au dessus du petit feu de camp.
"Y'a que dalle ici. - reprit Omann Do.
- On est au courant merci.
- Sauf que feignasses que vous êtes vous n'avez pas cherché pourquoi. - il regarda un par un les autres meneurs de reconnaissance. - Vous voyez des baraques abandonnées et vous rentrez, pis ça vous convient hein ? Bah vous apprendrez que y'a toujours un connard qui écrit une lettre à sa dulcinée et qui la laisse chez lui dans l'espoir qu'elle rentre et la lise. - Il se remit à manger.
- Arrêtes des conneries Omann Do -
coupa K-lean qui n'appréciait pas l'importance que son bras droit cherchait à se donner. - On n'est pas à une représentation du bouffon Elmut : T'as trouvé une lettre qui peut nous apprendre ce qu'il s'est passé ici ?
Omann Do termina de grignoter tranquillement sa bouchée avec un sourire bien niais. Glurp.
"Ouaip. Et on a même mieux que ça...
- Par la chiasse d'un Wigmar tu vas causer le vieux ?! - Elvane n'en tenait plus.
- Du calme bichette, demain tu sauras tout.
- Y'a quoi à savoir ?
- Ben ... ch'sais pas exactement. Mais la lettre qu'on a pu lire parlait d'une invasion de barbares à l'est de l'île. Et qu'ensuite une partie des habitants s'était tirée de là. Et l'autre partie... serait allée se planquer dans une petite forteresse...
- Et du coup vous avez cherché cette forteresse ?
- Mieux que ça K-lean ! On l'a trouvée !
- Me dites pas que c'était vide ? - demanda une Elvane craintive.
- Non. Y'avait de la lumière. Y'avait de la vie là dedans, mais surtout des petites patrouilles autour et des gardes sur les murs. Mais c'est surtout pas à côté !
- Faut y aller K-lean ! - assena Elvane. - C'est le seul moyen de savoir ce qu'il s'est passé ici."

K-lean resta silencieux quelques minutes tandis que Omann Do racontait comment ils avaient découvert le chemin pour y aller. Au fond de lui, K-lean ne voyait vraiment pas l'intérêt d'aller là bas. Cette ile était désormais vide, point barre. Ils ne craindraient rien cette nuit, ils n'avaient qu'à s'abriter dans une des maisonnées avoisinantes pour une nuit à l'abri et repartir le lendemain poursuivre leur périple.
"T'entends ça K-lean ?
- Hmmm ? Quoi Elvane ?
- Omann Do nous dit qu'ils savent même pas qui est dans la forteresse !
- Non, impossible de savoir. Y'avait pas de drapeau nul part, pas de fanion, rien. Même les soldats qu'on a vu, ils n'étaient pas dans des tenues homogènes.
- Alors c'était des contrebandiers armés, c'est tout.
- Non non K-lean, ils était bien trop structurés dans leurs rondes pour être de simples pillards.
- Ils se sont organisés face aux barbares de l'est, c'est tout. On n'a rien à faire ici. Cette ile est vide. On y dort cette nuit et on repart demain matin.
- K-lean ! Si on ne va pas voir cette forteresse, vous repartez sans moi demain !"

Elvane avait les yeux rougis d'émotions. Elle était bien plus attachée à cette ile que ce qu'elle avait pu leur dire.
Le silence resta pesant quelques longues minutes. Elvane et K-lean s'observaient. Elvane demeurait impassible, mais toute en colère contenue. K-lean voulait parvenir à lire dans son regard la raison de son comportement. Mais il n'y parvint pas.
"Elvane, je n'emmènerais pas l'équipage se battre contre une forteresse juste parce que tu nous le demandes. On ne sait pas qui ils sont, ni combien ils sont. Allons nous installer dans une maison pour la nuit et on en reparle demain matin. Tout le monde est crevé là."



Le lendemain matin, K-lean avait été voir Elvane dès le réveil. Elle avait été claire, malgré une nuit que l'on dit souvent porter conseil : Soit la troupe partait sans elle, soit elle partait à la forteresse. Le déjeuner avait permis à K-lean de discuter avec Omann Do de son emplacement.  Elle était située sur un petit monticule rocheux. Ils auraient à passer tout un flan à découvert puis un petit pont de bois escarpé avant d'arriver au pied de la forteresse. Et si jamais par chance ils n'étaient pas encore découverts, les rondes des gardes ne leur permettraient même pas d'arriver aux murailles sans combattre.
"Allons nous balader K-lean. Je pense qu'on peut couper et y être en deux heures de marche. On y va, elle se rend compte que c'est une connerie et on rentre. Ca fera du bien aux gars de faire une vraie marche sans danger. Y'a que dalle entre ici et là bas.
- De toute façon cette bourrique est butée. Et je me vois pas discuter avec Torkson par l'intermédiaire de Naki Bool."

Omann Do manqua de recracher tout son frugal repas à l'idée d'un Naki Bool traducteur.

Trois heures plus tard, l'équipage avait vu sur la forteresse.
albadon_by_karehb_d52hsnd.jpg

Dernière modification par K-lean (2018-03-20 22:40:25)


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#36 2018-03-21 14:44:00

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

La v’la ta forteresse ! T’es contente ?

K-Lean était de mauvaise humeur. C’était pas un guide qu’il avait embarqué, mais un sac d’emmerdes. Entre les acheteurs libidineux, les bancs de sable, les esprits retords, les amis frelatés et jusqu’aux mauvaises rencontres sur le fleuve, elle ne leur avait rien épargné. A croire qu’elle faisait exprès de les envoyer dans les traquenards. Cette histoire de forteresse c’était le pompon ! Elle lui faisait carrément du chantage ! A quoi pouvait bien servir d’aller se coltiner avec ces gars-là, alors qu’une autre épreuve les attendait à trois jours de là ? Putain du Nord, il avait une mission ! Et elle était déjà suffisamment périlleuse pour ne pas en rajouter par plaisir. Sans compter l’impact désastreux sur l’équipage. Oman Do ne l’avait jamais traité avec autant de d’arrogance que depuis qu’il se laissait diriger par cette donzelle.
Elvane inspectait la forteresse et les patrouilles qui la ceinturaient mollement. Ces soldats n’avaient pas l’air très concernés par leur mission.

Ce sont des Lumoediens ! Dit-elle après quelques instants.

- Des Quoi ?

- Des Lumoediens, des soldats de Déomul si vous préférez ! On ne dit pas Déomulien, c’est une injure. Me demandez pas pourquoi, c’est comme ça !

- ça des soldats! Mais y’en a pas deux équipés pareil ! S'étonna K-Lean

Elvane se retourna vers les Huskarls. Rien dans les casques, les haches, les boucliers ne rappelait un quelconque uniforme. Il y avait toutes les matières, toutes les formes et toutes les couleurs.

C’est pas pire que les vôtres. Faut pas croire que l’armée de Déomul ne soit faite que de légions ! Il y a aussi des auxiliaires ! Ils sont même majoritaires et ils gardent les tenues de leurs tribus d’origine.

- Déomul sur l’île ? Tu m’avais dit qu’elle était neutre !

- Eh bien, ça a changé ! Que veux-tu que j’te dise ! Si les barbares se sont emparés de l’île en faisant fuir les contrebandiers, c’est pas étonnant que Déomul ait contre-attaqué. Le thane de la région n’est pas connu pour être un mou, et si jamais les barbares foulent le sol de l’Empire, il risque d’y perdre la tête. Autant dire qu’il a pris les devants, au risque de rallumer le conflit avec Alervan. Mais j’ai l’impression que les négociants ont d’autres chats à fouetter pour le moment.

- Bon ! qu’est-ce qu’on fait alors ? Tu veux quand même pas attaquer cette forteresse !

- Non ! Elle ne m’intéresse plus ! On peut foutre le camp, et le plus vite sera le mieux.  A priori, ils n’ont pas barré le passage des navires sur le fleuve. Ce ne sera peut-être pas le cas au Pas du Géant !

Finalement la troupe regagna la plage ou elle avait laissé le knorr. Les hommes, K-Lean en tête, restèrent silencieux pendant tout le trajet. Elvane faisait la gueule des mauvais jours.
Quand ils remontèrent à bord et déhalèrent le bateau sous les ordres d’Oman Do, K-Lean la prit à part.

A moi, tu peux le dire ! Qui est-ce que tu t’attendais à voir dans cette forteresse ?

- Mon frère ! Répondit Elvane, laconiquement.

#37 2018-03-21 22:18:07

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Ton frère ? Mais pourquoi tu n'en as pas parlé plus tôt ?

- Parce que si je vous avais dit qu'on viendrait ici pour rendre visite à mon frère, vous n'auriez surement pas accepté. T'es en boucle sur la mission depuis plusieurs jours, comme si on avait rendez vous. Je pensais qu'en vous l'annonçant tu préfèrerais faire un arrêt ailleurs.

- Je suis si casse couille que ça ? Au contraire je préfère qu'on stoppe chez des connaissances que chez des inconnus bien sûr ! On obtient plus d'informations et plus de sécurité. Bon, de toute façon on ne l'a pas trouvé, il a surement quitté l'ile.

- Je sais pas. Il n'aimait pas le bateau, il préférait s'occuper de toutes les taches à terre. Et par dessus tout, cette ile c'était son ile.

- Bon, une fois qu'on aura vu Torkson on ira voir ta famille en Abrasil d'accord ? Et s'il n'y est pas retourné on repassera par ici. Les choses ont changé depuis ta dernière venue, il faut être prudent... Et la mission est la priorité.

- Ouais... La mission...   D'accord K-lean. Excuse-moi de m'être emportée et de n'avoir rien dit au sujet de mon frère.

- Personne n'est mort Elvane, c'est bon. Mais maintenant il faut tout me dire.

Trois jours de navigation plus tard, le Pas du Géant leur faisait face.
La rive sud était un mur de granit impossible à escalader. La rive Nord de Déomul était encore rocheuse et abrupte, mais lorsqu'ils verraient le soleil, ils verraient aussi la forteresse Lumoedienne.
Le Pas du Géant

Les couleurs du ciel que leur offrait encore leur périple semblait être l'aboutissement de trois jours de navigation où les dieux les avaient accompagnés tout le long. Ils avaient croisé des trières de guerre soit en pleine nuit, mais toujours sur la rive opposée à celle qu'ils longeaient et avec peu de visibilité, soit de jour mais elles étaient à quai à ce moment là et ils étaient impossible à rattraper. D'autant plus que la météo avait été plus que parfaite, le vent toujours favorable et suffisamment fort pour que les rames restent sur le pont. Elles n'avaient été ressorties qu'au petit matin, lorsque les roches alentours les masquaient totalement du vent.
Le moral était donc au plus haut, ils jouaient au osselets ou s'amusaient à pêcher des poissons plus gros les uns que les autres. Naki Bool était celui qui scrutait le plus souvent les alentours mais il le faisait surtout pour mémoriser ses futurs tracés qu'il dessinerait sur les cartes qu'il offrirait à Eugénée Anet. Tous étaient au top de leur forme, hormis Omann Do et K-lean, puisque le premier poursuivait l'entrainement physique du second.

Mais à mesure que le soleil se levait et que l'inconnu se profilait derrière ces derniers rochers, les doutes et les inquiétudes revinrent sur les visages des hommes.
Le plan de K-lean était simple. Passer comme si de rien n'était. S'il semblait impossible de passer en force, ils passeraient en douceur comme des marchands. S'il étaient stoppés par un contrôle  de Déomul et sommés de justifier leur voyage, ils trouveraient bien une réponse quitte à dire qu'ils étaient en route pour assassiner l'Empereur d'Abrasil. La seule inconnue résidait dans ces illuminés de Dieu dont avait parlé le Khirzine...S'ils étaient sur l'autre rive, ça risquait d'être chaud.

Dernière modification par K-lean (2018-03-21 22:20:15)


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#38 2018-03-22 13:14:23

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Longeant la falaise de granite, le Knorr s’engagea dans le passage, chahuté de toute part par des remous qui formaient ça et là de petits maelstroms. Le courant était violent et les hommes, arcboutés sur les rames, déployant toute leur énergie, avaient toutes les peines à faire avancer le navire. Oman Do, à la barre, était obligé de corriger sans cesse pour éviter que le Knorr se mette en travers. Il jurait comme jamais.

Putain du Nord, K-Lean ! Y’a trop de remous par là. Faut qu’on essaye de l’autre côté. Si ça continue on va se faire jeter contre la roche.

K-Lean regardait alternativement le rocher, parfois si proches qu’il semblait qu’on pouvait le toucher, la passe, qu’un halo lumineux faisait ressembler aux portes du paradis et ses hommes qui suaient sur les rames en ahanant comme des bucherons. Malgré la vitesse, ça n’avançait pas.
Sparr Off, toujours à l’affût du moindre détail, lui montra une zone du fleuve, sur la berge opposée, qui semblait plus calme. K-Lean fit de grands gestes au barreur pour lui indiquer l’endroit, mais dès que le Knorr prit de l’angle avec le courant, il se mit en travers et fût emporté comme une feuille morte descendant un ruisseau. En quelques minutes ils avaient perdu le terrain d’une heure de pénible effort. A ce moment-là, K-Lean ne pensait plus à la forteresse Lumeodienne, ni aux archers à cheval qui pouvaient peupler le fait de la falaise. Il se dit que ce pas de géant était à lui seul un sacré morceau.

0n va en face ! Tant pis pour Déomul. On gagnera rien à lécher les rochers sinon à briser le Knorr. Rapproche-toi de la berge au maximum. Gueula-t-il à Oman Do.

Vous passerez pas à la rame ! Cria Elvane, pour se faire entendre malgré le bruit ambiant. Le fleuve est en crue, il y a trop de courant !

- Ah oui ? Et comment font les marchands ? Ils attendent l’étiage ? ça peut durer combien de temps la crue ?

- Une semaine !

- Une semaine ? Putain du Nord! Et puis quoi encore ! On ne va pas camper la semaine devant ce trou au risque de voir débouler les Lumeodiens d’un côté et les fous de dieu de l’autre. Il faut qu’on passe !

Ils essayèrent encore et encore. Mais à chaque fois, sur un remous plus violent que les autres, qui surprenaient Oman Do et K-Lean, venu le seconder à la barre, ils se retrouvaient jetés en travers du courant comme un vulgaire fétu de paille et refoulés d’une cinquantaine de brasses en arrière en quelques instants. Les hommes, qui voyaient leurs efforts vains, commençaient à en avoir marre et cessaient de ramer.

Sinon on peut passer à pied ! Cria Elvane. Mais c’est payant.

- Quoi? J'entends rien!

Elle alla à l’arrière rejoindre les barreurs.

Laissez-vous porter par le courant. Il y a un petit bras mort, à un quart de lieue, du coté de Déomul, qui se remonte facilement et qui se termine en cul-de sac. C’est là que stationnent les bateaux qui attendent la fin de la crue.

- Je te dis qu’on ne peut pas attendre.

- Pour les gens pressés, il y a un système pour faire passer les bateaux sur un slip de bois qui contourne le Pas du Géant en passant derrière le rocher. Ça débouche aux pieds de la forteresse, dans des eaux calmes. Bon, c’est pas gratuit et ça prend quelques heures quand même, mais pour votre coquille de noix ça ne devrait pas être si compliqué. Evidemment, on n’échappera pas au contrôle des autorités, mais après on débouchera sur un lac dont la rive sud est bordée par le royaume de Ponobar. Ça veut dire que si les conditions sont bonnes, on peut atteindre la frontière d’Abrasil en quatre jours ou cinq jours.
A vous de voir ce que vous allez dire au capitaine qui commande la forteresse. Il doit être sur les dents avec cette histoire de prophète et de guerre sainte. A mon avis, tout ce qui ressemble de près ou de loin à des guerriers sera mal reçus. Dans le doute, il ne fera pas le tri.

- Tu as une idée ?

C’est vous le chef, Messire. Vu qu’on risque nos têtes, je n’ose pas vous conseiller quoi que ce soit. Je me demande d'ailleurs, s'il vaudrait pas mieux, pour ma santé, que je ne fasse pas partie de votre bande.

#39 2018-03-22 19:41:31

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Sous les ordres de K-lean, le petit knorr avait fait demi tour vers le bras mort indiqué par Elvane.
Ils avaient à peine remonté ce bras que K-lean fit échouer l'embarcation dans un recoin creux et fournis en branchage.
Ils y feraient une courte étape pour reposer les muscles fatigués par le courant et peut être plus longue suivant la décision qui serait prise.

La décision était suffisamment dangereuse pour que K-lean décide de rassembler tout l'équipage :
- Omann Do, c'est toi qui a le plus bourlingué ta carapace sur des territoires hostiles. Pour moi il y a deux options. Soit on se planque dans ce coin le temps que la crue passe. Soit on passe franchement les contrôles, mais on a intérêt à avoir des arguments solides. Qu'en dis tu ?
- Une semaine de planque pour vingt hommes ?! Déjà planquer ma seule croûte dans les fossés d'Okord c'était pas simple. Mais planqué un tas d'huskarls puant de sueur et le hareng t'oublies ! Y'a forcément des patrouilles qui passeront dans le coin, et même si on les zigouille tous on finira par s'en prendre une qui aura raison de nos têtes. Quitte à crever, autant y aller franchement. La meilleure défense c'est l'attaque.
- Quelqu'un à une idée pour passer les contrôles ? - K-lean observa un par un les équipiers.
Elvane ?
- Ha non, je passe mon tour.
- Naki Bool ?
- Ben ... Heu ... On peut se faire passer par des marchands et ...
- Personne n'y croira - le coupa Omann Do - Y'a que toi qui a l'allure d'un marchand. De loin avec d'autres tenues je dis pas. Mais là tout ce tas de muscles passera pas à un pas des gardes en leur faisant croire qu'on est des marchands.
- Des contrebandiers alors ? Eux sont plus baraqués.
- Non. Les contrebandiers ont toujours quelque chose dans leur bateau, dans un sens ou dans l'autre. - répondit Elvane -"
Le silence s'installa quelques minutes, il n'y avait pas de raisons vraiment valable à ce que des étrangers remontent le courant s'ils n'étaient pas marchand.
"Et si on se fait passer pour les illuminés et qu'on dit qu'on veut rentrer chez nous ? Y viennent bien de l'Ouest non ?
- Ha ha ha ! - Sparr Hoff riait à gorge déployée - On dirait qu't'es Wigmar quand tu t'y mets. On t'a dit qu'ils taperaient tout ce qui ressemble à un fanatique.
- He ben, je propose quelque chose au moins moi. - Naki Bool croisa les bras et bouda dans son coin.
- Et si on se fait passer pour des Lumeodiens ? On a vu qu'ils avaient des tenues différentes sur la dernière ile.
- Trop risqué, si quelqu'un nous parle on est grillé direct.
- Mais on peut se faire passer pour des mercenaires Okordiens.
- Qui seraient payés pour taper des illuminés !
- Qui seraient payés en échange de la tête du prophète !
...
- Bien vu les amis. Elle est là notre solution. On sera donc des mercenaires envoyés par le Roi Antijaky chargés de découper la tête de ce prophète. Naki Bool, arrête de bouder et fais moi un faux contrat en ce sens. Trouve moi un nom qui sonne bien.
- Là je t'arrête K-lean, t'as pas la gueule d'un chef mercenaire, t'es bien trop sympas. Et tu t'laisses guider par une femelle...
- MmmMerci Omann Do. Vieux brigand. Que suggères tu ?
- Que le contrat soit à mon nom, on sait jamais qu'on croise encore une connaissance. Et que tu me laisses être le chef mercenaire le temps qu'on arrive de l'autre côté. J'ai quand même plus la gueule de l'emploi."

K-lean regarda dans les yeux le grand Omann Do qui souriait bêtement, pensant avoir fait une blague. Si cela n'avait pas été lui, K-lean aurait pu croire qu'on voulait lui piquer son rôle de chef.
"T'as raison le vieux. Et tu sens tellement plus mauvais que moi qu'en te mettant devant les gardes s'écarteront plus facilement ! ha ha !
- Si c'est pas avec mon odeur, ce sera avec mes poings ! ha ha ha !
- Bon alors ?! - coupa Naki Bool toujours grognon - Je le mets à quel nom le contrat ?
- Au nom de Omånn Dø avec un D comme Dø !"

Plusieurs heures plus tard, le petit knorr arriva au cul de sac où une dizaine de bateaux stationnaient là. Comme l'avait prévu K-lean, il n'y avait pas de trière car l'accès était trop difficile pour un navire de cette taille. Il y avait des bateaux de toutes tailles, tous ressemblant a des bateaux de marchands, le petit knorr passerait inaperçue.
L'équipage était beaucoup moins discret cependant puisqu'ils étaient les seuls armés à l'horizon, à part les dizaines de gardes Lumeodiens que l'on pouvait voir aux alentours. Certains virent rapidement le knorr arriver et s'agitèrent pour contrôler en nombre le petit bateau.
Le plan était clair. Les Okordiens avançaient sûr d'eux avec à leur tête un Omann Do au sommet de sa gloire. K-lean devait jouer le fils, second et scribe du chef, ce qui lui permettrait de suivre Omann Do et d'entendre et voir tout ce qui serait dit.
Le bateau à peine arrivé contre un petit quai, les gardes braillaient dans tous les sens leurs ordres. Mais Omann Do sauta par dessus bord sans aucunement se soucier de la menace, malgré les lances pointées dans sa direction :
"Il est où le chef ici ?!"
Les gardes s'observèrent. Aucun ne parlait l'Okordien. Encore sur le pont, Elvane beugla la traduction. De nouveau les hommes se regardèrent, ils n'étaient pas habitués à ce qu'on leur refuse le contrôle.
"Vous m'amenez à votre chef ou faut que je vous défonce pour le trouver moi-même ?!"
Elvane traduisit dans des termes moins provocants. Celui qui ressemblait à un sergent rangea son épée et pointa du doigt vers une petite baraque à une vingtaine de mètres, la main légèrement tremblante.
Omann Do fit signe à Elvane et K-lean de le suivre.
"Ceux là viennent avec moi. Vous pouvez contrôler le bateau si ça vous chante."
Lorsqu'Elvane termina de traduire, celui qui avait rangé son épée donna plusieurs instructions. Les trois quarts des gardes montèrent à bord et le reste encercla Omann Do, K-lean et Elvane qui étaient descendus à leur tour.
Le sergent les invita à le suivre vers la baraque.


Ils n'eurent pas le droit de rentrer et restèrent devant la baraque jusqu'à ce que le capitaine des gardes en sorte. Dès que K-lean le vit, il lui semblait avoir devant lui le marquis Aldegrin de Karan, un peu moins vieux d'au moins dix ans, mais l'effet était saisissant.
Omann Do n'attendit pas qu'on lui fasse les présentations.

"Je suis le mercenaire Omann Do, voici ma traductrice Elvane et mon second Cöline.
Nous venons vous demander votre autorisation d'utiliser votre slip de bois pour passer de l'autre côté."

Un homme juste à côté du capitaine lui souffla à l'oreille, il y avait donc quelqu'un qui savait parler l'Okordien dans ce bled.
Constatant autour de lui, que des individus s'étaient approchés, Omann Do s'approcha un peu plus pour parler à voix basse au capitaine, mais deux gardes brandirent leur lance devant son nez. Omann Do leva les mains et regarda fixement le capitaine en levant les sourcils.
Ce dernier fit signe d'écarter les hallebardes et Omann Do put avancer encore et lui parler sans que personne d'autre n'entende.

"J'aurais aussi besoin que vous me refiliez quelques tuyaux sur celui que l'on appelle le prophète. Je crois savoir que, comme mon Roi Antijaky, vous aimeriez en être débarrassé ?"

Tandis que son traducteur lui soufflait les mots à son oreille, le capitaine des gardes souleva un sourcil et eut un petit sourire en coin l'espace d'une fraction de seconde. Assez lentement, et toujours sans dire un mot, il fit signe aux Okordiens de le suivre à l'intérieur.

Dernière modification par K-lean (2018-03-22 19:41:56)


Lignée des Trofs, et autres successeurs

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#40 2018-03-23 14:53:16

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

La baraque était adossée au mur de la forteresse. C’était un genre de bastion en bois permettant d’abriter quelques hommes de sorte qu’ils soient prêts à intervenir rapidement sur le port, mais elle masquait aussi une poterne qui donnait accès à l’intérieur de la forteresse elle-même.
Le capitaine fit un signe aux soldats situés de l’autre côté du mur, si épais que la poterne ressemblait à un tunnel. Ces derniers actionnèrent une grande roue pour soulever la lourde herse qui condamnait le passage. Le capitaine invita le mercenaire et ses acolytes à le précéder dans la forteresse. La Herse retomba derrière eux, dans un grincement sinistre.
Ils marchèrent longtemps, à la lumière incertaine de torches, gravirent des escaliers étroits en colimaçon, probablement inscrits à l’intérieur des murs et débouchèrent finalement dans une vaste salle éclairée par de larges baies donnant sur la cour intérieure du bâtiment. Elle était décorée avec gout et fortement gardée par des soldats lourdement armés, au gabarit impressionnant.
Un homme assez corpulent, vêtu d’une tunique de soie richement brodée, avachi dans un curieux meuble à mi-chemin entre le fauteuil et le lit, devant un plateau rempli de fruits et de friandises, répondit au viril salut de son capitaine des gardes, par un petit mouvement de sa main potelée aux doigts couverts de bagues. Il observa ses visiteurs d’un œil distrait alors que l’officier lui expliquait ce qu’il avait compris de la situation. Comme l’arrivée de ces étrangers dépassaient son niveau de responsabilité, il les avait menés à son supérieur, le gouverneur de la forteresse.
Ce dernier prit un loukoum dans le plat, l’engloutit et se lécha les doigts. Il prenait son temps et ses gestes étaient emprunts d’une forme de préciosité féminine que démentaient sa barbe et ses sourcils broussailleux. Le capitaine s’étant retiré, il s’adressa à Oman-Do.

Nous avons suivi avec intérêt votre tentative de passer la foulée du colosse, malgré la crue. Ainsi, d’après ce que m’a dit mon capitaine, vous êtes un mercenaire Okordien et votre polémarque s’intéresse au soi-disant prophète qui nous cause quelques désagréments et au sujet duquel vous cherchez des informations. C’est, je suppose, la raison de votre périple vers l’Ouest.

C’est bien cela votre excellence ! Répondit avec aplomb Oman Do à l’interprète qui avait traduit les paroles du gouverneur.
K-Lean, qui ne sentait pas la fibre diplomatique de son bras droit, se permit d’ajouter :

Je précise que le seigneur Antijacky n’est plus polémarque de l’Empire d’Abrasil, mais qu’il a repris le titre de roi d’Okord en déclarant une totale autonomie du royaume aussi bien politique que militaire.

- Ah ? Voilà qui plaira à Théodophane. Dit le gouverneur, apparemment égayé par la nouvelle, sans qu’on puisse déterminer pour autant s’il était vraiment heureux ou s’il plaisantait. Il mit un mouchoir devant ses narines pour continuer car il était indisposé par l’odeur que dégageait ses hôtes.

Je ne doute pas un seul instant que vous soyez des mercenaires. Mais quelle mouche pique le roi d’Okord à envoyer des mercenaires à la rencontre du prophète ?

C’est K-Lean qui prit l’initiative de répondre, au soulagement d’Oman Do que ce gouverneur maniéré mettait mal à l’aise.

Votre excellence n’est peut-être pas sans savoir que notre royaume est menacé à l’Est par la Horde, une vague de cavaliers barbares qui risque de déferler sur nos territoires. Notre roi, s’inquiète de cette guerre sainte qui s’allume à l’Ouest. Nos terres pourraient se retrouver prises en étau, et nos fiefs, désertés par l’armée occupée à l’Est, pourraient subir les assauts de ces illuminés en provenance de Salahin. 
Il m’a missionné avec l’espoir qu’en coupant sa tête nous pourrions éteindre cette flambée de violence.

Dans le même temps, il sortit de sa tunique le faux contrat rédigé par Naki Bool. Sur un signe du gouverneur, un soldat s’en empara et le porta à son maître, qui le déroula, l’inspecta et le passa à son interprète pour traduction. L’homme se pencha à son oreille et lui lut le contenu du contrat à voix basse. Cela eut le don de faire rire le gouverneur qui avait déjà eu du mal à garder son sérieux quand K-Lean avait utilisé le mot "barbare" pour parler des cavaliers de la Horde. En fait de barbares, il en avait un bel échantillon devant lui.

Ainsi vous prétendez tuer cet homme que vous n’avez jamais vu et que vous ne connaissez que par les vagues rumeurs colportées ici et là par des marchands apeurés. Je serais bien curieux de savoir comment vous allez, ne serait-ce que vous approcher de lui, sans irriter son odorat.

#41 2018-03-23 23:27:57

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Gouverneur, nous avons un contrat pour rapporter la tête de cet individu au Roi d'Okord. Si nous sommes vivant et devant vous aujourd'hui, c'est bien parce que nous ne sommes pas du genre à nous jeter sur les murailles de nos ennemis tels les Trolls d'Okord.
- K-lean s'accorda quelques secondes de silence tandis que l'interprète traduisait les mots. Il en profita pour paraître le plus sincère possible en prévision des mensonges à suivre. -
De ce que l'on en sait, ces illuminés agissent de manière désordonnée et plutôt aléatoire. Nous venons de loin, et nous avons évidemment beaucoup moins d'informations que vous. Accepteriez vous de nous donner ces précieux renseignements?
Le Gouverneur regarda plus attentivement le petit groupe face à lui. Il lui sembla étrange que ce gamin prenne si souvent la parole et que son chef le laisse faire ainsi. Mais il se dit que les barbares n'avaient que faire des règles et du savoir vivre. Malgré tout, le gouverneur était méfiant, un groupe de barbare qui se disait mercenaire... c'était bien gentil mais il fallait le convaincre.
Vous pensez peut-être que nous n'avons rien tenté ?
Figurez-vous que j'ai envoyé mes meilleurs assassins se débarrasser de ce prophète! Mais aucun n'est revenu. Enfin en un seul morceau.
Son armée de fidèles se compte en milliers d'hommes, vous les trouvez désordonnés ?
Soit, mais ils sont tous prêts à mourir pour leur prophète en échange d'une place au paradis.
Et le moindre paysan qui est accusé de quoique ce soit, est aussitôt décapité, sans aucun jugement, sur la simple dénonciation d'un fanatique.

L'évocation de la situation éprouva les nerfs du gouverneur qui serra fermement dans son poing son mouchoir et crispa la mâchoire.
Le temps de la traduction, il souffla doucement, se réinstalla au fond de son fauteuil et remis le mouchoir devant son nez.
Vous pensez vraiment qu'une bande de ... que quelques Okordiens feraient mieux que mes assassins ?
- Gouverneur, nous ne pouvons pas avoir parcouru tout ce chemin pour faire demi-tour maintenant. Permettez nous de nous approcher de ces illuminés et au moins de les observer.
Si nous jugeons que cette mission n'est pas possible, vous nous reverrez passer dans l'autre sens.
Si nous jugeons que c'est possible, mais que nous échouons, ma foi vous n'entendrez plus parler de nous.
Si nous jugeons que c'est possible et que nous réussissons, Déomul et Okord seront débarrassés d'une bonne épine.
- Et on sera riche ! Ha ha !
- Coupa Omann Do complètement dans son personnage.

Le gouverneur observait consciencieusement ces pouilleux malodorants.
Il lui semblait impossible qu'ils soient capable de réaliser une telle mission. Mais si ces guerriers n'étaient pas là pour se battre contre le prophète, pourquoi étaient ils ici ? Étaient-ils là pour faire alliance avec les illuminés, puis envahir Déomul ?
En même temps, il avait du mal à croire que les fous de dieu puissent faire une alliance avec quiconque.
Et puis, s'ils avaient voulu ouvrir un front à l'Ouest de Déomul, ces diables d'Okordiens auraient mieux fait de rester vassal de Torchon 1er.

"Je dois vous avouer que je ne sais pas quoi faire de vous. J'hésite entre vous laisser vous faire décapiter par ces barbares et vous torturer moi-même pour savoir le but réel de votre venue ici. - reprit le gouverneur
- Personne ne me torture moi ! - Omann Do s'approcha à grand pas tout en tentant de sortir son arme de sa ceinture. Mais trois gardes dégainèrent les leurs aussitôt et lui bloquèrent le passage. K-lean et Elvane se jetèrent sur Omann Do et le retinrent en arrière.
- Hoooo ! On arrête là ! Personne ne va torturer personne. - K-lean se tourna vers le gouverneur -
Monseigneur, j'ignore comment vous convaincre. Mais sachez qu'ouvrir le bide d'un mercenaire envoyé par le Roi d'Okord n'est pas la meilleure façon de se trouver un allié. Ces Fous de dieu envahissent peu à peu nos terres et depuis notre indépendance d'Abrasil, nous n'avons plus d'armée assez conséquente pour affronter la Horde à l'est et des illuminés à l'Ouest. Peut être que la solution serait que Déomul et Okord s'associent contre ces fléaux ? Mais en attendant notre mission est d'aller au moins observer de plus près ces barbares.
Monseigneur, je vous le demande une nouvelle fois. Donnez nous une carte et décrivez nous l'implantation de ces barbares, donnez nous des informations pour que notre mission soit un succès.


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#42 2018-03-24 00:46:23

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Le gouverneur restait pensif. Il n’était pas vraiment convaincu que les hommes qu’il avait devant lui venaient d’aussi loin pour assassiner le prophète. D’un autre côté, si c’était le cas, les en empêcher était idiot. Il avait beau se torturer les méninges, il n’arrivait pas à imaginer une autre mission. Une ambassade ?  Il repoussa cette idée saugrenue. On n’envoie pas de pareils loqueteux puants pour parler à la place d’un roi. C’est donner une image catastrophique du royaume qu’on est censé représenter. Non, il s’agissait de guerriers, c’était évident ! Certes trop nombreux pour approcher discrètement et efficacement le prophète, mais trop peu nombreux pour représenter un quelconque danger pour l’Empire. Ils lui faisaient plutôt l’effet d’aventuriers venus chercher fortune en profitant du désordre. Une compagnie de coupe-jarrets attirés par la rapine et le pillage facile. En fait de mercenaire, ces brigands devaient travailler pour leur propre compte.
Il poussa un profond soupir et reprit un loukoum qu’il dégusta lentement.

Vous m’avez convaincu !  Déclara-t-il finalement.

Je vais vous indiquer le dernier endroit connu où la présence du prophète a été signalée. Je vais vous communiquer ce que nous savons de ses forces, de sa manière de combattre, de sa capacité de déplacement et des ruses qu’il utilise pour tromper l’adversaire. Nous savons par exemple qu’il se fait remplacer par des doubles. Mes assassins ont réussi à en tuer un. Bref je vais vous dire exactement tout ce que nous savons sur ce prophète.
Je vais même faire plus ! Si vous me présentez la tête de ce chacal, avant de la ramener à votre roi, je vous donnerai un talent d’argent à chacun de vous ! Cela doit représenter environ 5000 de vos pièces d’or.
Et pour que votre mission soit un plein succès, je vais vous fournir un guide connaissant les Grands Sables comme sa poche. Un membre d'une de ces tribus que le prophète à massacrées au nom de son dieu et qui ne rêve que de vengeance.
Et j'irai même plus loin! Ma trière de guerre vous conduira jusqu’à un point de débarquement idéalement placé sur la côte de Ponobar, d’où vous pourrez partir à la rencontre de votre cible. Ainsi vous n’aurez pas besoin de faire passer votre frêle esquif par la cale et vous garderez vos forces au lieu de ramer. Votre bateau attendra ici votre retour, soyez sans crainte, nous en prendrons soin! De toute façon ce n'est pas en bateau qu'on traverse les steppes de Salahin, n'est-ce pas?

Et comme l'image ridicule d'un bateau voguant sur le sable lui traversa l'esprit, il partit dans un grand éclat de rire.

#43 2018-03-26 11:17:36

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Regroupés à l'arrière de la trière de guerre du Gouverneur, en route pour Ponobar, les Okordiens faisaient mines de paraitre naturels.
Les discussions de la veille avaient pourtant été plutôt houleuses entre eux, leur petit knorr avait été laissé sur place. Il n'avait pas grande valeur hormis leur autonomie et leur liberté d'actions. Ils avaient certes avancé dans leur périple, sans avoir besoin encore de faire couler du sang, ni même payer le passage et l'accès de l'autre côté du Pas du Géant, désormais embauchés qu'ils étaient par ce Gouverneur Lumoediens.

Pour quelques uns d'entre eux, dont Sparr Hoff, devoir quitter leur coquille et être largué à pied à Ponobar, qui était à quelques jours de la frontière d'Abrasil, c'était très risqué ou trop long. Le plan leur avait permis d'avancer et de gagner quelques jours plutôt que d'attendre la fin de la crue. Mais ils perdraient peut être ce temps en devenant piéton, et surtout, on les emmenait sur un territoire soumis à des règles régies par des fanatiques.

K-lean et Omann Do avaient su rassembler la troupe tout de même, ils n'auraient surement jamais pu passer autrement, surement pas par la force. Ils avançaient vers leur objectif et étaient tous en vie. Ils avaient même pu profiter d'une nuit vraiment reposante et des meilleurs repas depuis leur départ d'Okord.

Agenouillés autour de K-lean et Omann Do, toujours en faux chef mercenaire, l'équipage écoutait la discussion autour de la carte qui leur avait été donnée avec tous les renseignements sur les illuminés et les alentours. Omann Do laissait l'impression pour les Lumoédiens de donner ses consignes et son plan d'action pour aller espionner les fanatiques. Mais c'est K-lean, derrière le jeu bruyant d'Omann Do, qui guidait la discussion.
"Elvane, par rapport à ce que tu connais du secteur, est ce que les positions de ces fous de dieu nous posent problème pour avancer ? A t on moyen de contourner ces forts, longer le fleuve, et le traverser lorsqu'on sera en face d'Abrasil?"


Lignée des Trofs, et autres successeurs

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#44 2018-03-26 22:37:29

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Elvane inspectait la carte avec minutie. Elle n’avait pas de souvenir du désert de Salahin pour la bonne raison qu’elle n’y avait jamais mis les pieds. Il n’y a rien à faire dans un désert quand on est contrebandier. Elle déchiffrait les inscriptions qui étaient bien plus parlantes que le vague dessin représentant le fleuve, les montagnes et les villes fortifiées.

Elle interrogeait aussi le guide que le gouverneur leur avait fourni. L’homme était un pécheur qui avait pu fuir une razzia en traversant le fleuve avec son bateau. Elle traduisait ses réponses au fur et à mesure.
Au bout d’un certain temps, K-Lean fit un résumé de ce qui s’était dit.

Si j’ai bien compris, le prophète se déplace régulièrement. Son armée est en perpétuel mouvement, ce qui le rend très difficile à combattre. Il agit comme un brigand nomade. Il vient, il détruit et tue, capture des esclaves, pille les ressources, converti la population et s’en va. Ça m’étonnerait qu’il revienne aux endroits qu’il a déjà pillé. Il ne fait qu’y envoyer des collecteurs d’impôts. Je ne pense pas qu’il laisse des garnisons permanentes dans les régions qu’il contrôle. Je ne suis pas sûr non plus qu’il se fatigue à prendre des villes fortifiées d’assaut. Ce n’est pas la façon de se battre des tribus des steppes. Il doit se contenter de les menacer d’un long siège pour recevoir un tribut en or, en argent ou en nourriture.
Voilà ce que je propose. On débarque et on s’enfonce dans les terres le temps que cette foutue trière regagne sa base. Ensuite on marche vers l’Ouest jusqu’à ce qu’on trouve un moyen de retraverser le fleuve. Il doit bien y avoir un port dans le coin. Notre guide doit connaître puisqu’il est pêcheur.

- Et si on tombe sur des illuminés du prophète en chemin ? Demanda Oman Do

Ben on les enverra voir leur Dieu d’un peu plus près. Et s’ils sont trop nombreux, c’est nous qui iront trinquer au Walhalla. Allez ! Mais si on reste à Ponobar on ne devrait pas en voir de trop. Préparer-vous on arrive.

La trière aborda dans une petite baie déserte. La berge était couverte de hautes herbes et de buissons épineux. La troupe débarqua et s’enfonça aussitôt sous le couvert végétal du bois qui bordait la crique. Leur guide avait pris la tête de la colonne, suivi de très près par K-Lean et Sparr Hoff. Elvane suivait avec le gros de la troupe. Oman Do fermait la marche.
Ils marchèrent ainsi jusqu’à la nuit en direction du Sud.

#45 2018-03-29 17:02:39

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Ils arrivèrent à un petit hameau à la nuit tombée.
Jusque là ils les avaient tous soigneusement évités, profitant des plaines verdoyantes et cultivées de cette région.
Malgré la richesse de la nature avoisinante, ils avaient croisé des champs abandonnés, des maisons partiellement voir totalement détruites.
Nul doute que des illuminés étaient passés dans les parages, laissant derrière eux chaos et désolation.
Sparr Hoff avait pu utiliser son arc pour attraper quelques lapins, un peu de viande pour les jours à venir en complément des rations données par le gouverneur.

Ils trouvèrent une petite maison éloignée du hameau, abandonnée suite à une razzia probablement récente.
Après une sommaire installation et la définition des tours de gardes, ils firent cuire quelques lapins, prenant le risque d'éveiller la curiosité des voisins dans cet environnement qui semblait vidé de sa population.
Elvane expliqua au guide pêcheur la discussion qu'elle venait d'avoir avec K-lean, qu'ils suivraient le lendemain la grande route qui quittait le hameau vers l'ouest, arguant qu'ils obtiendraient plus de renseignements aux abords d'une grande ville. Puis elle revint vers K-lean.
"Alors ?
- Ben il n'en dit rien. Je ne sais pas si c'est le plan qui ne lui inspire rien, ou s'il n'a pas envie d'en parler.
- Faudrait que tu sympathises avec lui, qu'on voit si y'a moyen qu'il nous guide à l'ouest sans qu'on n'ait à le zigouiller dans sa couche.
- Ben, comme je viens de te dire, il est pas ben bavard. J'ai pas vraiment l'impression qu'il soit en joie de revenir par ici, mais de là à lui demander de nous guider jusqu'en Abrasil, on attendra un peu hein ?...
- Ouais, bah tire lui les vers du nez quand même, si y'a moyen qu'il nous guide clairement vers l'ouest ne nous gênons pas.
Allez, allons nous pieuter, on a encore une sacré marche à faire, demain."


Lignée des Trofs, et autres successeurs

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#46 2018-03-30 17:57:56

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Le guide était un homme entre deux âges. C’était, sans aucun doute possible, un pêcheur. Les professions se lisent sur le corps de ceux qui les exercent. Dans le cas présent, les mains de l’homme présentaient de multiples cicatrices laissées par les hameçons ou les dents de certain poissons particulièrement voraces. Il lui manquait deux doigts. Il faut dire que le grand fleuve héberge des monstres capables de vous arracher une main.
Aboukar, c’est son nom, était un taiseux. Elvane avait toutes les peines du monde à lui arracher quelques mots. Le pêcheur comprenait parfaitement la langue d’Ohm, même s’il ne la parlait pas bien, mais cette difficulté était peut-être feinte pour ne pas avoir à trop en raconter.
Quand Elvane lui avait expliqué qu’ils allaient tuer le prophète, il avait ricané doucement. Quand elle lui avait montré la carte pour lui demander dans quelle direction partir, il avait montré Urlun-Bitur. Elle en avait déduit que leur seule chance de survie consistait à faire demi-tour.

Quand elle avait demandé : Pourquoi pas Koromesh ?

Aboukar avait haussé les épaules.

Et Katta-Sur ? Il y a des bateaux à Katta-Sur ?

- Pas de bateaux ! Tous partis !

- Et à Olgii ?

-Olgii, fini ! Brulée ! Ville détruite, habitants massacrés.

Au bout d’un certain temps, à bout de questions, Elvane décida de dévoiler leurs intentions véritables.

Nous n'avons pas l'intention de courir après le prophète! en réalité nous allons en Abrasil ! Dit-elle en posant la main loin à l'Ouest, en dehors de la carte.

Cette fois, le pêcheur se mit à rire. Il pointa la carte avec les trois doigts de sa main mutilée et les fit glisser sur le fleuve au-delà du parchemin.

Frontière fermée. Beaucoup bateaux de guerre.  Tirent d’abord, parlent après.

- Et là ?

Elvanne avait pointé son doigt sur Thérunna. Une ville Abrasilienne sur le confluent du grand fleuve venant du Nord, en face de Déomul.

C’est possible de traverser là ?

Aboukar la regarda. Il fit d’abord la moue, puis ébaucha un petit sourire.

Possible, oui, mais toi passer par Déomul d’abord. Et pas de bateau pour traverser.

- Et si tu avais un bateau, à quel endroit tu traverserais, pour le faire discrètement ?

Aboukar pointe la carte entre Olgii et Katta-Sur.

Là ! Trop dangereux ! Pas surveillance.

- Et tu le ferais sur un radeau ? Dit Elvanne en le regardant droit dans les yeux.

#47 2018-04-03 10:44:36

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

- Non, pas radeau. Trop dangereux ! Nous devoir traverser avec bateau, utiliser courant pour traverser mais courant fort ! Dangereux !

Elvane et le pêcheur discutèrent longuement.
Finalement, la solution fut trouvée de se rendre à Katta-Sur pour, soit trouver un bateau sur place, soit en terminer un dans les différentes cales de construction.
Katta-Sur était la ville la plus proche, il y avait plus de monde et donc plus de chance de trouver un bateau. Etant donné le flot migratoire des habitants qui fuyaient la région vers le nord, il y avait fort à parier qu'ils rencontreraient du monde qui profitaient de la situation pour faire payer à prix d'or la traversée.

La troupe était donc de nouveau sur la route, en direction de l'ouest, vers Katta-Sur.
Ils évitaient toujours soigneusement la grande route en la longeant au travers des champs.
Depuis l'aube qu'ils marchaient ils n'avaient pas croisé d'hérétique ni de troupes armées, mais ils avaient observé beaucoup d'hommes et de familles qui allaient a contre sens avec toute leur maison ou ce qu'il en restait dans les chars qu'ils tiraient.
Après la franche explication d'Elvane, le pêcheur s'était peu à peu libérer et K-lean discutait avec lui, par l'intermédiaire des traductions d'Elvane.

- Moi plus famille. Tous perdus, couic.
- Mais alors que cherches tu ? Pourquoi être notre guide ?
Le pêcheur sourit de dépit.
- Moi pas avoir choix. Gouverneur ordonné moi être guide pour vous, sinon moi cachot ! Moi préférez mourir dans pays que dans cachot.
- Et pourquoi acceptes tu de nous guider jusqu'en Abrasil alors ?
- Moi pas vouloir mourir ici. Si vous vouloir partir Therunna vers Abrasil, moi guider vous car moi vivant à Therunna. Moi fuir prophète, pas vouloir revenir.
- Alors nous te protégerons tout comme nous nous protégeons entre nous.

Le pêcheur avait répondu en silence, regardant K-lean dans les yeux avec un léger sourire.
K-lean ne sut pas comprendre cette expression, peut être était ce un remerciement ? Peut être qu'il ne croyait pas que cette petite troupe saurait rentrer en vie jusqu'à Thérunna.

La journée passa sans encombre, la région était très et trop chaotique du fait des razzias et les champs trop luxuriants pour que la troupe puisse être remarquée au milieu des herbes hautes.

- Nous arriver bientôt à Katta-Sur. - annonça le pêcheur
- As tu des amis ou des connaissances par ici ?
- Moi pas savoir qui encore ici ou vivant. Mais moi connaitre grande maison tonton. Si lui pas là, nous tranquille. Si lui là ...
-il leva les épaules puis tourna l'index contre son crâne- tonton bizarre dans tête.


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#48 2018-04-03 15:03:54

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Quand on arrive à Katta-Sur, on comprend pourquoi les illuminés du prophète n’ont rien tenté contre la ville. Elle est construite sur pilotis au milieu d’une lagune séparée du fleuve par un long banc de sable entrecoupé de passages. Un seul chemin y mène, étroit et encombré de réfugiés qui tentent de fuir les razzias. La troupe de K-Lean se retrouva bientôt englué dans cette foule, incapable de prendre le moindre chemin de traverse. Les marais spongieux qui entourent la lagune pouvaient engloutir une armée entière. Il se retrouva bloqué avec ses hommes.

Pourquoi ça n’avance pas ? Se demanda-t-il au bout de cinq minutes, au comble de l’exaspération.

Deux hommes soulevèrent Sparr Hoff à bout de bras, afin que, monté sur leurs épaules, il puisse embrasser le paysage et comprendre ce qui se passait. Quand il descendit, il dit simplement.

Il y a des gardes à une centaine de pas, qui bloquent le passage. Ils ont l’air de refouler pas mal de monde. J’ai vu passer quelques personnes, mais il semble qu’il faille montrer patte blanche. Le chemin se poursuit vers un embarcadère ou un genre d’esquif à quatre rames vient prendre ceux qui ont le droit d’accéder à la cité. Comme il est seul, et qu’il ne peut prendre que cinq ou six passagers à la fois, il faut attendre qu’il revienne.

Eh ben, nous voilà frais !   Commenta Oman Do ! Putain du Nord ! Et la nuit qui va tomber avec ça ! T’es sûr qu’il y a pas d’autre façon d’aller dans ce bled, K-Lean ?

- Si ! à la nage, gros ballot ! Tu sais nager ? Non ? Moi non plus ! Alors patiente.

Putain du nord, je peux plus rester au milieu de ces traine-savates ! Je sens que j’vais faire un malheur.

Le géant dégaina sa lourde épée et s’avanca vers les réfugiés qui leur barraient la route. Il donna de grande bourrade à droite et à gauche en fendant la foule. Dans le même temps il poussait des grognements qui se voulaient des excuses, mais avaient le don d’effrayer les gens. La troupe le suivit en profitant de la tranchée qu’il ouvrait. Comme une sorte de sillage, les réfugiés se retrouvaient projetés de part et d’autre du chemin. Certains tombaient à l’eau.  Ça poussait des cris, les insultes fusaient, mais Oman Do n’en avait cure. D’ailleurs, personne, en le voyant, n’osait lui faire la moindre remarque. Il se frayait un chemin en regardant droit devant lui, sans prêter la moindre attention à ces pauvres gens, comme si cette marée humaine n’était pas plus gênante qu’une lande de genêt sauvage.
Arrivé devant les gardes. Il les toisa et leur dit :

On a un laisser passer spécial.

Et il leur montra son épée.

K-Lean intervint avant qu’il ne s’en serve et poussa le pêcheur devant afin qu’il leur explique la situation.
On peut être impoli avec des réfugiés mais certainement pas avec des gardes, surtout quand ils contrôlent le seul bateau qui peut leur faire traverser la lagune pour aller en ville.

#49 2018-04-04 16:10:47

K-tåås Trøf
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Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Elvane n'arriva pas à entendre la discussion entre le pêcheur et les gardes, les gens tout autour d'eux ne faisaient que pester.
Mais celui-ci se retourna enfin vers la troupe, Elvane pu alors traduire.
"On peut passer.
- Que leur as tu dis ?
- Moi avoir laisser passer du gouverneur. Moi pas besoin parler."

Evidement, le pêcheur tellement peu bavard, n'avait pas dit à la troupe qu'il avait reçu un laisser-passer du gouverneur du Pas du Géant.
Si durant quelques secondes cela ravi K-lean, il changea vite d'humeur lorsqu'il observa les réactions autour de lui.
Les gardes venaient de leur ouvrir le passage et avaient surement expliquer à la populace l'objet de la mission confiée par le gouverneur.
Les gens alentours, qui étaient jusqu'à présent hargneux et qui pestaient contre leur attitude, se mettaient à les acclamer au fur et à mesure qu'ils avançaient vers le bateau.
"Les gardes ont dit qu'on était là pour tuer le prophète - expliqua Elvane à K-lean
- J'avais compris, merci."
Il se mit soudain à regretter de ne pas avoir laisser Omann Do mettre à l'eau les deux gardes plutôt que d'envoyer discuter leur guide. La rumeur allait se propager comme dans un bordel de la Tour Rose, niveau discrétion c'était loupé.


L'équipage avait du faire la traversée en quatre voyages, juste ce qu'il fallait comme temps aux gardes de baver à chaque arrimage. Lorsque K-lean arriva avec les derniers huskarls à l'intérieur de la cité, Omann Do faisait la police et tentait de repousser une foule venue les acclamer.
"Putain du nord de manche à cul de Wigmar ! Avec tous ces bouseux s'il y a le moindre fanatique dans le coin on est grillé !
Elvane, demande lui de nous emmener dans un magasin de vêtements, faut qu'on se passe inaperçu.
- Magasin ?
- répondit le guide Aboukar - Pas ça ici. Nous aller tonton."
Aboukar s'avança donc au travers de la foule devant Omann Do qui lui emboita le pas et ouvrait la voie en montrant à tous son envie de voir couler le sang avec son épée.

La troupe avançait au travers d'une foule qui se fit de moins en moins compacte, et de moins en moins nombreuse au fur et à mesure qu'ils s'éloignaient de l'embarcadère. Ils s'enfonçaient dans ce qui semblait être le centre, même s'il était difficile de discerner l'utilité des maisons accolée là, sur pilotis, simplement reliées par de petits ponts de bois. Aucune maison ne se ressemblait, même si elle arboraient toutes un toit de chaume ou de paille, elles étaient de tailles et de formes différentes. Certaines, leurs murs de bois peints de couleurs vives, ce qui apportait un peu de couleur parmi la grisaille du lieu, d'autres enduites d'une boue rouge qui leur donnait l'air d'être en pierre.
Au détour d'un des pâtés de maison, il aperçurent une grande bâtisse de trois étages, bien plus large que toutes les autres constructions aperçues jusqu’alors. Celle-ci avait un toit de tuiles plates en bois peintes en rouge et était isolée de toute autre habitation. Il fallait reprendre une petite embarcation pour y parvenir.
K-lean compris rapidement que cette maison était celle du fameux tonton, en voyant Aboukar frapper à une porte et, celle-ci ouverte, accompagner un homme jusqu'à un petit hangard d’où il sortit un frêle esquif pour le mettre à l'eau.

K-lean Elvane et Aboukar se retrouvèrent rapidement à bord et ramèrent vers les pilotis de la grande maison au toit rouge. Ils s'approchèrent d'une échelle enfoncée dans l'eau et Aboukar commença a monter jusqu'à une lourde trappe qui obstruait l'orifice d'accès au rez de chaussé. Il essaya de la pousser, mais elle résista.
"Bloqué." se contenta d'expliquer Aboukar qui frappa encore et encore. Comme il voyait que cela ne répondait pas, il se mit à beugler en continuant de frapper de plus belle.
"Tuan Tuan !!" Cria-t-il pour appeler le tonton dans sa langue.
"Tuan Tuan !! C'est Aboukar !!"
K-lean entendit quelques frottements au dessus de sa tête sur le bois.
"Aboukar est mort ! Dit une petite voix chevrotante.
Non, c'est moi Tuan Tuan !
- Mon **** !
- Ouvre p**** de c**** de z**** !"

K-lean vit une petite trappe s'ouvrir un peu plus loin et une tête passa au travers, à l'envers. Il aperçut la tête d'un vieil homme ridé par le temps surpris par la visite.
"Aboukaer !!"
La petite trappe se referma bien vite, quelques glissements sur le bois et enfin la lourde trappe s'ouvrit.



(***** gros mot impossibles à traduire pour Elvane)


Lignée des Trofs, et autres successeurs

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#50 2018-04-04 20:27:50

Eugénée Anet

Re : Ambassade d'Okord - K-lean [Empire d'Abrasil]

Le tonton était un vieillard sec et sans âge. Presque chauve, sa barbe aussi, était clairsemée. Comme il ne la taillait pas, elle lui arrivait au nombril. Sa bouche édentée raccourcissait le bas de son visage en lui rapprochant le nez du menton, et faisait apparaître son crâne plus gros qu’il n’était. Elle lui donnait aussi un perpétuel sourire narquois et avait un effet désastreux sur sa diction. Et comme il ne cessait de parler avec un débit rapide, Elvane avait toutes les peines du monde à le comprendre.
Aboukar devait avoir l’habitude.  Il n’avait fait que demander un bateau et attendait tranquillement que la litanie verbeuse de son tonton se tarisse. Pour K-Lean qui ne comprenait rien à ce qui se disait, il semblait que le vieillard allait mourir d’une crise d’apoplexie tellement il s’emballait et accompagnait de gestes de plus en plus violents son discours. La demande semblait exorbitante, à la limite de l’insulte au bon sens. Pourtant la question était simple, au fond. Y avait-il un bateau encore à flot à Katta-Sur ? Et si oui, où se trouvait-il.
Au bout d’un certain temps, Alors que les diatribes du vieillard semblaient s’essouffler, Aboukar, souriant annonça :

- Oui, il y a un bateau.

Puis comme pour atténuer la joie qu’il lisait sur le visage d’Elvane.

Mais c’est le bateau des morts !

Elvane se fit expliquer la chose pour la traduire à K-Lean qui désespérait d’assister à ces échanges sans pouvoir y participer.

A Katta-Sur, tout se fait sur la lagune et les bateaux sont indispensables, mais à cause des évènements, ils sont tous partis sauf un. Le bateau des morts. Il est, comme qui dirait, sacré, ou maudit, de sorte qu’on ne peut le prendre.

- Mais il serait assez gros pour nous transporter tous ? Demanda K-Lean

Ça pour être gros, il est gros. Ce bateau ne transporte pas les morts jusqu’au cimetière. C’est le cimetière ! Ici on n’enterre pas les morts, mais on ne les laisse pas non plus flotter dans la lagune.

- Tu veux dire que les morts sont dans ce bateau.

- Oui ! C’est un genre de catacombe flottante. C’est pour cela qu’il est gros.

- Il est gros comment ?

- On peut le voir d’ici. Il est là-bas.

Elvane désigna une fenêtre qui donnait sur la lagune.
K-Lean regarda par l'ouverture et aperçut un groupe de maisons bordé par un énorme quai descendant jusqu’à l’eau. Il eut beau chercher, il ne vit rien d'autre.

Je vois bien le quai, mais je ne vois pas le bateau.

- Il n’y a pas de quai, ce que tu vois, c’est le bateau. Je sais, il n’y a pas de mat, ni rame, ni gouvernail, mais ça flotte. Et bien sûr il est interdit d’y toucher. T’imagines, piquer le cimetière de ces gens ? Tu embarques tous leurs aïeux d’un coup !
D'un autre coté, faut savoir ce que tu veux! C'est ça où on va chercher ailleurs. Et ailleurs, pour l'instant, on sait pas vraiment où c'est!

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