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#1 2016-06-25 22:04:18

Helyanor

Un passé glorieux

[Note HRP : Ce topic retrace la recherche des origines de la lignée du Marquis Andior. Pour rappel, Andior a passé sa jeunesse sur une île lointaine où il est devenu chef de guerre, avant de rejoindre le royaume d'Okord (voir le topic "les exilés de l'île perdue"). Le seul indice qu'il possède sur ses origines est un fragment d'étoffe sur lequel figurent des armoiries.]

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Andior venait de franchir les portes du Clan du Hibou, accompagné de son fils ainé Loth et du capitaine Dagobert Duchesne. Dès l'annonce de leur arrivée, Elverid s'était rendue à la biblitothèque de l'université et avait fait porter dans la plus vaste des salles d'études tous les manuscrits ramenés de Pankhord. Elle parcourut une dernière fois les étagères pour s'assurer qu'aucun des précieux ouvrages et documents ne manquait. Tout était en ordre. Il ne lui restait plus qu'à accueillir ses invités. Regardant par une fenêtre, elle les aperçut au loin, sur la place principale. Andior n'avait pas eu besoin de guide : il connaissait la cité aussi bien que s'il s'agissait de sa propre capitale.
Elverid sortit de la salle pour aller les accueillir... et à peine sortie dans le couloir, elle se retrouva face à Helyanor.
"Matriarche ! Que faites-vous ici ? Vous devriez ...
- Dormir toute la journée ? Et me priver de participer à l'étude de tous ces manuscrits österlichois ? Cela fait déjà trois jours que je ne suis pas sortie de la chambre où tu m'as installée. Il est grand temps que je me rende à nouveau utile.
- Vous devrez rester alitée bien plus longtemps que trois jours si vous voulez que votre blessure guérisse... ou en tout cas éviter de traverser la moitié de la cité à pied.
- La distance n'était pas si grande, et j'ai marché lentement. Pour le reste... Je ne vois pas en quoi passer mes journées assise à lire des livres plutôt que couchée à recompter mes points de suture pourrait compromettre ma guérison."
La vieille femme entra dans la salle, choisit un ouvrage sur l'une des étagères, s'installa à la table et commença à lire. Elverid, quant à elle, sortit en toute hâte du bâtiment pour aller accueillir Andior et sa suite.
"Mes salutations, Monseigneur Andior. Merci d'avoir répondu à mon invitation.
- Bonjour Elverid. Voici Loth, mon fils ainé. Et vous connaissez déjà le capitaine Dagobert Duchesne.
- Bonjour Mes sires. J'ai réservé notre meilleure salle d'étude à votre intention. La Matriarche s'y trouve déjà. Veuillez me suivre.
- Helyanor est donc déjà remise de ses blessures ?"
Elverid eut une hésitation avant de répondre.
"Disons qu'elle est en bonne voie de guérison, mais... son état reste plus préoccupant qu'elle ne veut l'admettre."

Dernière modification par Elverid (2016-07-28 18:18:53)

#2 2016-06-30 17:21:44

Helyanor

Re : Un passé glorieux

Le petit groupe retrouva Helyanor dans la salle d'étude. La matriarche avait déjà disposé une dizaine d'ouvrages sur la table.
"Bonjour à vous tous. Ravie de te revoir, Andior. J'ai sélectionné plusieurs documents sur l'histoire de la région, et plus particulièrement sur la période qui va de la chute de l'empire d'Ohm à la fondation du royaume d'Okord.
- Bonjour Helyanor. Voilà un choix intéressant.
- C'est celui qui m'a semblé le plus judicieux. Nous y trouverons peut-être des informations utiles sur les relations qu'entretenaient les sociétés pré-okordiennes avec les royaumes voisins encore existants."
Elverid fronça les sourcils en regardant la pile de livres posée sur la table. Certains d'entre eux étaient d'une taille et d'une épaisseur considérable.
"Matriarche, vous avez déplacé tous ces volumes vous-même ?
- Oui. Ils n'étaient pas si lourds que ça, si c'est ce qui t'inquiète. Et si nous nous mettions au travail ?"
Chacun des cinq membres du groupe prit un livre de la pile et s'installa pour l'étudier. Andior avait choisi le plus volumineux. Il devait s'agir d'un atlas chronologique de la région d'Okord : l'ouvrage contenait plusieurs cartes légendées occupant chacune une double page, et toutes suivies de plusieurs pages de texte en ancien österlichois.
Sur chacune des cartes, on reconnaissait le tracé du grand canal, des montagnes et des lacs de la région de l'actuel Okord.
D'une carte à l'autre, les frontières des différents royaumes ou domaines seigneuriaux changeaient, certains blasons disparaissaient et d'autres apparaissaient. Sur les premières, on reconnaissait ceux de familles okordiennes connues pour être très anciennes : le Duché d'Arald, la maison de Karan, la Samarie... Et surtout, un emblème familier qui attira immédiatement le regard d'Andior, un blason qu'il était le seul à pouvoir reconnaître : celui qui était brodé sur son fragment d'étoffe, seul vestige de ses origines mystérieuses.
Le visage d'Andior se figea. Il se mit à tourner les pages plus rapidement, à la recherche d'informations supplémentaires. Son blason figurait également sur les cartes suivantes. Il les compara entre elles, nota chaque changement du tracé des frontières, parcourut à toute vitesse les textes relatifs au domaine qui portait son emblème. Vers le milieu de l'ouvrage, le blason cessa de figurer sur une dizaine de cartes, puis réapparut sur les suivantes. Une dizaine de pages avant la fin, ce royaume qui devait être celui de ses ancêtres était à son apogée et s'étendait du fendoir d'Orka à l'ouest jusqu'à Preskill Gundor à l'est... Et sur la carte suivante, il était réduit à la moitié sud du Nid du Dragon. Enfin, sur celle d'après, et jusqu'à la fin du livre, son blason avait disparu. Nul doute qu'il avait dû subir les assauts de nombreux ennemis, et à de multiples reprises au cours de son histoire. Andior tenait là un début d'explication sur les raisons qui avaient dû pousser sa famille à s'exiler et à traverser l'océan...
De nombreuses pensées se mirent à traverser l'esprit d'Andior. Helyanor remarqua son trouble.
"Tu m'as l'air d'avoir trouvé plus de questions que de réponses dans ce livre. Est-ce que je peux t'aider ?"

#3 2016-07-02 15:36:26

Andior

Re : Un passé glorieux

Andior se leva de sa chaise, prenant le livre dans ses bras, et l'amena devant Helyanor. Il lui montra des pages de l'atlas, pointant du doigt les emblèmes de sa famille.

"Les reconnais-tu? "

L'excitation dans sa voix était largement audible, maintenant que le choc était passé. Après tant d'années sans nouvel indice sur son origine, ces petits symboles semblaient aussi précieux que si l'historique complet de sa famille était inscrit sous ses yeux. Helyanor se concentra un instant, puis son regard s'éclaira, et elle tourna son visage vers lui. Ils avaient déjà eu entre leurs mains, une dizaine d'années auparavant, une carte où cet emblème était présent, mais ils étaient encore sur l'île d'Agomeux à l'époque, et cette carte était bien moins précise que celles qu'ils avaient à présent sous leurs yeux.

"Que comptes-tu faire?
-Chercher des informations sur place. C'est une occasion inespérée.

Loth avait les yeux qui brillaient en regardant l'atlas, car son père lui avait déjà parlé de ce symbole. En revanche, Elverid et Dagobert n'avaient aucune idée de ce qu'il était en train de se passer. Ce dernier prit la parole.

"Sire? Puis-je vous demander ce qu'il se passe?
-Mes amis, ces emblèmes sont en partie la raison pour laquelle nous nous trouvons ici, dans le Royaume d'Okord. Cet emblème est celui de ma famille, lignée dont j'ignore tout. Le seul indice que j'avais jusqu'alors sur mes origines était un morceau d'étoffe où se trouvait ce symbole, dans lequel j'étais enroulé lorsque l'on m'a retrouvé, seul rescapé du naufrage du navire de mes parents, à Agomeux. Vu la qualité de l'étoffe en question, je savais que je venais d'une famille riche... Et manifestement, elle n'était pas seulement riche, mais aussi noble.
-Sire, mon épée est vôtre jusqu'à ma mort. Si je peux faire quoi que ce soit pour vous aider à trouver  des informations supplémentaires, vous n'avez qu'à me donner des ordres et je vous suivrai.
-Il y a bien quelque chose que tu peux faire. Je ne peux pas aller récolter des informations en personne. Notre famille a peut-être encore des ennemis en Okord, et nous devons faire preuve de discrétion. De plus, j'ai des terres à gérer, ainsi que la confrérie du Cygne. Ceci dit... C'est une tâche qui ne peut être confiée qu'à quelqu'un de mon sang."

Il se tourna vers son fils dont les yeux s'étaient agrandis par la peur. Il avait compris.

"Loth, il est temps que tu fasses tes preuves. Dagobert, tu l'accompagneras, le conseilleras, et assureras sa sécurité. Je ne connais personne d'aussi capable que toi pour cette mission.
-Bien, sire."

Andior s'adressa ensuite à  Helyanor, avec un sourire.

" Désolé, mais je crois que l'étude de ces documents va devoir se terminer sans nous."
"Tous ces livres peuvent attendre un peu, en effet. Je me ferai un plaisir d'accompagner Loth dans cette..."

Tout en répondant à Andior, Helyanor s'était lentement levée. Soudain, elle s'arrêta net de parler et oscilla légèrement sur ses jambes avant de tomber au sol. Elverid se précipita pour la rattraper et l'examina immédiatement.

"Ce n'est rien, juste un étourdissement...
- Rien, vous dites ? Votre blessure s'est réouverte. Pourquoi ne l'avez-vous pas signalé avant de perdre tout ce sang ?"

Sans attendre qu'Helyanor réponde, Elverid sortit de la pièce et donna l'ordre de la transporter au laboratoire pour l'opérer à nouveau, puis elle se tourna vers Andior.

"Vu les circonstances, la Matriarche ne pourra pas participer à cette mission. Si vous le permettez, j'accompagnerai donc votre fils Loth à sa place. Je vous servirai comme elle le ferait."
Bien. Soyez à Pondragon demain, à l'aube.

Les trois hommes tournèrent les talons, laissant Elverid se préparer à leur périple.

#4 2016-07-05 23:16:12

Helyanor

Re : Un passé glorieux

Immédiatement après le départ d'Andior, Elverid s'était empressée de soigner Helyanor. Cette dernière se reposait à présent dans la chambre qu'on avait fait aménager juste à côté de son laboratoire. Elverid, quant à elle, préparait à nouveau son paquetage pour rejoindre Loth et sa suite à Pondragon, conformément aux ordres du Marquis. Lorsqu'elle eut terminé, elle retourna à la bibliothèque où elle avait chargé des scribes de chercher dans les documents de Pankhord des informations complémentaires sur la famille d'Andior.
"Vous avez trouvé quelque chose ?
- Oui. Comme vous l'avez demandé, nous nous sommes concentrés plus particulièrement sur la décennie qui a précédé la fondation du royaume d'Okord. Nous avons trouvé dans cet ouvrage une carte détaillée de la région du Nid du Dragon, qui doit remonter à l'époque où le domaine de la famille d'Andior s'est effondré. Je commençais justement à la reproduire.
- C'est parfait. Je vais continuer."
Elverid s'assit à la table et commença à étudier le document. Elle répertoria toutes les villes figurant sur la carte et rechercha dans les pages du livre toutes les informations s'y rapportant. En comparant avec des relevés récents établis par les cartographes du Clan, elle constata que les sites de la plupart des anciennes villes étaient à présent occupées par des fiefs okordiens. Enfin, une page attira son attention. La lettrine enluminée représentait le blason d'Andior, et le texte déclarait proscrite une petite place forte située au pied d'une montagne, qui était désignée comme la résidence d'un seigneur rebelle. Elverid reprit la copie de la carte que le scribe avait commencé à tracer, et y marqua l'emplacement précis de la citadelle.
Elverid se leva de table, satisfaite. Elle allait pouvoir proposer au jeune Loth un endroit précis où debuter les recherches. Elle roula soigneusement sa carte pour l'ajouter à son paquetage, puis, avant de partir pour Pondragon, elle décida de retourner voir la matriarche pour s'assurer que tout allait bien. Arrivée sur place, elle retrouva une des femmes du conseil assise sur une chaise à côté du lit.
"Elverid ! J'ai appris ce qui s'était passé dans la salle d'étude. Comment va-t-elle ?
- Elle a perdu beaucoup de sang. Elle devrait se rétablir, si toutefois elle consent à se reposer assez longtemps pour cela. Encore une imprudence comme celle-ci et..."
Elverid marqua une pause avant de reprendre.
"J'étais juste à côté d'elle et je n'ai rien vu.
- Elle a tout fait pour que tu ne voies rien, ni toi, ni personne. Et il sera difficile de la contraindre au repos : je crois qu'elle n'acceptera pas l'idée de cesser de se rendre utile au Clan, même pour quelques jours. Elle est notre Matriarche depuis plus d'un quart de siècle déjà, et..."
La conseillère s'interrompit en voyant Helyanor ouvrir les yeux.
"Le conseil du clan attend des nouvelles. Je vais aller les leur donner. Vous avez sans doute beaucoup de choses à vous dire."
Elle sortit de la pièce, pendant qu'Elverid s'approchait du lit. Helyanor eut un sourire en voyant son assistante.
"Pas trop lassée de passer ton temps à me rafistoler ?
- Lassée, certainement pas. Mais inquiète. Vous auriez pu vous vider de votre sang.
- Je sais ce que tu vas dire : que je dois me reposer. Mais il n'est pas bon de rester trop longtemps inactive quand on commence à vieillir, et je tiens à occuper utilement le temps qu'il me reste... Allons, ne fais pas cette tête. Je sais que le Conseil du Clan commence déjà à réfléchir à ma succession. C'est ton nom qui ressort le plus souvent lors des discussions, d'ailleurs...
- Moi ? A mon âge ?
- Ne te sous-estime pas. Andior était plus jeune que toi quand il a unifié l'île d'Agomeux, et les récits qui circulent sur ton expédition en Österlich suscitent l'admiration du peuple. Tu as montré un sang-froid et un sens de la stratégie digne d'un chef de guerre expérimenté... Dis-moi plutôt ce que tu comptes faire dans les prochains jours. Tu es équipée comme pour repartir en voyage.
- En effet. C'est moi qui vais accompagner le jeune Loth dans la mission qui lui a été confiée par son père. Je sais que vous auriez voulu y aller vous-même, mais... vous n'êtes pas en état. Reposez-vous bien, que je puisse tout vous raconter à mon retour.
- J'attends cela avec impatience.
- Je dois partir, à présent. Je suis attendue à Pondragon avant l'aube."
Elverid retourna au-dehors retrouver sa monture et la petite escorte de chasseresses qui l'attendait déjà. Elle monta en selle et partit sans tarder. Elle voulait arriver en avance à Pondragon.
En franchissant les portes de la cité, elle se demanda si elle avait pris la bonne décision : il lui avait paru important d'accomplir la mission dont Helyanor ne pouvait plus s'acquitter, mais elle aurait également voulu pouvoir veiller sur la vieille dame durant sa convalescence. Il y avait certes d'autres herboristes au clan du Hibou. Cependant, la Matriarche devenait de plus en plus têtue au fil des années. La soigner était une chose, l'empêcher de reprendre ses activités trop tôt en était une autre...

Pondragon se trouvait à peu de distance du Clan du Hibou. Elverid y arriva à la tombée de la nuit et donna congé à son escorte. Elle trouva rapidement une petite auberge encore ouverte dans l'enceinte de la cité. Les quelques clients qui s'y trouvaient ne firent pas attention à elle lorsqu'elle entra et s'installa à une table. L'aubergiste s'approcha d'elle.
"On ne voit pas souvent des dames comme vous, par ici. Qu'est-ce que je vous sers ?
- Un potage aux orties, du pain et du fromage.
- Ah, vous venez du Clan du Hibou... j'aurais dû m'en douter. Vous prendrez une chambre ?
- Oui. Je partirai demain une heure avant l'aube."
L'aubergiste comprit qu'Elverid ne répondrait à aucune autre question. Il ramassa les pièces d'or qu'elle venait de poser sur la table à son intention et retourna en cuisine préparer le repas commandé.
La jeune femme monta dans sa chambre dès qu'elle eut fini son dîner. L'endroit avait l'air propre. Elle verrouilla la porte, retira ses bottes et s'allongea sur le lit pour prendre un peu de repos.

Le lendemain matin, Elverid se présenta au château peu avant l'aube, et fut conduite aux écuries, où Dagobert Duchesne finissait d'inspecter sa monture et celle de Loth que les palefreniers venaient de préparer.
Un peu plus loin, leur escorte d'une vingtaine de soldats se tenait prête à partir.
"Bonjour, Capitaine Duchesne.
- Dame Elverid. Nous nous mettrons en route dans quelques minutes.
- J'ai pu faire des recherches complémentaires, hier, avant mon départ. J'ai pu identifier un point de départ possible pour nos recherches, dans une zone montagneuse du Nid du Dragon. Où est Messire Loth ?
- Avec Messire Andior, qui doit être en train de lui faire ses dernières recommandations avant sa première grande mission. Justement, les voilà."
Elverid se retourna. En effet, Andior et Loth s'approchaient. L'expression de leur visage trahissait leur excitation mêlée d'inquiétude. Le jeune garçon paraissait avoir mal dormi. En passant devant Elverid et Dagobert, il les salua d'un signe de tête, puis se dirigea vers son cheval et et monta en selle. Les autres membres de l'expédition firent de même.
"Je ne vous décevrai pas, Père."
Le petit groupe de cavaliers s'éloigna. Andior les suivit longtemps du regard. Un regard rempli de fierté...

#5 2016-07-06 23:00:20

Helyanor

Re : Un passé glorieux

Le petit groupe arriva au nid du dragon en milieu d'après-midi. Il leur fallait à présent chercher leur première destination : le site de la dernière résidence de la famille d'Andior. Elverid consulta à nouveau la copie de la carte qu'elle avait emportée.
"Je pense que l'ancien château doit se situer dans la zone montagneuse qu'on voit au loin."
Les cavaliers éperonnèrent leurs montures. Loth, en particulier, avait hâte d'arriver sur les lieux. Après une heure, ils trouvèrent enfin le château... ou ce qu'il en restait : des murailles effondrées et des poutres calcinées. Il passèrent les vestiges du rempart et démontèrent dans la cour. Loth s'avança au milieu des ruines en regardant autour de lui, l'air consterné.
"Comment allons-nous trouver quoi que ce soit ici ? Tout a été détruit il y a des années !
- Cherchons quand-même. La bibliothèque du Clan du Hibou regorge de documents que la Matriarche Helyanor a trouvés dans des ruines beaucoup plus anciennes que celles-ci."
Elverid avança résolument vers ce qui semblait avoir été le logis seigneurial. Sans hésitation, elle entra dans le vieux bâtiment à demi-détruit. Dagobert, puis Loth, la suivirent. Après plusieurs heures d'inspection minutieuse, Loth, voyant que la nuit allait tomber, décida de faire un feu. Il ramassa quelques fragments de bois éparpillés au sol et le rassembla dans l'immense cheminée. S'appuyant sur le côté d'une moulure, il déclencha un mécanisme... et un panneau au fond de l'âtre pivota sur lui-même, dévoilant un escalier en colimaçon qui s'enfonçait sous terre.
Dagobert et Elverid s'approchèrent rapidement.
"Bien joué, Messire Loth ! S'il y a quelque chose à trouver, c'est certainement dans ce souterrain. Je passe le premier."
Dagobert Duchesne s'engagea dans le passage, suivi de Loth, et d'Elverid qui fermait la marche. En bas des escaliers, ils débouchèrent dans une petite salle sommairement meublée, creusée dans la roche, qui s'ouvrait sur un tunnel. Dagobert Duchesne alluma les torches fixées aux murs afin de mieux examiner l'endroit. Quelques étagères portaient d'anciens registres, et sur un écritoire, Elverid trouva un parchemin roulé, abîmé par endroits, dont le sceau portait l'emblème d'Andior. Elle l'apporta à Loth.
"Je pense que ceci vous revient."
Loth prit le parchemin, l'ouvrit fébrilement et commença à lire. Il déchiffra avec difficulté certains passages dont l'encre était à demi-effacée.
"C'est une lettre... L'auteur l'adresse à son frère cadet... Les noms sont illisibles...
Il explique qu'il a du fuir avec son épouse et son fils nouveau-né... vers le confluent du Grand Canal, à la Griffe de l'Ours... et qu'ils doivent y retrouver leur homme de confiance, un certain K'Thorgenn, dans une ville portuaire située sur l'une des îles... et un capitaine de marine marchande qui peut les aider à fuir par la mer... vers une île située très loin au sud... et oubliée de tous.

- De tous à l'exception de ce marin... La lettre mentionne son nom, ou celui de la ville ?
- Non... Il y a une carte dessinée au bas de la lettre, mais elle est presque effacée. Regardez."
Everid examina attentivement le parchemin et, en le plaçant à contre-jour devant une torche, parvint à distinguer le tracé.
"Elle représente les îles de la Griffe de l'Ours. Cette croix à la pointe nord-ouest de l'île supérieure doit indiquer l'emplacement de la ville portuaire. Nous devrions aller là-bas rechercher d'autres indices. Qui sait, peut-être que ce K'thorgenn est encore vivant, ou qu'il a eu des descendants qui se souviennent de quelque chose."
Soudain, le visage de Loth s'assombrit.
"J'espérais pouvoir retrouver un membre rescapé de notre famille ou ses descendants... Mais si nous avons trouvé cette lettre, ça veut dire que son destinataire doit être mort avant de parvenir jusqu'ici..."
Tous les trois remontèrent l'escalier pour retrouver leurs montures et se remettre en route. Loth, pensif, tenait dans sa main le parchemin comme s'il s'agissait de son bien le plus précieux. Même si la signature était illisible, il en était convaincu : ce document avait été rédigé de la main de son grand-père, et le bébé mentionné dans le message ne pouvait être qu'Andior.

#6 2016-07-13 00:17:29

Andior

Re : Un passé glorieux

Passage écrit à 90% par Anthémius qui n'a pas eu le temps de le poster avant ses vacances

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Le petit groupe mené par Loth avait chevauché jusqu'à la tombée de la nuit pour atteindre la rive du grand canal à la pointe sud-est d'Okord et avait établi un campement pour la nuit en pleine campagne. Au petit matin, après avoir levé le camp, ils avaient rencontré un pêcheur qui s'apprêtait à partir. Ils avaient pu le convaincre, moyennant quelques pièces d'or, de les conduire vers les îles situées au milieu de la Griffe de l'Ours. Arrivés en vue de la côte nord de l'île supérieure, le pêcheur leur demanda dans quelle ville ils voulaient débarquer. Elverid tira d'une de ses sacoches une longue-vue et scruta la côte.
"Nous cherchons une cité ancienne... Je vois trois villes fortifiées presque côte à côte... Celle qui se trouve le plus à l'ouest porte la bannière du Comte Ultan. Je sais qu'elle a été fondée il y a moins d'une génération... La seconde n'est pas la bonne non plus, tous les bâtiments visibles sont de construction récente... C'est la troisième, celle qui se trouve à l'est. Les fortifications ont clairement été érigées sur les vestiges d'anciens remparts.
- Alfard, donc. C'est le fief principal du Seigneur Anthémius. Je vous déposerai au port, mais je repartirai aussitôt. Je n'ai pas envie d'y passer des heures..."

La traversée se passa sans encombre.
Loth et son groupe venaient à peine de faire débarquer leurs montures sur le ponton du port de la cité  qu’un petit homme se présenta à eux, accompagné de deux gardes aux mines patibulaires. Il avait les mains tachées d’encre et un écritoire autour de la taille. Sa tunique grise retenue par une fibule d’or était de belle facture, mais vraiment trop grande pour lui.
« Halte voyageurs, vous êtes à Alfard, capitale du sire Anthémius de la famille Doukas.» Il jeta un coup d’œil au bateau qui les avait conduits à bon port et ajouta :
« Et visiblement vous n’êtes pas de la Plume, vous êtes donc assujettis aux droits de douanes décrétés par notre seigneur. Inspection obligatoire.» Sur un signe de tête de sa part les deux gardes s’approchèrent sans ménagement des sacoches portées par les chevaux. Les trois compagnons ne bronchèrent pas.
Le visage penché sur son écritoire le fonctionnaire se mit en tête d’inscrire le moindre morceau de fromage contenu dans leurs maigres réserves de nourriture. L’inspection terminée les gardes revinrent encadrer le petit homme qui releva enfin la tête de son écritoire :
« Vos marchandises ne sont pas imposables, vous êtes libres de partir. Respectez nos coutumes et notre seigneur et tout se passera bien pour vous. Rien à déclarer ? » Demanda-t-il d’un œil morne.
Dagobert et Loth échangèrent un regard, puis ce dernier prit la parole :
"Nous voudrions discuter avec K'Thorgenn. Sauriez-vous où nous pouvons le trouver?"

A ce nom les deux gardes se regardèrent et éclatèrent d’un rire gras. Cela ne fit pas du tout rire le fonctionnaire des douanes. Ses yeux papillonnèrent et il demanda :
« Etrangers, comment connaitriez-vous le Sacellaire K'Thorgenn ? »
Loth répondit : "C'est un ami de mon père, le Duc Andior, qui m'a demandé de reprendre contact avec lui."
Comme par enchantement le visage blasé du petit homme se para d’un regard bien plus bienveillant. « C’est une drôle de question, au palais bien sûr ! Quand on dirige toutes les finances et le commerce d’une cité on ne perd pas de temps avec des humbles douaniers comme moi ! Mais je ne vous retiens pas mes seigneurs, passez mes salutations au sire K’Thorgenn » fit le fonctionnaire en s’écartant avec humilité pour leurs laisser le passage sur le ponton.
Ils s’avancèrent et portèrent leurs regards sur la cité. Depuis le port elle s’étendait dans toutes les directions. Néanmoins on pouvait facilement distinguer le palais de la famille Doukas qui dominait la cité sur une hauteur au Sud. Sa construction sur une presqu’île au bout de la baie lui donnait une position enviable, le palais était bordé par la mer sur ses flancs Est, Nord et Sud.
Ils quittèrent les pontons pour s’engager dans les rues de la cité. En ce milieu de matinée les rues de la zone portuaire commençaient à être bien animées. La ville était un mélange étrange de constructions visiblement antiques et de constructions plus récentes. Des colonnades de marbre bordaient la rue commerçante qu’ils remontaient. Mais le marbre était en bien piètre état, éraflé, tagué ou même cassé.
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Ils passèrent même devant une grande construction à moitié en ruine. Les grandes arches à l’entrée, à moitié écroulées, indiquait que l’endroit avait été en son temps grandiose. On distinguait à travers les murs effondrés que le bâtiment avait autrefois abrités plusieurs bassins.
Une fois au palais Doukas des soldats les arrêtèrent et les désarmèrent. Ils demandèrent une audience avec le Sacellaire.  Conduit à l’intérieur sous escorte ils se retrouvèrent dans un petit bureau, face à un nouveau fonctionnaire au grand désespoir de Loth.

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L’homme avait les paupières tellement tombantes qu’on avait l’impression qu’il était en permanence assoupi. Il était occupé à griffonner sur un parchemin. Il les fit attendre. Longtemps.
Quand il leva ses yeux vers les nouveaux arrivants il se présenta comme l’exigeait le protocole. D’une voix monocorde il égrena :
"Valerius Madron, grammatikos du département étranger de l'administration du Maître des Offices, son excellence Théodora Atassu." Disant cela il tourna machinalement la bague qu’il avait sur la main droite. L’insigne de sa charge.
L’homme parlait d’une voix si lasse qu’ils purent à peine discerner les différents mots.
"Veuillez indiquer vos noms, votre provenance et votre date de départ, conformément au formulaire de traitement de demande, paragraphe 2 alinéa 7 relatif aux étrangers ne relevant pas de l’autorité de la Plume."
Loth répondit d'une voix agacée : "Notre souverain est le Duc Andior, co-dirigeant du Cygne et ancien membre de l'honorable confrérie de la Plume. Ne pouvons-nous pas nous passer de ces détails administratifs insignifiants?"

Le fonctionnaire les regarda pendant plusieurs secondes d’un air toujours aussi las, tellement las qu’on aurait dit que son visage allait se décomposer d’une seconde à l’autre. Puis sans rien ajouter il se mit à écrire en marmonnant des imprécations.
"Provenance et date de départ" répéta-t-il d’une voix monocorde
Loth s'avança vers le fonctionnaire, l'air menaçant, mais Dagobert le retint d'une main sur son épaule, et répondit calmement :
"Je suis le capitaine Dagobert Duchesne. Voici Elverid, du clan du Hibou, et Loth, fils du duc Andior d'Orcanie. Nous venons de Pondragon, fief du Duc. Nous partirons dès que nos affaires ici seront réglées, d'ici deux ou trois jours au plus tard, sans doute."

Après de longues minutes il finit par leur tendre un bout de document.
"Votre demande de rencontrer le Sacellaire ne peut être traitée par les bureaux du Maître des Offices. Vous allez devoir vous rendre dans les bureaux de l’Eidikon, à l’étage."
Commença une procession interminable à travers les bureaux de la pléthorique administration au service de la famille Doukas.
A leur arrivée ils avaient été impressionnés  par la taille du palais, qui semblait démesurée pour un simple baron d’Okord. Mais après plusieurs heures, et à mesure qu’ils étaient renvoyés de bureau en bureau ils se rendirent compte qu’une grande partie du palais était en faite fermée et condamnée. Seule une petite partie était encore habitée. Et à bien y regarder, les riches mosaïques et grandes tentures étaient par endroit dans un état de décrépitude avancé.
Après plusieurs heures ils étaient néanmoins proches du but. Ils se trouvaient dans le bureau de l’adjoint du Sacellaire K'Thorgenn. L'adjoint était un homme élancé et charmeur, avec les cheveux noirs et bouclés typique des habitants de l’île.
-Je suis navré que vous ayez fait tout ce chemin pour rien mais le Sacellaire K'Thorgenn est un homme très occupé et ne peut recevoir de visite sans rendez vous. Il reçoit néanmoins en audience à partir de la semaine prochaine.  Mais il vous faut remplir ce formulaire pour être sur liste d’attente" leur dit-il tout sourire en leurs tendant un énième document.

Loth était de plus en plus énervé par la situation, mais Dagobert avait pris les choses en main à partir du moment où il l'avait retenu par l'épaule. Le capitaine prit le formulaire tendu par l'adjoint, le parcourut du regard, et le tendit à Loth avant de prendre la parole d'une voix sèche, montrant Loth d'un signe de la main.
"Vous avez ici Loth, héritier du duc Andior, qui est lui-même un ami de longue date de la Princesse Ayla, dirigeante de la Plume Noire. Comment pensez-vous que le Duc réagira s'il apprend que nous avons été baladés pour rien pendant plusieurs heures dans votre palais? Il en parlerait sans aucun doute à la Princesse, qui en parlerait à votre souverain, le Baron Anthémius. Je pense qu'il serait navré d'apprendre l'inefficacité de votre administration, et du manque de respect accordé à quelqu'un du rang de Loth.
Je vous demande donc de reconsidérer la situation en prenant en compte ces informations."

Le visage de l'adjoint se décomposa : il n'avait pas été informé de la nature de ces visiteurs, et se confondit en excuses. Il sortit précipitamment du bureau en leur demandant de l'attendre ici.
Dagobert regarda ses compagnons avec un petit sourire.
"Je crois qu'on va être reçus."

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#7 2016-07-20 14:57:35

Andior

Re : Un passé glorieux

Quelques instants plus tard, l'adjoint s'effaçait pour les laisser entrer dans le bureau de leur hôte.
L'homme qui se trouvait sous leurs yeux était beaucoup plus jeune qu’ils ne l’avaient imaginé puisqu’il ne devait pas avoir plus de 40 ans. Signe de l’importance du personnage, il était très richement vêtu, de soie brodée à l’or. Il avait même un garde du corps tapi dans le fond de son bureau, impassible. Une grande fenêtre faisait entrer la lumière de l’après-midi dans la pièce. Elle avait une vue imprenable sur la mer en contrebas. 

« Que puis-je pour vous étrangers ? Il parait que vous insistez pour me rencontrer personnellement. Vous avez créé pas mal de remous dans mes services j’ai l’impression !
-Vous n'êtes pas K'Thorgenn. » répondit Dagobert d'une voix froide.
L'homme ne se départit pas de son ton chaleureux pour autant.
« En effet. Je suis Andronic Komnemos, fils aîné et remplaçant de K'Thorgenn Komnemos. Mon père est hélas tombé très malade il y a quelques jours, et n'est pas en état d'assurer ses fonctions.
-Nous souhaitons rencontrer K'Thorgenn, personne d'autre.
-Sa santé ne le permet pas. 
-Dans ce cas, je souhaiterais que nous restions seul. C'est une affaire très privée que nous portons à votre connaissance.»

Les deux hommes se jaugèrent du regard pendant quelques secondes, puis Dagobert fit un signe de tête vers Elverid. La jeune femme tendit le bout de parchemin qu'ils avaient trouvé quelques jours plus tôt, dans les ruines du château, au fonctionnaire. Celui-ci le lut à toute vitesse, les yeux de plus en plus écarquillés. Il ordonna sans plus tarder à son garde de sortir, avant de reprendre la parole.

« Où avez-vous trouvé cela ? 
-Nous avons exploré les ruines d'un château se trouvant près du Nid du Dragon. L'héritier du Duc Andior ici présent, Loth, est en mission pour découvrir l'histoire de sa famille. » lui répondit Elverid.

Andronic éclata de rire. Un fils de Duc se présentait ici, prétendant être l'héritier d'une grande famille de l'époque pré-okordienne ? Pour ce qu'il en savait, Andior avait la réputation d'être un exilé Österlichois ayant inventé des tonnes d'histoires pour se donner une crédibilité politique, et avait embobiné suffisamment de monde pour devenir chef de faction. La prétention de son fils cadrait bien avec les foutaises de son père !

« Sans vous manquer de respect, cette lettre pourrait aussi bien être tombée entre les mains du plus crasseux des alcooliques. Elle ne prouve rien de plus qu'un opportunisme de votre part. »
Loth se leva de sa chaise, scandalisé.
« Comment osez-vous? »
A nouveau, Dagobert calma le jeune homme en le forçant à se rasseoir.

« Nous avons d'autres informations prouvant que nous sommes tout sauf des opportunistes. Pour ce que nous en savons, les parents du Duc ont été défaits peu avant la création d'Okord, et ont été forcés de fuir au sud, sur l'île d'Agomeux. Hélas, ils sont tous les deux morts à leur arrivée sur place, car leur navire s'est fracassé sur les côtes de l'île. Le seul survivant du naufrage est Andior, que l'on a retrouvé enveloppé dans cette étoffe. »
Loth la tendit à Andronic qui, au fur et à mesure que Dagobert parlait, se concentrait. Leur histoire tenait la route. Il prit le drap tendu par Loth. Il était très usé par le temps, mais on distinguait clairement l'Ours caractéristique de la famille qui avait écrit cette lettre. Il se redressa sur sa chaise.
« Il n'y a qu'une seule façon d'être certain de votre honnêteté. Suivez-moi. »

Andronic se leva de sa chaise et ouvrit la porte se trouvant sur le côté de son bureau. Quelques couloirs plus tard, il entra dans une salle avec Loth, laissant Elverid et Dagobert sur le pas de la porte. Dagobert colla son oreille à la porte, prêt à intervenir au moindre bruit suspect, tandis qu'Elverid restait à l'écart, très calme. Ils étaient bien arrivés à retrouver K'Thorgenn, donc il n'y avait aucune raison que leur fils les piège, à ses yeux.
Pourtant, les minutes passaient et les deux hommes ne sortaient pas de la pièce...

#8 2016-07-21 14:34:31

Andior

Re : Un passé glorieux

La pièce dans laquelle Loth et Andronic entrèrent était uniquement éclairée par le feu d'une cheminée et quelques bougies, car les rideaux des deux fenêtres étaient tirés. Une grande bibliothèque se trouvait entre elles, pleine de livres manifestement anciens, et un vieil homme était allongé dans un grand lit en bois de rose, au centre de la pièce. Il avait les traits tirés, le teint blafard... Il vivait sans doute ses derniers jours. C'était sans aucun doute K'Thorgenn.

Andronic murmura quelques mots à l'oreille de Loth :
« Gare à vous si vous me menez en bateau... Quand je vous le demanderai, vous lui montrerez votre visage. Il n'arrive plus à parler. »
Puis il se tourna vers son père :
« Père, voici un homme qui se prétend héritier de l'Ours du nid du Dragon. »

Il s'effaça ensuite dans un coin de la pièce, invitant Loth à avancer. Loth marcha lentement vers le lit, puis se pencha son visage au-dessus de celui de K'Thorgenn. Les yeux du vieillard parcoururent le visage du jeune homme, cherchant à le comparer aux souvenirs qu'il avait de ses grand-parents. Quelques dizaines de secondes passèrent, puis son visage s'éclaira.

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Il leva sa main pour toucher Loth, les traits chargés d'émotion, puis se tourna vers son fils et cligna une fois les yeux. Andronic comprit le message. Il partit en direction de la bibliothèque, tira un livre de l'étagère du bas en arrière, et prit une petite boîte qui était cachée derrière.
Il la donna ensuite à Loth, qui l'ouvrit. Il sortit précautionneusement l'objet de sa boîte, et l'examina.
Il s'agissait d'un cube comprenant une quantité impressionnante de symboles, certains gravés et d'autres émergeant du cube. Il semblait être fait d'or mais ce n'en était pas, et Loth ne savait absolument pas dire ce que c'était.

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« Vous êtes bien l'héritier de la famille que vous recherchez, je vous fais toutes mes excuses. Vos grand-parents ont laissé des instructions claires à mon père, qui me les as transmises.
Bien que vous soyez leurs héritiers, vous devez prouver votre valeur afin de pouvoir prétendre porter leur nom. Vos parents, dont l'emblème était l'ours présent sur votre étoffe, étaient des seigneurs très puissants dans la période pré-okordienne, mais je ne peux pas vous en dire plus. Je ne peux pas non plus vous divulguer leur nom, ce sera à vous de le découvrir.
Ces informations sont sans aucun doute présentes dans la grande bibliothèque de Nefret, appartenant au domaine des Karan. Vous devrez vous montrer prudents avec eux, ils ont toujours, quoi qu'on en dise, une influence très forte en Okord, et ne doivent pas vous percevoir comme une menace pour leur sécurité. Le retour d'une grande famille ne ferait pas leurs affaires, vous devrez donc trouver un bon prétexte pour entrer dans la bibliothèque.
Vos grand-parents possédaient également un artefact, symbole de leur puissance, qu'ils ont caché en Okord avant leur fuite. Ce cube vous aidera à avoir accès à l'artefact, mais vous devrez également trouver son emplacement vous-même.
Ah, une dernière chose. Dites à votre père que son véritable nom n'est pas Andior... Ses parents l'avaient nommé Andronic. Comme moi, oui. »

Loth resta abasourdi devant tant de révélations.

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Andronic, avec un sourire, remit le cube dans sa boîte et accompagna Loth en dehors de la pièce. Lorsqu'il ouvrit la porte, il entendit un fracas derrière : Dagobert, qui était resté l'oreille collée à la porte, avait précipitamment reculé contre  le mur du couloir et l'avait heurté de plein fouet, manquant complètement de discrétion.
N'en prenant pas ombrage, Andronic reprit la parole :
« Vous dormirez dans le palais cette nuit. Vous serez nos invités de marque. Demain matin, je vous montrerai une passage secret pour quitter la ville, et m'assurerai que vous n'êtes pas suivi. Je compte sur vous pour vous montrer à la hauteur de votre quête. »

#9 2016-07-22 14:11:04

Helyanor

Re : Un passé glorieux

Le lendemain matin, comme convenu, Andronic conduisit ses invités jusqu'à l'extérieur de la ville. Il avait également prévu une embarcation pour les reconduire, avec leurs montures, de l'autre côté du canal. Le pilote du bateau, un personnage peu engageant au visage parcheminé, leur fut présenté comme un homme de main en qui K'Thorgenn avait toute confiance. Il les conduisit sur l'autre rive sans décrocher un seul mot, mais il regardait fixement le jeune Loth comme si ce dernier lui rappelait quelqu'un. Une fois déposés sur la terre ferme, ils remercièrent le passeur et s'éloignèrent rapidement. Loth paraissait troublé. Elverid s'en aperçut.
"Auriez-vous reçu des révélations... dérangeantes ?
- Non, mais Andronic m'a remis un drôle d'objet. Je suis censé découvrir par moi-même quoi en faire, mais je n'ai aucune idée de ce que c'est.
- Souhaitez-vous que je l'examine ?"
Loth sembla hésiter un instant, puis se décida.
"Oui. Arrêtons-nous à l'écart de la route."
Loth s'enfonça dans le sous-bois et fit quelques dizaines de mètres, toujours suivi d'Elverid et de Dagobert, avant de démonter et de sortir le coffret de sa sacoche. Il l'ouvrit et le présenta à Elverid, qui prit le cube avec précautions et le tourna lentement dans tous les sens.
"Je ne crois pas qu'il soit en or, même si ça y ressemble beaucoup...
- Vous avez raison. S'il s'agissait d'un bloc d'or massif, il serait beaucoup plus lourd... et s'il était simplement recouvert de feuille d'or, la surface devrait porter des traces d'usure par endroits... Cet objet semble de facture très ancienne, et il est constitué d'un matériau très résistant... Tous ces symboles doivent avoir une signification, mais je n'ai jamais rencontré de tels hiéroglyphes dans les quelques ouvrages que j'ai lus sur les civilisations antiques... Sa masse n'est pas répartie de façon homogène... je ne serais pas étonnée qu'il renferme un mécanisme..."
Loth, agacé, reprit le mystérieux cube des mains d'Elverid. Au lieu de lui apporter des réponses, elle ne faisait que soulever de nouvelles questions. Dagobert, quant à lui, se préoccupait de questions plus pragmatiques :
"Loth, remettez cet objet en lieu sûr. Il n'est pas en or, mais il en a l'éclat. De quoi attirer tous les bandits de grand chemin du coin. Et nous ne pouvons pas nous permettre de nous le faire voler par le premier tire-laine venu. Si peu nombreux, nous sommes une cible facile...
- Nous sommes à peu de distance de la Grange aux Chouettes. Nous pouvons y faire une halte et demander à la bourgmestre locale de nous fournir une escorte.
- Tant que ça ne nous oblige pas à exposer en détail l'objet de notre quête...
- Il suffira d'expliquer que Messire Loth est en voyage initiatique. C'est aussi une coutume répandue parmi mon peuple."

moins d'une heure plus tard, les trois voyageurs passèrent les portes de La Grange aux Chouettes, et furent accueillis par la bourgmestre.
"Bonjour, Imana. Voici Loth d'Orcanie, fils d'Andior, et le capitaine Dagobert Duchesne.
- Bonjour Elverid. Soyez les bienvenus, mes Sires. Que nous vaut l'honneur de cette visite ?
- Le jeune Loth est en voyage initiatique pour faire la preuve de sa valeur. Nous devons nous diriger vers le nord jusqu'au portes de Preskill Gundor, et on nous a rapporté que les routes n'y étaient pas sûres. J'ai donc proposé de nous faire accompagner par une escorte de chasseresses.
- Pour vous aventurer aussi près du domaine de Karan, il vaut mieux que vous soyez escortés, en effet... Je vais réunir une quinzaine de nos meilleures cavalières. Ce sera suffisant contre les brigands et cela ne risquera pas de faire suspecter une tentative d'invasion.
- Parfait."

Dès que l'escorte fut rassemblée, Loth voulut se remettre en route sans attendre. La bourgmestre Imana les raccompagna jusqu'aux portes de la ville, puis les regarda longuement s'éloigner vers le nord, du haut des remparts. Elle songeait à Elverid qu'elle avait vue grandir, Elverid qui, enfant, passait l'essentiel de son temps à lire et à étudier... Elverid qui, à peine revenue de sa longue expédition en Österlich, repartait déjà vers une nouvelle mission... Perdue dans ses pensées, elle ne remarqua pas une autre cavalière, au loin, qui arrivait de l'ouest à bride abattue...

La messagère en provenance du Clan du hibou arriva aux portes de la ville au moment où Loth et sa suite disparaissaient à l'horizon. Ses cris tirèrent Imana de sa rêverie.
"Ouvrez la porte ! Je suis porteuse d'une nouvelle de première importance !"
On fit entrer la messagère, et Imana redescendit en hâte du rempart.
"Parle. Que se passe-t-il ?
- La matriarche Helyanor est morte."
La nouvelle tomba comme une chappe de plomb. Imana demeura silencieuse, comme figée. Après quelques instants, la messagère poursuivit :
"Depuis le départ d'Elverid, la matriarche se reposait et semblait à nouveau bien se remettre de sa blessure... et puis ce matin, elle n'était plus dans sa chambre. On pense qu'elle s'est levée un peu avant l'aube pour retourner à la bibliothèque étudier les documents ramenés de l'expédition en Österlich. C'est là, dans un couloir, que des scribes l'ont retrouvée complètement exsangue. Les herboristes n'ont pas pu la réanimer... Des messagères ont été envoyées porter la nouvelle dans toutes nos cités, et pour tenter de retrouver Elverid, aussi... Elle est partie en expédition, personne ne sait où... et sa présence est indispensable pour la succession.
- Elverid a fait une halte ici ce matin, avec des hommes de la maison d'Andior. Ils viennent de repartir en suivant la route du nord. Tu les rattraperas facilement."
La messagère se remit en selle immédiatement et repartit au grand galop en direction du nord.

#10 2016-07-24 12:49:46

Amon

Re : Un passé glorieux

La journée était avancée, mais le soleil invisible derrière d'épaisses couches de nuages grisâtres ne permettait pas de déterminer si la nuit était proche, ou si l'aube venait de s'achever.

Une épaisse brume cachait le sol humide et boueux. Elle semblait ramper entre roches, touffes herbeuses et quelques rares arbres aux troncs épais, réduisant le champs de vision à quelques mètres au plus. Sa présence donnait l'impression de peser telle une chape de plomb sur la nature environnante. Nulle trille joyeuse ne montait des frondaisons, aucun buisson ne bruissait ni ne craquait sur le passage d'un quelconque animal. Même le vent s'abstenait de s’infiltrer entre branches et feuilles pour faire mouvoir les arbres, comme pour participer à figer la campagne dans un sombre et oppressant jour.

Les seuls bruits et mouvements intrus à ce calme venaient d'une troupe montée, avançant vers le Nord, fendant la brume comme si elle en sortait. Les sabots s'enfonçant dans la terre argileuse trempée, les cliquetis des harnachements et quelques renâclements des montures produisaient une musique qui ne faisait qu'ajouter à cette morne journée une note discordante.
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Le groupe avançait prudemment afin d'éviter de perdre montures voir cavaliers dans crevasses, gorges ou autres pièges naturels qui n'attendaient qu'un pas malheureux. Pour autant, l'allure était soutenue et ne faiblissait pas.
Quelques jours auparavant, ils étaient parti de Cintra, la cité principale des Amon, pour chasser un campement de barbares repéré dans le Nord, qui d'après les rapports de plusieurs espions, transportait une certaine quantité d'or ainsi que quelques artefacts artistiques dérobés lors de pillages. La cavalerie l'avait vite localisé, et avait fondu dessus au petit matin d'une journée pluvieuse.

Les combats furent brefs, et déstabilisants. De la troupe annoncée, les soldats n'en rencontrèrent qu'un quart, certes armé et hargneux, mais sans la moindre pièce d'or. Ils seraient sans doute rentrés à leurs tavernes et femmes n'eut été la présence de la garde montée de la vicomtesse, de son oncle et commandeur de ses armées, et de la vicomtesse elle-même. N'ayant eu ni la bataille recherchée, ni l'or convoité, Merwynn avait refusé à ses hommes un retour dans le Sud, et extrait d'un des survivants barbares la direction des fuyards : toujours plus loin dans le Nord.

Avec environ une journée d'avance sur la cavalerie, les piétons barbares furent coursés à travers plaines et collines, avant d'être enfin en vue. La malchance joua encore son tour sous la forme d'une profonde ravine, dont le fond bouillonnait d'eau et de pierres. Les barbares à pieds eurent tôt fait de la franchir sur une passerelle branlante, qu'ils s'empressèrent de démolir. Jetant un regard aux planches mitées et vermoulues avalées dans les tumultes du torrent, Merwynn sentit la colère monter en elle, exacerbée par les cris moqueurs des barbares s'enfonçant dans un brouillard qui commençait à s'épaissir. Elle rabaissa son casque d'un geste rageur, fit volter sa monture, et après quelques ordres à son oncle et à ses hommes, la troupe repartit d'un trot rapide le long de la ravine, pour trouver un moyen de la contourner.

Il leur fallu une douzaine d'heures pour trouver un passage praticable pour leurs montures, et une poignée d'autres pour retrouver la trace de leurs proies. Ils avançaient donc désormais dans cette campagne brumeuse et silencieuse, parsemée de roches et d'arbres immobiles. Il était clair que les barbares  tentaient de rallier les zones montagneuses, où les chevaux ne seraient d'aucune utilité pour les traquer, si ce n'est un poids et un danger. Le tout était de les atteindre avant qu'ils ne mettent pieds sur les chemins de rocailles, propices aux embuscades ravageuses.

Le champs de vision restreint commençait à peser sur le moral. A part quelques traces laissées par les fuyards, les cavaliers chevauchait dans ce paysage uniforme,  presque immuable à mesure que la nuit approchait. En tête, Filraein scrutait la brume, comme si sa concentration lui permettrait de découper ce voile opaque.
Brusquement, il leva un poing, tout en restant silencieux, la colonne se stoppa. Entouré de la garde de sa nièce, Filraein ne fit pas un mouvement, laissant Merwynn se porter à ses côtés. Il pointa alors quelque chose devant lui. La jeune femme fit glisser son regard sur la masse grisâtre qui les engloutissait, sans rien percevoir au premier abord, puis des contours plus sombres apparurent, délimitant une masse qui s'élevait devant eux, toute proche.
« - La montagne ... »
Ils arrivaient donc trop tard, les barbares avaient gagné.

La troupe se regroupa, démonta, attendant les nouveaux ordres de leur maîtresse, tout en profitant d'un peu de repos. Merwynn marchait entre ses hommes, accompagnée de Filraein et des trois commandants de ses détachements. Il s'agissait maintenant de déterminer soit leur retour, soit écumer les plaines de la région à la recherche de quelques camps barbares.

« -J'vais crever si elle continue à nous mener comme ça, l'autre. J'sens plus mon bras, la vermine s'y est déjà installée ! »

Un soldat, avachi sur une roche, gourde en main, venait de prononcer ces paroles, estimant que la concernée ne l'entendrait pas. D'un geste de la main, Merwynn interrompit ses interlocuteurs, et se dirigea vers l'homme jusqu'à s'accroupir face à lui. Il avait la face rougeaude, l'haleine répugnante et les dents noires. Il exhalait une odeur de vin tourné, et de sueur. De grosses gouttes se formaient sur son front dégarni et dégoulinaient le long de son visage,  humidifiant la couche de crasse qui s'y amoncelait. Il reposa sa gourde, les lèvres tremblantes et trempées de vin, serrant son bras droit.
Merwynn lui posa une main douce sur l'épaule,  avant de s'adresser à lui avec chaleur.
« - Vous êtes blessé, soldat. »
« - Ma Dame,
balbutia l'homme, peinant à courber l'échine malgré sa position, dans une tentative de montrer son respect. C'est mon bras, un mauvais coup de javelot. Trop tard pour l'soigner, va falloir qu'le soigneur me l'enlève... »
A ces mots, il cracha de dégoût un liquide noirâtre,  qui souilla les bottes de Merwynn. La jeune femme acquiesça, et d'un regard compréhensif, l'invita à continuer.
« - J'pourrais plus être soldat, ma Dame, plus travailler, ma famille ... Faut m'couper l'bras avant que la pourriture ne m'emporte tout entier. »
Merwynn se releva, une main toujours posée sur l'épaule du blessé, et tourna autour de lui, réfléchissant. Elle se positionna derrière lui, et lui serra l'épaule. Il plongea sur son outre, et avala quelques goulées de l'alcool puant.
« - Je ferais en sorte que ta famille reçoive ta solde, malgré ton … incapacité. Nous allons reprendre la route de Cintra.
- Merci, ma Dame.
L'homme tressauta, tant sous l 'effet de la douleur qui pulsait dans son bras que de l'enivrement.
- Mais ta famille n'aura pas à souffrir un ivrogne en plus d'un homme inutile et répugnant. »

La Vicomtesse sortit d'un geste souple la dague qui lui ceignait la taille, l’inséra entre deux vertèbres visibles dans le cou du soldat, et entreprit de sectionner la moelle. Le corps s'affaissa de lui même en avant, libérant la lame ensanglantée. Merwynn frotta l'acier sur la gourde du mort afin d'en retirer le liquide poisseux, et releva le visage, scrutant ses cavaliers en vue d'une réaction. Il n'y en eu aucune.
Satisfaite, elle allait donner l'ordre de se remettre en selle et de marcher vers le Sud, quand un hennissement déchira le silence qui régnait depuis des heures.

Instinctivement, tous ses hommes se levèrent, prenant garde d'être silencieux, et commencèrent à se mettre en formation, enfourchant leurs montures avec une discrétion étonnante. Merwynn sortit son épée du fourreau, et recula jusqu'à être encerclée de sa garde, déjà à cheval. Attrapant la bride de son hongre bai de sa main libre, elle se mit en selle, arme en main, scrutant la brume dans la direction d'où venait le hennissement. Elle fit un signe de tête en direction d'un homme à pied, légèrement vêtu. Il s'éclipsa alors dans la brume sans un bruit.

La troupe resta muette, immobile, alors que les minutes s’écoulaient, que la luminosité baissait . D'un coin de l’œil, Merwynn avisa un mouvement, que ses hommes avaient déjà repéré. L'éclaireur était de retour. Il se fraya un chemin jusqu'au centre du bataillon. Succinctement, il rapporta ce qu'il avait vu. Une quinzaine de cavaliers, peu armés, avançant vers le Nord, droit vers la troupe. Rapidement, et sans échanger un mot, l'action fut décidée.
Les commandants prirent tête de leurs détachements, et les trois cents cavaliers s'étirèrent en deux bandes, partant à l'Est et à l'Ouest, lentement, maîtrisant le moindre bruit des montures et des cavaliers.
Petit à petit, ils disparurent dans la brume, chacun ne voyant à peine plus loin que la croupe de la monture qu'il précédait. La ligne s'arqua petit à petit, chaque extrémité se rejoignant, formant un cercle, large et invisible. Et au centre de ce cercle se trouvaient les intrus.
Les cavaliers firent pivoter leurs montures, et s'avancèrent d'un seul mouvement vers la compagnie piégée, armes sorties et l'esprit alerte.

Escortée de sa garde, visière baissée, Merwynn Amon s'avança jusqu'à faire face à ces intrus fortuits.

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#11 2016-07-25 13:11:46

Amon

Re : Un passé glorieux

Se voyant ainsi encerclés, Dagobert et Elverid se portèrent en première ligne pour faire face aux chevaliers qui s'avançaient. Les chasseresses se placèrent en cercle autour de Loth, qui, peu habitué à ce genre de situation, montrait quelques signes d'inquiétude.
"-Qui sont ces gens et que nous veulent-ils ?
- Il sont trop nombreux et trop bien équipés pour être des brigands. Il doit s'agir de soldats en campagne. Quant à ce qu'ils veulent... Le seul moyen de le savoir est de le leur demander."
Dagobert démonta, déposa son épée au sol et fit quelques pas en avant.

Merwynn observait. Les cavalières, toutes femmes, semblaient garder leur calme et savoir comment réagir malgré leur sous-nombre. L'homme qu'elles protégeaient, jeune, ne partageait pas entièrement leur sang froid, il échangea quelques mots avec autre, plus âgé. Celui-ci accompagnant une femme, mis pieds à terre avant de s'avancer, laissant son arme au sol.

"- Bonjour, Chevalier. Je suis Dagobert Duchesne, de la maison du Duc Andior, et voici Elverid, du Clan du Hibou. Nous escortons Loth, fils ainé du Duc, en voyage initiatique. Y a-t-il un conflit en cours dont nous ne serions pas informés ? "

Filraein écarta la main de la garde de son arme, et retira son heaume. Il dévisagea l'homme qui venait de parler, prenant son temps avant de lui répondre.
"-La Maison Andior et le Clan du Hibou,  si loin au Nord ? Ce doit être un voyage des plus importants, pour que le Duc risque sa succession dans une escorte de cette taille. Vous n'êtes pas sans savoir que  les troupes barbares sillonnent ces étendues, à l’affût du moindre pillage..."

Le chevalier qui venait de parler confirmait la supposition de Dagobert : il s'agissait bien d'un seigneur d'Okord, qui connaissait la maison d'Andior. Il observa attentivement son interlocuteur et les hommes d'armes qui l'accompagnaient, essayant de distinguer un étendard ou un blason reconnaissable, mais la brume épaisse ne permettait pas d'apercevoir davantage que des silouhettes sombres.
"-C'est volontairement que nous nous faisons accompagner par si peu d'escorte. Là où nous allons, nous devons absolument éviter d'être pris pour une force d'invasion. Puis-je vous demander quelles sont vos intentions à notre égard ?"

Après une campagne aussi ratée que celle qu'il venait de mener, Filraein n'avait pas la moindre envie de laisser les intrépides sudistes s'en tirer si facilement, du moins tant que Merwynn ne le rappelait pas à l'ordre.
Il adressa un charmant sourire à dame du Hibou, et reporta son regard sur l'homme.

"- Comme vous pouvez le voir, cette journée n'est pas des plus délicieuse. La brume, la boue ... Il gesticula caricaturalement, désignant les alentours, un sourire narquois figé sur les lèvres. Je serais ravi d'en savoir plus sur la quête initiatique d'un seigneur d'Okord. Surtout si elle vous conduit dans ces lieux."

Dagobert Duchesne était de plus en plus contrarié. Andior avait donné l'ordre d'opérer dans la plus grande discrétion, et à présent, le chef de l'armée qui les encerclait ne semblait pas vouloir les laisser partir sans leur avoir soutiré le plus d'informations possible sur les raisons de leur voyage. Elverid remarqua son trouble et descendit de sa monture pour s'approcher à son tour.

"-Comme vous l'a dit le capitaine Duchesne, le jeune Loth est en voyage initiatique. L'un des buts de sa quête est de parfaire son instruction, en allant étudier pendant quelques temps dans la bibliothèque la plus réputée du royaume d'Okord : celle de Nefret. C'est pour cette raison que nous voyageons si peu nombreux. Nous savons que le Seigneur de Karan est d'un naturel soupçonneux, et nous ne souhaitons pas nous présenter à ses portes avec des troupes qu'il pourrait considérer comme une menace."

Elverid s'avança encore de quelques pas.
"-Vous savez à présent qui nous sommes, d'où nous venons et où nous allons. Allez-vous enfin nous dire à qui nous avons l'honneur de parler ? "

Filraein pressentait que la patience de ses interlocuteurs était déjà bien entamée, et il s'en réjouissait intérieurement. Il allait encore les questionner en ignorant leurs propres interrogations, quand Merwynn posa une main gantée sur son avant bras, lui signifiant qu'elle prenait le relais.
Retirant son casque, elle mit prestement pied à terre, et s'avança face à Elverid. Les cavaliers baissèrent alors leurs armes, la tension descendant d'un cran.

"- Je crains qu'il ne vous faille excuser mon oncle, il a tendance à se divertir aux dépends d'autrui. Je suis Merwynn, de la Maison d'Amon. Nous sommes en ... retour de campagne. Je serais curieuse d'en apprendre plus sur ce qui vous attire à Nefret. Ce n'est pas un lieu des plus accueillant, et bien lointain au Nord. Il vous reste bien du chemin à faire pour y parvenir, les barbares pullulent dans ces régions."

Merwynn s'interrompit, observant le ciel couvert et de plus en plus sombre.

"- Par ailleurs, la nuit est déjà sur nous. Puis-je vous proposer de vous joindre à nous pour cette soirée ? Vous y gagnerez sécurité, et moi, un récit qui promet d'être intéressant."


Par Helyanor et Amon

Dernière modification par Amon (2016-07-25 13:12:57)

#12 2016-07-26 08:09:49

Elverid

Re : Un passé glorieux

Dagobert et Elverid échangèrent un bref regard. Il était en effet plus sage de bénéficier d'une escorte supplémentaire, même si en échange, il faudrait avoir la politesse de satisfaire, au moins en partie, la curiosité naturelle de Dame Merwynn. Dagobert s'inclina légèrement avant de répondre.
"Nous acceptons avec gratitude votre invitation, ma Dame. Nous n'avions pas reconnu votre blason dans ce brouillard, veuillez nous en excuser."
Elverid salua la Dame à son tour, avant de revenir vers les chasseresses pour leur ordonner d'établir le campement. Loth, quant à lui, commença enfin à se détendre et descendit de sa monture.

Quelques heures plus tard, tous les trois, ainsi que Dame Merwynn et son oncle, s'installèrent autour d'un feu de camp où cuisait la carcasse d'un chevreuil que les chasseresses avaient pu ramener. Le regard de Dame Amon trahissait sa grande curiosité, et Loth paraissait se sentir en confiance. Dagobert, quant à lui, espérait secrètement que le jeune homme ne parlerait pas trop.
Soudain, l'un des soldats de Dame Amon arriva au pas de course et l'interrompit au moment où elle s'apprêtait à poser sa première question.
"Ma dame ! Les gardes viennent d'intercepter une cavalière. Elle dit qu'elle vient du Clan du Hibou et qu'elle doit retrouver une certaine Elvi... Heu... Elve... quelque chose...
- Elverid ?
- Oui, c'est ça... Enfin bref, elle a parlé d'un message de la plus haute importance.
- Conduisez-la ici."
Elverid fronça les sourcils. Elle se leva immédiatement lorque la messagère arriva, entourée de deux gardes, et se dirigea directement vers elle.
"Elverid ! Enfin, je te retrouve... Le Conseil du Clan réclame ton retour immédiat.
- Pour quelle raison ?"
La messagère regarda autour d'elle.
"Je ne sais pas si je peux le dire devant tout le monde...
- Parle. Il est un peu tard pour faire des secrets.
- La Matriarche Helyanor est morte."
Elverid reçut cette nouvelle comme un coup de poignard. Elle resta quelques instants silencieuse avant de reprendre :
"Je ne devine que trop bien comment c'est arrivé : une fois de plus, elle a voulu se lever trop tôt et une fois de plus, sa blessure s'est réouverte.
- C'est cela même. Des scribes l'ont retrouvée ce matin dans un couloir de la bibliothèque. Elle avait perdu tellement de sang... Même toi, tu n'aurais rien pu faire... Tu dois revenir au plus vite. C'est toi qui a été choisie comme nouvelle matriarche, et les sages du Conseil ont décidé de hâter le rituel de succession. Elles craignent que nos cités ne deviennent la cible de pillages si nous restons trop longtemps sans chef..."
Elverid sembla hésiter quelques instants : elle s'était engagée à accompagner Loth dans sa mission, et cependant elle ne pouvait ignorer une injonction aussi pressante du Conseil du Clan. Elle regarda tour à tour le jeune Loth et Dagobert Duchesne. Ce dernier lui fit un signe de tête pour lui indiquer qu'elle pouvait quitter l'expédition sans faillir à son devoir. Elle se dirigea vers l'endroit où les chevaux avaient été parqués. Dame Merwynn, qui n'avait pas perdu une miette de la conversation, la retint par le bras quand elle passa à côté d'elle.
"Ce n'est pas très prudent de voyager de nuit avec tous les barbares qui rodent.
- J'en ai l'habitude.
- Dame Amon a raison. Vous pourrez repartir demain à l'aube. Votre monture aura eu le temps de se reposer et vous vous dirigerez plus facilement à la lumière du jour. Vous arriverez à peine plus tard qu'en partant maintenant."
Cette dernière remarque de Dagobert acheva de convaincre Elverid de passer la nuit au campement. Elle retourna s'asseoir près du feu, silencieuse et la mine sombre.

Dernière modification par Elverid (2016-07-27 00:28:06)

#13 2016-07-28 14:16:25

Andior

Re : Un passé glorieux

Les minutes passaient et personne ne parlait, autour du feu. Loth avait un peu de mal à encaisser la nouvelle de la mort d'Helyanor. Avec la disparition de sa propre mère durant la traversée de la Grande Mer, elle était devenue un substitut de mère à ses yeux, même si leurs rencontres n'étaient pas si fréquentes que cela. Ils avaient eu beaucoup de longues discussions durant lesquelles elle s'était montrée très à l'écoute, très encline à répondre à ses questions, contrairement à son père.

En effet, son père Andior, qu'il admirait plus que quiconque, s'était révélé bien plus doué pour nouer des alliances, ou sur le champ de bataille, que pour élever ses fils. Il avait en réalité été assez peu présent pour eux, ce qui aurait pu rendre Loth et Viserys très immatures si Helyanor n'avait pas été là pour eux.
Cela dit, il fut très rapidement ramené sur terre par Dagobert, qui en avait vu d'autres. Il lui murmura de se remettre de ses émotions, puis s'adressa aux Amon :

"Malgré cette nouvelle malheureuse, il me semble que nous vous devons quelques explications sur notre mission. Je pourrais m'en charger moi-même, mais je ne suis rien de plus qu'un garde du corps pour le seigneur Loth. Je pense donc que c'est à lui de vous divulguer les informations qu'il jugera nécessaire."

Loth ouvrit grand les yeux, surpris de se voir confier cette tâche. Il prit quelques de dizaines de secondes pour chercher comment amener le sujet.

"Vous savez que mon père va devenir Roi, n'est-ce pas?"

Un court silence suivit cette annonce, mais le jeune homme n'attendait pas de réponse.

"Bien sûr que vous le savez. Qui en doute? Il succèdera à Ayla, ou à un autre, peu importe. Il sonnera la fin des rois de pacotille en Okord, et le fera entrer dans une autre dimension. Il sera le plus grand roi qu'Okord n'ait jamais connu."

S'il y avait bien une chose que tous les membres de la famille d'Andior avaient en commun, c'était leur ambition, et leur aplomb.

"Mon père est un homme qui connaît ses faiblesses. Bien entendu, il a su s'entourer. Helyanor et ses immenses connaissances, Zyakan et sa verve incomparable... Que peut-il lui arriver? Eh bien, il y a un point que tous les alliés du monde ne sauraient contrebalancer : ses origines. J'imagine que vous connaissez déjà son histoire : c'est devenu au fil du temps une des histoires les plus contées au Sudord. Il n'est pas considéré comme un Okordien, et cela peut lui porter préjudice. Quel est le dernier Roi qui ne se considérait pas Okordien, et qui est arrivé sur le trône? Molag. Voyez comment il a fini.
Il y a également eu son successeur Cody qui est souvent vu, à tort, comme un Saxon... Personne ne s'est levé pour le défendre, lorsqu'il a été capturé par Galactic.
A l'inverse, la Reine Ayla, pure Okordienne, a été défendue par la majorité du royaume lorsqu'elle a été capturée par surprise. Or, mon père a toutes les raisons de penser que sa famille est d'origine Okordienne. C'est pour en apprendre plus là-dessus que nous nous rendons à Nefret, et plus précisément dans sa bibliothèque."

"Pour la discrétion, on repassera..." pensa Dagobert. Ceci dit, si Loth s'arrêtait là, ils conservaient le secret sur le cube, et sur l'artefact, et les Amon auraient assez d'informations pour prendre leur décision. Cela suffirait amplement. Mais le visage de Loth trahissait une excitation manifeste d'être au milieu des débats, ce qui ne rassurait pas Dagobert.

#14 2016-08-02 09:34:12

Amon

Re : Un passé glorieux

Merwynn avait écouté le récit de Loth sans émettre de commentaire, attisant les braises d'une branche sèche et cramoisie, tandis que Filraein affichait un large sourire en entendant le jeune homme déclarer avec tant de foi, et sans douter, le futur qui attendait sa maison. L'homme qui l'escortait, Dagobert, ne semblait lui, pas partager cet assurance.

Son sourire s'étirant encore plus, Filraein s'adressa à Loth.

« - Ainsi, vous allez à Nefret trouver votre porte vers la royauté. Sans parler du danger évident de ces terres, vous avez bien conscience que la route est longue jusqu'à votre objectif. D'autant plus longue que, après la triste nouvelle venant du Clan du Hibou, votre escorte  sera réduite à néant. Vous seriez quoi, vous, et votre homme Dagobert ? Ce ne sont même plus les barbares qui seront à craindre, mais bêtes errantes et autres pièges simples des contrées sauvages. Vôtre quête risque de bien vite toucher à sa fin. D'ailleurs ... »

Une braise incandescente lui frôla la joue,  il leva alors les yeux, croisant le regard non moins brûlant de Merwynn.

"- Assez de tenter de les décourager, mon oncle. Vous avez certes raison, sans escorte, la route est un danger. Mais nous n'allons pas laisser un jeune seigneur d'Okord, qui plus d'une maison sœur du Sudord, sans aide, alors que nous disposons d'assez d'hommes pour leur fournir un voyage sauf. Moitié de notre campagne rentrera à Cintra, et le reste nous suivra jusqu'aux portes de Nefret."

Filraein se renfrogna, n'appréciant visiblement pas l'idée, et retourna son regard sur Loth.

« - Dites moi, vous avez donc monté cet expédition vers la cité de Nefret, grand fief de la maison de Karan, pour y trouver, potentiellement, la clef qui ouvrira aux Andior la place sur le trône. A Nefret. Dans l'antre de celui, qui ne s'en cache pas, couve la couronne d'Okord avec plus d'envie qu'aucun ?    Si Merwynn veut vous fournir une escorte, soit, mais cela ne vous protégera pas de  ce que vous pourrez rencontrer dans la cité. Et ce n'est pas moi qui me ferait ennemis des serpents qui dorment en ce lieu. »

Il se leva d'un bond rageur et s'éclipsa dans l'obscurité, tandis que Merwynn se tournait vers Loth, le  visage exprimant toute sa satisfaction.

« - Eh bien, cela est réglé. Demain, je choisirais des hommes pour vous accompagner, sans pour autant constituer une trop grosse force, et nous nous rendrons jusqu'à Nefret. Maintenant, je serais vraiment très heureuse que vous m'en disiez plus, car je suis certaine qu'il y a plus à dire ... »

Elle plongea son regard dans celui de Loth, espérant que sa langue se délierait enfin, sa curiosité plus affamée que jamais.
Dagobert restait en retrait, pour pouvoir juger l'attitude de son protégé dans de telles circonstances.

Loth, quant à lui, défiait Filraein du regard, ne se rendant pas compte que c'était exactement ce qu'il recherchait. Lorsque Merwynn intervint une première fois, un sourire apparut sur ses lèvres. Il ne fut nullement décontenancé par la deuxième tirade de Filraein, car ils ne partaient pas au hasard en direction de Nefret. Lorsque celui-ci se leva, il dit d'un ton moqueur :

"Heureusement que tous les Amon ne sont pas des couards."

Ah, ce vieux con était enfin parti. Ils restaient avec Merwynn, qui lui semblait nettement plus... Intéressante. Nettement plus agréable à regarder, également.

"En effet, ma Dame, il y a d'autres choses à en dire. Nous n'en sommes plus aux simples suppositions : notre famille était une grande famille sur le territoire d'Okord, dans le royaume pré-okordien. Elle a durant un temps contrôlé des territoires presque aussi larges que le royaume d'Okord, ce qui n'était pas une simple affaire à l'époque, pour ce que l'on en sait. Elle est aussi vieille que la Samarie, et que les Karan. Nefret se situe sur une terre autrefois contrôlée par ma famille, et nous avons rencontré un homme, une connaissance de mes grand-parents, qui nous a dit que nous y trouverions des réponses.

Je ne peux pas tout vous dire pour l'instant, car plus vous en savez, plus vous serez en danger à Nefret. Cependant, je peux vous dire une chose : nous avons toutes les raisons de croire qu'un trésor est au bout de notre quête. Si vous nous aidez à parvenir à notre but, vous pourrez garder tout l'or que nous trouverons. Ce n'est pas ce que nous recherchons.
Soyez assurée, ma Dame, que je vous donnerai tous les détails de notre quête dès que nous aurons quitté les terres de malheur des Karan.

Si cela vous convient, nous allons à présent vous laisser choisir vos hommes, et nous retirer dans nos tentes."


Par Andior et Amon

#15 2016-08-03 12:02:15

Elverid

Re : Un passé glorieux

Elverid était restée silencieuse toute la soirée, se contentant d'écouter distraitement la conversation entre le jeune Loth et Dame Amon. Lorsque Loth et Dagobert se levèrent, elle en fit autant et regagna sa tente sans dire un mot, pour tenter de prendre quelques heures de repos avant de quitter l'expédition.
Le lendemain matin, elle se leva peu avant l'aube et ordonna aux chasseresses de lever le camp. Toutes semblaient, comme elle, avoir mal dormi. Cependant, elles furent bientôt prêtes à retourner au Clan du Hibou. Peu avant le départ, Elverid rencontra Dagobert Duchesne qui venait de se lever.
"Bonjour, Capitaine Duchesne. Je regrette de devoir m'absenter aussi précipitamment. Je n'oublie pas pour autant l'engagement pris auprès de Monseigneur Andior et de Messire Loth, et je rejoindrai à nouveau cette mission aussitôt que possible.
- Ne vous préoccupez pas de cela pour l'instant. Nous comprenons tous, et je suis sûr que le Duc comprendra également. Dame Amon semble décidée à nous escorter jusqu'à Nefret et à nous apporter son aide. Partez sans inquiétude. Je vous ferai parvenir des nouvelles dès que nous aurons connaissance de la prochaine destination."
Elverid fit un signe de tête en guise de remerciement, puis elle et la petite escorte de chasseresses s'éloignèrent au grand galop. Dagobert décida d'aller réveiller Loth sans plus tarder. Dame Amon et ses soldats étaient déjà occupés à lever leur campement et il allait bientôt falloir se mettre en route pour Nefret.

[HRP : Ce passage précède chronologiquement le rp sur le dernier voyage d'Helyanor]

Dernière modification par Elverid (2016-08-03 12:07:55)

#16 2016-08-05 16:20:16

Andior

Re : Un passé glorieux

Le groupe, délesté d'une partie des cavaliers de la maison Amon, repartit donc vers le nord. Filraein faisait bien partie du convoi, malgré sa réticence plus que notable. Ils arrivèrent rapidement aux Marches de l'Est où ils furent accueillis à Corberoc. Plus loin, le Vicomte Corfe leur offrit le gîte à Beauvoir sans trop poser de questions : après tout, le Duc l'avait aidé à plusieurs reprises. Il ne faisait que lui rendre la pareille.
Leur route continua par les territoires de la Tour, en contournant l'île de la Saxe par l'ouest. Ils décidèrent de camper afin de ne pas se rendre trop visibles par les seigneurs alentours, puis repartirent, traversant une province du Coq avant d'arriver à Cair Calibur, passage obligatoire pour aller sur la Preskill Gundor.

Loth et Dagobert, d'un commun accord, ne portaient plus les armoiries du Cygne mais de simples vêtements civils. Ils avaient pris la décision, avec Merwynn, de se faire passer pour des traducteurs à son service, afin de ne pas dévoiler le réel objectif de la mission.

Avant d'entrer dans la cité, on leur demanda le motif de leur séjour sur la Preskill. Grâce aux années communes passées au Lys par les Karan et les Amon, les gardes ne furent pas trop insistants, et ils furent autorisés à dormir sur place. Nefret, forteresse des Karan depuis des décennies, voire des siècles, serait bientôt face à eux.

Ces jours de voyage permirent à chacun de jauger leurs alliés de circonstances. Ainsi, Dagobert, longtemps soupçonneux, apprit à faire confiance à Merwynn. Malgré tout, il avait une impression insidieuse, celle que la Vicomtesse se jouait d'eux, et qu'elle avait des objectifs inavoués. Mais c'était la seule option qu'ils avaient à leur disposition pour réussir leur quête. Il comprenait l'attitude de Filraein, ceci dit, qui voyait sa souveraine se mettre en danger pour des inconnus, et ne pouvait que s'élever contre cela.
Loth, quant à lui, était totalement acquis à la cause de la Dame. Elle représentait à ses yeux, comme son père, le succès d'une famille montante en Okord, et son caractère affirmé lui plaisait. Il n'avait donc pas moufté lorsqu'elle leur avait proposé son plan pour accéder à la bibliothèque. Étant rancunier, il restait très distant de Filraein, qui s'en amusait en lui lançant régulièrement des piques acerbes.

Finalement, ils y arrivèrent. Les grandes murailles de Nefret se dévoilaient à leurs yeux ébahis. Rentrant la tête dans les épaules, Loth continua à avancer vers la porte principale, bien au milieu de leur convoi. Ils entraient véritablement en terre hostile, à présent.

#17 2016-08-15 18:02:01

De Karan
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Messages : 798

Re : Un passé glorieux

Thème

Mais ils y entraient librement...

Il se racontait tant de choses sur le Pays de Karan. Tant de rumeurs colportées... Beaucoup demeuraient fidèle à la réalité ; il fallait bien le reconnaître. D'autres en revanche, n'étaient que des traits grossis.

Le "Pays de Karan" avait vu le jour plus de vingt cinq ans auparavant, sur les ruines de la Maison Shaner. Imitant un système connu des autres provinces, le Comte Bélial de Karan remit entre les mains de seigneurs nordiques locaux -et des nobles samariens qui suivirent sa migration depuis l'Ouest- la souveraineté de chaque baronnie fondée par l'armée karanienne. Aucune de ses actions ne fut due au hasard. Chaque cité occupaient les terres les plus fertiles et les mines les plus riches de la région. Trois enclaves en territoire étranger s'ajoutait au domaine, dont Cair Cilbur, pour être la ville douanière de la Preskill, était la plus connue. La sagesse karanienne accordait à la Maison Sametue un régime privilégié...

Mais de toutes, Nefret constituait l'épicentre de la puissance karanienne ; en bien ou en mal.

Peu nombreux étaient les seigneurs okordiens à voyager jusqu'à Yumruk ou même Terör. Nefret en revanche avait accueilli plus d'un Roi d'Okord. La capitale du Pays de Karan, plus que toute autre cité de la Preskill Gundor, permettait de comprendre ce qui faisait battre le cœur des karaniens : l'or. Il constituait des dômes, il s'incrustait dans les façades, il se plaquait en larges feuilles sur les hautes murailles... Mais il demeurait désespérément absent des mains tendues. Il était dans la bourse -bien trop garnie- du garde qui fit entrer Merwyn et et ses compagnons. Le bougre avait marqué un temps d'arrêt en s'emparant des papiers okordiens -qu'il ne détailla même pas.

Le baqsis. Littéralement ''le don'' en patois karanien. Ce que d'aucun aurait nommé ''corruption'' constituait en ces terres un usage parfaitement acceptable, et même institutionnalisé. Car, si l'administration du Pays de Karan excellait en un domaine c'était de récolter les taxes. Celles-ci étaient généralement peu élevées, mais d'une incroyable et improbable diversité. Taxe de jour, taxe de lune, taxe de cuir pour les cordonniers, taxe de pétrin pour les meuniers, il existait même une taxe dite ''du mendigot'' qui permettait aux mendiants de pratiquer leur activité sur tout ou partie de la journée dans tel ou tel quartier... On taxait même la barbe, que les riches portaient juste pour montrer qu'ils pouvaient se le permettre et que les pauvres se voyaient contraints de raser ; ce qui avait néanmoins le mérite d'améliorer la salubrité publique. C'était sans aucun doute ce réflexe de mettre la main à la bourse, qui faisait passer les nobles karaniens pour de parfaits parvenus une fois hors de leurs frontières.

Ne voyant toujours pas sa pièce arriver, le garde marmonna quelques paroles peu amènes envers les gens de l'Ouest, mais bon gré mal gré, il laissa passer les trois nobles. La matinée n'était pas encore terminée, tout comme la file de marchands, voyageurs et riches calèches qui s'avançait sur la route. Il rentrerait encore dans ses caisses une somme confortable avant la nuit, à condition de ne pas traîner.

L'un des principes karaniens voulait que le passage d'enceinte se fasse ''de bonne foi''. La logique d'un système pervers se chargeant de délester le badaud un peu benêt qui posait le pied dans une cité karanienne. Un principe qui souffrait évidemment d'exceptions, comme put le constater Loth. Le bourgeois dracangian qui le suivait de près déposa sans sourciller deux pièces d'or dans la main du garde corrompu avant de franchir la herse.

Ainsi Nefret s'offrait à eux.

Du moins, les bas quartiers de Nefret s'offraient à eux. Car comme toute puissance bâtie sur le pouvoir de l'or, la ville n’était qu'une succession de niveaux et de passages ; triste reflet d'une société pyramidale à l'extrême menant à un seul lieu. Le palais. L'immense Palais d'Airain, juché au sommet du mont. Une ville dans la ville. Il suffisait de lever les yeux pour le voir. A dire vrai, l'édifice était si imposant et la cité conçue de telle manière que peut importait la ruelle sombre et tortueuse où l'on pouvait se trouver, le Palais d'Airain restait toujours à portée du regard. L'incarnation parfaite du terrible pouvoir qu'exerçaient les Karan sur la terre qu'ils dominaient sans partage. Du quartier des esclaves, jusqu'aux bordels les plus huppés, tous pouvaient le voir et saliver... Et le maudire.

Nefret la Versatile ; pour qui pouvait payer.

Visuellement, aucun bâtiment ne partageait la même architecture. La multitude de toitures dorées prêtait à confusion, mais à y regarder de plus près Nefret était une capitale cosmopolite. Par ceux qui l'avaient bâti, comme par ceux qui l'administraient, de nombreux traits samariens et nordiques étaient reconnaissables entre tous, mais pas seulement. L'influence des terres centrales, due aux mandats de Chancelier exercés jadis par Bélial de Karan auprès des rois Godefroy puis Jacquouille, se lisait encore dans les somptueux colosses élevés à la gloire du Coq. La nacre et l'argent brillaient sur la montagne. Plus nombreuses encore étaient les langues chantées dans la rue. Loth pouvait entendre un groupe d'esclaves österlichois, en proie à un vif débat sur le parvis d'une église podeswanienne miteuse. Plus loin, des marchands venus de Déomul s'agaçaient du prix de l'alun, ridiculement bas en cette partie du monde.

Le mélange ne se cantonnait pas aux bas quartiers. Passé la première ceinture, les grandes allées claires et bien agencée succédèrent aux rues enroulées et aux passages étroits. Marché d'épices, hôtels particuliers construits par de riches patriciens exilés de Valésianne, bordels luxueux aux tentures de pourpre délicates... Les simples passants se faisaient plus rares, remplacés par des chars richement ornés, menés par des bêtes magnifiques.

Ultime rempart sur le seul chemin menant au Palais d'Arain, se dressait la Banque du Royaume d'Okord. Immense bloc de marbre blanc orné d'une rangée de fenêtres triangulaires. Plus un entrepôt qu'une banque. Orge, bois, épices, albâtre, argent, laine, soie... La ''Banque'' était un monstre vorace dont la gigantesque bouche engloutissait les chariots chargés à ras-bord pour ne vomir que leur conducteur esseulé. Elle dominait la plus grande place de la ville, la ''Place des Blés'', ainsi nommée en référence aux premières fonctions dévolue à l'institution : veiller à l'éradication des famines sur la Preskill et assurer l'équitable répartition de ses ressources. Mais Bélial de Karan avait eu à cœur de modifier sa mission. Le blé était devenu or, d'abord dévolu aux seigneurs de la Preskill, puis à ceux du Royaume d'Okord. Désormais, chaque porteur de la couronne y disposait d'un compte généreusement garni... Ainsi que l'assurance de toujours trouver un financement pour ses armées.

Vénérable artisan de la rapacité avide du pouvoir, le Comte Bélial de Karan se trouvait au centre de la place, immortalisé dans la pierre, bardé de médailles et au visage magnifié, préservé de la maladie. Entre ses mains froides reposaient ses parchemins comportant les noms des fondateurs de la Banque. Le piédestal s'ornaient de sa célèbre tirade, celle qu'il avait répété au Duc Antoine Ier durant toute sa jeunesse, celle qu'il avait souvent répliqué à ses détracteurs : ''le pouvoir n'use que ceux qui n'en ont pas.''

Pas moins de cinq casernes encerclaient les lieux. Certains soldats descendaient vers la cité basse, d'autres en revenaient, d'autres encore montaient au Palais d'Airain. L'une des composantes de Nefret -et des autres villes karanienne- était son corps d'armée. Partout, à toute heure, fort bien payé et nourri. Un besoin cynique de dilapider l'or pour en assurer la sûreté. Une nécessité contre les troubles qui ne manquaient pas d'éclater au milieu de ces peuplades diverses, brassées dans un espace réduit. Il ne se passait pas une année sans qu'une révolte d'esclaves n'éclate ; parfois plus violente que la précédente, parfois moins... L'armée restait donc dans les villes, s'assurait les routes commerciales restent sûres, mais jamais elles ne s'aventuraient au loin. La Maison Karan avait sacrifié l'arrière pays pour quelques coffres.

Car les coffres étaient tout. Ils étaient le cœur et l'âme du Pays de Karan. Malheureux était celui qui pensait y faufiler ses doigts...

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-Reconnaissez-vous les faits ?

Chef désincarné du pays des mauvais hommes. Cruel pourfendeur des honnêtes gens. Lys Noir. Murène. Traître à son Roi. Les surnoms ne manquaient pas pour désigner Mazër Tanios Samarya de Karan, Seigneur incontesté de Nefret, Karst et de Mezar, Maître de Kül et d'autres lieux...

Assis sur son trône, dans la vaste Salle des Petits Cuirs, le Comte dominait l'assemblée. La salle d'audience du Palais d'Airain avait été baptisée ainsi à cause des morceaux parcheminés qui recouvraient le mur dominant le trône. Il y en avait des centaines agrafés à des crochets, de petits cercles bruns plus ou moins réguliers, de teintes et de couleurs différentes.

-Oui... Je les reconnais.

L'homme à genoux sur les dalles froides baissait les yeux. Il souleva sa manche et tripota nerveusement le bracelet doré qui ornait son poignet. Peu de bourgeois karaniens pouvaient se vanter de porter un bijou d'une telle facture. Non pas qu'il était finement ouvragé ou d'une rare pureté (en réalité ce n'était qu'un placage grossier). Mais pour ce qu'il représentait : le droit de pratiquer le commerce d'esclaves. Obtenir cette prérogative coûtait une somme conséquente, qu'il ne fallait pas verser à quelconque officier de l'administration karanienne, mais bien au Comte lui-même.

L'esclavage, plus que toute autre forme de commerce, constituait le pivot de l'économie mais également de la société karanienne. Le Pays de Karan était loin d'en avoir l'exclusivité. Que ce soit dans le reste du monde ou même à Okord, d'autres puissances s'y adonnait également. Mais sur ces terres, l'esclavage se trouvait être plus qu'un simple revenu, il était réfléchi, au cœur d'un système aussi macabre que rodé.

Tous les quatre mois le Corps Expéditionnaire karanien partait pour les terres étrangères. De bien mauvaises périodes pour les villages de pêcheurs ou les fermiers qui résidaient là-bas. Le Corps revenait ensuite à Nefret, où les guildes esclavagistes de chaque cité se rassemblaient et négociaient la capture. Chaque esclave se faisait marquer sur l'épaule gauche, d'un ''G'' s'il venait du Gundor, d'un ''Ö'' s'il venait d'Österlich, d'un ''D'' pour ceux capturé en ''Déomul''... Puis venaient les grandes ventes sur les marchés, là où chaque marchand pouvait cultiver son bénéfice. Les rentrées d'or étaient faramineuses, ce qui faisait souvent des esclavagistes les personnes les plus influentes de chaque cité. Pour eux, tout allait bien, dans le meilleur des mondes, à condition de payer la seule taxe qui leur était demandé. La taxe de peau. Car dans le cas contraire...

-Alors qu'il soit Tête-Nue.

Le bourreau s'empara du long couteau recourbé qui pendait à sa ceinture. Il attrapa le prisonnier sous le menton et le força à relever la tête. La lame courut lestement sur le crâne rond, décalottant rapidement le petit bonnet rougeâtre. Le bourreau s'écarta, laissant le soin à l'officier de retirer le bracelet doré. Il le tordit d'un coup de marteau. Plus il en sortit un autre de sa poche, en plomb, qu'il enfila plus ou moins de force sur le bras du supplicié, désormais inconscient. Le bourreau ôta rapidement les cheveux qui recouvrait le cuir chevelu, avant de plonger le scalp dans une petite bassine qui empestait l'alcool. Puis il alla l'accrocher au mur avec les autres, sur un nouveau crochet. Deux gardes soulevèrent le marchand par les épaules.

-Vous êtes pardonné, annonça le Comte d'une voix claire.

C'était le cas. En principe, du moins. Le crime était lavé, le marchand ainsi puni recouvrait son droit de commercer. Mais en pratique, à condition de survivre au supplice, il deviendrait un paria. La guilde à laquelle il appartenait le renverrait, lui faisant perdre tous ses avantages. Porteur du Plomb, il se trouverait réduit aux ventes de secondes mains, au mieux. Les Têtes-Nues formaient une classe à part chez les marchands d'esclaves ; et même au sein de la société du Pays de Karan. Dans une certaine mesure, ils restaient riches, et arrivaient encore à vendre quelques esclaves aux mines et aux métairies. Mais ceux qui acceptaient de leur vendre du pain ou de la viande étaient encore plus rares les maquerelles qui les laissaient fréquenter leurs maisons.

''Voler un Karan.'' Une des nombreuses expressions qui avaient vu le jour depuis que les Karan détenaient cette terre. Elle désignait un acte dont les risques encourus dépassaient de loin les profits gagnés.

-Fort bien, déclara Mazër, tandis que les gardes traînaient le malheureux hors de la salle. Comme les autres avant lui, il serait jeté aux portes du Palais. S'il n'y a plus d'autres affaires réclamant ma justice...
Un intendant s'échappa de la petite foule de bourgeois et de nobles rassemblée pour l'occasion. Il grimpa les quelques marches menant au trône et murmura quelques mots à l'oreille du Comte ; sous l’œil suspicieux de Kerberos. Les paupières de Mazër s'affaissèrent.
-Faites-les entrer.
Avec un soupir, le Seigneur de Kül se rassit, lissant les plis de son beau manteau de pourpre. Le bourreau était parti, deux esclaves s'employaient à laver le sang rependu par terre, les nobles quittaient un par un la Salle des Petits Cuirs... Il avait un peu de temps à consacrer à des seigneurs okordiens, surtout venus de si loin.

Dernière modification par De Karan (2016-08-15 18:03:02)


Seigneur de Ténare ; Marquis de Falcastre
Maître du Palais ; Gardien du Trésor Royal
Chevalier au Léopard ; Chevalier de l'Ordre des Fondateurs royaux

Hors ligne

#18 2016-09-25 01:32:14

Andior

Re : Un passé glorieux

[Rédigé par Amon. Rappel : ce RP se déroule avant la mort de Mazër de Karan.]

Leur rapide traversée de Nefret s'était faite sans précipitation, mais sans pour autant montrer la moindre envie de s'attarder. L'objectif de la troupe était plus que présent dans leurs esprits, et le plus vite il serait atteint, le plus vite ils pourraient retrouver un brin de sérénité.

Merwynn s'avançait dans la salle, suivie de près par Loth et Dagobert, tentant de faire profil bas, tandis que Filraein fermait la marche. Afin de se montrer de bonne foi, il avait été décidé de laisser les hommes d'armes hors du bâtiment. Il restait à voir si cette intention serait perçue comme voulue, ou au contraire, si elle allait rendre leur entreprise encore plus trouble. Ils n'avaient pas eu l'occasion de troquer leurs équipements de voyages contres des vêtements plus raffinés. Poussière et tâches boueuses avaient été éradiquées tant bien que mal, aussi, c'est une assemblée ne payant pas de mine qui pénétra la salle.

Malgré un potentiel danger, Merwynn avait retiré ses plaques d'armure et fait l'effort d'arranger sa chevelure qui tombait désormais sur ses épaules jusqu'au creux de ses reins, toujours parsemée de fines chaines d'argent agrémentées de perles ciselées dans le même métal. Les quelques rayons de soleil qui erraient dans la pièce venaient parfois se heurter aux filaments et s'y réfléchissaient furtivement, attirant ainsi l'attention sur la seule marque de richesse des intrus, si ce n'était le blason au léopard que l'on peinait à distinguer, couleurs passées sous le soleil, contraste atténué par poussière et frottements.

Il lui fallut quelques secondes pour déterminer ce qui recouvrait les hauts murs, avant que son regard ne se laisse accrocher par une gouttelette écarlate au sol. Elle passa la semelle de ses bottes au-dessus, et la poisseuse couleur s'étira en arc de cercle en suivant son mouvement. Sans plus s'attarder, elle avança, ses compagnons sur les talons, jusqu'à faire face à Mazër de Karan.

Laissant s'écouler les secondes, Merwynn dévisagea l'homme sans pudeur. Trop d'empressement montrerait soit de la crainte, soit remettrait grandement la légitimité de sa requête. Légitimité entièrement factice, certes, mais la façade se devait d'être aussi convaincante que possible.
Elle éleva alors la voix.

"Votre Magnificience, je vous remercie au nom de la maison Amon pour nous avoir permis de pénétrer en votre cité, et je ne peux que réitérer devant l'audience impromptue que vous nous accordez."

La jeune femme fit une brève pause, cherchant une réaction chez son interlocuteur autant que les prochains mots qui allaient franchir ses lèvres.

"Voilà quelque temps, depuis que la qualité d'Ambassadrice d'Okord m'a été assignée, que je parcours Okord dans l'objectif de compléter le peu d'informations que le Royaume possède sur ses nombreux voisins. Durant ces recherches, plusieurs fois le nom de Nefret et la richesse du savoir que renferment vos bibliothèques ancestrales sont apparus. Le peu d’intérêt qu'on eues ces étapes m'ont conduit à dévier de ma route pour vos terres. Aussi je vous adresse aujourd'hui cette requête, l'accès au savoir et aux richesses, non d'or et de pierreries, mais de connaissances que peut renfermer votre cité."

Dernière modification par Andior (2016-09-30 20:48:11)

#19 2016-09-30 20:46:07

De Karan
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Re : Un passé glorieux

-Les putains de l'Ouest ont de belles manières. Mais elles restent des putains.

C'était une voix désincarnée, étrangement froide et déplaisante, mais que l'on devinait capable d'ancrer des navires au fond des abysses.

Mazër n'avait pas bougé d'un pouce pendant que Merwynn exposait sa demande. Seuls ses yeux pivotaient, déshabillant la jeune femme. Le Comte était un loup, surpris de découvrir une biche dans sa tanière. Il reconnut sans peine la langue élégante des terres occidentales, ainsi que le lion qui ornait ses vêtements. Les visiteurs empestaient l'Ouest avant même que la Maison Amon soit mentionnée.

Le Comte de Karan se leva, attirant sur lui l'attention du colosse qui veillait sur sa vie. Mazër de Karan considérait toujours que les seigneurs de l'Ouest lui avaient couté un royaume entier. Jamais il n'avait considéré la mésaventure du trône autrement que par la lorgnette du profit personnel.

-Je tenais la destinée du monde entre mes mains. Énonça sèchement le Comte, alors qu'il descendait les trois marches le menant au niveau du reste de la Salle. C'était malheureusement sans compter sur certaines maisons de l'Ouest, si avachies, si empattées, qu'elles peinaient à voir plus loin que leurs métairies.

Il s'arrêta, serrant ses poings gantés et recouverts de bagues. Il jubilait ; à sa façon, mais il jubilait. Si les légendes colportées sur le Pays de Karan n'étaient pas toutes exactes, en revanches celles qui entouraient son maître avaient toute un fond de vérité. Mazër n'avait probablement pas la spectaculaire intelligence dont jouissait son glorieux aïeul, mais il disposait de sa sombre cruauté. Détruire quelque chose de beau l'amusait d'une joie stupide. Et Merwynn était belle, au moins autant que son projet. Unir Okord sous la connaissance. C'était si...

-Consternant de sottise. Assena le Comte après un moment. Il repoussa sa crinière de cheveux bruns. Okord est un serf avec les deux pieds plongés dans la bouse. Ce n'est en aucun cas un page ou un érudit. Il plaça sa main droite contre son torse. Regardez-moi. Regardez qui je suis. Il désigna ensuite son trône d'un index impérieux. Ici se trouve le pouvoir. Ici se trouve l'illumination. Je n'en laisserais pas une once aux bêtes de somme qui répondent d'un roitelet de pacotille.

Mazër découvrit ses dents en un sourire aussi factice qu'atroce. Il regagna sa place, osant tourner le dos aux voyageurs.

-Si la Maison Amon ne peut envoyer qu'une catin et deux loqueteux pour toute ambassade, je ne vois pas pourquoi je lui ferai l'honneur d’accéder à sa requête. Je ne me séparerai de rien, pas même du plus insignifiant parchemin. Il se rassit en soupirant. J'ajoute que le fourrage de vos montures sera à votre charge. Maintenant partez.


Seigneur de Ténare ; Marquis de Falcastre
Maître du Palais ; Gardien du Trésor Royal
Chevalier au Léopard ; Chevalier de l'Ordre des Fondateurs royaux

Hors ligne

#20 2016-10-01 18:35:39

Amon

Re : Un passé glorieux

Merwynn contempla quelques secondes le dos du Comte, avant reculer pas à pas, puis d'effectuer une révérence ridicule.

- Sa Magnificence est trop bonne.

Elle se détourna, et suivie de ses compagnons, pris la direction de la sortie du palais. Sur le parvis, elle se tourna vers son oncle, un large sourire dessiné sur les lèvres.

- Il va donc falloir que nous allions chercher ce que nous voulons par nos propres moyens, ce sera nettement plus intéressant que de jouer aux rats de bibliothèque. 

La lueur de désapprobation qui brûlait dans les yeux de Filraein n'eut aucun effet sur la jeune femme, dont il pouvait presque sentir le corps trembler d’excitation à ses côtés. Bien qu'elle ne l'ai pas connu, elle partageait le même caractère que sa mère, l'attrait pour l'interdit, la défiance et le plaisir de la discorde. A ce moment, il réalisa que ce n'étaient plus les origines des Andior qui l'intéressaient, mais son implication serait toute dévouée à ennuyer celui qui se permettait de la traiter de catin.

Agrippant son avant bras, il attira Merwynn à lui, et la bouche proche de son oreille, lui glissa quelques mots.
- Tu ne peux pas te permettre ça… 
- Bien sûr qu'une misérable catin de l'Ouest peut se le permettre.
- De Karan n'est pas un simple d'esprit avec lequel tu peux jouer à ta guise.
D'un geste sec, la jeune femme se dégagea, un rictus narquois calqué sur les lèvres.
- Ah, le grand et craint de Karan. Il n'est rien de plus qu'un animal de l'obscurité. Dangereux au fond de sa caverne, dans son antre, entouré de sa Cour infernale, à concocter de mortels plans. Merwynn secoua la tête, cherchant en vain une trouée dans le ciel nuageux, et laissa échapper un rire sonore. Quel dommage qu'il soit frappé de débilité à peine le museau sorti de l'ombre, et qu'après quelques coups de griffes maladroits, il doive retourner s'y terrer, la queue entre les jambes. Je ne retirerais pas mes paroles pour autant, mon Oncle, s'il est une maison qui peut avoir le moindre impact sur les okordiens en montant sur le trône, alors c'est celle des Karan, aussi pervertie soit-elle. Pour peu qu'elle gagne en stabilité. Mais pour aujourd'hui, c'est aux côtés de Loth que je suis.
- Tu finira par te brûler avec tes jeux, Merwynn.
- Pourtant, je suis toujours intacte, n'est-il pas ?

Elle coupa court à toute réplique en pivotant vers le reste de l'équipée. Loth et Dagobert échangeaient activement à voix basse, assez proches pour que Merwynn en saisisse quelques bribes. Au moins, eux non plus n'étaient pas décidés à abandonner de sitôt. En quelques pas, elle les rejoint.

Ils étaient toujours sur le parvis du palais de Nefret, leurs montures laissées à la garde de quelques hommes décharnés et voûtés, et clairement, ils n'auraient aucun fourrage à payer vu leur efficacité.

-Loth, on ne peut rester ici. Un instant, la vicomtesse cru déceler de la déception dans les yeux de l'homme. Je sais que ce que vous cherchez se trouve plus que certainement en ces lieux, mais si nous ne quittons pas les murs de Nefret  dans la journée, le Comte le saura. Une cité pourra nous héberger, hors de l'île – la jeune femme fit une pause, étirant un peu les lèvres au souvenir de l'agréable appellation que le Comte avait utilisé – vers l'Ouest.

#21 2016-10-10 20:47:15

Andior

Re : Un passé glorieux

La cité en question, administrée par un vassal de Merwynn Amon, se nommait Kurïne. Ils y furent très bien accueillis, les deux Amon, Loth, et Dagobert, ayant chacun eu droit à une chambre d’invité du Palais.
Ils y restèrent quelques jours, le temps de déterminer quel serait leur plan d’attaque. Finalement, il fut décidé que Filraein repartirait administrer les terres des Amon dans le sud, tandis que les trois autres retourneraient séparément sur l’île, accompagnés par un cavalier. Le reste des troupes escorterait Filraein jusqu’au sud. Pour le plus grand bonheur de Loth, les yeux de Merwynn lançaient des éclairs dès que le nom de Mazër de Karan était prononcé, et il n’avait pas été difficile de la convaincre de continuer à les aider, malgré la longueur annoncée de la mission.
Le premier à franchir à nouveau les portes de Nefret fut Dagobert, déguisé en mercenaire, qui réussit rapidement à se faire engager dans la milice de Nefret. Grâce à son expérience et à son bagout, il s’intégra sans difficulté, et réussit à se faire apprécier par son supérieur qui lui donna rapidement quelques difficultés. Au bout de quelques mois à faire ce travail, il demanda avec succès à être transféré dans la garde du palais, dans lequel se trouvait la fameuse bibliothèque. Durant tous ces mois, il n’eût que très peu de contacts avec ses comparses, pour que personne ne détecte la supercherie, et il prit le temps de bien étudier les parcours des différentes rondes de gardes, les heures de relève… Bref, la totalité de l’organisation. Par chance, le palais étant extrêmement vaste, le système de garde comportait de nombreuses failles tant que l’on ne s’approchait pas trop des appartements du Marquis. Mais même en tant que soldat, il n’avait pas eu l’opportunité de traîner vers là-bas, l’endroit étant réservé à ses hommes de confiance.

Quelques jours après Dagobert, Loth franchit à son tour les portes de la ville. Il se fit engager dans une auberge, et tentait de recueillir les confidences de fin de soirée des plus éméchés de ses clients. Son objectif premier était de trouver des personnes rancunières envers les Karan – et l’île n’en manquait pas – et de déterminer lesquelles étaient susceptibles d’avoir un navire leur permettant de fuir l’île, tout en restant discret sur ses réelles intentions. Après quelques semaines infructueuses, il eût vent d’un capitaine qui évitait consciencieusement les cités du Marquis, car il s’y était fait confisquer sa cargaison à plusieurs reprises de façon arbitraire. Il continuait cependant à commercer avec des cités plus au sud, et c’est là-bas que Merwynn devrait se rendre pour négocier avec lui. Pendant ce temps, Loth essaya de récolter des informations sur ce que contenait la bibliothèque et comment elle était organisée, sans succès. Peu de personnes avaient eu la chance d’y entrer.

Merwynn passa donc la porte de Cair Cilbur deux mois après Dagobert, accompagnée de son soldat, et se dirigea vers l’est de l’île. Elle arriva au port de Huchet de Soissons, bourgade gouvernée par le Vicomte Djanto, seigneur de la Tour. On l’informa que l’homme qu’elle cherchait était justement en train d’accoster. Après quelques dizaines de minutes de discussion, elle était parvenue à trouver un accord avec lui. Son navire devrait passer à Huchet de Soissons tous les trois jours, jusqu’à ce que quelqu’un lui dise qu’il devait y stationner jusqu’à nouvel ordre. Il récupèrerait ensuite les voleurs, pour les emmener à une destination qu’il ne connaissait pas encore. En contrepartie, il recevrait assez d’or pour se permettre de prendre des vacances pendant plusieurs mois. Elle lui donna d’ores et déjà une certaine somme d’or, et lui promit le reste une fois qu’il aurait accompli sa mission. Afin d’être certain qu’il n’alerte personne, le soldat des Amon resterait travailler sur le navire jusqu’à la fin de la mission, et accompagnerait le capitaine dans tous ses déplacements pour le surveiller.

Une fois cela fait, Merwynn Amon retourna en Nefret, prit une chambre à l’auberge, et s’y fit discrète jusqu’à ce que leur mission se lance, quinze jours plus tard.
En effet, lorsque Dagobert estima qu’il connaissait assez la sécurité de la bibliothèque, et qu’on lui annonça qu’il la garderait la moitié de la nuit suivante, il alerta ses comparses.

A quatre heures moins le quart, incapable de fermer l’œil de la nuit, Loth quitta sa chambre. Au même moment, Merwynn Amon en faisait de même dans une autre auberge de la ville. Dagobert, lui, dormait toujours à poings fermés. A quatre heures moins cinq, Loth et Merwynn s’étaient rejoint, et attendaient à quelques ruelles d’une des entrées latérales du palais. Cinq minutes plus tard, Dagobert se réveilla en sursaut, affolé. Il avait fini par s’endormir à trois heures, mais ne s’était pas réveillé pour prendre la relève de son camarade en avance, comme prévu. Enfin, à quatre heures cinq, le duo vit que la porte n’était pas gardée du côté extérieur, comme annoncé par Dagobert. Ils frappèrent donc deux coups comme prévu. En revanche, ce qu’ils n’avaient pas prévu, c’est l’identité de l’homme qui leur ouvrit la porte, qui n’était absolument pas Dagobert Duchesne.

#22 2016-10-24 14:39:12

Merwynn

Re : Un passé glorieux

Les deux individus qui se tenaient de l'autre côté de la porte n'étaient pas du tout ce qu'Etienne attendait. D'ailleurs, il n'attendait personne à cette heure-ci, mais son beau frère, lui aussi dans la garde, avait pour habitude de passer les fins de nuits avec une bonne outre de vin et ses camarades de guet.
Une habitude fort louable, Etienne en était certain, il était cependant un peu moins sûr que le Comte apprécierait cela. Encore moins si cela aboutissait pas une intrusion dans son cher palais.
L'esprit encore embrouillé par sa somnolence, et le repas bien trop garni que lui avait laissé sa compagne pour la soirée, Etienne brandi sa pique en direction des deux intrus qui s'entregardèrent, paniqués, et gonflant sa poitrine, allait ameuter ses collègues quand le sol lui sembla trembler violemment et monter à sa rencontre.

Loth et Merwynn regardèrent le garde tituber, tourner sur lui-même avant de s'écraser au sol dans le bruit métallique de son équipement, Dagobert debout derrière lui, tenant ce qui restait d'une chaise en bois. Il allait déverser des excuses quand Loth, d'un mouvement, lui fit comprendre que le silence était de mise. Les deux hommes tirèrent le corps du garde, jusqu'à le camoufler grossièrement derrière un tas de bois et de débris servant à alimenter le petit brasier présent pour réchauffer les gardes de guet.

Sans le moindre bruit, le trio s’élança dans la noirceur des longs et interminables couloirs du palais, traversant salles ouvragées et dépendances poussiéreuses, sachant exactement où ils devaient aller, et quels endroits éviter. Il leur fallu plusieurs dizaines de minutes pour se trouver devant une porte de bois de petite taille. D'après Dagobert, elle donnait sur une réserve, accolée à la bibliothèque, dont l'usage était de  conserver encre et parchemins pour les visiteurs. Celle-ci n'était pas utilisée par les nobles ou autres érudits, seuls les assistants du bibliothécaire principal s'y rendait, afin de la garnir les nombreuses tables d'études de tout le nécessaire. Ils poussèrent la porte et pénétrèrent enfin dans la bibliothèque.

La Bibliothèque était immense. Démesurée. De nombreuses alcôves s'étendaient autour d'une pièce centrale, dont le toit était soutenu par des colonnes de marbre ouvragé, et partout, des étagères regorgeant de livres, de parchemins, de vitrines contenant objets et divers artefacts anciens, hérités, pillés, volés.

Il apparaissait impossible de trouver ce qu'ils recherchaient ici sans avoir la plus infime idée de où chercher. Le petit groupe n'en paru pas plus inquiété. Ils continuèrent leur chemin sans hésitation, vers une alcôve à la porte entrouverte. Merwynn et Loth s'y faufilèrent, laissant Dagobert monter la garde.
La pièce était spacieuse, mais comblée de tables et autres meubles, chacun regorgeant de parchemins et de manuscrits éparpillés. Une faible lueur émanait d'une chandelle presque consumée, déposée au chevet d'un lit fonctionnel.

Merwynn se dirigea au pied du lit, sortant discrètement son arme du fourreau, et secoua la forme qui y était endormie, sans succès. Avisant une cruche au pied du lit, elle s'en saisit et la renversa sur le lit. Aussitôt, la forme se leva en grognant et toussant, s’apprêtant à maugréer à voix haute. Le froid de l'acier sur sa gorge chassa bien vite les brumes du sommeil, et tout envie de s'exprimer. La lame s'écarta doucement, et, s'habituant à l'obscurité, l'homme pu discerner le visage d'une femme, un doigt sur les lèvres, lui faisant signe de se lever. Ce qu'il s 'empressa de faire, après tout, quoi qu'on lui veuille, cela ne pouvait être assez important pour y laisser sa vie.

Le bibliothécaire en chef, l'homme qui de presque chaque ouvrage connaissait le contenu et l'emplacement, s'extirpa de son lit, et tenta de faire face avec dignité à une femme armée, et un jeune homme qui avait clairement une lueur amusée dans les yeux en regardant son accoutrement.
Dans un chuchotement, la femme s'adressa à lui:
- Mon ami aurait besoin de quelques renseignements, vieil homme. Tout ce que tu peux nous dire sur les familles les plus anciennes des terres du Nid du Dragon, la moitié Sud. Et assez rapidement, si possible.

Il allait répliquer, mais le regard que la femme lança à son arme, puis laissa couler sur lui le dissuada. Bougonnant, il passa une main sur son crâne, paraissant réfléchir. Il trottina jusqu'à une étagère, se saisi de quelques volumes qu'il laissa lourdement retomber sur l'un de bureaux, retourna prendre la bougie qui arrivait à sa fin, et alluma une lanterne et quelques chandelles. Pendant plusieurs dizaines de minutes, il tourna furieusement pages après pages, se parlant à lui-même, motivé par Merwynn et Loth, accoudés à la porte, qui ne cachaient pas leur impatience. Il finit par s'immobiliser, le doigt sur une page.
- J'ai trouvé quelque chose. Sa voix chevrotait, tant par la peur que par l'excitation de sa recherche. Il n'est fait référence que d'un ouvrage, un vieux registre qui retrace le développement des maisons du Nid du Dragon. Je ne sais même pas si il est encore en état, ou si il correspond à l'époque qui vous intéresse. Il est dans l'une des réserves les plus anciennes et je n'y ai jamais mis les pieds ...
Il allait continuer ses explications, quand Loth s'approcha de lui, et d'un geste rapide, le bâillonna, lui murmurant quelques mots.
- Je veux lire cet ouvrage, maintenant. Conduis nous.
Le vieil homme hocha rapidement de la tête, et leur montra la porte d'un regard. Merwynn se saisit d'une chandelle, épée en main, Loth poussa l'homme devant lui, laissant une main sur son épaule, et ils se mirent en route pour la dernière étape.

Ils se trouvèrent au final devant une vieille porte, qui n'avait ni été huilée ni utilisée depuis bien longtemps. Le bibliothécaire, toujours incapable de parler, sorti de dessous sa tunique un trousseau de clefs, et après plusieurs essais sous les regards menaçants de Loth, il finit par faire jouer la serrure, et s'appuya sur la porte pour la faire pivoter, ce qu'elle fit dans un grincement sinistre, se répercutant dans la bibliothèque.
Le groupe resta un instant immobile, tendant l'oreille, mais il n'y eu que le silence pour leur répondre. Ils passèrent alors par l'ouverture, prenant bien garde de ne plus toucher la porte.


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L'air sec de l'alcôve les surprit, il n'y avait pas la moindre odeur de pourriture ou de moisi. Merwynn fit quelques pas dans la salle, déplaçant alors un nuage de poussière qui la fit éternuer, menaçant d'éteindre la chandelle. D'une main, elle demanda au bibliothécaire de se presser. Le prisonnier parcouru alors la pièce, époussetant les reliures des manuscrits, arrachant des toiles d'araignées, à la recherche de l'ouvrage si violemment demandé.

Il finit par mettre la main dessus, et à peine eut-il mis sorti le livre de son étagère que Loth s'en empara, faisant signe à Merwynn de lui approcher la lumière. Tous deux rassemblés, dos à la porte, Merwynn surveillant le bibliothécaire, Loth noyé dans le livre. Il parcourait les pages avec délicatesse, mais le plus rapidement qu'il en était possible, ne pouvant résister à découvrir la réponse qu'il cherchait depuis si longtemps.
Merwynn, de son côté, ne pu résister aux chatouillis de la poussière sur son nez, et étouffa un nouvel éternuement. Malgré ses efforts, la flamme de la chandelle vacilla, et au terme un bien court combat finit par s'éteindre. La jeune femme allait s'excuser, mais Loth ne semblait pas incommodé du tout par le manque de lumière.

Elle non plus d'ailleurs. Et le vieil homme avait un regard vaguement rassuré, trop rassuré et triomphant.
Merwynn se retourna doucement, une main sur l'avant bras de Loth, pour faire face à une poignée de soldats de la garde, dont celui qu'ils avaient assommé, torches et armes en main, diffusant une douce lumière dans l'alcôve.

Loth n'eut pas le temps de se retourner qu'elle chargea les soldats, Dagobert émergeant de l'ombre derrière eux et, se servant d'un chandelier comme d'une masse, réussit à en mettre un hors de combat. Le précieux ouvrage sous un bras, Loth se joignit à ses compagnons. Au terme d'un combat confus et bref, les quatre soldats étaient étendus sur le sol, certains inconscients, d'autres sans vie.

Le trio se consulta du regard. Ils avaient du être repérés à un moment ou à un autre. Merwynn essuya d'un geste vif le sang maculant son arme à même l'étoffe de sa tunique, traversa l'alcôve, agrippant le bibliothécaire par l'épaule, et le traîna vers ses compagnons.
- Il faut que l'on sorte d'ici, au plus vite. Je garde le vieux, il pourra servir d'otage. Enfin, si de Karan ne veut pas perdre tout son savoir. C'est notre seule carte, aussi pitoyable soit-elle.
Loth acquiesça, serrant fermement le livre, un large sourire étirant ses lèvres.
- Tout est dans ce vieux  tas de poussière. Toutes les réponses que nous cherchions.Allons-y, Cähabars nous attend ! Je vous parlerais de ce que j'ai pu commencer à lire sur la route.


Ils débouchèrent en courant la pièce centrale de la bibliothèque, la grande porte qu'ils avaient soigneusement évité était maintenant ouverte. Dagobert, d'instinct, s'y précipita, avant de remarquer la lueur qui en émanait, devenant de plus en plus forte.
- Il y en a d'autres qui arrivent, et pas qu'un peu, cette fois-ci. Passons par la réserve, ils ne nous y attendront pas.

Il empoigna Loth qui rangeait tant bien que mal le fruit de leur vol dans sa besace, le tira vers la seule sortie restante, avant de remarquer que Merwynn ne faisait pas un mouvement pour fuir.

- Eh bien, qu'est-ce que vous attendez ? Laissez le vieux et courrez !
- Ceux qui arrivent ne savent sans doute pas combien nous sommes, si nous fuyons ensembles, ils auront tôt fait de nous avoir. Sauf s'ils pensent déjà avoir les intrus. Je reste, vous partez.

Loth allait s'interposer, mais Dagobert n'hésita pas un instant. Ils avaient ce qu'ils voulaient, et le sort de Merwynn lui importait peu face à la vie de Loth. Son devoir était envers son père avant tout.

Restée seule, Merwynn avisa le peu de temps qu'il lui restait avant que les gardes ne débouchent dans la bibliothèque. Une poignée de seconde, et une poignée de plus avant qu'ils n'arrivent jusqu'à elle. Elle aurait à peine le temps de camoufler leurs traces.

Elle poussa le bibliothécaire à terre, et enfonça son arme dans son dos, à la base de la nuque, puis parti en courant vers l'alcôve qu'ils venaient de quitter. Certains des gardes reprenaient conscience, elle les acheva sans perde la moindre seconde. Se munissant d'une des torches restées au sol, elle retourna dans la grande salle, et se dirigea droit vers la lumière de la troupe armée qui avait désormais investi la bibliothèque.

Dernière modification par Amon (2016-10-24 23:35:02)

#23 2016-10-31 00:25:20

Andior

Re : Un passé glorieux

Groupe Loth/Dagobert

Ignorant le bruit des gardes qui venaient sans doute d’immobiliser Merwynn, Dagobert et Loth couraient dans la réserve, cherchant à s’échapper de ce maudit palais, et de cette maudite ville. Loth tenait toujours le bouquin serré contre lui. Malgré le fait qu’il ait retenu les informations utiles pour retrouver la preuve de son ascendance, il comptait bien dévorer l’ensemble du bouquin dès qu’il le pourrait, et surtout, le ramener à son père.
Dagobert réfléchissait à toute allure. En sortant de la réserve, ils auraient encore un couloir à parcourir avant d’arriver au niveau de la porte par laquelle ils étaient rentrés. S’ils passaient ainsi en courant, il y avait une chance sur deux pour qu’ils soient repérés et capturés. Ils allaient devoir ruser.

"Loth, cache le bouquin et joins tes mains dans ton dos."

Le jeune homme ne songea même pas à demander pourquoi et obéit à Dagobert, se mettant à marcher d’un pas rapide. Comme l’avait prévu le capitaine, ils croisèrent un soldat qui le reconnut immédiatement. Personne ne savait encore par où s’étaient introduits les brigands, et la couverture de Dagobert était toujours intacte.

"Salut ! J’emmène cette saloperie de voleur aux cachots. Il va morfler, ça j’te le dis. Ils ont besoin de renforts dans la bibliothèque, pour vérifier qu’il n’avait pas de complice. Vas-y, je reviens en suivant."

Le soldat acquiesça sans sourciller et accéléra le pas. Lorsqu’il eût tourné en direction de la bibliothèque, Dagobert lâcha Loth et ils quittèrent le palais par la porte dérobée. Loth récupéra l’uniforme de soldat qu’il avait caché dans un tonneau avant le vol, et l’enfila en vitesse, puis ils se dirigèrent vers l’écurie de Nefret, à l’entrée de la ville. N’hésitant pas une seconde, ils réquisitionnèrent deux chevaux sous prétexte de transmettre un message important du Marquis à Cair Cilbur, et se dirigèrent au galop à Huchet de Soissons. Comme prévu, le capitaine Coulapic les y attendait avec son navire, le Vingilot, et les laissa monter à bord avec leurs montures. Cependant, le soldat que Merwynn avait laissé sur place paraissait moins heureux de les voir sans elle.
Pointant son épée vers Dagobert sous le regard apeuré de Coulapic, il les questionna sur le sort de sa Dame.

"Ecoute, petit, elle s’est portée volontaire pour nous permettre de nous sauver. Je crois qu’elle tenait particulièrement à se retrouver face à lui, et à le défier une nouvelle fois. Un conseil, ne la traite jamais de catin. Quoi qu’il en soit, si tu veux l’aider, rester sur l’île ne sert à rien. Tu devrais nous suivre, et alerter tes alliés de la situation."

Dagobert continua en repoussant la lame du soldat d’un geste brusque.

"Maintenant à toi de voir. Soit tu dégages rapidos et tu descends de ce bateau, soit tu réfléchis un tant soit peu et tu restes dessus, mais t’as dix secondes pour décider, après on décarre."

L’homme décida de rester à bord, et le Vingilot partit droit vers le sud. Loth écrivit une lettre qu’il scella, et la donna au capitaine.

"Voilà pour vous. La maison Andior vous est reconnaissante pour l’aide immense que vous lui apportez, et vous serez dignement récompensé. Une fois que vous nous aurez déposés, mettez sur le cap du grand port de Hrothgar, au sud du canal. Remettez cette lettre au palais en disant qu’elle vient de moi. Bien entendu, si vous l’ouvrez ou que vous la donnez à quelqu’un d’autre, vous le paierez. Mais vous n’avez aucune raison de le faire… Une vie riche et paisible vous attend. Vous verrez, le Sudord est une contrée très accueillante."

Le Vingilot les déposa à Cham, cité du seigneur Claudem, et le capitaine Coulapic mit le cap sur Hrothgar, où il fut grassement récompensé. Il ne leur restait plus alors qu’à se rendre à Cähabars, afin d’y rencontrer le Baron Luscan qui leur fournirait sans aucun doute son aide.
Loth, bien qu’ayant passé tout le trajet à lire l’ouvrage qu’il gardait toujours si précieusement sur lui, était inquiet pour Merwynn. Personne ne pouvait envier son sort : elle se trouvait à la merci de Mazër de Karan, un des plus sordides nobles du royaume. Le courage dont elle avait fait preuve avait impressionné le jeune homme, qui comptait bien s’inspirer de son attitude à l’avenir.

Dagobert, lui, n’avait pas les mêmes soucis que Loth. Au plus profond de lui-même, il avait été soulagé de ne pas avoir à se sacrifier au palais de Nefret pour sauver Loth. Cependant, ils devaient faire au plus vite, car le Marquis de Karan pourrait peut-être obtenir des informations de Merwynn qui ne donnerait certainement pas sa vie pour protéger les secrets d’Andior. Et s’il découvrait leur destination… Alors il s’y rendrait, malgré le fait que ce soit en plein territoire du Cygne. Il était possible qu’une guerre soit déclenchée par ce simple événement, et que l’ost du Dragon soit à leur recherche. Mais la vie de l’héritier d’Andior dépendait uniquement de lui, alors il ferait en sorte d’être à la hauteur.

Dernière modification par Andior (2016-10-31 16:21:12)

#24 2016-11-04 00:19:52

Elverid

Re : Un passé glorieux

Elverid venait de franchir les portes du château de Hrothgar. Depuis qu'Andior était revenu épuisé et malade des geôles de Wanderer, elle lui rendait visite aussi souvent qu'elle le pouvait. Comme à son habitude, elle laissa son cheval dans la haute cour et se fit annoncer sans attendre. Le garde la conduisit dans le cabinet de travail d'Andior et l'y précéda.
"Monseigneur, votre herboriste vient d'arriver."
Le maître des lieux était installé à son écritoire. Il leva les yeux vers ses visiteurs et esquissa un sourire. Elverid n'attendit pas davantage pour entrer dans la pièce et poser sa sacoche sur une table à quelques pas de son suzerain.
"Bonjour, Messire Andior. Vous avez l'air reposé, aujourd'hui. La potion que je vous ai donnée la dernière fois est-elle à votre goût ?
- Bonjour Elverid. Comme la précédente, elle me retourne l'estomac. A moins que ce soit ce potage aux orties dont vous avez donné la recette à mon cuisinier... Je suis vraiment obligé d'ingurgiter tout ça ?"
Tout en l'écoutant, la jeune matriarche avait examiné Andior. Elle put lui répondre avec une satisfaction visible :
"Non, plus maintenant. Physiquement, vous êtes complètement remis. Est-ce que vous commencez à mieux dormir ?
- Pas vraiment... Je n'ai toujours aucune nouvelle de Loth... Je me demande si je n'ai pas été trop exigeant avec lui en l'envoyant si jeune sur une mission aussi importante...
- Je suis certaine que Messire Loth est à la hauteur de la tâche. Et puis le capitaine Duchesne l'accompagne... A présent que vous n'avez plus besoin de soins médicaux, je me propose de partir à leur recherche dès demain. J'y songe depuis déjà un certain temps, mais je ne voulais pas commettre la même erreur avec vous qu'avec la Matriarche Helyanor.
- Vous voulez vous aventurer sur les terres de Karan ? Et si vous non plus, vous ne revenez pas ?
- Je ne compte pas me présenter au Seigneur de Karan à visage découvert. Je me ferai accompagner par les meilleures chasseresses de mon clan, nous nous ferons passer pour des guerrières itinérantes et nous tenterons de collecter des informations dans les tavernes."
Andior éclata de rire.
" Vous ? Dans les tavernes ?... Sans vouloir vous offenser, je vous imagine très mal faisant le tour des gargottes du pays de Karan pour interroger les ivrognes.
- Tout dépend qui m'accompagne. Je referai une halte ici pour vous présenter Cornélia juste avant notre départ. C'est elle qui prendra le commandement jusqu'à ce que nous retrouvions Loth et Dagobert. Vous verrez qu'elle est la personne idéale pour ce genre de mission."
A ce moment, un garde frappa à la porte, interrompant la conversation. Andior lui ordonna d'entrer. L'homme semblait troublé. Il s'adressa immédiatement à son maître, d'une voix saccadée :
"Monseigneur, un capitaine de marine marchande arrivé au port aujourd'hui vient de se présenter au château. Il dit avoir une missive importante à vous remettre... de la part de votre fils !
- Faites-le entrer !"
Andior s'était brusquement levé de son fauteuil en donnant cet ordre. Il se mit à marcher de long en large pendant quelques instants, puis se ressaisit pour accueillir le nouveau venu, tentant de masquer son excitation. Enfin, le capitaine Coulapic -car c'était lui- se présenta timidement à la porte restée ouverte.
"Entrez donc ! On vient de me dire que vous étiez porteur de nouvelles d'un membre de ma famille. Quelles sont-elles ? Et gare à vous si tout ceci est un mensonge !"
L'homme semblait intimidé. Il s'avança vers Andior d'une démarche hésitante et, tout en s'inclinant, lui tendit la lettre.
"Mes respects, Monseigneur... Non, ceci est la stricte vérité, voici bel et bien une missive rédigée de la main même de votre fils Loth. Je les ai embarqués à mon bord en grand secret, lui et son garde personnel, dans une ville portuaire du sud de Preskill Gundor, pour leur faire traverser le canal...
- Quand cela ?
- Il y a quelques jours. Je les ai déposés dans la cité de Cham."
Andior prit la lettre des mains du capitaine et la décacheta. Son visage s'éclaira quand il reconnut la calligraphie de Loth. Lorsqu'il eut fini de lire, il se tourna à nouveau vers le capitaine, avec beaucoup plus de bienveillance.
"Je vous remercie de ces nouvelles, mon ami. Je les attendais depuis longtemps et vous m'ôtez un grand poids. Comme vous l'a promis mon fils, je vais ordonner à mon intendant qu'il vous attribue un poste de capitaine de la marine marchande de Hrothgar. C'est un emploi bien rétribué qui, je pense, vous conviendra. Nos affaires commerciales avec les autres maisons de Sudord sont très florissantes."
Le capitaine, visiblement surpris mais rassuré, s'inclina encore plus bas avant de sortir à reculons. Ses contacts passés avec les Karan l'avaient habitué à craindre le pire de la part des nobles d'Okord, et il découvrait avec soulagement que d'autres maisons étaient beaucoup plus accueillantes.
Durant toute la conversation, Elverid était restée en retrait, silencieuse, dans un recoin peu éclairé de la pièce. Le capitaine n'avait même pas remarqué sa présence, mais elle n'avait rien perdu de ce qui venait de se dire. Elle s'avança vers Andior.
"Quelles sont les nouvelles ?
- Vous n'avez plus besoin de partir à la recherche de Loth. Il m'écrit qu'il a dû voler dans la bibliothèque de Nefret un livre qui retrace l'histoire de notre famille, et qu'il se dirige vers Cähabars pour requérir l'aide du Baron Luscan. C'est là que vous pourrez le retrouver. Il parle également d'un ancien temple qu'il faudra explorer pour retrouver un objet important... Quand pouvez-vous partir ?
- Dès demain à l'aube. Le temps d'un aller-retour à l'Antre du Lac pour aller chercher Cornélia et son groupe de chasseresses. Nous pourrons repasser ici avant notre départ, si vous le souhaitez.
- Ce ne sera pas nécessaire. Cela vous retarderait inutilement."

Dernière modification par Elverid (2016-11-04 10:24:34)

#25 2016-11-05 16:45:37

Andior

Re : Un passé glorieux

[Groupe Loth/Dagobert]

Lorsque Loth arriva devant Cähabars, ville qui lui était jusqu’alors inconnue, il fut époustouflé par son architecture. Tout d’abord, les alentours de la ville étaient plein de vie, de nombreuses chaumières entourées par des champs, ou par des prés dans lesquels paissaient de nombreux chevaux, qui faisaient probablement partie de la grande chevalerie de Luscan. Il était évident que la zone n’avait pas été touchée par une quelconque guerre depuis un moment. Cependant, la vision de la ville qui paraissait s’enfoncer dans le creux de la montagne, et de ses murs dont les ornements étaient taillés à même la pierre, le laissa sans voix. Une tour, au sein même de la cité, émergeait dans la brume, surplombant l’ensemble de la cité.
Le capitaine Dagobert possédant une certaine célébrité pour ses nombreux faits d’armes, n’eût aucune difficulté à les faire entrer dans la cité. La crevasse contenait l'intégralité de la ville, dont une partie des habitations étaient creusées dans les murs. La ville était bien éclairée, propre et peu habitée. En effet, la grande majorité des paysans leur principale demeure en dehors des murs, mais gardaient une place dans la ville en cas d'attaque. L’ensemble donnait un aspect très ancien à la ville, qui avait sans doute vu des centaines de généraux s’écraser sur ses murs, échouant à la conquérir de par son remarquable positionnement.

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Loth et Dagobert se dirigeaient naturellement vers le palais lorsque le capitaine s’arrêta net, alors qu’ils passaient devant des bâtiments étranges ressemblant à des forges. Un jeune homme, d’environ trente ans, venait de sortir d’un de ces bâtiments, et Dagobert le reconnut immédiatement comme étant le baron Luscan. Malgré son titre, il était habillé très sobrement, ses vêtements étant même maculés de crasse, et ne paraissait pas être fait pour les arts de la guerre. En effet, il était plutôt petit et peu musclé. Toutefois, il était réputé pour ses remarquables travaux sur le développement de nouvelles armes et armures, qu’il montrait régulièrement aux réunions mensuelles de la confrérie du Cygne. C’était sans aucun doute un des plus grands atouts de la faction.

« Baron Luscan ? Je suis le capitaine Dagobert Duchesne, et voici Loth, le fils du seigneur Andior. Nous venons demander votre aide pour une affaire de la plus haute importance. »

Un grand sourire s’afficha sur le visage du baron qui leur tendit la main.

« C’est un plaisir de vous recevoir ! Suivez-moi, je vais vous conduire au palais. Veuillez excuser l’état de ma tenue, je travaille actuellement sur un nouveau concept de lance qui améliorerait grandement les performances de nos unités anti-cavaliers, je vous le dis… »

Sur le chemin du palais, il décrivit avec passion les détails de ses recherches. La chaleur de sa voix fit que les deux acolytes furent immédiatement très intéressés par ce qu’il disait, et Loth trouvait remarquable qu’un homme de son rang puisse se comporter ainsi, bien loin de l’attitude hautaine que de nombreux nobles, y compris son père, adoptaient devant des inconnus.
Le palais était entièrement creusé dans la roche, et l’intérieur, bien que majestueux de par l’immensité de ses salles, était assez pauvrement décoré. Le baron les amener dans une petite salle de réception, à côté d’un bon feu, et fit amener une petite collation pour ses invités. Après qu’il se soit changé, il revint au sujet de la visite de Loth et Dagobert. Loth sortit rapidement le livre de Nefret, racontant l’intégralité de leur périple au baron qui se montrait très intéressé.

Et alors, qu’avez-vous trouvé dans ce livre?

Eh bien, il déborde littéralement d’informations concernant ma famille. Tout d’abord, son nom… Andior est l’héritier des Hallgeirr, une très vieille famille d’Okord dont la zone d’influence s’étendait du fendoir d’Orka à la Preskill Gundor. En réalité, les Hallgeirr étaient les principaux opposants du seigneur Enigral qui, comme nous le savons tous, a créé notre royaume. Les Hallgeirr, menés par le père d’Andior, Aegon, avaient commencé à réunir des nobles sous leur suzeraineté, au même moment qu’Enigral. Certains pensaient que deux royaumes différents allaient se créer, mais la soif de pouvoir des deux camps en décida autrement, et ils entrèrent bien rapidement en guerre.
L’ost d’Enigral réussit à battre celui d’Aegon Hallgeirr, qui se réfugia avec le reste de son armée dans sa forteresse de Rabanastre, qui se trouvait au Nid du Dragon, territoire actuellement contrôlé par le Coq. Malheureusement pour eux, après plusieurs semaines de siège, ils furent à cours de vivre. La famille Hallgeirr décida de fuir en empruntant des tunnels creusés dans la roche plutôt que de se rendre, et finit par quitter le nouveau royaume d’Okord en partant par la Griffe de l’Ours pour rejoindre la Mer des Fournaises. La garnison déjà affaiblie de Rabanastre fut exterminée, et sa population séparée en petits groupes qui furent envoyés dans de nombreuses cités différentes. La forteresse fut entièrement détruite, et il est toujours possible de s’y rendre… Elle correspond aux ruines que nous avons visitées au début de notre périple.
Voilà la triste histoire de notre famille. Cependant, il est dit dans le livre que les Hallgeirr, avant de quitter le royaume, auraient laissé le symbole de leur pouvoir dans le temple d’Orodûr, et c’est là que nous aurions besoin de votre aide. Etant donné qu’il n’est qu’à quelques lieues au nord d’ici et que vous devez connaître ces montagnes mieux que quiconque, pourriez-vous nous dire ce que vous savez sur ce temple, et éventuellement nous y guider ?

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